SYNDROME D`ASPERGER OU DYSPHASIE - zig-zag

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SYNDROME D’ASPERGER OU DYSPHASIE PRAGMATIQUE
À propos de gabriel
Colloque ZIG-ZAG
27 janvier 2012
Ketty ETCHEVERRY
« syndrome d’Asperger ou dysphasie
pragmatique ?
à propos de Gabriel…. »
Ketty ETCHEVERRY Psychologue clinicienne - neuropsychologue
MONTLUÇON le 27 Janvier 2012
Plan
• Rappels théoriques : autisme de KANNER syndrome d’ASPERGER- idée actuelle de
« spectre » autistique – dysphasie sémantique
pragmatique
• Gabriel : présentation clinique – le contexte
de la demande
• bilans et observations pluridisciplinaires Hésitations et choix diagnostique- orientations
thérapeutiques
• Conclusion : quel enjeu de l’évaluation
Rappels théoriques Autisme : définitions
• Selon Kanner (1943) : « trouble précoce du contact affectif » perturbant
les relations de l’enfant avec les autres et avec le monde symptômes décrits :
• Altération relationnelle ou des interactions sociales (présente d’emblée)
• Intolérance au changement (besoin excessif de permanence et de
prévisibilité)
• Comportements et centres d’intérêt restreints et stéréotypés, répétitifs
Nosographie Nord Américaine (DSM IV ) : clinique du comportement, fidèle
à la description de KANNER (troubles de la communication et de la
réciprocité, troubles du langage et centres d’intérêt restreints)
• Diversité des contextes étiologiques : autisme primaire (sans contexte
pathologique ou étiologique connu) et autisme secondaire associé à une
pathologie affectant le développement du système nerveux central
(épilepsie, anomalie génétique….) –
Autisme : formes cliniques
symptômes
- période d’apparition des signes cliniques :
début précoce (1ère année de vie) ou début
tardif (3ème année de vie) : évolution
identique
- Perturbation de la conscience de soi, de la
représentation d’autrui, du lien à la réalité, et
des interactions sociales
- Troubles ou altérations des capacités
symboliques (langage, pensée créative, jeux.)
- pathologie de la relation ou de l’empathie
(«théorie de l’esprit»)
autisme de KANNER/
syndrome d’ASPERGER
La même année : (1944)
Asperger : description proche d ’ un « trouble de la
personnalité » moins référée à une opposition entre
normal et pathologique mais plus au principe d ’ une
variation de tendance par rapport à la normale « sujets
présentant des troubles de la relation et des interactions
sociales, une maladresse psychomotrice, avec un
développement intellectuel normal voire supérieur et sans
anomalie de langage » (idée actuelle de « spectre » :
modèle dimensionnel plus que catégoriel)
Kanner : modèle pathologique plus classique introduisant un
nouveau syndrome, et postulant un trouble précoce
spécifique du développement
PERSPECTIVE ACTUELLE
Idée de « spectre »
• Travaux de MOTTRON (dernier ouvrage 2005)
considère l ’ autisme de « haut niveau »
comme une variante du fonctionnement
mental (rejet de la notion de déficit ou de
handicap) associant : difficultés dans les
interactions sociales (défaut de théorie de
l’esprit et d’analyse des émotions d’autrui)
et des « pics d’habileté » dans les secteurs de
la mémoire, de la perception ou de
l’intelligence logique
Perspective de Mottron :
le fait psychopathologique n’est pas considéré
comme une réduction, un appauvrissement , un
échec d’une fonction en négatif du normal mais
peut se définir par l’ajout, ou le déploiement
d’autres fonctions ou comportements
particuliers (plutôt différence que déficit de
compétence)
ouverture à la conception d’une
psychopathologie fonctionnelle
La dysphasie pragmatique
• Les troubles sémantiques et pragmatiques du
langage : souvent associées – chez l’enfant- au
trouble envahissant du développement en lien
avec un défaut de symbolisation.
• Travaux de psycholinguistes : ont amené à
considérer double origine des TSP : linguistique
ou psychiatrique
Confusion persiste
car souvent : troubles
psychopathologiques associés ou secondaires
dans les TSP
rappel : le langage
• « l’utilisation d’une langue, référée à un code
culturel, à plusieurs composantes :
• Phonologique : basée sur un ensemble de sons
• Lexicale : déterminée par un ensemble de mots
• sémantique : qui se réfère au sens
• Ce code langagier est utilisé dans la communication
selon des règles conversationnelles (pragmatique :
tour de parole, réciprocité de l’echange, mimiques,
prosodie, prise en compte du contexte de
l’ échange….)
• Deux versants du langage : réceptif et expressif
Les troubles du langage :
L’atteinte de ces composantes a amené à distinguer différents
types de troubles spécifiques du langage (dysphasies
développementales) se distinguant d’un simple retard de langage
par : la spécificité de l’atteinte langagière, la sévérité et la
durabilité du trouble
Le DSM IV et la CIM 10 définissent le trouble en référence un
déficit évalué par des tests standardisés (score – 2 DS/âge)
interférant avec la communication sociale et les performances
académiques. L’origine serait neurodéveloppementale sans lien
avec une pathologie acquise.
Les différents types de dysphasie : phonologique syntaxique (la
plus courante) – lexicale syntaxique –sémantique pragmatique
Le trouble sémantique-pragmatique :
(débat posé : TSL ou intégré à l’idée de « spectre »
autistique ???)
Dans le registre neuropsychologique, les TSP :
proches du syndrome décrit par ROURKE (incapacité
d’apprentissage non verbal) associant :
-Des troubles d’apprentissage des mathématiques
-Des troubles psycho-perceptivo-moteurs (d ’ allure
dyspraxique)
-Une difficulté à manier les concepts temporels,
-Des troubles des compétences sociales en raison des
difficultés d’utilisation des codes de communication
non verbale (mimiques, gestes, intonation, prosodie…)
Travaux de BISHOP (1998)
• Difficulté de langage entraîne forcément des
difficultés ou restriction de la communication
• Les difficultés peuvent être dans l’utilisation
du langage (fonctionnelles) ou liées à sa
structure (phonologie, syntaxe…)
• BISCHOP conçoit l’atteinte sémanticopragmatique comme un trouble spécifique du
langage –similitudes avec langage d’enfants
présentant un trouble autistique :
Travaux de BISHOP (suite)
•
•
•
•
•
Paraphasies sémantiques
Néologismes
Recours à des phrases « plaquées »
Compréhension « littérale »
Initiations verbales inappropriées (parlent seul,
passent du coq à l’âne…)
Mais chez enfants autistes : difficultés communicatives
pas seulement langagières
BISHOP propose : TSP catégorie intermédiaire entre
trouble langagier et trouble communicatif
La Children’s Communication Cheklist (BISHOP)
grille d’évaluation des aspects qualitatifs de la communication
70 items, 9 sous échelles
•2 sous échelles : difficultés de la structure du langage
•5 sous échelles : difficultés pragmatiques (initiation de
la conversation, cohérence, langage stéréotypé,
utilisation du contexte et rapport conversationnel)
•2 sous échelles évaluent les relations sociales et les
centres d’intérêt
Gabriel : présentation et contexte de la consultation :
• Âgé de 8 ans 11 mois; aîné d’une fratrie de deux enfants (une
sœur de 5 ans) ; les deux parents ont une activité
professionnelle. La famille est décrite comme unie , avec des
grands parents présents et attentifs. Aucun événement
familial particulier n’est relaté.
• Les premières acquisitions ne semblent pas avoir posé de
problème (marche, propreté, apparition du langage, premier
processus de séparation) ; le langage cependant se développe
avec quelques particularités (Gabriel ne répond pas toujours à
propos, utilise des expressions de manière un peu répétitive,
des bouts de phrases « plaquées », continue à poser une
question dont il a déjà la réponse…) ; les parents ,puis les
enseignants, repèrent ces particularités et lors de l’année de
GSM : mise en place de l’accompagnement orthophonique – le
graphisme se développe très lentement.
• Niveau scolaire : fin d ’ année CE1 au moment de la
consultation (2 années de GSM)
Blocage sur les apprentissages, après une année de CP
« moyenne » : la lecture est acquise, mais Gabriel a
beaucoup de mal à intégrer les sens des énoncés, il
s’isole et ne participe pas en classe ;
• Nécessité de soutien important le soir avec
l ’ impression des parents que « Gabriel
ne
comprend pas ce qu’il apprend » ; il faut passer par
l’image, l’expérience ou la concrétisation
• L’enfant est de plus en plus anxieux dans le milieu
scolaire, ne semble pas pouvoir donner du sens à ce
qu’il apprend (notamment les apprentissages un peu
abstraits : grammaire, mathématiques…)
• sur le plan relationnel, Gabriel est en demande (aller au centre de loisirs,
être avec ses copains) mais souffre de « la place qu’il n’arrive pas à
prendre » auprès d’eux lors des jeux ou des conversations. Il recherche la
relation aux autres, mais se montre plus à l’aise avec les enfants
nettement plus jeunes (aires de jeux psychomoteurs)
• Sa maman le dit « très naïf, immature et faible dans ses relations »
• Le sommeil est marqué par des difficultés d’endormissement (rituels de
balancements, de bercements) ; l’alimentation est marquée par un
faible appétit
• Sur le plan psychomoteur il n’a jamais eu de difficulté (natation, vélo,
sport) plutôt bien dans les activités physiques (sauf en situation de jeux
collectifs avec des règles du jeu à respecter)
• la graphomotricité est marquée par d’importantes fluctuations : Gabriel
ne semble pas pouvoir gérer deux choses en même temps : soit il écrit
(recopie) soit il traite le message (et alors l’écriture se dégrade
considérablement)
• Ses centres d’intérêts spontanés : très fluctuants : parfois peut jouer
seul –voitures, au ballon - ou lire (adore les livres sur les animaux
préhistoriques) ; il joue avec sa petite sœur qui, elle, initie et guide
souvent les activités, parfois ne peut ni jouer ni s’occuper seul tant il
paraît « perdu » « inquiet » « anxieux » « malheureux »
Contexte du bilan
• Consultation au CMP (conseillée par l’orthophoniste
qui suit l’enfant en libéral)
• Bilan
neuropsychologique
demandé
par
pédopsychiatre du CMP ( suspicion de « troubles des
apprentissages ») – il transmets le dossier au
neuropédiatre du service hospitalier ;
• Un bilan orthophonique est également réalisé dans
le même temps
• à l’issue de ces bilans, synthèse organisée
(parents/orthophoniste/neuropsychologue/neuropé
diatre) en vue d’un diagnostic et d’une orientation
thérapeutique
Conclusions des bilans :
• Le bilan cognitif met en évidence un potentiel
cognitif situé dans une zone « moyen faible » mais
avec quelques zones d’échec massif :
• le raisonnement mathématique ou abstrait
• L’investissement des apprentissages de type scolaire
(notions liées au découpage temporel par exemple)
• L’élaboration verbale (argumentation, élaboration de
définitions…avec quelques «particularités»
dans
l’utilisation ou la compréhension lexicales)
• La vitesse de traitement (qui semble indiquer la
grande anxiété à produire une réalisation
graphomotrice autonome)
•
•
•
•
•
Les zones de réussites :
Le maniement de la pensée catégorielle,
La connaissance des usages de vie quotidienne
L’attention visuelle (images/situations de vie familières)
Les épreuves neuropsychologiques expriment : une
difficulté sur le plan exécutif (anticipation,
programmation et le contrôle d’une activité) mais
également sur le plan des fonctions sensori-motrices
• Des aptitudes correctes en langage (aspect structurel)
excepté sur le plan de la compréhension des consignes
un peu longues ou complexes (capacité de synthèse)
Bilans et observations (suite)
• Sur le plan psycho-affectif, ce qui se dégage du bilan :
• Le dessin libre nous indique l’insistance de l’enfant à se réfugier dans ses
intérêts répétitifs , à savoir dessins de serpents ou de dinosaures avec
une connaissance surprenante du lexique qui s’y rapporte …… le dessin est
soigné (même si le geste graphique est un peu maladroit) avec un souci
de réalisme
• Le dessin de famille évoque une image du corps encore immature,
faiblement différenciée (peu marquage des repères générationnels et
sexués)
• Le dessin de soi ( grand souci de correspondance avec la réalité)
• L’analyse des protocoles des tests thématiques : recherche d’adaptation
et de conformité à la réalité perçue, imaginaire faible, de nombreuses
énumérations, mais également des
éléments anxieux et dépressifs
repérés (environnement perçu comme menaçant, sentiment d’isolement
ou de rejet, image de soi fragile et sans défense dans la confrontation aux
autres). Le langage utilisé est marqué par des répétitions, des débuts ou
des fins de phrases très stéréotypées.
• L’épreuve de Sally et Ann : bonne adaptation à la notion de « théorie de
l’esprit »
• Le bilan orthophonique ne révèle aucun trouble
phonologique, ni syntaxique mais principalement des
difficultés de compréhension sémantico- pragmatique :
Gabriel ne prend pas toujours en compte la question posée,
se répète ou pose une question pour laquelle il a déjà la
réponse… . Il fait beaucoup de digressions, raconte des
anecdotes sans rapport avec le sujet…. Il utilise souvent des
phrases plaquées, a beaucoup de mal dans la réciprocité des
échanges verbaux
• La mémoire immédiate est excellente, la lecture est fluide
mais l’accès à la compréhension doit être soutenu (n’accède
pas aux « jeux de mots » ou à l ‘utilisation d’un langage imagé
ou métaphorique)
• l’enfant est décrit comme très volontaire (grande envie de
bien faire) mais facilement réactif face à la difficulté
(réactivité sur un mode inquiet, inhibant toute capacité de
persévérance et d’analyse)_ Besoin d’étayage +++
• le biais de la manipulation d’objets ou d’ image (utilisation de
matériel, de personnages, d’objets) facilite considérablement
l’adhésion de l’enfant à la rééducation
• Sur le plan scolaire: (bilan enseignants)
• Il a acquis tous les automatismes (lecture,
dénombrement,
règles
de
grammaire
ou
d’orthographe) mais l’application est difficile
• A beaucoup de mal à produire seul (bloque devant
les consignes qu’il semble ne pas « décoder »)
• S’angoisse face à tout ce qui est abstrait (maths par
exemple) ;
• Prend tout « au pied de la lettre »
• La problématique de compréhension des consignes
orales et écrites et le raisonnement semblent au
premier plan des difficultés et s’associent à une
problématique d’ajustement relationnel notamment
dans la classe (mieux en récréation : recherche les
autres)
Quelles demandes
quelles attentes ??
• Des parents : ne pas l’exclure du milieu
ordinaire – soulager son « mal-être » demande d’aides « spécialisées » …
• De l’enfant : « je voudrais être comme mes
copains » (conscience des difficultés)
• Des enseignants : comment l’aider à
apprendre et à trouver sa place dans la classe
?? Aménagements des attentes ???
diagnostic…. et perspectives
le trouble sémantique-pragmatique se dégage de l’ensemble
des observations et bilans, qui mettent l’accent sur cette
dimension relative à la difficulté spécifique à intégrer et
s’inscrire dans les codes en jeu dans la communication verbale
la dimension psychopathologique est toutefois considérée
(troubles de l’ajustement de la relation, éléments anxieux et
dépressifs, restrictions ou difficultés d ’ investissement et
d’adaptation), et sera envisagée comme conséquence du
trouble du langage et des troubles d’apprentissages associés
Une orientation vers l’équipe du CMPP est organisée
(notamment pour la prise en charge psychothérapeutique et
psychomotrice)
avec poursuite de la rééducation
orthophonique entreprise en libéral ;
Des contacts seront maintenus avec l’équipe de soins afin de
suivre l’évolution de cet enfant.
Quel impact de l’évaluation sur l’enfant et sa
famille ??
• La participation des parents au cheminement de
l’équipe semble avoir contribué à apaiser leur
« posture » :
• non plus « paralysés » dans l’attente inquiète mais
pris dans une dynamique permettant l’avancée vers
des « possibles » tout en intégrant la sévérité, la
durabilité du trouble et les nécessités de « penser »
l’avenir de la manière la plus adaptée aux besoins de
leur enfant.
Pour l’enfant…
• Une possibilité d’être sujet d’un apprentissage
qui doit venir s’inscrire dans une perspective
« adaptative » par rapport aux particularités
repérées chez l’enfant (les attentes scolaires
seront revisitées et les supports réaménagés)
une demande d’AVS sera envisagée
• Une ouverture vers des interactions
simplifiées avec l’entourage proche :
la
compréhension du trouble devrait permettre
une meilleure adaptation relationnelle
Pour les enseignants….
• Une communication simplifiée avec les
parents : un repositionnement des attentes et
du rôle (et des limites) de chacun : effets
apaisants
dans
les
interactions
parents/enseignants
• Une possibilité d’entrevoir des perspectives
d’aide en collaboration plus étroite aves les
différents
partenaires….
(orthophoniste,
équipe de soins)
• Une « déculpabilisation » par rapport aux
particularités et « déviances » dans le mode
d’apprentissage de l’enfant
CONCLUSIONS :
• Regards croisés
• Temporalité
• Questionnement théorique et conceptuel : se
saisir des outils pour penser et cheminer, et
non comme un parti- pris idéologique
• La question de la psychopathologie et des
manifestations de souffrance de l’enfant :
indispensable à considérer y compris dans les
situations de troubles dits « spécifiques »…
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