Introduction
Au commencement était l’Afrique, tel
pourrait être le début de toute description
de la fièvre catarrhale ovine. On ne sait
pas précisément depuis quand la maladie
est présente sur le continent, mais on sait qu’elle a
été décrite en 1876 sur des moutons Mérinos
importés en Afrique du Sud. On parlait alors de
fièvre sur des moutons durant l’été. La mortalité
atteignait alors 90 %. En 1881, Hutcheon parla de
«catarrhe épizootique» chez les moutons et en
1893, on lui doit la première description détaillée
mais c’est Spreull (1906) qui fut le premier à
conduire une étude en profondeur de cette mala-
die que les Afrikaans appelaient Bloutong.
Avant sa découverte en 1943 à Chypre, la maladie
n’était connue qu’en Afrique.
Les pays africains qui s’en préoccupent sont ceux
où il existe quelques élevages intensifs de mou-
tons, c’est-à-dire principalement au nord et au sud
du continent. Par conséquent, on ne dispose que
de peu d’information sur la situation épidémio-
logique de la fièvre catarrhale ovine en Afrique.
Seuls 24 pays ont signalé la maladie avec une très
grande irrégularité des notifications par les services
vétérinaires.
Toutefois, compte tenu des conditions météorolo-
giques, on sait que la très grande partie du
continent se trouve dans une zone endémique ;
seules les deux extrémités du continent, le sud de
l’Afrique du Sud et le nord des pays d’Afrique du
Nord, sont dans une zone à épidémie régulière. En
effet, cette zone offre des conditions climatiques
favorables au principal vecteur de la maladie,
Culicoides spp. En Afrique C. imicola et C. bolitinos
semblent être les plus abondants.
D’après le laboratoire mondial de référence basé à
Pirbright (Royaume-Uni), c’est en Afrique (et dans
le sous-continent indien) que l’on trouve le plus
grand nombre de sérotypes : 21 sur 24, princi-
palement en Afrique subsaharienne. En 2009, le
sérotype 1 était commun à tous les pays du
Maghreb mais pas de façon exclusive.
En Afrique, les formes cliniques de la maladie sont
signalées surtout chez le mouton (les races
améliorées) alors qu’elle semble asymptomatique
chez les races ovines locales, les caprins et les
bovins qui servent de réservoir. En effet, les races
locales de moutons semblent être plus résistantes
et la fièvre catarrhale ovine est d’importance
secondaire. Les dromadaires peuvent être porteurs
du virus sans exprimer la maladie. Chez les ani-
maux sauvages, la fièvre catarrhale ovine semble
asymptomatique même si des anticorps ont été
retrouvés chez les buffles, les gazelles à poche
dorsale (qu’on ne trouve qu’en Afrique Australe) et
les impalas.
Les premiers vaccins pour lutter contre la fièvre
catarrhale ovine furent developpés en Afrique du
Sud. Spreull (1902, 1905) recommanda d’immuni-
ser les animaux grâce à l’administration simultanée
d’un antisérum et du sang provenant d’animaux
virémiques. Puis, Theiler (1906) initia l’ancêtre des
vaccins vivants en proposant d’atténuer le virus
par passages successifs sur le mouton. Alexander
(1940) est à l’origine du premier vaccin polyvalent,
produit sur œufs embryonnés. Vingt ans plus tard,
c’est Howell et Erasmus qui mirent au point le
vaccin vivant pentavalent composé de trois
flacons, lequel fut importé en Europe après 1998.
Depuis, l’Onderstepoort Veterinary Institute
(Afrique du Sud) est resté pionnier dans les
vaccins vivants qui sont le seul type de vaccin
utilisé sur le continent.
Toutefois, ces vaccins vivants présentent une
importante restriction qui en fait des vaccins
difficiles à utiliser sur tout le continent : il est en
effet recommandé de l’utiliser en dehors des
saisons du vecteur. Or, seule l’Afrique du Sud peut
prétendre à une véritable période hivernale où il
n’existerait que très peu de vecteurs pour propager
le virus vaccinal qui pourrait être à l’origine de la
diffusion de la maladie.
Dans tous les cas, les moyens de lutte sont aussi
disparates que quasi inexistants pour la plupart
des pays : seuls quelques pays engagent des
moyens de lutte. En Afrique du Sud, le berceau de
la fièvre catarrhale ovine, le célèbre Onderstepoort
Veterinary Institute est en charge de la surveillance
et de la production de vaccins vivants. Biopharma,
un laboratoire marocain, produit des vaccins
vivants utilisés au Maroc et en Tunisie. L’Algérie est
l’un des rares pays à ne se concentrer que sur la
lutte contre le vecteur ; la vaccination est interdite
ainsi qu’en Égypte et en Angola.
Pour certains pays (Angola, Lesotho, Madagascar,
Botswana, Togo et Nigéria), la fièvre catarrhale
ovine est à déclaration obligatoire pour toutes les
espèces sensibles y compris les animaux de la
faune sauvage (buffles et animaux sauvages).
Il existe également un réseau de surveillance en
Afrique du Sud, au Lesotho, au Maroc et en
Tunisie.
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