Société Scientifique des Pharmaciens Francophones « Alcool et médicaments » Texte Par le Pharmacien J. Peters Chef de service CHP Chêne aux Haies Mons Programme 2012 L’alcool et les médicaments Jeannine PETERS Pharmacien chef de service CHP le Chêne aux Haies MONS Le 31 juillet 2012 Plan de l’exposé Page 2 1. INTRODUCTION 2. L’ALCOOL 3. METABOLISME DE L’ALCOOL 4. ALCOOLISME 5. EPIDEMIOLOGIE DE L’ALCOOLISME 6. DIAGNOSTIC ET DEPISTAGE DE L’ALCOOLISME 7. LES TRAITEMENTS DE L’ALCOOLISME 8. LES PRINCIPALES INTERACTIONS ALCOOL ET MEDICAMENTS 9. L’ALCOOL ET LES STIMULANTS 10. L’ALCOOL ET LA PERSONNE AGEE 11. L’ALCOOL ET LE TABAC 12. L’ALCOOL ET LA GROSSESSE 13. LA CONCLUSION Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 1. INTRODUCTION L’histoire de l’alcool est ancienne et sociale. L’inconscient collectif (à part islamique bien que le mot alcool soit d’origine arabe) a reconnu (et reconnaît encore) à l’alcool différentes vertus : pouvoir de désaltération, habitude sociale (« trinquer »), pouvoir médicamenteux (prendre un « remontant »), analgésique, communion spirituelle (ne dit-on pas d’ailleurs « spiritueux » ?), fortifiant (« eau de vie »), signe de maturité (« prendre de la bouteille ») et calmant… L’alcool fait donc partie de notre culture, spiritualité et donnée non-négligeable, … de notre économie. L’alcool est une molécule simple, produite par la décomposition et la fermentation de sucres contenus dans les fruits. Ceci explique que l’alcool existe depuis qu’il y a des peuples sédentarisés. C’est donc un produit psychoactif naturel, basique et abordable. Tout au long de l’histoire, tout ou partie de notre société a donc considéré que l’alcool était un produit qui redonnait des forces et favorisait les contacts. En cela, il est l’ancêtre officiel et légal des amphétamines et de l’ecstasy, d’où peut-être son succès. Aujourd’hui, l’alcool est présent dans la vie quotidienne et lié à certains rituels sociaux. Il est consommé par un public de plus en plus jeune, notamment sous forme d’alcopops : apparues récemment sur le marché, ces boissons incitent à la consommation d’alcool car elles se boivent comme des limonades. Croyances, idées reçues qu’il convient de remettre en question « Boire réchauffe le corps » Non, il y a une sensation de chaleur ponctuelle au niveau de la peau, mais perte calorique corporelle. Dans des conditions de froid important, cela peut donc même être dangereux. « L’alcool rend courageux » L’alcool désinhibe et augmente chez l’alcoolisé la prise de risques souvent de manière inconsidérée. L’alcool modifie les perceptions conscientes, rend « inconscient » avec sensation d’invincibilité et perte de la conscience réelle et précise du danger, d’où l’impression de courage. « L’alcool est un stimulant sexuel » L’alcool désinhibe, mais altère la performance sexuelle elle-même. « L’alcool donne de la force » L’alcool entraîne une euphorie ponctuelle, mais aussi une fatigue à l’effort jusqu’à un épuisement dangereux pour la santé. « L’activité physique me permet d’éliminer l’alcool » La transpiration libère de l’eau, non de l’alcool. « L’alcool ne fait pas grossir » Il y a 100 calories par verre de vin. Il s’agit de calories de « stockage ». « Au lendemain d’une ivresse, il faut boire » oui mais de l’eau. Page 3 « Coupé avec de l’eau, l’effet de l’alcool est moins important » L’effet est le même si la quantité d’alcool est la même. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 2. L’ALCOOL L’alcool, alcool éthylique ou éthanol, est soluble dans l’eau et dans les graisses, ce qui entraîne sa dispersion partout et instantanément. L’alcool est normalement éliminé par le foie. En cas de dose excessive et répétée, le foie ne peut plus faire face. A long terme, l’alcool attaque alors le foie, le cerveau, le pancréas, les nerfs périphériques et les voies digestives hautes (bouche, glotte, larynx,…). Ces destructions se réalisent sur 10 ou 20 ans de consommation excessive. Cette toxicité survient avec des quantités plus faibles chez la femme car les volumes hépatiques et de distribution sont plus petits et les rapports masse maigre/eau sont différents. Malgré sa réputation, l’alcool est plus toxique que la plupart des drogues illicites. L’alcool est un psychotrope L’alcool, est un produit psychotrope (qui modifie les perceptions, l’état de conscience et les comportements). Définition d’un psychotrope : un psychotrope est un produit qui modifie le fonctionnement psychique en agissant sur les cellules du système nerveux central en produisant différents effets : le fonctionnement mental s’en trouve altéré, entraînant des changements dans les perceptions, l’humeur, la conscience, le comportement et diverses fonctions psychologiques et organiques. L’alcool a un effet désinhibiteur, anxiolytique, dépresseur ; il peut entraîner une réelle dépression, des idées noires avec un risque suicidaire. L’ivresse pathologique peut se transformer en folie, agressivité, violence et elle aggrave les troubles psychiques préexistants. Les effets psychotropes de l’alcool sont à la base de la dépendance psychique. L’alcool est une drogue La dépendance peut prendre plusieurs aspects : - Tolérance : diminution de la réponse pour une dose donnée ou le fait de ne ressentir aucun effet pour une dose donnée et nécessité d’augmenter la dose pour maintenir un effet. - Dépendance physique avec syndrome de sevrage. - Dépendance psychique : impossibilité de se passer de la substance en dépit des problèmes que provoque sa consommation. Page 4 L’alcool est une substance psychoactive Consommé à petite dose, il détend et apporte une légère euphorie. Une dose plus importante d’alcool désinhibe, procure une certaine excitation puis entraîne un engourdissement progressif du système nerveux (effet calmant), perturbe fortement les perceptions et ralentit les réflexes par effet sédatif. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 3. METABOLISME DE L’ALCOOL Il est surtout absorbé au niveau du jéjunum en 30 à 60 minutes en moyenne, mais plus rapidement à jeun et avec des alcools forts. Il traverse la barrière intestinale, 99,90% de l’éthanol est métabolisé par le foie. Une très faible quantité est éliminée sans être transformée. Le reste est métabolisé par les reins, muscles, cellules digestives, cerveau. Au niveau hépatique - Transformation de l’éthanol en acétaldéhyde sous l’action de l’alcool déshydrogénase. - Transformation de l’acétaldéhyde en acétate sous l’action de l’acétaldéhyde déshydrogénase. - La deuxième transformation peut être bloquée par un produit médicamenteux. Page 5 Au niveau cellulaire - Hépato toxicité. - Production d’ion H+. - Modification de l’absorption et du métabolisme des sucres et des graisses. - Modification de l’absorption des vitamines B d’où des carences. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 4. ALCOOLISME La dépendance alcoolique est une maladie chronique résultant de facteurs génétiques, psychosociaux et environnementaux, dont le traitement relève tout autant de l’intervention médicale que médico-sociale. Elle est définie par la présence d’une tolérance au produit, par une symptomatologie de sevrage lors de l’interruption de la consommation, par la perte du contrôle de la consommation, et ce malgré la survenue de conséquences délétères pour l’individu. Les contre-indications absolues au sevrage n’existent pas ; des non-indications au sevrage immédiat sont à respecter : absence totale de demande et de motivation du sujet, situation de crise ne permettant pas une évaluation correcte de la pertinence du sevrage, absence de projet thérapeutique ou renouvellement d’une demande de sevrage immédiat dans un contexte de ré alcoolisation. Une proposition de prise en charge et d’accompagnement devra cependant être faite au patient dans une perspective de sevrage ultérieur. Rapport à l’alcool On peut définir 4 catégories de rapports établis avec l’alcool : 1) L’appétence : il s’agit du goût de l’homme pour l’alcool, attirance culturelle pour ses ‘pseudo-vertus’ (effets psychoactif : tonifiant, euphorisant, désinhibant…). L’appétence concerne donc les avantages supposés plutôt que les plaisirs sensoriels réels (goût, odorat,…). 2) Tolérance : la tolérance est le rapport entre quantités absorbées et effets produits. Naturellement, à force d’une utilisation régulière, le corps s’habitue aux effets du produit. Cela a pour conséquences fréquentes, l’augmentation des quantités absorbées et l’émergence du phénomène de dépendance. 3) l’accoutumance : il s’agit d’un phénomène qui se met en place dans un deuxième temps, d’où sa perversité : l’alcool devient nécessaire à l’équilibre, la tolérance augmente ce qui provoque une augmentation des doses. Il y a peu de signes d’ivresse: le consommateur se pose donc peu de questions. 4) La dépendance : elle est constituée par une perte de liberté, impossibilité de s’abstenir (manque, syndrome de sevrage), dépendance globale (physique et psychique). Cette addiction entraîne le craving (impulsions, impossibilité de se soustraire au manque et à l’habitude, sensibilisation psycho-physiologique réflexe) ainsi qu’une détérioration psycho-sociale, concentration sur le problème, envahissement et changement identitaire…. Les consommateurs à risques : ils consomment de manière chronique ou de manière festive (week-end, systématique….). Les risques sont divers, pour la santé de manière globale, à long terme ou dans certaines situations (conduite, travail,…) qui nécessitent une vigilance adaptée. On considère généralement que la consommation peut devenir nocive pour la santé si elle dépasse 24 à 28 verres par semaine pour les hommes et 14 à 21 verres par semaine pour les femmes. On parle alors d’une consommation excessive en termes de santé. Ces risques pour la santé sont souvent accompagnés de répercussions sociales, familiales et/ou professionnelles. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page • 6 Voici un panel des comportements relatifs à l’alcool, du non-consommateur à la pathologie addictive : • Les non-consommateurs : ne pas consommer d’alcool peut indiquer que la personne n’y voit pas de goût ou d’intérêt ou qu’elle établit un auto-contrôle, plus problématique, car dans ce domaine, plus il y aura contrôle, plus il y aura aisément perte de contrôle. • Les consommateurs sociaux : ils répondent à une norme sociale. Cette partie des consommateurs diminue, car consommer de l’alcool est de moins en moins une obligation relationnelle ou sociale. Une grande partie de la population consomme de l’alcool en quantité modérée, de façon occasionnelle ou régulière. On parle alors d’une consommation « sociale ». Les consommateurs « usage nocif ou abus » : l’abus (DSM-IV) ou l’usage nocif, est caractérisé par une consommation répétée susceptible d’induire des dommages au niveau somatique, psychoaffectif et social. L’abus de substance est défini par le DSM IV comme suit : -la personne utilise de façon répétitive des substances le menant à négliger les obligations sociales majeures -elle consomme dans des situations dangereuses -elle a des problèmes avec la justice de par sa consommation -elle poursuit sa consommation malgré ses problèmes Les personnes appartenant à ce groupe sont susceptibles d’évoluer vers la dépendance. L’alcoolisme est caractérisé par la dépendance psychologique et/ou physique à l’alcool. Page 7 • Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 5. EPIDEMIOLOGIE DE L’ALCOOLISME Aux Etats-Unis, on estime qu’environ 13% de la population souffre ou a souffert de problèmes liés à l’alcool. En Province de Liège, une étude récente a montré que la prévalence des troubles liés à l’utilisation d’alcool approchait 30%. En France, une consultation sur cinq en médecine générale, 15 à 25% des hospitalisations et 30 à 40.000 décès par an sont directement liés à l’usage inadapté de l’alcool. La consommation moyenne pour les plus de 15 ans est de 19 litres par an et par personne. L’alcool est le produit le moins typé socialement, touchant femme et homme, riches et pauvres. On estime que 5 millions de français ont des soucis d’alcool : 2 millions sont dépendants, 3 millions consomment de manière abusive. 1 homme hospitalisé sur 3 a des problèmes d’alcool. On dénombre 23000 décès par an liés directement à l’alcool, c’est-à-dire 7% des décès masculins et 2% des décès féminins. L’alcool est le toxique qui tue le plus après le tabac. L’alcool est à l’origine de 19% des délits. En cas d’alcoolisation, le risque d’accident de la route est multiplié par 2 (à 0,5g/l – environ 2 verres), par 5 (à 0,7g/l), par 10 (à 0,8g/l), par 35 (à 1,20g/l). En Belgique, chez l’adulte, on dénombre : 70 à 80% de consommateurs de boissons alcoolisées, 20% de personnes présentant un problème d’alcool, 5% d’alcooliques. On constate un rajeunissement de la population en cure de désintoxication. Les principales causes de décès dans la population sont : la cirrhose, les cancers, les maladies cardio-vasculaires, les maladies respiratoires, les accidents et les suicides. Page 8 L’espérance de vie de la personne alcoolique est de 52 ans, elle voit donc sa vie raccourcie de 20 à 30 ans. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 6. DIAGNOSTIC ET DEPISTAGE DE L’ALCOOLISME L’alcoolisme est une véritable maladie qui peut engendrer de la fatigue chronique, de l’hypertension artérielle, des problèmes sexuels, des gastrites et des ulcères gastriques, des cirrhoses, des polynévrites et des troubles neurologiques, des divers cancers : bouche – langue – foie – œsophage…., des troubles psychiatriques (korsakoff), de la dépendance, des troubles de la mémoire, une atteinte du nerf optique, une pancréatite chronique, du diabète…. Il existe des signaux psychiques précurseurs tels l’irritabilité, l’anxiété, un état dépressif, des troubles du sommeil, des troubles de la communication… Les facteurs d’alerte de l’alcoolisme sont nombreux : o o o o o o o o o o o Je bois tous les jours Je n’ai pas toujours le contrôle de ma consommation Je pense à boire Boire me fait du bien J’ai besoin de boire Je ne peux pas me distraire avec les autres sans boire Je ne me sens pas bien quand j’ai bu la veille Je ne me souviens pas de ce que j’ai fait quand j’ai bu J’ai plusieurs fois risqué un accident en ayant bu On me fait des remarques quand je bois …….. Il y a problème de boisson quand : La personne contrôle difficilement sa consommation, est souvent ivre, provoque des accidents, altère sa santé, devient dépendante. L’alcoolisme peut se détecter de façon précoce, par l’accumulation de problèmes spécifiques : o hypertension artérielle o troubles digestifs o dépression, anxiété, troubles du sommeil o absences répétées au travail o problèmes familiaux o accidents de roulage o épisodes d’ébriété o augmentation de la tolérance à l’alcool Page 9 L’identification tardive de l’alcoolisme va entraîner l’apparition de : o cirrhose o polyneuropathies o atrophie cerebelleure o consommation impulsive o dégradation de la vie sociale Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 On peut aussi détecter l’alcoolisme par des marqueurs biologiques dont la spécificité et la sensibilité varient : Marqueur Sensibilité Spécificité Gamma GT 50 – 70 % 60 – 70 % VGM 30 % 90 % CDT 50 – 70 % 90 % DETA = 2 75 – 90 % 75 – 95 % • • • • Gamma GT : gamma glutamyl transpeptidase en augmentation VGM : volume globulaire moyen en augmentation CDT : carbohydrate déficient transferrin en augmentation On peut aussi soumettre le patient à un questionnaire CAGE (DETA). Questionnaire DETA 1. 2. 3. 4. Avez-vous déjà ressenti le besoin de DIMINUER votre consommation ? Votre ENTOURAGE vous a-t-il déjà fait des remarques au sujet de votre consommation ? Avez-vous déjà eu l’impression que vous buviez TROP ? Avez-vous déjà eu besoin d’ALCOOL pour vous sentir bien ? Certaines situations augmentent le risque de devenir alcoolique : o o o o o o o o Environnement à haut risque Antécédents familiaux d’alcoolisme Dépendance à d’autres substances Difficultés psychologiques Recherche de sensations Goût particulier pour les boissons alcoolisées Certaines catégories socio professionnelles Accessibilité du marché La dépendance à l’alcool se caractérise par le fait que la personne perd le contrôle de sa vie et que son mode de vie est orienté avec la consommation. Les conséquences d’une destruction neuronale Le syndrome de Korsakoff fréquemment rencontré dans l’alcoolisme chronique, consiste en une forte désorientation. Ce syndrome comporte à la fois une amnésie des faits récents, une désorientation spatio-temporale, de fausses reconnaissances, la fabulation et une certaine euphorie. Elle est due à une perte de neurones entraînant une atrophie cérébrale généralisée. La psychose de Korsakoff est classée aujourd’hui parmi les encéphalopathies carentielles vitaminocurables, bien que les améliorations obtenues par le traitement vitaminique B1 ne soient pas totales. Elle s’accompagne fréquemment d’une polynévrite. L’évolution de la maladie est très lente et le pronostic est très mauvais. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 10 Dégâts cognitifs Troubles de la mémoire Maladie d’Alzheimer Syndrome de Korsakoff Page o o o o L’alcool et dépression L’association alcool-dépression se traduit par un taux élevé de tentatives de suicide. Selon les théories, la consommation d’alcool a été liée à la dépression, en tant que cause possible ou en tant que symptôme (ou les deux). Dans le premier cas, la dépression s’installe au fur et à mesure de l’histoire alcoolique et des difficultés qui surviennent. La dépendance alcoolique est ici primaire. Dans le deuxième cas, l’alcool constitue une sorte d’auto-médication de l’état dépressif. Elle est compensatoire, secondaire. L’alcool a donc une vocation ambigüe, à la fois dépressogène et antidépresseur. Au-delà de sa nature primaire ou secondaire, l’important est de reconnaître la participation d’un état dépressif ou de symptômes de type dépressif au processus de nombreuses dépendances à l’alcool et d’en tenir compte dans la remise en cause de l’addiction. La notion d’alcoolémie Page 11 L’alcoolémie est le taux d’alcool pur contenu dans le sang. Il s’exprime en grammes par litre de sang. En Belgique, il est interdit de conduire un véhicule avec une alcoolémie égale ou supérieure à 0,5 gr/litre de sang (cela équivaut à +/- 2 verres d’alcool). A consommation égale, l’alcoolémie varie fortement d’une personne à l’autre selon le sexe, le poids, la rapidité de consommation, la prise de repas, etc. Peu digéré, l’alcool passe presque directement de l’estomac dans le sang qui le transporte dans toutes les parties du corps. L’alcoolémie atteint son maximum en moins de 1h. On dit en général qu’il faut compter en moyenne une heure par verre pour ramener le taux d’alcoolémie à zéro. Attention : certaines personnes éliminent beaucoup plus lentement. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 7. LES TRAITEMENTS DE L’ALCOOLISME Leur but est d’augmenter l’espérance de vie, de diminuer le risque de complications médicales et d’améliorer le fonctionnement personnel et social du patient. Les moyens mis à disposition, à ce jour, sont d’abord d’améliorer l’état général du patient, lui faire accepter son traitement, le désintoxiquer et enfin de gérer et diminuer le nombre de rechutes. La cure de désintoxication se décompose en plusieurs phases qui sont : - Interrompre la pharmacodépendance Evaluer la situation médico-psycho-sociale Informer Réintroduire un facteur « temps » Préparer l’avenir à court terme Organiser le suivi Restaurer le réseau de communication du patient avec ceux qui l’entourent Après la désintoxication, on s’attèlera à : - Maintenir la sobriété Améliorer la santé Améliorer le fonctionnement personnel, familial et social La pharmacothérapie sera une aide précieuse au traitement : - Augmenter la peur de boire : DISULFIRAM ou ANTABUSE Diminue l’envie de boire : ACAMPROSATE, NALTREXONE, BACLOFENE La psychothérapie sera essentielle afin de : - Permettre de gérer l’envie de boire Améliorer les fonctions de communication et les liens familiaux Renforcer un lien thérapeutique A. Traitements psychothérapeutiques Un travail de revalorisation de l’image de soi et de restauration narcissique est essentiel, la psychothérapie doit être axée sur l’information, non culpabilisante, personnalisée et répétée, sur le conseil, tant dans le domaine médical que social ou familial, et sur l’accroissement de la motivation. De nombreuses études contrôlées ont démontré l’utilité d’une telle prise en charge, que l’intervention d’un mouvement d’anciens buveurs (AA) peut renforcer. L’entretien incitatif ou motivant est un style d’approche centré sur la personne, semi-directif et qui vise à modifier le comportement en aidant la personne à explorer et à résoudre des ambivalences. L’examen des facteurs de stress sont autant d’occasion de résolution de problèmes, en mettant en place des stratégies de gestion du stress adaptées afin que « l’outil alcool » ne soit plus nécessaire ou unique. B. Traitements pharmacologiques de l’alcoolisme Page 12 Le patient alcoolique est le plus souvent déprimé. La prescription d’antidépresseurs chez le patient alcooliques se justifie-t-elle ? Le meilleur traitement antidépresseur chez le patient alcoolique est la désintoxication car les antidépresseurs sont peu efficaces si le patient continue à boire. De plus, il y a risque d’interactions entre l’alcool et les antidépresseurs. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Le sevrage Les BZD La désintoxication est une partie importante du traitement des personnes dépendantes de l’alcool. Ceci est associé avec de l’anxiété, une activation sympathique et chez quelques patients, du délirium tremens et des crises épileptiformes. Les benzodiazépines sont les agents les plus populaires pour prévenir et traiter le delirium tremens. Ils sont efficaces, bon marché et sûrs. Cependant, l’usage en routine de benzodiazépines devrait être limité aux patients alcooliques en phase aiguë de manque afin de réduire le risque de devenir dépendant à ces médicaments. Les symptômes du sevrage alcoolique surviennent habituellement 4 à 12 heures après l’interruption ou la réduction de la consommation et, en l’absence de traitement, atteignent un pic en 24 à 48 heures. Outre une activation noradrénergique à l’origine des symptômes neurovégétatifs classiquement observés, le syndrome de sevrage alcoolique est lié au freinage brutal des voies GABAergiques, à l’activation des voies dopaminergiques (l’alcool stimule la production d’alcool au niveau du circuit de la récompense), de l’axe hypothalamo-hypophysaire et des récepteurs NMDA (N-Méthyl-D-Aspartate car l’alcool stimule les récepteurs GABA et inhibe les récepteurs au glutamate NMDA). Sur le plan clinique, l’arrêt de l’alcool peut être asymptomatique, mais on observe fréquemment des tremblements musculaires distaux. La symptomatologie peut s’avérer plus importante et s’accompagner de nausées, de vomissement ou d’insomnie, mais également d’agitation, d’anxiété et d’irritabilité. L’hyperthermie, des anomalies tensionnelles et de la fréquence cardiaque sont des signes de gravité et des complications sévères peuvent survenir (delirium tremens, hallucinations, crises comitiales, décès). Les benzodiazépines réduisent l’incidence des crises comitiales et du delirium tremens. Le choix se portera donc en première intention sur des benzodiazépines à longue demi-vie (diazépam – valium) qui permettent un sevrage plus doux et préviennent plus efficacement les crises convulsives. Les molécules à demi-vie brève, qui présentent un potentiel d’abus plus élevé, seront réservées aux patients présentant une insuffisance hépatique. La voie orale doit être privilégiée Traitement de l’alcoolodépendance Page Inhibiteur de l’aldéhyde déshydrogénase, le disulfirame est responsable d’une accumulation d’acétaldéhyde dans l’organisme, à l’origine de céphalées, nausées voire de vomissements, de transpiration, d’hypotension, d’une tachycardie, d’une dyspnée et d’un flusch (rougeur de la face) lors de l’ingestion d’alcool. Réputée être efficace dans le traitement de la dépendance alcoolique, cette molécule n’a, jusqu’à présent, fait l’objet que de peu d’études contrôlées. Administré par voie orale à raison de 200 à 500 mg par jour, l’Antabuse n’a montré une efficacité relative que chez des patients à haut niveau socioculturel, motivés et non impulsifs, ou lorsque la prise du médicament était contrôlée par le médecin. Sous forme d’implant, la biodisponibilité du disulfirame n’a pas été démontrée car les taux plasmatiques sont largement insuffisants. Enfin, des effets secondaires importants ont été rapportés (infarctus du myocarde, douleurs précordiales, troubles du rythme cardiaque, crises comitiales, insuffisance hépatique et insuffisance respiratoire) rendant son utilisation potentiellement dangereuse. En conséquence, il est recommandé de ne proposer ce traitement qu’à des patients soigneusement choisis et informés des effets potentiels du médicament. 13 Disulfirame = ANTABUSE Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Des interactions médicamenteuses à prévoir. Le disulfirame est un inhibiteur de l’activité de l’isoenzyme hépatique CYP 2EE1 du cytochrome P450. Une augmentation de l’effet de divers médicaments a été rapportée : phénytoïne, antivitamine K, rifampicine, isoniazide. Certains médicaments ont parfois augmenté l’intensité des réactions du disulfirame avec l’alcool : antidépresseurs tricycliques et inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO) (réaction sévère) ; métronisazole (psychose aiguë), neuroleptiques phénothiaziniques (hypotension), alpha et bêtabloquants (troubles cardiaques). L’acamprosate = CAMPRAL Ce produit est le mieux étudié à long terme. Son mode d’action n’est pas encore connu mais il inhibe les récepteurs au glutamate, entraînant une diminution du craving et du rique de rechute. Il n’est pas métabolisé par le foie. Il est recommandé d’éviter un usage prolongé chez les patients cirrhotiques. La naltrexone = NALOREX = RELISTOR Ce produit induit un blocage des récepteurs opiacés µ ce qui réduit l’effet de récompense lié à la prise aigue d’alcool et le craving semble diminuer, réduisant le risque de rechute chez le patient sevré. Les effets secondaires sont relativement réduits: nausées fréquentes, vomissements, diarrhée, somnolence, difficultés d’endormissement, anxiété, troubles de l’humeur, douleurs musculo-articulaires, céphalées. Sa métabolisation, essentiellement hépatique, ne le recommande pas en cas d’insuffisance hépatique. En raison du blocage des récepteurs aux opioïdes, l’utilisation simultanée d’analgésiques opiacés est contre indiquée. Le topiramate=TOPAMAX Antiépileptique à l’inverse de l’alcool, il stimulerait les récepteurs GABA, inhiberait les récepteurs glutamaergiques et réduirait la production de dopamine dans le striatum au niveau du circuit de récompense. Des effets secondaires tels somnolence, troubles de la concentration, paresthésies et dysgueusie ont été rapportés, ce qui ne le positionne pas en traitement de première intention. Il n’est pas enregistré dans cette indication en Belgique. Le baclofène= LIORESAL Page 14 Le baclofène est un myorelaxant utilisé principalement pour le traitement de certaines spasticités musculaires. C’est un agoniste des récepteurs GABA. Son efficacité sur le maintien de l’abstinence est encore controversée. Un essai sur 39 patients a eu des résultats convergents à 4 semaines. Ces premiers résultats justifient de poursuivre l’évaluation de ce médicament. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 8. LES PRINCIPALES INTERACTIONS ALCOOL ET MEDICAMENTS L’alcool est largement présent dans notre société. Pourtant la prise d’alcool et de médicaments n’est jamais recommandée, à ce point que certains médicaments ne doivent jamais être combinés avec l’alcool. En effet, en présence d’alcool, certains médicaments peuvent voir leur dégradation et/ou leur élimination modifiée(s). Selon la quantité d’alcool ingérée, l’alcool peut : - Soit prolonger la présence du médicament dans l’organisme en augmentant son activité et parfois ses effets secondaires (notamment en cas de consommation aigüe). - Soit accélérer la dégradation du médicament puis son élimination et ainsi diminuer son efficacité (notamment en consommation chronique). Inversement, les médicaments peuvent ralentir la dégradation de l’alcool ; il s’en suit un long séjour dans le corps de certains métabolites toxiques entraînant des effets désagréables tel flusch, nausées, céphalées, chute de tension, palpitation cardiaque (= effet Antabuse). Plusieurs médicaments sont répertoriés comme ayant un effet Antabuse : Ceftrioxone (Rocéphine), Glibenclamide (Daonil), Glipizide (Glibénèse), Griseofulvine, Isoniazide (Nicotibine), Kétoconazole (Nizoral), Metronidazole (Flagyl, Rozex même en UE). L’alcool ne fait pas bon ménage avec les médicaments ! En effet, certains médicaments ne doivent jamais être combinés avec de l’alcool. L’alcool interagit à deux niveaux avec les médicaments : - soit les médicaments ralentissent le métabolisme de l’alcool, augmentant le phénomène de toxicité de l’alcool ; c’est ce que l’on appelle l’effet Antabuse. - soit l’alcool agit sur le métabolisme des médicaments en augmentant ou en ralentissant leur destruction suivant qu’il s’agisse d’un alcoolisme aigu ou chronique. Effets de l’alcool sur la biodisponibilité des médicaments A forte dose : l’alcool retarde l’évacuation gastrique (par spasme du pylore), diminuant la résorption et/ou la biodisponibilité de certains médicaments. Cela nuit aux principes actifs sensibles à un pH acide (érythromycine). A l’inverse certains médicaments auront une biodisponibilité accrue (trinitrine). Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page En cas d’alcoolisation chronique : L’ingestion chronique d’alcool peut, au contraire, avec le temps, activer les enzymes du métabolisme du médicament, et accélérer son élimination, ce qui diminue l’efficacité du traitement. Une fois activés, les enzymes peuvent exercer leur action même en l’absence d’alcool, perturbant ainsi le métabolisme de certains 15 En alcoolisation aiguë: la consommation aiguë d’une forte dose d’alcool peut inhiber le métabolisme d’un médicament et retarder son élimination. L’alcool entre en compétition avec le produit en monopolisant les mêmes enzymes métaboliques (effet inhibiteur par liaison avec le cytochrome P450). Cette interaction prolonge la disponibilité du médicament : l’alcool potentialise l’effet du médicament et augmente les risques d’effets secondaires. C’est le cas du phénobarbital, des AVK, du méprobamate, des benzodiazépines… Le risque de toxicité des médicaments est alors augmenté. produits plusieurs semaines après l’arrêt de la consommation d’alcool. Pour cette raison, les buveurs chroniques récemment abstinents nécessitent une posologie supérieure à la normale afin d’obtenir l’effet thérapeutique attendu. Certains enzymes activés peuvent transformer les médicaments en produits toxiques, qui provoquent alors des lésions hépatiques ou des lésions sur d’autres organes. L’alcool peut modifier l’équilibre des échanges en eau de toutes les cellules de l’organisme car il possède un effet diurétique par production d’urine au niveau de rein, entraînant la déshydratation des cellules de l’organisme. La voie principale de métabolisation de l’alcool passe par l’ADH et ensuite par l’ALDH. En cas d’alcoolisation aiguë, cette voie est saturée ; intervient alors la voie de métabolisation par les CYP qui dès lors, ne sont plus disponibles pour dégrader les médicaments, leur métabolisme s’en trouve diminué et leur acticité augmentée. En cas de prise chronique, se produit une augmentation de la fabrication de CYP( induction enzymatique), il y aura dès lors plus de CYP disponibles pour métaboliser plus vite les médicaments dont l’activité s’en trouvera diminuée La PHARMACOGENOMIQUE : lien entre génome (personne ou groupe) et réponse aux médicaments. Elle désigne tous les éléments de modifications de l’expression des gènes qui altèrent la réponse aux médicaments. Il existe une grande variabilité de l’ADME (Absorption, Distribution, Métabolisation, Elimination) de l’alcool due aux facteurs génétiques et environnementaux ; ce sont des facteurs cinétiques. Le CYP2E1 est augmenté dans l’alcoolisme chronique et des polymorphismes du CYP2E1 seraient impliqués dans certains cancers (estomac) et pancréatites chez l’alcoolique. 7 gènes encodent pour l’ADH dont 2 polymorphes : L’ADH2*1 2x moins vite que le ADH1 (wt) et l’ADH2*2 métabolise 15x plus vite que le wt avec risque d’accumulation toxique d’acétaldéhyde. 2 gènes encodent pour l’ALDH avec 2 allèles dont un est inactif; rare chez les caucasiens, il est présent chez 40% des orientaux avec risque d’accumulation d’acétaldéhyde. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page Les cytochromes P450 (CYP) sont des enzymes ubiquitaires (plus de 1000 cytochromes différents sont identifiés mais on ignore encore les rôles de la majorité d’entre eux) ; ils interviennent dans le métabolisme des médicaments. Ils se répartissent en famille et sous-familles. Ils oxydent les molécules afin de faciliter la glucuronoconjugaison. Parmi ces sous-familles, les principaux CYP impliqués dans le métabolisme des médicaments sont les suivants : - CYP 1A2 - CYP 2C8 - CYP 2D6 essentiellement pour les psychotropes (qui apporte des radicaux OH). - CYP 3A4 qui déméthyle (enlève le radical CH3). Le métabolisme des médicaments, principalement hépatique, fait intervenir : - le plus souvent plusieurs CYP : leurs voies sont multiples et peuvent se chevaucher. 16 Interactions médicamenteuses et cytochromes. - plus rarement un seul CYP ou un CYP préférentiel : c’est dans ces circonstances que le risque d’interaction est le plus élevé. Chez l’homme, le CYP 3A4 est quantitativement le plus important ; il représente 30% du contenu hépatique en CYP et est également présent au niveau intestinal (entérocytes). Environ la moitié des médicaments métabolisés le sont par l’intermédiaire du CYP 3A4. Une liste non exhaustive de médicaments (principes actifs- métabolisés préférentiellement par un CYP, et donnant lieu à des interactions cliniquement significatives, est présentée dans le tableau ci-dessous. Principaux cytochromes (CYP), principes actifs à risque interactif métabolisés par ces CYP, inhibiteurs et inducteurs C Y P PRINCIPES ACTIFS INHIBITEURS 1 a 2 2 C 8 2 D 6 3 A 4 - clozapine tacrine théophylline -- fluvoxamine - répaglinide- - gemfibrozil - flécaïnide métoprolol - INDUCTEURS - fluoxétine, paroxétine quinidine - - ergotamine dihydroergotamine amiodarone, disopyramide midazolam, triazolam, zolpidem ifosfamide ciclosporine,tacrolimus, sirolimus fentanyl, méthadone pimozide sildénafil, tadalafil, vardénafil simvastatine, atorvastatine - jus de pamplemousse amiodarone diltiazem, vérapamil kétoconazole, itraconazole, fluconazole, miconazole ritonavir, atazanavir… érythromycine, clarithromycine alcool(prise chronique) tabac millepertuis anticonvulsivants : • carbamazépine, • phénobarbital, • phénytoïne anti-infectieux et antiviraux: • rifampicine, • éfavirenz • névirapine Modifications d’activité des CYP Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page Elle est le fait de substances inductrices, majorant la synthèse et l’activité des CYP (cf tableau) : - alcool (en prise chronique) - tabac - millepertuis - certains médicaments : principalement des anti-infectieux (rifampicine) et des antiépileptiques (carbamazépine). 17 1 Augmentation de l’activité des CYP L’induction n’est pas spécifique d’un seul CYP mais concerne principalement les CYP 2C et 3A. L’induction est progressive et atteint son maximum en 10 à 15 jours. De la même façon, cet effet disparait progressivement à l’arrêt de l’inducteur. On parlera de chevauchement » inter-cytochromes » à propos des inductions éventuelles. 2 Diminution de l’activité des CYP Elle est le fait de substances inhibitrices, principalement médicamenteuses : - antifongiques azolés, macrolides, inhibiteurs de protéases, antagonistes des canaux calciques, bradycardisants (cf. tableau) - jus de pamplemousse L’inhibition, à l’inverse de l’induction, s’exerce le plus souvent au niveau d’un seul CYP. Dans ce cas, il n’y a pas de chevauchement. L’inhibition, à l’inverse de l’induction est rapide et répond schématiquement à deux mécanismes : - une réelle inactivation du CYP par l’inhibiteur - une compétition au niveau d’un même CYP entre 2 substances : − administrés simultanément − fixés et métabolisés par le même CYP Ce deuxième mécanisme, plus fréquemment impliqué, résulte d’une affinité de la substance inhibitrice pour le CYP considéré, qui est supérieure à celle de la substance inhibée. En fonction de leur degré d’affinité pour un CYP donné, certains médicaments peuvent, dans ces conditions, se comporter comme substrats ou inhibiteurs du métabolisme de médicaments moins affinés, mais aussi avoir leur métabolisme inhibé par d’autres médicaments plus affinés (inhibition compétitive). Conséquences pratiques En cas de prescription d’une association médicamenteuse, il convient de vérifier la présence d’inducteurs ou d’inhibiteurs (cf tableau). - l'association à des médicaments à risque doit être prise en compte et se révèle d’autant plus problématique, voire dangereuse, que la marge thérapeutique du médicament associé est étroite ; - les inducteurs, en accélérant le métabolisme de certains médicaments, peuvent, par diminution de leur concentration plasmatique, entraîner des diminutions notables d’efficacité aux conséquences : - graves : par exemple, rejet de greffe en présence d’immunosuppresseurs : ciclosporine et millepertuis. inattendues : par exemple, échec d’une contraception orale : substrats ou inducteurs des CYP3A4. les inhibiteurs, en ralentissant le métabolisme de certains médicaments peuvent, par augmentation de leurs concentrations plasmatiques, majorer le risque d’effets indésirables avec des conséquences parfois graves (myopathies et parfois rhabdomyolyses en présence de statines….). Page 18 Rappel: un médicament est dit à marge thérapeutique étroite lorsque la dose nécessaire pour obtenir un effet thérapeutique est proche de la dose toxique Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Médicament Principaux effets toxiques d’un surdosage Anticonvulsivants Troubles neuromusculaires, neuropsychiatriques, cardiovasculaires, digestifs Digitaliques Troubles digestifs, visuels, cardiaques. Surveiller régulièrement la kaliémie Théophylline Troubles digestifs, convulsions, excitation, troubles cardiaques Quinidines Hypoglycémie, cinchonisme (troubles de la vision, surdité), troubles cardiaques Anticoagulants oraux Manifestations hémorragiques Lithium Tremblement, nausées, diarrhées, troubles visuels, vertiges, confusion, troubles du rythme cardiaque (premiers signes à partir de 1,2mmol/l) Coma, épilepsie et troubles du rythme cardiaque (potentiellement mortel à partir de 2,5mmol/l) Ciclosporine Néphrotoxicité, tremblements, hypertension 3. Dans certains cas, pour contrebalancer l’effet de l’interaction, il est recommandé de modifier la posologie du médicament associé à un inducteur ou à un inhibiteur : - augmentation avec un inducteur ; - diminution avec un inhibiteur. 4. L’adaptation posologique préconisée peut parfois être guidée : - par la mesure des concentrations plasmatiques du médicament associé, fréquemment disponibles en cas de médicaments à marge thérapeutique étroite : immunosuppresseurs, anticonvulsivants, théophylline, inhibiteurs de protéases…. - Par le suivi d’autres paramètres : anticoagulants oraux et INR, antiarythmiques et ECG…. Dans tous les cas, ces contrôles ne dispensent pas d’un suivi clinique. 5. L’arrêt d’un inducteur ou d’un inhibiteur doit s’accompagner : - d’un retour à la posologie initiale du médicament associée, - d’un suivi d’autant plus rigoureux que le médicament associé a une marge thérapeutique étroite. La toxicité de l’alcool se généralise dans l’organisme, au niveau gastrique, hépatique, cérébral…. Il y a donc lieu de proscrire l’alcool (même en petites quantités) avec les médicaments du système nerveux central (anxiolytiques, certains antidépresseurs, neuroleptiques, hypnotiques, antihistaminiques….), en effet, l’alcool majore l’effet sédatif de ces médicaments avec une altération accrue de la vigilance rendant dangereuse la conduite de véhicules et le maniement de certaines machines. LES ANALGÉSIQUES NARCOTIQUES Ce sont des neurodépresseurs : leur combinaison va ralentir le système respiratoire, parfois à tel point que cela peut causer la mort. Page 19 LES ANALGESIQUES Les analgésiques en prise avec l’alcool peuvent affaiblir les fonctions du système nerveux central et irriter le tractus gastro intestinal avec risque de saignement. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 LE PARACETAMOL Le paracétamol entre dans la composition de nombreux médicaments utilisés couramment contre les rhumes, les refroidissements, les douleurs, la fièvre. Des doses supérieures de 3gr par jour peuvent s’avérer toxiques pour le foie et provoquer des hépatites aiguës. Dans une étude de Wartel, sur 41 cas d’hépatites aiguës sévères causées par un surdosage en paracétamol (> 6gr par jour) 92% concernaient des buveurs excessifs (~ 10 verres d’alcool par jour) et 85 % avaient pris du paracétamol pendant plus d’une journée. En cas d’alcoolisme chronique, même des doses usuelles peuvent entraîner une toxicité chronique sévère. Comme l’éthanol, le paracétamol est métabolisé par le CYP2E1 en métabolite toxique, qui doit alors être pris en charge par le gluthation ; en cas de déficit de ce dernier, une hépatotoxicité létale peut survenir. Chez l’alcoolique chronique, les doses maximales en paracétamol devraient être divisées par 2. L’ACIDE ACETYLSALICYLIQUE LES ANTI INFLAMMATOIRES AINS De nombreux consommateurs d’alcool utilisent divers médicaments comme remède contre la gueule de bois. L’aspirine, le paracétamol et l’ibuprofène sont souvent cités. Pourtant, ces remèdes doivent être pris avec précaution en association avec l’alcool : les AINS, en association avec l’alcool, risquent de provoquer des brûlures d’estomac ou des reflux acides. Comme un adulte sur 5 va consommer de l’alcool le lendemain de veille comme remède en pensant améliorer son état, cette pratique est particulièrement dangereuse et constitue un comportement à risques. En cas d’intoxication éthylique aiguë, la prise d’alcool pourra créer des nécroses tubulaires. LES ANESTHESIANTS L’association des anesthésiques avec l’alcool peut diminuer l’effet anesthésiant et créer des lésions hépatiques. LES ANTIBIOTIQUES La combinaison de l’alcool et de certains antibiotiques peut, en prise aiguë, prolonger le séjour dans l’estomac et diminuer l’effet de l’antibiotique (molécule sensible au PH acide). Il y aura dès lors une diminution de l’effet du traitement et on pourra être confronté à des effets secondaires tel nausées, vomissement, céphalée et parfois même des convulsions. La plus grande prudence devra donc être observée lors d’administration concomitante d’Erythomycine, de pénicilline et de la Quinacrine (antipaludique). La télithromycine (KETEK) appartient à la famille des médicaments appelés antibiotiques de type kétolide, très hépatotoxiques. Ce médicament est utilisé pour traiter une pneumonie causée par certaines bactéries. Il agit en tuant les bactéries ou en arrêtant leur croissance ; il doit donc être réservé aux spécialistes. Page LES ANTI ASTHMATIQUES Ces médicaments peuvent causer des brûlures d’estomac lorsqu’ils sont utilisés simultanément avec de l’alcool. 20 LES ANTI COAGULANTS = LES ANTIVITAMINES K En cas de forte dose d’alcool, ce dernier va potentialiser l’effet anticoagulant entraînant dès lors un risque important d’hémorragie. Par contre, en cas d’alcoolisme chronique, l’effet anticoagulant sera diminué entraînant des risques de thrombose. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 LES ANTIDEPRESSEURS L’alcool augmente l’effet sédatif de cette classe de médicaments. La combinaison de l’alcool et de certains antidépresseurs appelés IMAO (inhibiteurs de la monoamine oxydase) peut entraîner une chute très dangereuse de la tension artérielle, et provoquer éventuellement l’évanouissement. L’alcool accélère l’élimination de ces médicaments de l’organisme, ce qui peut diminuer l’efficacité du traitement. LES ANTIEPILEPTIQUES Chez un patient traité pour l’épilepsie, la prise même modérée de boisson alcoolisée est susceptible d’aggraver la fréquence des crises dans différentes circonstances : a) Les formes d’épilepsie réfractaires aux traitements médicamenteux s’aggravent à la suite de l’absorption d’alcool (de 1 à 3 verres de bière suffisent). Par « réfractaire », on entend la persistance de crises hebdomadaires malgré 2-3 médications antiépileptiques bien contrôlées. b) L’alcool, même à faibles doses, peut modifier le taux sanguin de certains médicaments. C’est ainsi que l’élimination de certaines substances peut être accélérée (c’est le cas de la phénytoïne), et donner lieu à une diminution de l’effet thérapeutique. c) Enfin, une prise modérée d’alcool, chez des patients traités, est également susceptible de modifier le caractère réparateur du sommeil et ce facteur, en soi, peut accroître pendant quelque temps la fréquence des crises. Ceci dit, les revues statistiques et épidémiologiques indiquent que la consommation « sociale » modérée d’alcool, chez des patients dont l’épilepsie est bien contrôlée, n’affecte pas de façon significative la fréquence des crises. Mais il n’y a aucun doute qu’un individu qui absorbe des quantités importantes d’alcool, de façon chronique, est susceptible de présenter des manifestations convulsives généralisées dans deux circonstances : - en cas d’absorption massive aiguë. - lorsque, pour des raisons multiples (économiques, cf. manque d’argent ; sociales, cf. incarcération ; médicales, cf. intolérance digestive), il arrête pendant 24 à 48 heures, d’absorber de l’alcool. Il s’agit de manifestations convulsives de sevrage, associées ou non à d’autres symptômes (delirium tremens, anomalies neurologiques, etc.). Ces manifestations de sevrage établissent fermement le caractère d’intoxication par l’alcool de ces individus, signant une dépendance plus ou moins importante et définitive. LES ANTI HISTAMINIQUES La plupart des médicaments contre les allergies ont un léger effet sédatif, et peuvent donc causer de la somnolence. Il va de soi, l’alcool va potentialiser cette effet sédatif, il accroîtra la somnolence, la perte d’attention et le ralentissement du fonctionnement du cerveau. LES ANTIHYPERTENSEURS L’alcool étant hypertenseur, il pourra diminuer l’effet des antihypertenseurs. En cas d’alcoolisme chronique, il diminuera l’action des bétabloquants comme le Propranolol (métabolisé per le CYP 2D6) par augmentation de son métabolisme ; par contre il augmentera l’effet du Sotalol( non métabolisé par les CYP) par diminution de son élimination. En prise aiguë, les antihypertenseurs centraux majoreront les effets sédatifs de l’alcool. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page LES CONTRACEPTIFS ORAUX Il y a peu d’interactions entre l’alcool et les contraceptifs oraux ; néanmoins, l’alcool étant souvent source de vomissements et de diarrhées, il y a donc lieu d’être très attentif au laps de temps écoulé entre la prise de la pilule et ces vomissements. 21 LES ANTI ULCEREUX Ils peuvent augmenter la disponibilité de faibles doses d’alcool. LES CORTICOIDES Ils aggravent les problèmes gastriques dus à l’alcool. LES DERIVES NITRES La prise simultanée de dérivés nitrés (Molsidomine (Corvaton), Dinitrate d’Isosorbide (Cedocar), nitroglycérine (Trinitrine) et d’alcool peut augmenter la fréquence de flush cutanés en cas de prise aiguë. LES DIURETIQUES L’alcool étant vasodilatateur et diurétique en lui-même, il va de soi que l’on pourra observer une majoration de l’effet hypotenseur et diurétique des diurétiques. LA FELODIPINE = RENEDIL = PLENDIL ET LA NIFEDIPINE = ADALAT On peut constater de l’hypotension orthostatique par augmentation possible de leur absorption. L’INSULINE ET LES HYPOGLYCEMIANTS En prise aiguë, l’alcool potentialise leur ’effet hypoglycémiant, il favorise la survenue de coma hypoglycémique sévère. Avec la metformine, on constate un risque accru d’acidose lactique. Lorsque le diabète est bien soigné, une consommation modérée d’alcool est tolérée. Il peut cependant produire des effets secondaires chez les personnes qui prennent des hypoglycémiants oraux. Il peut aussi provoquer une hypoglycémie sévère lorsqu’il est consommé à jeun, surtout chez les personnes qui prennent de l’insuline. L’alcool passe directement dans le sang pour être métabolisé par le foie. Normalement, lorsque le taux de sucre dans le sang diminue, le foie puise à même ses réserves pour produire du glucose. En présence d’alcool, le foie cesse d’équilibrer le taux de glucose pour se consacrer uniquement à la métabolisation de l’alcool et à l’éliminer. C’est ainsi que l’alcool contribue à abaisser le taux de sucre. Certains facteurs combinés à l’alcool peuvent aussi augmenter son effet sur le taux de glycémie. L’exercice physique, par exemple, a pour effet d’abaisser le taux de glycémie. Ainsi, si on prend de l’alcool après un exercice physique, il y a un grand risque d’atteindre un taux très bas de glycémie. On recommande de vérifier son taux de glycémie après un exercice et avant de consommer de l’alcool, et de procéder à une autre vérification quelques heures après. Les médicaments oraux et l’insuline vont aussi abaisser le taux de glycémie et exigent certaines précautions. On recommande aux diabétiques de se limiter à deux consommations par jour, de ne pas boire l’estomac vide. Il est préférable de boire l’alcool lentement, pendant ou après un repas. Si l’alcool est pris avant le repas, il faut le consommer en même temps que des aliments comme du fromage ou des biscuits. L’alcool a un effet hypoglycémiant démontré car du fait de sa structure similaire au sucre, il favorise une sécrétion d’insuline par le pancréas même si celui n’en produit plus beaucoup surtout dans le diabète de type1. Cette insuline va agir en plus de l’insuline apportée par l’injection, ce qui explique le risque plus important d’hypoglycémie en associant alcool et hypoglycémiants. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Page LE LITHIUM = MANIPREX = PRIADEL = CAMCOLIT Utilisé en prévention des rechutes des troubles bipolaires et des états schizo-affectifs intermittents et pour le traitement curatif des états d’excitation maniaque ou hypomaniaque, le Lithium peut causer une déshydratation. En cas de prise aiguë d’alcool (diurétique), la lithémie peut s’en trouver augmentée par fuite d’ions sodium. 22 LE LEFLUNOMIDE = ARAVA Il constitue le traitement de choix de l’arthrite chronique. La prise simultanée du léflunomide et de l’alcool pourrait endommager le foie davantage que la prise de l’une ou l’autre de ces substances séparément. Il est donc conseillé, pour réduire le risque de lésion grave du foie, de ne pas consommer d’alcool pendant le traitement. LE MÉTHOTREXATE = LEDERTREXATE En cas d’alcoolisme chronique : l’alcool augmente la toxicité hépatique du méthotrexate. LES NEUROLEPTIQUES La plus grande prudence s’impose lors de la prise simultanée de neuroleptiques et d’alcool. Le patient s’expose à une potentialisation des effets secondaires des neuroleptiques et de l’alcool pouvant induire des lésions hépatiques. Notons que près de 50% des patients psychotiques consomment de l’alcool. LES SOMNIFERES Lorsque les somnifères sont combinés à l’alcool, ils provoquent un dangereux ralentissement des fonctions cardiaque et respiratoire. Ils peuvent augmenter l’effet sédatif, voire entraîner le coma ou le décès. LES BENZODIAZEPINES Les benzodiazépines et l’alcool : la fréquence et la quantité de consommation d’alcool est un facteur important chez les patients qui ont besoin de benzodiazépine. En effet, l’alcool affecte le complexe ionophore GABA-benzodiazépine-chlorure par une action agoniste-like. C’est pourquoi des interactions additives doivent être attendues de la combinaison de l’alcool avec les benzodiazépines. Par ailleurs, l’alcool a une efficacité cliniquement significative anxiolytique, et de nombreux anxieux peuvent abuser de ce fait. Rappelons que l’alcool potentialise l’effet amnésiant des benzodiazépines ainsi que la dépression du système nerveux central. IL va potentialiser aussi l’effet sédatif et diminuer les capacités d’attention et d’appréciation. LES STATINES On préconise la prudence, si on prend régulièrement trois verres d’alcool ou plus par jour en même temps que des statines car le risque de myopathies, voire rhabdomyolyse s’en trouve accru. LE TACROLIMUS = PROTOPIC = ADVAGRAF = PROGRAFT ET LE PIMECROLIMUS = ELIDEL Le tacrolimus, un immunosuppresseur utilisé par voie systémique dans la prévention et le traitement des épisodes de rejet aigu lors de transplantation d’organes, est maintenant aussi disponible sous forme de pommade à 0,03% (à partir de 2 ans) et à 0,1% (à partir de 16 ans). Le tacrolimus est indiqué pour le traitement de la dermatite atopique modérée à sévère chez l’adulte et l’enfant de plus de deux ans en cas de réponse inadéquate ou d’intolérance aux traitements conventionnels. Tous deux constituent une avancée dans la prise en charge de la dermatite atopique. Ce traitement paraît être une alternative raisonnable en cas de réponse insuffisante ou d’intolérance aux corticostéroïdes, particulièrement pour traiter des endroits plus sensibles aux effets indésirables des corticostéroïdes (par ex. au niveau du visage, autour des yeux). Ces médicaments peuvent entraîner une intolérance à l’alcool. Page 23 LES VASOCONSTRICTEURS NASAUX L’alcool étant un vasodilatateur périphérique, il va de soi qu’il contrecarrera l’effet des vasoconstricteurs nasaux. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 9. L’ALCOOL ET LES STIMULANTS Caféine, smart drinks, amphétamines, speed, xtc, cocaïne Ce mélange accentue les risques de déshydratation et peut contribuer à une surchauffe de l’organisme, en particulier si la consommation se fait dans un lieu festif surchauffé et confiné. Ce « coup de chaleur » peut s’accompagner d’un accident cardiaque ou d’un épuisement, parfois mortels. L’alcool diminue la perception des crampes musculaires qui annoncent ce « coup de chaleur ». Par ailleurs, la sensation d’ivresse peut être masquée par l’effet des stimulants. De ce fait, l’usager peut avoir tendance à boire davantage. L’ivresse survient ensuite brutalement quand les effets du stimulant diminuent. Si elle est excessive, cette combinaison augmente les risques d’infarctus (crise cardiaque) et de problèmes hépatiques (foie). Autres drogues de synthèse G.H.B., kétamine,… Le GBH, acide Gama hydroxybutyrique, aussi appelé drogue du viol, a des actions similaires à celle de l’alcool, il y aura donc un cumul des effets et des effets secondaires et notamment de la dépression respiratoire et de l’amnésie. La kétamine, anesthésique général qui en combinaison avec l’alcool va augmenter les risques de dépression respiratoire. Le mélange de ces anesthésiques avec de l’alcool est particulièrement dangereux, car il augmente fortement le risque de ralentissement respiratoire. Cannabis Moins dangereux, ce mélange peut pourtant provoquer chez certaines personnes des effets imprévus, parfois désagréables (anxiété, nausées, flip, vomissements, …) A plus fortes doses, il entraîne la somnolence, voire l’endormissement. Héroïne et autres opiacés Opium, codéines,… A petite dose, l’alcool atténue l’effet euphorisant de l’héroïne. A forte dose, il accentue l’effet endormant de l’héroïne et le risque de surdosage, surtout s’il y a consommation conjointe de médicaments (ex. : benzodiazépines). 10. L’ALCOOL ET LA PERSONNE AGEE Plus les patients sont âgés, plus ils prennent des médicaments (poly médication), surtout parce que bon nombre de maladies surviennent plus fréquemment dans cette tranche d’âge. Certaines interactions se produisent parce que l’alcool et les médicaments sont absorbés et éliminés par les personnes âgées d’une manière différente que par les personnes plus jeunes. Le danger pour la santé est également plus élevé parce que l’effet de l’alcool est plus fort chez les aînés. L’ingestion de la même quantité conduit à une concentration nettement plus élevée d’alcool dans le sang, étant donné qu’avec le vieillissement, la quantité d’eau dans le corps diminue. Les concentrations en alcool sont donc plus élevées et les effets secondaires s’en trouvent accrus. L’ALCOOL ET LE TABAC Page Alcool et tabac vont souvent de pair selon de nombreuses études. On estime entre 71 et 97% la proportion d’alcooliques fumeurs. Plusieurs auteurs ont mis en évidence une corrélation entre la dépendance à l’alcool et la dépendance au tabac. Cette co-dépendance peut être problématique lors de la désintoxication d’alcooliques fumeurs. De plus, l’alcool et le tabac étant tous les deux des inducteurs des cytochromes P450, leur association sera donc aussi problématique. 24 11. Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 12. L’ALCOOL ET LA GROSSESSE Page 25 De nombreuses femmes enceintes consomment des boissons alcooliques en plus ou moins grande quantité. Pourtant, diverses recommandations préconisent une consommation nulle d’alcool pendant la grossesse. Un syndrome d’alcoolisation fœtal est présent chez environ 5% des enfants exposés au cours de la grossesse à une consommation d’alcool régulière d’au moins 5 verres standard par jour (c’est-à-dire 50g d’alcool par jour). Ce syndrome associe dysmorphie faciale, retard de croissance et retard mental. Quatre études ont exploré le lien entre consommation importante d’alcool sur une courte durée et la survenue de troubles cognitifs chez les enfants exposés. Les résultats ont été peu probants, et les analyses n’ont pas pris en compte une éventuelle consommation chronique d’alcool concomitante. Une étude de bonne qualité méthodologique a observé un lien avec des anomalies neurologiques (convulsions, épilepsie) en cas de consommation importante sur une courte durée entre les 11ème et 16ème semaines de grossesse. Un risque de troubles cognitifs et comportementaux chez les enfants n’est apparent que pour des consommations régulières d’alcool à partir de 2 verres standard par jour. De nombreuses études, portant sur environ 150.000 grossesses au total, ont recherché un lien entre consommation minime d’alcool et anomalie du déroulement de la grossesse. Très peu ont montré un lien statistiquement significatif et leurs résultats sont fragilisés par le manque de prise en compte des autres facteurs de risque. Un lien entre mortalité infantile et consommation d’alcool pendant la grossesse a été recherché dans de vastes cohortes. A partir d’une consommation d’au moins 4 verres standards par semaine, le risque de mort néonatale précoce a semblé augmenté, majoré par le tabac. Une consommation quotidienne d’alcool pendant la grossesse est à déconseiller. On conseille la modération, sinon l’abstinence, pendant la grossesse. L’alcool passe dans le placenta et dans le lait maternel. En cas de consommation excessive ou régulière d’alcool (2 à 3 verres par jour), le bébé peut présenter un « syndrome alcoolo-fœtal » (handicap mental irréversible). Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 13. CONCLUSION La consommation d’alcool avec des médicaments intensifie le risque d’effets secondaires et peut toujours entraver l’efficacité thérapeutique des médicaments. L’actualité nous le prouve tous les jours. La mort de Marilyn Monroe serait due, apparemment, à un mélange d’alcool et de médicaments (dont le Xanax), et celle de Whitney Houston à de la drogue et de l’alcool Alcool + médicaments = danger Test d’addiction à l’alcool 1. Pensez-vous que vous consommez une quantité d’alcool supérieure à la normale ? 2. Est-ce que votre conjoint, un parent ou un de vos proches vous a déjà fait des reproches sur votre consommation d’alcool ? 3. Vous est-il arrivé de vous sentir coupable au sujet de votre consommation d’alcool ? 4. Vos amis et vos proches vous considèrent-ils comme un buveur normal ? 5. Pouvez-vous toujours arrêter votre consommation d’alcool quand vous le voulez ? 6. Avez-vous déjà assisté à une réunion d’anciens buveurs pour un problème personnel d’alcool ? 7. L’alcool a-t-il créé des problèmes avec votre conjoint ou un de vos proches ? 8. Avez-vous eu des problèmes au travail à cause de votre consommation d’alcool ? 9. Vous est-il arrivé de négliger, à cause de votre consommation d’alcool, vos obligations, votre famille, votre travail pendant deux jours de suite ou plus ? 10. Vous est-il arrivé de demander conseil ou de l’aide à cause de votre consommation d’alcool ? 11. Avez-vous été hospitalisé à cause de votre consommation d’alcool ? 12. Avez-vous déjà été arrêté par la police pour conduite en état d’ivresse ou de conduite avec facultés affaiblies ? 13. Avez-vous déjà été arrêté, même pour quelques heures, à cause d’un comportement relié à votre consommation d’alcool ? Pour connaître votre degré de liberté par rapport à l’alcool, posez-vous les questions suivantes : • Est-ce que je peux passer quelques jours sans alcool ? • Est-ce que je suis bien quand je ne bois pas ? • Est-ce que je recherche toutes les occasions de boire ? Est-ce que j’ai envie d’alcool quand les autres ne boivent pas ? Page 26 Mais rien ne vous interdit de préférer le vin d’ici à l’eau de là…… Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 27 Page Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012 Le présent fascicule fait partie du programme 2012 de la formation post-universitaire, mis au point par le Collège des Experts de la Société Scientifique des Pharmaciens Francophones Rue des Dames Blanches, 1 B-5000 Namur. Le programme de cette formation a été déterminé en tenant compte d’une part, des attentes des pharmaciens d’officine et, d’autre part des recommandations du Comité Consultatif Européen pour la Formation Continue des Pharmaciens. Page Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction, même partielle, par tous procédés, y compris la photographie et le microfilm, sont réservés pour tous pays. 28 Editeur responsable : Pharmacien M. Libert Rue des Dames Blanches, 1 – 5000 Namur Pharmacien J. Peeters SSPF – Formation générale 2012