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Forum sur la gouvernance dans les
Organisations de l’Économie Sociale (OESS)
Les spécificités de la gouvernance dans le
champ de l’action sociale
RENNES, le 8 novembre 2006
Maurice PARODI
Professeur émérite de l’Université de la Méditerranée
(Sciences Économiques)
Président du Collège Coopératif Provence Alpes Méditerranée
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Schéma de l’intervention
I.
Émergence et extension de concept de gouvernance des
entreprises et des organisations
II.
La gouvernance des OESS se différencie nettement de celle
des entreprises capitalistiques (concept de la « corporate
governance »)
III.
La gouvernance spécifique des « associations de service
social » a un tronc commun important avec celle des
entreprises et des organisations de l’économie sociale.
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
1.
S’entendre sur la « validité des énoncés » (HABERMAS)
ou le sens des mots, pour agir en commun
➙ un peu de sémantique : gouvernement, gouvernance, gestion ou
administration des organisations, management…
2.
Un peu d’histoire et de géographie ou le repérage des espaces
institutionnels de migration du concept
2.1 Naissance du concept de « corporate governance »
(2ème moitié du XXème siècle) dans le champ des grandes
entreprises (sociétés de capitaux) américaines.
➙ Fiche 1 : Le principe originel du Corporate governance
➙ Élargissement du concept après les scandales financiers d’ENRON ou
d’ANDERSEN (2002) : Pour un « capitalisme responsable » ou la
redécouverte des autres parties prenantes (shareholders), à côté
des actionnaires stockholders)…
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
2.2 Une extension dans les grandes entreprises
françaises et européennes (2ème moitié des années 1990)
➙ Le 1er rapport de Marc Viénot (1995) PDG de la Société
Générale (l’exercice des mandats d’administrateurs, la
rémunération des dirigeants, la séparation des fonctions et des
pouvoirs, etc.)
➙ Le 2ème rapport Viénot (1999) et la loi sur la nouvelle
régulation économique (NRE)
(la distribution de stock-options aux dirigeants, la participation
des représentants de salariés aux organes de contrôle de
gestion de l’entreprise)
➙ Autres initiatives en Europe
Voir fiche 2 : Transparence (Le Monde du 26/03/2002)
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
2.3 Une première migration du concept au niveau des organisations
universelles ou mondiales (années 1980 et 1990)
➙ D’abord au niveau des organisations économiques, monétaires et
financières … comme la Banque Mondiale, le F.M.I., l’OCDE, l’OMC et à
l’usage des pays en développement (PED) : les bonnes pratiques d’un État
libéralisé (dénationalisation, libre concurrence…) et critères d’un État de droit
non corrompu (liberté d’expression, stabilité politique, qualité des services
publics éducatifs), conditionnent l’octroi des aides internationales pour les PED,
mais aussi le PNUD, la CNUCED… : voir fiche 3 : «Une gouvernance
globale» (extrait de BEITONE A., GILLES P., PARODI M. Histoire des
faits économiques et sociaux, DALLOZ 3e édition, 2006).
➙ A ce niveau géopolitique mondial un clivage majeur entre :
- ceux qui considèrent le marché comme un « état de nature » réduisent la
«gouvernance globale » à un système de règles du jeu minimales pour le bon
fonctionnement du marché concurrentiel,
- ceux qui le considèrent comme une « construction sociale », incluent dans les
bonnes pratiques de gouvernance, les pratiques démocratiques, le respect des
normes sociales minimales, les exigences du développement durable…
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
Une deuxième migration en direction des pays
développés de l’OCDE et de leurs collectivités territoriales
est plus récente (début des années 2000) et plus discrète au
niveau des Etats eux-mêmes.
2.4
➙ préconisations des organisations multilatérales comme
l’OCDE, l’OMC, la Commission de l’UE (DG de la libre
concurrence).
➙ d’abord critères de bonne gouvernance économique,
monétaire, financière : par ex : libéralisation des structures
productives, des échanges de biens et services ; « critères de
convergence » de l’U.E. ; indépendance des autorités
monétaires.
➙ puis critères de gouvernance politique ou de
démocratie participative en complément nécessaire de la
démocratie représentative (nouveaux rapports entre la sphère
publique et la société civile).
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
2.5 Au niveau des collectivités territoriales et des territoires du
développement local ➙ concept de « gouvernance territoriale »
➙ Une approche des économistes industrialistes : la
gouvernance territoriale pour renforcer les dynamiques des S.P.L.
(Systèmes Productifs Locaux).
➙ favoriser l’administration de « sucres lents »
(coopération et coordination des acteurs, facteurs d’environnement,
développement du « capital social », confiance…) plutôt que de
«sucres courts » (subventions, exonérations fiscales, etc.).
➙ Une approche plus politique et plus globale : les acteurs
publics des gouvernances territoriales en recherche d’une
participation active des acteurs de la société civile comment
combiner ou articuler gouvernement des territoires et
gouvernance ou ménagement des acteurs (ce qui est de l’ordre de
la négociation et du compromis). Voir fiche 4 : M. PARODI Économie sociale et solidaire et développement local – RECMA
n°296, mai 2005
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
2.6 Une dernière migration en direction de toutes
formes d’entreprises et d’organisations
➙ Notamment les trois composantes juridiques et
organisationnelles de l’ESS : Coopératives,
Mutuelles, Associations-Gestionnaires.
➙ Nombreuses tentatives pour se démarquer du
modèle élargi de la « corporate governance » (celui
qui intègre non seulement la transparence
financière, la composition et le fonctionnement du
C.A. mais encore la R.S.E.* interne et externe).
* R.S.E. : Responsabilité Sociale des Entreprises
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
➙ Exemples :
- Les 30 recommandations du rapport sur le
gouvernement d’entreprises des coopératives et des
mutuelles
➙ fiche 5 : Coopératives et Mutuelles : un
gouvernement d’entreprise original (Extrait du rapport
Etienne Pfimlin, Président de la Confédération Nationale du
Crédit Mutuel).
- Colloque sur Coopératives et Mutuelles : Gouvernance
d’entreprise et
démocratie d’entreprise. Conseil
Economique et Sociale, 26/10/2006.
- Le projet UCE (Université Coopérative Européenne) de
formation de formateurs des entrepreneurs sociaux.
➙ fiche 6 : Le projet UCE en réseau (Leonardo da
Vinci).
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I. Émergence, extension et développement
du concept de gouvernance
➙ L’application du concept de gouvernance aux associations
Des
démarches
déductives
(transposition
ou
«décalquage» du modèle de corporate governance)
➙ fiche 7 : Exemple du dossier DELOITTE : La
gouvernance associative. Revue Associations, juillet
2006.
- Des démarches empiriques (d’abord inductives) à partir
des « démarches qualité » qui incluent la dimension bonne
gouvernance de l’entreprise associative.
Exemples :
- la démarche qualité « cèdre » de COORACE,
- la démarche qualité – développement durable des
Jardins de Cocagne.
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II. La gouvernance des OESS se distingue de
celle des entreprises capitalistiques
(sociétés de capitaux)
1. Parce qu’elle s’ancre dans des valeurs, des principes et un
«système de règles » qui caractérisent cette « autre façon
d’entreprendre » proclamée par les « entrepreneurs sociaux ».
➙ Fiche 8 : M. PARODI, Les valeurs, les principes et les règles
de l’économie sociale traversent tous les domaines de la
gouvernance et de la gestion (UCE - janvier 2004).
et pas seulement la G.R.H…
➙ Fiche 9 : Gouvernance des ressources humaines : une
révolution culturelle pour l’ESS. TESS, octobre 2006,
et encore faut-il repérer ce qui distingue (ou devrait distinguer…)
fondamentalement la GRH d’une OESS de celle d’une entreprise
«autre »…, ou la responsabilité sociale (interne) de l’entreprise
(R.S.E.) dans l’un et l’autre cas (voir en III).
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II. La gouvernance des OESS se distingue de
celle des entreprises capitalistiques
(sociétés de capitaux)
2. Les différences et caractéristiques (spécificités) essentielles (et donc
irréductibles…) s’articulent autour de quelques grands principes ou règles.
- Le principe de « gestion démocratique » des OESS.
➙ La mise en œuvre de l’association ou de la participation des « parties
prenantes » (sociétaires – adhérents, élus, bénévoles, salariés, usagers non
adhérents, partenaires…).
- Le principe « d’acapitalisme » (lucrativité limitée pour les coopératives,
non lucrativité pour les associations et les mutuelles).
➙ … et ses déclinaisons précises (réserves impartageables, rémunération des
coopérateurs au prorata de leur travail ou de leur activité et non au prorata du
capital détenu…)
- Le principe de la double-qualité : adhérent (sociétaire) et participant
à l’activité (usagers).
➙ animation, responsabilisation du sociétariat, éducation coopérative ou
mutualiste des membres.
- Le principe de solidarité interne et externe (engagement au service de
la communauté et pas seulement au profit des adhérents).
etc.
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II. La gouvernance des OESS se distingue de
celle des entreprises capitalistiques
(sociétés de capitaux)
3. Un regard sur les 30 recommandations (ou applications) du rapport sur le
gouvernement d’entreprise des coopératives et des mutuelles
(Fiche 5).
Les têtes de chapitre ou les dimensions retenues :
* Sociétariat (animation, information, communication).
* Conseil d’Administration [représentativité du sociétariat, participation des
femmes ; sélection et évaluation des administrateurs (Comité d’audit et des
comptes, Comité de rémunérations…); formation et information, compte rendu
de mandats…].
* Dirigeant élu (accès à la fonction de Président, bénévolat, code
déontologique…).
* Salarié / dirigeant salarié (sensibilisation aux principes et valeurs de
l’ESS…).
* Relations dirigeant élu / dirigeant salarié.
* Outils de communication sur la bonne gouvernance ou le bon
gouvernement des entreprises de l’E.S. (compte rendus annuels, observatoire
des bonnes pratiques…). Voir aussi fiche n°10 : Ph. RYFMAN : Les ONG ontelles besoin d’une nouvelle gouvernance – Le Monde – 11/04/06
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III. La gouvernance spécifique des « associations de
service social » a un tronc commun important avec celle
des entreprises et des organisations de l’économie sociale
1. Si les associations-gestionnaires de « service social »
(F. Bloch-Lainé) relèvent de la même logique que les autres
«entreprises sociales » et plus largement les entreprises de
l’E.S., elles ne sont pas dans la même démarche
entrepreneuriale que les coopératives et même les mutuelles
(d’assurance tout au moins…) qui sont clairement confrontées
au marché du secteur marchand.
2. Toutefois, dans leur rapport avec les pouvoirs publics ou
commanditaires publics (et donc les marchés publics), elles
doivent concilier logique économique (sinon commerciale…)
et logique ou finalité sociale.
Voir Fiche 11 : M. Parodi, Quand les associations entrent
en économie. Projet n° 264, hiver 2000-2001.
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III. La gouvernance spécifique des « associations de
service social » a un tronc commun important avec celle
des entreprises et des organisations de l’économie sociale
3. Sur les marchés publics (régis par le code des marchés
publics) elles sont amenées à affronter non seulement la
concurrence d’autres entreprises associatives ou coopératives
ou mutualistes de l’E.S., mais aussi celles des entreprises à
finalité lucrative de droit commun.
➙ La gouvernance associative a donc des espaces
communs avec :
* les entreprises de droit commun (y compris les
entreprises capitalistes qui entrent bien sur le marché des
services à la personne…).
* les entreprises de l’économie sociale et solidaire.
➙ Elles sont concernées par toutes les rubriques des 30
recommandations du rapport sur le gouvernement d’entreprise
des coopératives et mutuelles.
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III. La gouvernance spécifique des « associations de
service social » a un tronc commun important avec celle
des entreprises et des organisations de l’économie sociale
➙ … mais aussi par les prescriptions et quelques outils (dispositifs,
procédures…) de la gouvernance des entreprises capitalistiques
elles mêmes (par ex. ceux relatifs à la transparence financière,
aux modalités de contrôle, d’audit, d’évaluations externes, etc.)
➙ Le modèle proposé par la revue Associations (➙ fiche 7) est
trop rigoureusement décalqué à partir du modèle de «corporate
governance» revu à la hausse après les scandales financiers
(voir ci-dessus en I).
Il faut donc, a minima, que les associations de service social en
passent par là; ces prescriptions minimales correspondent
d’ailleurs aux exigences du Cahier des Charges de la
commande public et aux grilles d’audit (financier et social)
mises en pratique dans les associations à la demande des
commanditaires publics.
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III. La gouvernance spécifique des « associations de
service social » a un tronc commun important avec celle
des entreprises et des organisations de l’économie sociale
4. Un passage nécessaire mais pas suffisant : retour aux
« spécificités méritoires » des associations de service
social.
➙ Voir François Bloch-Lainé « Les associations de
service social et leurs spécificités méritoires », RECMA
n° 251, 1er trimestre 1994.
* Les quatre fonctions ou spécificités méritoires distinguées par
F. Bloch-Lainé :
1. « La fonction d’avant-garde ou d’innovation sociale».
2. Le moindre coût pour la collectivité « lié au principe
de non lucrativité et à la mise en œuvre des gratuités »
(engagement bénévole par exemple).
3. « La réfection du tissu social » et du « lien social »
(➙ citoyenneté au quotidien, utilité sociale et sociétale…).
4. « Le personnalisme et l’accompagnement ».
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III. La gouvernance spécifique des « associations de
service social » a un tronc commun important avec celle
des entreprises et des organisations de l’économie sociale
* Ces spécificités méritoires des associations de service social doivent
se retrouver dans la mise en œuvre, l’organisation et le « faire valoir »
(objectivation des critères et des indicateurs ») des principes de
gouvernance qui les caractérisent.
Ainsi, par exemple, la fonction d’innovation sociale doit se retrouver
dans la mise en œuvre d’un outil ou d’un dispositif de veille et
d’autoévaluation (avec critères et indicateurs) au niveau des
administrateurs et de la direction, pour exercer cette fonction relative
au maintien et au développement des capacités d’innovation de la
structure et de ses acteurs.
Il en va de même pour les trois autres.
* La démarche qualité, un outil pertinent de mise en valeur
des spécificités de la bonne gouvernance des entreprises
associatives
Un exemple : Fiche 12 : La démarche qualité – développement
durable des Jardins de Cocagne : les critères (extrait : tableau
général des critères).
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