Imaginer des solutions de rechange pour un développement durable

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Feuillet no10
IMAGINER DES SOLUTIONS
DE RECHANGE POUR UN
DÉVELOPPEMENT DURABLE
Ce document fait partie
d’une série de dix
feuillets d’information
traitant des femmes et
du développement de
l’industrie d’extraction des
ressources naturelles. Tous
les feuillets d’information
sont disponibles au www.
fnn.criaw-icref.ca et vous
y trouverez aussi des
ressources additionnelles
sur les sujets abordés.
Ce feuillet d’information met l’accent sur la nécessité d’un développement viable
des ressources naturelles afin que les populations du Nord, y compris les diverses
femmes de ces communautés, puissent en tirer un meilleur parti. Il propose
des façons de préparer l’avenir en se basant sur des principes différents de ceux
d’aujourd’hui, notamment:
• la pleine reconnaissance des droits et du contrôle des Autochtones sur leurs
territoires traditionnels
• des changements dans la distribution de la richesse issue de l’extraction
des ressources
• l’utilisation des ressources naturelles à un rythme raisonnable et viable.
Reconnaissance des droits des Autochtones et du contrôle par les
peuples de leurs territoires traditionnels
Les peuples autochtones du Canada ont investi beaucoup de temps et d’efforts, sans
parler de nombreux recours judiciaires, pour commencer à reprendre le contrôle des
terres et des cours d’eau qu’ils utilisaient depuis bien avant la colonisation. Malgré
la lenteur du processus, d’importantes décisions judiciaires et diverses ententes ont
reconnu les droits des Autochtones et leur pouvoir de prendre des décisions.
CRIAW-ICREF reconnait
sa présence et son travail
en territoire autochtone.
Nous reconnaissons avec
respect l’héritage de
lacolonisation sur les
peuples autochtones.
La Cour suprême du Canada a rendu un jugement historique le 26 juin 2014 en
reconnaissant que les droits territoriaux des autochtones s’étendent aux terres
utilisées traditionnellement, y compris à l’extérieur des sites d’établissement. Cette
cause impliquait la Nation Tsilhqot’in, au centre-nord de la Colombie-Britannique.
Depuis plus de 20 ans, la Nation Tsilhqot’in tentait par l’entremise des tribunaux et
de barrages routiers de stopper l’extraction des ressources (exploitation forestière)
sur son territoire traditionnel. La Cour suprême a finalement jugé en leur faveur.
Cette publication a été
créée par le Réseau du Nord
féministe. Traduction par
Michele Briand. Pour la liste
complète des contributeurs
consulter notre site Web.
La signification de la décision Tsilhqot’in
978-1-894876-75-9
Institut canadien de recherches sur les femmes – FemNorthNet
Conception accessible par Forest Communications.
Cette décision de la Cour suprême annonce une nouvelle manière d’aborder les
revendications territoriales non résolues à des titres autochtones, particulièrement
1
dans le nord du Québec, l’est du Canada et au
Labrador, où il n’existe pas de traités. (En signant un
traité, les peuples autochtones peuvent céder ou
abandonner leurs droits à la terre. En l’absence de
traités, la terre est qualifiée de non encore cédée.)
Cette décision par le plus haut tribunal du pays a
fourni une définition plus précise de ce qu’est un
titre ancestral et des façons de le reconnaître. Cette
décision donne aux Premières nations qui tentent
d’obtenir des droits sur des territoires non encore
cédés des outils pour établir leurs droits à un titre
ancestral et par conséquent, au contrôle d’un
territoire.
Le titre ancestral donne aux groupes autochtones
le droit de:
•
•
•
•
jouir du territoire et l’occuper
posséder le territoire
tirer des avantages économiques du territoire
décider de l’utilisation et de la gestion du territoire.
Une nouvelle époque de consultation
et de consentement
La décision Tsilhqot’in enjoint au gouvernement
fédéral d’obtenir un consentement avant toute forme
de développement sur des terres non encore cédées.
Cette exigence de consentement ne s’applique pas
sur des terres soumises à d’autres types d’ententes
(comme des traités), où seul le devoir de consultation
s’impose. Cette disposition ouvre la possibilité pour les
nations autochtones de participer au développement
économique à titre de partenaires plus égaux.
Mais des restrictions s’appliquent:
• des projets majeurs comme des mines ou
des pipelines peuvent être mis en œuvre
sans le consentement des Autochtones, si
le gouvernement peut faire la preuve d’un
« objectif public réel et impérieux » et offrir une
compensation au groupe autochtone
• les gouvernements fédéral et provinciaux peuvent
réglementer les activités économiques, telles les
pratiques de foresterie, sur les terres non encore
cédées, avec ou sans consentement, si un besoin
public est reconnu comme réel et impérieux.
Aux termes de la décision de la Cour suprême, les
peuples autochtones n’obtiendront pas tous accès à
un titre ancestral sur leur territoire traditionnel, même
s’ils saisissent les tribunaux, notamment les groupes qui
ont déjà cédé leurs terres par traité. D’autre part, divers
peuples autochtones au Canada et ailleurs croient que
leurs droits au territoire ne peuvent être ni vendus, ni
achetés, ni échangés, ni abrogés par un quelconque
gouvernement ou pour toute raison que ce soit.
« Journée historique à Xeni Gwet’in ». Rencontre entre la
première ministre et le ministre des Relations autochtones
et de la Réconciliation et les chefs de la Nation Tsilhqot’in
pour signer une Lettre d’entente par suite de la décision de
la Cour suprême du Canada. – Photo de la province de la
Colombie-Britannique (2014, licence CC BY-NC-ND 2.0)
2
Que signifie la décision en termes généraux?
La décision s’applique à de nombreux groupes
autochtones qui vivent sur des territoires non encore
cédés et les utilisent. C’est particulièrement vrai pour
la Nation NunatuKavut qui a beaucoup en commun
avec la Nation Tsilhqot’in:
IMAGINER DES SOLUTIONS DE RECHANGE DURABLES
Déclaration des Nations Unies sur les droits des
peuples autochtones
Le village de Red Bay, primé en 2013 comme site du
patrimoine mondial par l’UNESCO en raison de son
industrie basque de pêche à la baleine, est situé en
territoire traditionnel Nanatukavut. Parcs Canada collabore
avec le gouvernement Nanatukavut à la protection
de l’héritage et des sites sacrés de la nation inuite
NunatuKavut du sud du Labrador. – Photo par
Wiegee (2004)
• les deux nations se sont vu refuser des titres en
raison de règlements sur la vie semi-nomadique.
Par le passé, elles n’ont pas répondu aux strictes
normes gouvernementales exigeant qu’elles
occupent un territoire donné en tout temps.
Dans la décision Tsilhqot’in, la Cour suprême a
rejeté cette idée, affirmant que les groupes seminomadiques possèdent des droits aux titres des
terres qu’ils ont traditionnellement occupées.
• La communauté du NunatuKavut a vu ses titres
ancestraux reconnus par le passé. Ces titres leur
ont ensuite été retirés en raison de leur échec à
passer les tests stricts et déraisonnables relatifs à
la continuité (relation continue avec le territoire).
La décision Tsilhqot’in a redéfini la continuité
et affirmé qu’il ne s’agissait pas d’un motif
raisonnable pour le gouvernement de rejeter
la revendication de titres.
• Les deux nations ont trouvé les gouvernements
réticents à reconnaître leurs droits; la récente
décision a précisé l’obligation des gouvernements
d’accommoder les Autochtones.
TENIR COMPTE DES FEMMES DE LA RÉGION
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des
peuples autochtones (DDPA) énumère les droits que
les États membres des Nations Unies doivent respecter
en vue de bâtir des relations saines et viables avec
les peuples autochtones. Elle contient des principes
touchant au développement des ressources basés
sur le respect des droits humains, la justice, la nondiscrimination et la réconciliation.
Les Nations Unies ont adopté la Déclaration en
septembre 2007, plus de 30 ans après le début des
travaux par des groupes autochtones du monde
entier. Le Canada est l’un des quatre pays à avoir
voté contre la DDPA lors de son adoption, affirmant
que la Déclaration allait trop loin en accordant
aux Autochtones des titres de propriété sur leurs
territoires traditionnels, ainsi qu’un droit de veto sur
des lois fédérales et la gestion locale des ressources.
Mais trois ans plus tard, en novembre 2010, le
gouvernement canadien signait et endossait la DDPA.
La DDPA s’applique à l’extraction des ressources parce
qu’elle requiert des États nations:
• qu’ils reconnaissent et respectent les droits des
peuples autochtones, leurs institutions, leurs
cultures et leurs traditions
• qu’ils mettent fin à toute forme de discrimination
et fassent la promotion d’une entière participation
des peuples autochtones dans toutes les affaires
les concernant, y compris leur droit à demeurer
distincts et à poursuivre leurs propres visions du
développement économique et social
La Déclaration des Nations Unies sur
les droits des peuples autochtones
(DDPA) vise à inciter les pays à changer
leurs lois, pratiques et programmes.
3
Comment appliquer la Déclaration des Nations
Unies sur les droits des peuples autochtones:
• Adopter la Déclaration et s’assurer que
toutes les politiques et procédures du pays
respectent ses normes.
• Travailler avec les organisations autochtones
en vue d’inciter le gouvernement et les
industries à mettre en application la
Déclaration.
• La Déclaration peut servir de cadre aux
gouvernements et aux entreprises
pour guider leur travail avec les
communautés autochtones.
• Le milieu de l’enseignement peut inclure de
l’information sur la DDPA dans les cours en
vue d’éduquer le public sur sa signification
au Canada.
Source: Indigenous Bar Association, 2011
• qu’ils reconnaissent le droit des peuples
autochtones à l’autodétermination
• qu’ils permettent aux peuples autochtones de
participer pleinement et efficacement à toutes les
décisions pouvant affecter leurs terres
• qu’ils favorisent les partenariats et la collaboration
entre les États et les peuples autochtones
• qu’ils mettent sur pied un mécanisme de
consentement préalable, donné librement et en
connaissance de cause en vue de protéger les
droits des peuples autochtones à décider de quand
et comment devra se produire le développement.
Pourquoi la DDPA est-elle importante pour les
femmes autochtones?
Les femmes autochtones ont participé très activement
à l’élaboration de la Déclaration pendant les deux
décennies de négociations. La DDPA accorde aux
femmes autochtones des droits formels dans plusieurs
domaines, notamment:
4
• le droit de prendre part aux décisions dans les
affaires qui affectent leurs droits
• le droit à une nationalité et le droit d’appartenir à
une communauté ou une nation autochtone, basés
sur les traditions et coutumes de la communauté
ou de la nation impliquée
• le droit à tous les niveaux et toutes les formes
d’éducation sans discrimination et la possibilité
de partager leurs histoires, langues, traditions
orales, philosophies et littératures avec les
générations futures
• des droits égaux à ceux des hommes en matière
de participation à la politique et aux affaires
publiques et dans les rôles de représentation
de leurs communautés et de leurs pays.
La Déclaration affirme également que le mariage
ne peut forcer les femmes à changer de nationalité
ou à devenir apatrides. Les nations doivent aussi
prendre des mesures pour améliorer les conditions
économiques et sociales des femmes autochtones.
Au Canada, la DDPA peut fournir aux peuples
autochtones, et aux femmes, des moyens de protéger
la terre et l’eau pour les générations futures. La
Déclaration peut également leur permettre d’exercer
un meilleur contrôle sur le type et la portée des
projets de développement des ressources dans leurs
communautés, ainsi que sur le partage de la richesse.
Changer la distribution de la richesse issue
de l’extraction des ressources
La DDPA utilise une perspective des droits de la
personne pour concevoir des relations plus égalitaires.
Mais il s’agit aussi d’un enjeu économique.
La richesse créée par l’extraction et le développement
des ressources dans le Nord n’a pas été partagée. Les
profits résultant des projets de développement ont
plutôt élargi l’écart entre:
• les entreprises et les populations
• les riches et les pauvres
• le nord et le sud du Canada.
IMAGINER DES SOLUTIONS DE RECHANGE DURABLES
Ce sont les entreprises, et non les gens, qui ont le
plus bénéficié de la phase d’expansion de l’extraction
des ressources au Canada. La part du revenu national
détenue par les entreprises est à son plus haut niveau
depuis les 40 dernières années. Au cours des quinze
dernières années, les entreprises canadiennes ont
engrangé des profits de plus de 700 milliards. Pendant
la même période, la dette du Canada a augmenté de
660 milliards, soit 50 000$ par ménage canadien.
Un écart croissant sépare également les riches et
les pauvres au Canada. Cet écart est frappant dans
la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Entre 1981
et 2005, TNL connaissait les niveaux de croissance
économique parmi les plus élevés au Canada.
L’économie provinciale (produit intérieur brut) est
passée d’environ 5 à 21 milliards. Qu’est-il advenu
de toute cette richesse?
• Durant cette période, le pourcentage des profits
par comparaison à celui des salaires était de 70% à
Terre-Neuve, contre 51% dans le reste du Canada.
Autrement dit, les entreprises opérant dans cette
province se payaient elles-mêmes 70 cents pour
chaque dollar payé en salaire, contre 51 cents dans
le reste du Canada.
• En 2008, le pourcentage des profits par rapport
aux salaires à Terre-Neuve-et-Labrador était
deux fois plus élevé que dans le reste du Canada,
à environ 125%. Cela veut dire qu’en 2008, les
entreprises se payaient elles-mêmes beaucoup
plus généreusement qu’elles ne payaient leurs
travailleuses et travailleurs.
Le revenu des dirigeants déjà bien nantis des
entreprises a également augmenté à un rythme
beaucoup plus rapide à Terre-Neuve que dans le
reste du pays. Par comparaison, les salaires des
travailleurs sont loin d’avoir suivi le rythme de la
croissance économique. Et comme ailleurs, les salaires
des femmes, des Autochtones et des personnes en
situation de handicap sont plus faibles que ceux
des hommes. En d’autres mots, les populations ne
reçoivent pas une part équitable des avantages
économiques issus de l’extraction des ressources.
TENIR COMPTE DES FEMMES DE LA RÉGION
Depuis quelques années, Terre-Neuve-et-Labrador
compte sur les redevances de l’industrie de l’extraction
des ressources pour défrayer une bonne partie des
dépenses publiques. L’effondrement en 2015 de la
demande mondiale pour les matières premières
telles le pétrole, le gaz et le minerai de fer a réduit les
revenus de la province. En réaction, le gouvernement
provincial de TNL a effectué des coupures drastiques
aux dépenses publiques pour gérer l’augmentation
de sa dette, après avoir été pendant presque une
décennie l’une des plus solides économies du pays.
Il existe des façons plus logiques et plus intelligentes
de gérer la richesse issue du développement des
ressources naturelles dans le Nord du Canada.
La Norvège: un modèle pour le Nord du Canada
Depuis la découverte de gisements sur son plateau
continental en 1969, la Norvège a soigneusement
géré sa production de pétrole en vue d’assurer
un développement durable. Ses politiques ont
protégé l’environnement et réservé des richesses
pour la population actuelle, de même que pour les
générations futures.
Le gouvernement norvégien possède 80% des
infrastructures de production et de transport du
pétrole. Il peut définir et diriger le développement
des ressources parce qu’il perçoit et investit les
revenus de la production de pétrole au nom de la
population de la Norvège.
Plateforme pétrolifère Draugel au large de la Norvège –
Photo par BoH (2013, licence CC BY-SA 3.0)
5
La Norvège a créé un Fonds souverain pour
économiser et réinvestir une partie de l’argent
provenant de l’extraction du pétrole. Le Fonds a
présentement une valeur de 1,1 trillion.
à des fins sociales. Le Canada pourrait se fixer l’objectif
de s’assurer qu’une plus grande part des avantages
économiques issus de l’extraction des ressources dans
leur région revienne aux communautés nordiques.
Le gouvernement norvégien a fermement réglementé
le processus d’extraction du pétrole par le biais de ses
politiques et de son droit de vote à titre d’actionnaire
dans de nombreuses entreprises opérant en Norvège.
La protection de l’environnement est une priorité
que reflète:
Les participantes à FemNorthNet ont manifesté
leur colère et leur frustration devant l’énorme
quantité de ressources extraites sans aucun effort
de réinvestissement dans leur région. En effet, les
infrastructures de base sont très souvent déficientes
dans les communautés nordiques. Nous parlons ici de
la rareté de routes pavées et de trottoirs, d’autobus, de
systèmes d’eau propre, de logements, de services de
santé et de services sociaux, de services de garde, de
maisons d’hébergement pour femmes, et plus encore.
• l’intense surveillance des sites de production
posant de plus grands risques environnementaux
• des politiques fondées sur des preuves
scientifiques plutôt que sur l’unique objectif de
générer des profits par une croissance incontrôlée.
Depuis 2004, les lignes directrices éthiques du Fonds
souverain dans le domaine des investissements ont
encouragé les entreprises nationales et étrangères
à adopter des pratiques éthiques. Si les entreprises
participantes ne respectent pas les lignes directrices,
le Fonds met fin à ses investissements. En 2011,
il a retiré son soutien à la Potash Corporation of
Saskatchewan parce que l’entreprise ne répondait pas
aux normes éthiques et environnementales fixées par
le gouvernement norvégien.
Le Canada produit à peu près la même quantité de
pétrole que la Norvège, mais il n’a pas tenté de capturer,
conserver et gérer la richesse issue de l’industrie
comme l’a fait la Norvège. Les politiques norvégiennes
sur l’extraction des ressources ont permis de créer
l’un des plus généreux systèmes de soutien social au
monde. De plus, les différences de revenu sont plus
faibles et l’écart entre les riches et les pauvres est moins
grand que dans d’autres pays. Par comparaison, l’écart
entre riches et pauvres augmente sans cesse au Canada
et les programmes sociaux sont éviscérés en raison des
politiques d’austérité du gouvernement.
Les relations nord-sud doivent être plus équitables à
l’intérieur du Canada. Nous devons investir davantage
dans les infrastructures nordiques, particulièrement
les infrastructures sociales comme les services de
garde, l’éducation, les soins de santé, les services
sociaux, mais aussi dans des infrastructures physiques
telles le logement.
Choisir d’utiliser les ressources naturelles
de manière lente et viable
Vivir bien et sumak kawsay sont des concepts
autochtones de l’Équateur et de la Bolivie qui signifient
« bien vivre » en espagnol et en quechua. Ces
expressions placent le bien-être des populations et de la
Terre Mère au dessus de l’argent et des gains matériels.
Les gouvernements de l’Équateur et de la Bolivie ont
inscrit ces concepts dans leurs structures politiques
comme moyen de donner des droits à la Terre Mère.
Ce concept a été officiellement ajouté à la constitution
de l’Équateur en 2008 et à celle de la Bolivie en 2010.
En Bolivie, il reconnaît les droits de tout ce qui vit et
accorde au monde du vivant le même statut et les
mêmes droits qu’aux être humains.
Justice entre le sud et le nord du Canada
La loi bolivienne accorde à la Terre Mère les droits à:
La Norvège est un bon modèle d’utilisation de
la richesse provenant de l’extraction des ressources
• la vie et la régénération
• la biodiversité et la liberté de ne pas être
génétiquement modifiée
• de l’eau pure
6
IMAGINER DES SOLUTIONS DE RECHANGE DURABLES
•
•
•
•
•
de l’air propre
des systèmes naturellement équilibrés
la restauration des effets de l’activité humaine
la protection contre la contamination
ne pas être affectée par les gigantesques
infrastructures et projets de développement qui
affectent l’équilibre des écosystèmes et les gens
dans les communautés locales.
Décoloniser le passé et le présent
Au centre du concept de vivir bien, on retrouve:
• l’acquisition de l’indépendance par rapport aux
liens coloniaux qui asservissent les peuples
• le redressement des effets et des dommages
à court et à long terme qui résultent des
pratiques coloniales
• un changement des façons de voir le monde
des colonisateurs et de celles et ceux qui ont
été colonisés.
Il faut également décoloniser son propre esprit
pour changer la manière dont les pays développés
perçoivent et traitent les pays en développement.
Au Canada, cela s’applique également à la
perception qu’ont les gens des peuples autochtones
et des communautés nordiques. Le processus de
décolonisation doit:
• exiger que l’on cesse de voir les sociétés de
subsistance et non-capitalistes comme étant
arriérées et en manque de modernisation
• contester le modèle occidental de capitalisme
qui se nourrit essentiellement de plus de
consommation, plus de richesse et plus de
croissance économique.
Le processus de décolonisation est à l’opposé d’un
développement des ressources qui fait fi du bienêtre des gens et de la santé de l’environnement. Une
croissance sans limite comporte de grands risques
parce l’environnement n’est pas quelque chose que
les humains peuvent indéfiniment consommer et
exploiter à leur guise.
Le développement et la croissance économiques ne
sont pas les seules options pour planifier l’avenir.
TENIR COMPTE DES FEMMES DE LA RÉGION
« Première rencontre des peuples des Andes pour le
respect de la vie » - Photo par Cancillería del Ecuador
(2011, licence CC BY-SA 2.0)
D’autres concepts ont été imaginés dans le cadre d’une
perspective occidentale et scientifique pour favoriser
des modes de vie plus sains et plus viables.
Économie écologique occidentale
L’économie écologique reconnaît que l’économie
humaine est un sous-système à l’intérieur du système
terrestre. Ce principe est basé sur l’idée que toute
activité économique dans l’économie humaine dépend
de l’utilisation et de la réutilisation de ressources
naturelles ou écologiques.
Cette approche rejette les mécanismes servant à
mesurer le progrès, tels le Produit intérieur brut, qui ne
tient compte ni de l’environnement, ni du travail non
rémunéré principalement effectué par les femmes. Elle
tente plutôt de présenter une approche de l’économie
qui valorise l’environnement et toutes les formes de vie,
au-delà de la seule croissance économique.
Décroissance
Le concept français de décroissance va encore plus loin
que l’économie écologique en énonçant une critique du
consumérisme qui se résume à « vivre simplement pour
que les autres puissent vivre ».
La décroissance nécessite une rupture radicale d’avec
les modèles économiques traditionnels basés sur la
7
croissance. Les supporters de la décroissance allèguent
qu’une croissance économique viable est impossible
dans le cadre du système économique actuel basé sur
la consommation et l’exploitation.
La décroissance pose d’importantes questions.
Comment pouvons-nous:
• inventer de nouveaux modes de vie fondés sur
une véritable démocratie?
• réorienter l’économie vers le partage et la
coopération?
• respecter les valeurs d’égalité et de liberté?
• favoriser une économie qui cherche à réduire
l’utilisation des ressources naturelles et
de l’énergie?
La décroissance implique une contraction économique
qui mènera éventuellement vers un nouveau type
d’économie dans les pays développés.
Plutôt que de tout miser sur la croissance économique
et les gains financiers, une économie écologique
valorisera notamment l’environnement, le travail des
femmes et tout travail qui ne vise pas nécessairement
à créer des biens ayant une grande valeur monétaire,
tel le travail des artistes et des musiciens.
Le manifeste Un grand bond vers l’avant
Le manifeste Un grand bond vers l’avant, qui demande
au Canada de prendre soin de la terre et les un-e-s
des autres, est un outil important pour alimenter des
discussions sur le développement des ressources et
les changements climatiques au Canada. Le manifeste
affirme que nous devons faire un grand bond en avant
et adopter des valeurs différentes qui:
• commencent par le respect des droits ancestraux
et du titre des premières personnes à avoir gardé
cette terre.
• la pleine mise en application de la Déclaration
sur les droits des peuples autochtones des
Nations Unies
• appuient une démocratie énergétique où les
8
communautés contrôlent collectivement les
nouveaux systèmes de production d’énergie
• favorisent la création de structures de propriété
innovantes: gouvernées démocratiquement,
fournissant des salaires suffisants et retenant
dans la communauté des revenus dont elle a
grand besoin.
Le manifeste Un grand bond vers l’avant n’aborde pas
spécifiquement les besoins de diverses femmes. Mais
il réclame un revenu annuel universel, étant donné
que la majorité des soins dispensés aux personnes et
à la planète ne sont pas rémunérés présentement.
Cette initiative vise à susciter dans tout le Canada des
discussions et des débats par le biais d’assemblées
publiques qui vont permettre aux populations locales
de décider démocratiquement du caractère que
doit revêtir le changement vers un nouveau type
d’économie dans leurs communautés respectives.
Nous espérons que les communautés vont relever ce
défi et nous encourageons une diversité de femmes
à prendre la tête de ce mouvement vers des solutions
de rechange viables au modèle actuel d’extraction
trop rapide des ressources.
Citation suggérée:
FemNorthNet. (2016). Imaginer des solutions
de rechange pour un développement durable.
Développement des ressources dans les
communautés du nord: tenir compte des
femmes de la région no10. Ottawa: Institut
canadien de recherches sur les femmes.
RESSOURCES
Sur la décision de la Cour suprême dans Tsilhqot’in:
APTN National News. (26 juin 2014). « Tears and
cheers » greet historic Supreme Court ruling handing
Tsilhqot’in major victory. Tiré de http://aptn.ca/
news/2014/06/26/supreme-court-hands-tsilhqotinmajor-victory-historic-ruling/
IMAGINER DES SOLUTIONS DE RECHANGE DURABLES
Canadian Broadcasting Corporation (CBC) Nouvelles.
(26 juin 2014). First Nation activist on landmark land
claim ruling: Pamela Palmater reacts to Supreme
Court of Canada ruling that recognizes Tsilhqot’in First
Nation’s B.C. title claim [vidéo]. Tiré de http://www.
cbc.ca/player/News/Canada/BC/ID/2468137255/
Coates, K. & Newman, D. (2014). Tsilhqot’in ruling
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Tiré de http://m.theglobeandmail.com/globedebate/tsilhqotin-brings-canada-to-the-table/
article20521526/?service=mobile
McCue, D. (23 décembre 2014). Tsilhqot’in land ruling
was a game changer for B.C.: The Tsilhqot’in, after
years of being ignored by government, now a priority
for B.C.’s premier. CBC News. Tiré de http://www.cbc.
ca/news/aboriginal/tsilhqot-in-land-ruling-was-agame-changer-for-b-c-1.2875262
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TENIR COMPTE DES FEMMES DE LA RÉGION
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Dillon, J. (2010). The Economics of Sustainability.
Publié par Kairos Canada. Tiré de http://www.
kairoscanada.org/wp-content/uploads/2011/09/SUSGF-G20-EconomicsSustainability.pdf
Pachamama Alliance. (2014). Sumak Kawsay: Ancient
Teachings of Indigenous Peoples. Tiré de http://www.
pachamama.org/sumak-kawsay
Shahriari, Sara. (26 octobre 2012) Bolivia Enacts
New Law for Mother Earth. Tiré de http://
indiancountrytodaymedianetwork.com/2012/10/26/
bolivia-enacts-new-law-mother-earth-141899
Vidal, John. Bolivia enshrines natural world’s rights
with equal status for Mother Earth. Tiré de http://
www.theguardian.com/environment/2011/apr/10/
bolivia-enshrines-natural-worlds-rights
Sur le manifeste Un grand bond vers l’avant
Manifeste Un grand bond vers l’avant. https://
leapmanifesto.org/fr/un-grand-bond-vers-lavant/
À PROPOS DE
FEMNORTHNET
L’expansion économique accélérée et l’implantation
de nouvelles industries dans le Nord du Canada
provoquent des transformations sociales,
économiques et culturelles. FemNorthNet
(Feminist Northern Network ou Réseau féministe
du Nord) a documenté et partagé les expériences
de diverses femmes des régions nordiques.
FemNorthNet a été créé par l’Institut canadien
de recherche sur les femmes (ICREF). Plus de
30 chercheuses et activistes communautaires
issues de diverses universités canadiennes se sont
impliquées activement dans le Réseau avec des
représentant(e)s d’organisations communautaire de
Labrador Ouest (TNL), Happy Valley-Goose Bay (TNL)
et Thompson (MB), ainsi que d’autres organisations
travaillant dans le Nord. Pour plus d’information visitez
le www.fnn.criaw-icref.ca/fr.
Soutenez l’Institut canadien de recherches
sur les femmes
Depuis 1976, l’Institut canadien de recherches
sur les femmes (ICREF) a documenté la situation
économique et sociale des femmes au Canada en
menant des recherches féministes avant-gardistes.
Toutes les activités de l’ICREF découlent de notre
objectif principal: créer des outils visant à aider les
organisations à faire progresser la justice sociale et
l’égalité pour toutes les femmes.
En tant qu’organisme à but non lucratif et organisme
de charité, l’ICREF dépend du soutien de ses membres
et de vos dons. Tous les membres de l’ICREF reçoivent
notre bulletin de nouvelles électronique directement
par courriel, de même que nos feuillets d’information
et nos rapports de recherche.
Assurez l’avenir de l’ICREF! Pour devenir membre
de l’ICREF, visitez le www.criaw-icref.ca/fr/become-amember.
© Institut canadien de recherches
sur les femmes – 2016
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IMAGINER DES SOLUTIONS DE RECHANGE DURABLES
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