Virulence chez les microparasites et les macroparasites-Aspects évolutifs Jacques Cabaret et Sabrina Gaba Équipe d’Écologie et de Génétique des Parasites – INRA Tours e-mail : [email protected] 1 Définitions • • • • Pathogène, commensal, symbionte Micro et Macroparasites Fitness et R0 Virulence et pathogénicité 2 Mutualisme/commensalisme/ pathogène -Commensalisme: association entre un « parasite » et un organisme supérieur; ne cause aucun dommage -Mutualisme : association mutuellement bénéfique Symbiose : Wolbachia chez les filaires -Pathogène : cause ou peut causer un dommage Casadevall et Pirofski, 2000, Infection and Immunity 3 Quelques Définitions Microparasite versus Macroparasite Microparasites : - bactéries, virus, protozoaires - temps de génération court - multiplication directe dans l’hôte=infectieux - induisent une réponse immune (intracellulaires: TH1) Macroparasites : - helminthes, arthropodes - temps de génération plus long - pas de multiplication directe dans l’hôte=infestant - induisent une réponse immune (extracellulaires: TH2) 4 Adapté de Anderson et May (1991) Infectious disease of Humans Oxford Quelques Définitions Succès reproductif ou fitness Capacité des individus d’un certain type à survivre et à produire des descendants Fitness = survie * fécondité ADULTES ZYGOTES Type A Type B Gamètes ZYGOTES MORT MORT Evolutionary Genetics- J. Maynard Smith 1989 Oxford University Press Fitness de A =2/3 survivent x 4 zygotes formés = 8/3 Fitness de B =½ survivant X 1 zygote = 1/2 5 Fitness absolue /relative/-génotype Fitness marginale -gène • C’est une propriété d’une catégorie d’individus, d’un génotype (pas d’un individu ou d’un gène seul) • Ca ne vaut que pour un environnement donné • Cela ne concerne qu’une génération et se définit de façon plus complexe lorsque les générations sont chevauchantes (R0 = taux reproductif net) 6 Quelques Définitions Le taux de reproduction net R0 Capacité intrinsèque du parasite à produire des descendants Croissance de la population si R0 > 0 R0= Σlx*mx lx = probabilité qu’une femelle survive jusqu’ à l’âge x, et mx = nbre de descendants femelles/par femelle d’âge x Microparasites: nombre moyen d’infections secondaires produits quand un individu infecté est introduit dans une population d’hôtes sains Macroparasites: nombre moyen de descendants qu’une femelle peut produire et qui peuvent se reproduire en absence de contraintes de densité-dépendance 7 Anderson et May (1991) Infectious disease of Humans Oxford L’effet pathogène … Ensemble des conséquences de la présence de l’organisme étranger dans l’organisme hôte. ex : amaigrissement d’une vache suite à une infestation par la grande douve du foie Fasciola hepatica … et la VIRULENCE Conséquences de la présence de l’organisme étranger sur la transmission des gènes de l’organisme hôte En écologie, virulence = diminution du succès reproducteur Plus un pathogène est virulent, plus la descendance de son hôte sera faible et plus la transmission des gènes de cet hôte à la génération suivante sera faible. 8 Mesure de la virulence Soit par une de ses composantes telle que la mortalité (Ebert et Mangin 1997) Soit de manière indirecte par l’effet pathogène Effet pathogène est essentiel à l’échelle de l’individu (ex le malade) MAIS c’est la virulence qui est important lorsqu’on se place au plan de l’évolution (Combes 2000) 9 détails dans Poulin et Combes Parasitology Today 1999 Virulence Degré de pathogénicité (capacité à produire une maladie), Sévèrité de la maladie, Capacité à déjouer les défense de l’hôte Capacité à réduire la fitness de l’hôte Capacité d’entrer et de se multiplier dans un hôte Casadevall et Pirofsky, 1999, Infection and immunity 10 Virulence -Classe 1 : cause des dommages seulement si la réponse de l’hôte est faible: Pneumocystis , Legionella n=4 -Classe 2 : cause dommage chez hôte à réponse faible ou au cours de la mise en route d’une réponse immune normales : Plasmodium, Toxoplasma, Candida, Listeria, Borrelia, Virus hépatite A n=38 -Class 3 : cause dommage durant la mise en place d’une réponse immune appropriée (en début et fin) : Leishmania, Salmonella, , Escherichia coli O157:H7, AIDS n=21 -Classe 4 : cause des dommages en cas de faible ou forte réponse immune: Aspergillus, Vaccine n=2 -Classe 5: cause dommage au cours dela réponse immune normale, mais plus important en cas de forte réponse de l’hôte : Schistosoma, Trypanosoma, Poliovirus, n=8 -Classe 6 : cause dommage seulement en cas de forte 11 Réponse de l’hôte : Helicobacter pylori, Maladie de Crohn n=2 Virulence • De la part du pathogène • De la part de l’hôte • • • • • • • • • • Opportunistes Pathogène faible Pathogène + fort Pathogène faible Pathogène fort Immunodéprimés cl1 Réponse immune faible cl2 R. immune faible/forte norm. cl3 R. immune faible/forte anorm cl4 R. immune normal/grave forte Cl5 • R. immune grave si forte Cl6 12 Virulence multiplication/ virulence pathogénie • Le premier type: n’a pas de valeur sélective systématique sur l’hôte • Le second type : a valeur sélective d’autant plus que l’action pathogène est forte (si réduit fitness ou R0) 13 Evolution de la virulence 14 Notion de virulence optimale Pourquoi les parasites nuisent-ils à leurs hôtes si un hôte vivant et sain est bénéfique à leur transmission ? Forte virulence du parasite transmission du parasite survie de l’hôte Diminution du SR du parasite Compromis entre virulence et transmission 15 Le modèle « Trade-off » 16 dans Ebert et Bull (2003) TRENDS in Microbiology vol 11 n°1 Conséquences du modèle « Trade-off » Virulence forte Virulence faible Mutualisme Toutefois sélection naturelle maximise le succès reproducteur donc Pas de raison pour que la virulence diminue 17 Exemple de la myxomatose dans la population de lapins en Australie 18 Cycle de la myxomatose 19 Contrôle de populations virus Myxoma virus 1950 : introduction du virus pour contrôles des populations trop prolifiques Diminution des effectifs Diminution de l’impact de la maladie dans le temps 20 Suivi des souches de virus + virulente - virulente 21 Anderson et May (1991) Infectious disease of Humans Oxford Conclusions Succès du parasite ne nécessite ni une évolution vers une faible virulence ni vers une forte virulence Coévolution peut suivre plusieurs voies en fonctions de la relation entre la transmission et la virulence du parasite Absence de prise en compte de la présence conjointe de plusieurs génotypes du parasites 22 Exemple du Cholera 23 Etiologie Maladie endémique en Inde et endémo-épidémique en région tropicale Jusqu’à 1010 vibrions par ml de selles 24 d’après Guegan 2004 Transmission de la maladie Est-ce que ces cycles sont associés à des augmentations de virulence? 25 Dans Guégan 2004 Transmission de la maladie 26 dans Guegan 2004 Transmission de la maladie 27 d’après Colwell ENSO El Niño Southern Oscillation est un système d’interactions entre l’océan Pacifique et l’atmosphère au-dessus. L’état du système ENSO fluctue d’années en années. Une manière d’observer les fluctuations est d’observer les changements de température de surface de l’océan Pacifique. 28 ENSO 29 dans Rodo et al. (2002) PNAS vol 99 pp12901-12906 ENSO et les pics de cholera 30 dans Rodo et al. (2002) PNAS vol 99 pp12901-12906 Conclusions Environnement Conception Dynamique Pathogène Hôte 31 d’après Guégan 2004 Conclusions Variabilité inter annuelle du climat Lien non-stationnaire Augmentation de la transmission Augmentation de la virulence 32 Virulence et Cycle Complexe 33 Cycle complexe Les parasites à cycle complexe ont 2 ou + hôtes Hôte intermédiaire : lieu de multiplication asexuée du parasite et/ou lieu de développement des stades juvéniles Hôte définif : Lieu de reproduction sexuée Le modèle trade-off est-il toujours valide? 34 Exemple de la bilharziose 35 Etiologie Bilharziose ou schistosomiase = helminthiase Trématodes appartenant au genre Schistosoma Maladie tropicale / 2 formes urinaires et intestinales 4 espèces de Schistosoma 36 Cycle de vie du parasite Cycle de vie mammifère cercaire mollusque d’eau douce œufs miracidium 37 Évolution de la virulence Schistosoma mansoni – Biomphalaria glabrata - Souris Taux de reproduction Nombre de cercaires Virulence du parasite Augmentation de la mortalité Taux d’infestation Nombre de vers dans le foie et les reins Taux de reproduction Estimation de la production de Miracidia 38 Davies et al. (2001) Proc. Roy. Soc. Lond. B 268 pp 251-257c Évolution de la virulence (2) Schistosoma mansoni – Biomphalaria glabrata - Souris Taux de reproduction Pouvoir infestant Virulence du parasite & Succès reproducteur du parasite dans HD + Transmission Virulence associée à une forte reproduction 39 dans Rodo et al. (2002) PNAS vol 99 pp12901-12906 Conclusions Schistosoma mansoni – Biomphalaria glabrata - Souris Trade-off entre reproduction et fitness entre les deux hôtes Difficulté du contrôle des transmissions 40 dans Rodo et al. (2002) PNAS vol 99 pp12901-12906 Exemple de la stratégie hitch-hiker 41 Manipulation comportementale des hôtes intermédiaires Parasites induisent des altérations physiologiques ou comportementales chez leur hôte Reflet d’effets secondaires Bénéfique pour le parasite Non Adaptative Adaptative 42 Manipulation comportementale Génome de l’hôte Phénotype modifié de l’hôte Génome du parasite Phénotype Etendu (Dawkins 1992) 43 La FAVORISATION SELECTION PARASITE Fitness Manipulation de son hôte Transmission 44 Combes (1991) Am. Nat. 138 pp 866-880 Transmission trophique (PITT) PROIE PREDATEUR Hôte Définitif Hôte Intermédiaire non parasité Hôte Intermédiaire parasité 45 Lafferty (1992) Am. Nat. 140 pp 854-857 La stratégie hitch-hiker Œufs Gammarus insensibilis 46 Thomas et al (1997) Evolution 51 pp1316-1318 3 parasites et 1 cycle Non manipulateurs Maritrema subdolum Microphallus hoffmani Manipulateur Microphallus papillorobustus 47 Thomas et al (1997) Evolution 51 pp1316-1318 Association des parasites Prévalence hitch-hiker M. subdolum + M. papillorobustus M. hoffmanni + M. papillorobustus S* NS lucky passenger 48 Thomas et al (1997) Evolution 51 pp1316-1318 Conclusions Augmentation de la transmission de M. subdolum sans augmentation de la virulence 49 Thomas et al (1997) Evolution 51 pp1316-1318 Superparasitisme et le virus manipulateur 50 Parasitoïdes Etape clé du parasite : rencontrer son hôte Parasitoïdes = insectes dont la larve se développe en se nourissant du corps de son hôte qui est généralement lui aussi un insecte ( Godfray 1994) 51 Godfray (1994) Parasitoids Behavioral and Evolutionary Ecology. Princeton University Press Stratégie de ponte Hôte sain Où pondre? Hôte parasité Compétition extrême entre larves superparasitisme Capacité de discrimination Nombre d’hôtes Van Alphen et Visser (1990) Van Lenteren (1981) 52 Exemple du trio Leptopilina boulardi Leptopilina heterotoma Bcp de superparasitisme Peu de superparasitisme Drosophila simulans Pas de gain ? 53 Varaldi et al. 2003 Science 302 pp 1930 Exemple du trio Analyse génétique : transmission maternelle du superparasitisme Traitements antibiotiquesNégatifsRecherche de microsporidies Microscopie électronique virus Transmission verticale & horizontale 54 Varaldi et al. 2003 Science 302 pp 1930 Coopération ou conflit Le superparasitisme serait-il alors bénéfique à la fois pour la virus et pour la parasitoïde ou existe-t-il un conflit d’intérêt? 55 Varaldi et al. 2003 Science 302 pp 1930 Modélisation Virus n’a pas d’effet sur la parasitoïde Trois hypothèses Virus induit un comportement de superparasitisme sans transferts horizontaux Virus induit un comportement de superparasitisme dont 60% entraîne des transferts horizontaux 56 Varaldi et al. in prep Modélisation : résultat & conclusions Maintien du virus si il induit un comportement de superparasitisme Donc Rôle des microorganismes symbiotiques dans la capacité des espèces à envahir certaines communauté Modification de comportement ne résulte pas forcément en une adaptation du parasite à augmenter sa transmission Complémentarité des études génétiques et de modélisation pour mieux comprendre la variabilité de certains traits 57 Varaldi et al. in prep Conclusions 58 Conclusions sur l’évolution de la virulence Ne se résume pas qu’au modèle Trade -off Parasite complètement évolué peut être nuisible pour son hôte Augmentation de transmission n’est pas forcément synonyme d’augmentation de virulence Emergence de nouvelles théories Ex « coïncidal evolution » ou « short sighted evolution » 59 Levin (1996) Emerging Infectious Disease vol 2 n°2 pp93-102