ENVI-F-409 Aspects économiques de l’environnement Séance 1 (2008-2009) : 28 Février 2009 Tom Bauler – [email protected] Support internet : http://tbauler.pbwiki.com Objectifs et limites du cours • Montrer comment on peut intégrer l’environnement naturel dans les conceptualisations et modèles économiques. Montrer les opportunités que présentent la science économique pour ajouter une perspective utile, parfois originale, à la résolution des problèmes environnementaux. • Montrer la diversité d’écoles et d’approches. • Montrer la diversité des outils manipulés, et discuter leur performance. • Montrer les limites et les questions non résolues dans le couple économie-environnement. • il ne s’agit pas d’un cours de gestion environnementale (management), même si 1 séance sera consacrée à ces outils. • cours à ouverture multidisciplinaire; sans prérequis. • (Personnellement : ecological economics, qui est la branche / courant/ école la moins ‘économistique’ dans le traitement du couple E&E) Organisation • 9 séances en tout (13/02 est annulé), dont 2 séances consacrées à des extérieurs : – 1ier avril : Arnaud Brohé, l’économie du climat et ses outils de gestion (ex. emission trading systems)… – 1 séance dédiée aux systèmes de gestion environnementaux (EMAS, ISO14001…) en entreprises et administrations. • Pas de syllabus ! • Site internet d’accompagnement : http://tbauler.pbwiki.com. Reprend toute information utile/nécessaire/indispensable : slides à télécharger; lectures complémentaires et textes à télécharger; références de manuels ‘testés et approuvés’; liste de ‘mots clés et concepts indispensables’ à connaître. • Manuels en bibliothèque (toujours utile d’en avoir un à la maison). • Examen écrit. Questions de compréhension et de discussion, dont 1 question relative à un texte mis à disposition sur le wiki. Donc : lire et comprendre ce texte avant d’arriver à l‘examen! Table des matières – séance 1 • 0° Introduction • 1° Vocabulaire de base • 2° Représentation du système économique dans l’environnement 0° Introduction Etymologie • ‘Économie’ et ‘écologie’ : racine identique. Oikos. Grec ancien: ‘maison’, ‘foyer’, ‘ménage’, voire ‘famille’. • Oikonomia, est la gestion de la maison, du foyer, du ménage… dans certains cas d’exploitations agricoles : gestion agricole, i.e. gestion de la terre. Oikonomos: maître d’hôtel, concierge • Écologie, oikos en combinaison avec –logia (i.e. l ’étude de). Oikologia est donc l’étude du fonctionnement de la ‘maison’ (dans le sens: Terre). Les bases de la relation Envi&Economie Les classiques : découverte du rôle productif de la terre • Adam Smith (1770), « La Richesse des Nations » : notion de ‘main invisible’, le progrès est animé par la somme des recherches individuelles de bien-être (i.e. amélioration des conditions de vie). Conséquence : allocation des ressources efficace. • Thomas Malthus (1798): frein principal au progrès est la finitude des ressources, e.g. rendements agricoles sont décroissants car rareté des surfaces agricoles si combinés à une évolution démographique positive. Conséquence : économie de survie et économie stationnaire (‘steadystate’). • David Ricardo (1817): notion des avantages comparatifs mutuellement bénéfiques. Finitude des ressources (tj en termes de ‘terres agricoles’) n’est que relative, car soutenue par intensification (progrès technique) et extensification agricoles. Conséquence : économie stationnaire. • John S. Mill (1857) : continuité de la reconnaissance des rendements décroissants, mais: à nuancer par l’influence du progrès technique (notamment énergie exosomatique) et importations. Conséquence: économie stationnaire, mais à un niveau de confort assez haut. Première reconnaissance des ‘amenities’ négatives (bruit, pollution, valeur esthétique…), dont conséquence : simplicité volontaire. Les néoclassiques : l’amnésie collective du rôle de la terre • Progrès technique, rendements décroissants, rareté relative… le facteur ‘terre’ n’est plus limitatif : hausse rareté hausse de prix du facteur. Importance de l’efficience des échanges. 1900 à 1965, plus mention d’éléments ‘naturels’ dans les fonctions de production. • Vilfredo Pareto (1900) : Pareto efficience/optimum; situation d’échange est optimale si impossible d’augmenter le bien-être d’un agent sans en affecter un autre négativement. Sous conditions, cette situation est atteinte uniquement dans une situation de marché libre. (aussi : principe de Pareto). • Arthur C. Pigou (1920) : reconnaissance du rôle de l’Etat dans la construction des équilibres. Interventions étatiques, levées de taxes « pigouviennes » pour palier aux défaillances du marché, notamment aux externalités. • 1970 apparition de 2 préoccupations, qui se développent en branches à part entière de la science économique : – économie des ressources naturelles; extractions efficientes des ressources (minières, forestières…, renouvelables, épuisables…). – économie de l’environnement; insertion de l’environnement dans l’économie, surtout en termes d’impacts (i.e. pollutions comme nouveau facteur limitant du développement). • 1985 construction d’une branche alternative à l’économie des res.nat. et de l’envi. Reconnaissance de la spécificité des problèmes environnementaux : mise en question de certains principes néoclassiques fondamentaux, et insistance sur le développement d’outils spécifiques pour traiter l’environnement. Ecological Economics. Problème de régulation économique de l’envi. : absence de marché/prix des services environnementaux Prix (par unité) Offre (fixe) P* Q* Q Services environnementaux (quantité disponible) Les notions clés Possible d’énumérer certaines notions- et questions-clés de l’étude de l’économie dans le domaine environnemental : • Horizon temporel ? Environnement impose de pouvoir intégrer le très long terme et l’irréversibilité dans les décisions, ex. ressources nonrenouvellables, équité intergénérationnelle... • Efficience de l’allocation des ressources et la distribution de leurs droits de propriété? Permettre au marché de devenir la ‘machine à allocation efficiente des ressources’ en surmontant les difficultés fondamentales liées aux biens et services environnementaux. • Substitution entre facteurs et capitaux? Certaines fonctions environnementales sont critiques à long terme, i.e. ont un impact sur la pérennité de la société, ce qui limite leur substituabilité. Attitudes fondamentales – Paradigmes Le couple Environnement&Economie génère 4 attitudes fondamentales : • « Préservation », Nature est à préserver dans son intégrité la plus profonde. Aucune interrelation E&E n’est permise. Éthique s’applique aux non-humains (même aux éléments non-vivants), sans hiérarchie avec les humains. Deep Ecology. • « Efficience », Nature est régulée par les marchés et la recherche d’efficience des agents. Éthique basée sur l’utilitarisme; les analyses coûts-bénéfices déterminent les allocations optimales et permettent des substitutions parfaites. • « Conservation », Nature comporte des éléments critiques qui imposent des limites à la croissance. Équité intergénérationnelle plus importante que intragénérationnelle. État stationnaire/décroissance. • « Durabilité », Nature impose des contraintes fortes, mais une certaine adaptation des sociétés est possible. Équité inter- et intragénérationnelle sur un même plan. 1° Vocabulaire de base Biens privés et biens publics • Problèmes environnementaux aussi liés à l’existence d’un gradient entre biens&services publics et privés. Les biens publics sont : • Non-excluables : il est impossible d’empêcher un agent de consommer ces biens&services. • Non-rivaux : la consommation de ce bien par un agent n’empêche pas un autre agent de consommer le même bien • charactéristiques déterminées par les droits de propriétés éventuels, et par la nature du bien. Excluabilité Non-excluabilité Rivalité Bien privé pur Bien commun Non-rivalité Bien de club Bien public pur Freeriding et tragedy of the commons: déterminer l’offre efficiente de biens publics £, €, $ Coût marginal Q* Quantité (du bien public) Freeriding et tragedy of the commons: • Détermination des courbes de CàP est difficile, car comportements stratégiques des agents/consommateurs: passagers clandestins. • Conditions : a) quantités identiques de consommation du bien public; b) situation de non-excluabilité; c) 2 consommateurs; d) 1 bien public. • Exemple : installation d’un parc urbain public Consommateur A Achète Consommateur B N’achète pas Achète 1010 / 1010 960 / 1060 N’achète pas 1060 / 960 1000 / 1000 • Vu des consommateurs, stratégie dominante doit être « n’achète pas ». • Déclaration des CàP, et taxe proportionnelle, induira une sous-déclaration des 2 agents. Avec une taxe égalitaire, une sur-déclaration. Services écosystémiques et valeur économique totale • Domaine où les interactions disciplinaires sont fortes: détermination et classification des valeurs de la Nature. • Exercice en cours au niveau européen du TEEB – The Economics of Ecosystems and Biodiversity, avec l’objectif d’un rapport Stern pour la Biodiversité et ses fonctions, distingue 4 fonctions générales dans cet exercice (voir aussi : Millenium Ecosystem Assessment) : – Services d’approvisionnement (nourriture, eau, bois, fibres…) – Services de régulation (climat, eau, maladies, inondations, sécheresse…) – Services d’appui (cycles nutritifs, sol, production primaire…) – Services culturels et d’agrément (esthétique, spirituel, récréationnel…). Services écosystémiques et valeur économique totale Il existe d’autres typologies, certaines plus fines : – Barbier (1994 in Land Economics) construit 4 fonctions qu’il nomme « essentielles en support à la vie » : regulation, production, carrier, information. – Costanza (et al. 1997 in Science) utilise 17 services combinés des fonctions : gas-, climate-, disturbance-, water-regulations, water supply, erosion control, soil formation, nutrient cycling, waste treatment, polination, biological control, refugia, food production, raw materials, genetic resources, recreation, cultural. – Turner (et al. 2000, CSERGE) intègre structure, fonctions et processus des écosystèmes. Adapté de: Turner et al (2000), Ecosystem functions and services : an integrated framework and case study for environmental valuation, CSERGE working paper GEC 2000-21. Sur base de: Costanza Robert, Ralph d’Arge, Rudolf de Groot, Stephen Farberk, Monica Grasso, Bruce Hannon, Karin Limburg, Shahid Naeem, Robert V. O’Neill, Jose Paruelo, Robert G. Raskin, Paul Sutton, Marjan van den Belt (1997), "The value of the world’s ecosystem services and natural capital", in : NATURE, VOL387 : 253-260 Services écosystémiques et valeur économique totale (De Groot et al, 2006) Aménités positives et négatives • A partir de certaines fonctions ou services écosystémiques, possible d’identifier une série d’impacts positifs (ou négatifs) sur les fonctions d’utilité des agents. • Une aménité peut être tangible ou pas; elle constitue un bien ou une caractéristique d’un bien qui augmente (ou diminue) la valeur d’un autre bien ou service parce qu’elle procure plaisir (ou gène); p.ex. le silence dans une forêt; les rayons solaires sur une plage, l’odeur des fleurs… • Dans la négative, une aménité induit une gène. Certains impacts environnementaux négatifs présentent en plus une aménité négative; ex. odeurs d’une décharge… • (le concept est quelque peu usé, car peu opérationnel, car peu précis: ex. une même aménité peut être positive pour A, négative pour B. Il a été remplacé largement par les notions de services et fonctions écosystémiques, mais on utilise encore le vocable pour désigner l’attrait contemplatif de certains éléments de la nature) Différents capitaux • Pour construire les fonctions de production d’une économie, on différentie en : – Capital naturel; référence au stock de biens qui génère les services écosystémiques. – Capital physique; réfère au biens physiques manufacturés nécessaires à la production (ex. usine, machines…). Il est influencé par les investissements réalisés dans la firme. – Capital humain; stock de connaissances et apprentissages des travailleurs/employés, en relation directe avec leur productivité. – Capital intellectuel / technologique; stock de connaissances et informations de la firme, ex. les brevets, et de la société tout court, ex. le stade technologique. • Pour simplifier, dans les fonctions de production, on distingue généralement entre capital manufacturé (Σ (c.physique, c.humain, c.intellectuel)) et capital naturel; certaines références (hors économie) utilisent aussi capital humain (Σ (c.physique, c.humain, c.intellectuel)) vs capital naturel. 2° Représentation du système économique dans l’environnement Formes de représentation du couple E&E Énergie Matières Énergie Le « monde » vide : lecture économique classique Individual Utility/welfare Property rights Private Public Consumption Building Education, Training, Research Improvement (based on fixed preferences) Manufactured capital Labor Land Economic Process GNP Goods and Services Cultural Norms and Policy Investment (decisions about, taxes government spending, education, science and technology policy, etc., based on existing property rights regimes) source: Costanza, R., J. C. Cumberland, H. E. Daly, R. Goodland, and R. Norgaard. 1997. An Introduction to Ecological Economics. St. Lucie Press, Boca Raton, 275 pp. Interactions basiques au sein du couple E&E Énergie Système environnemental (Services écosystémiques) Système économique Utilité K Capitaux (stock) I Ressources (stock) + C Production Consommation L Déchets (puits) - Aménités Le monde “plein” : une conception ecological economics positive impacts on human capital capacity being, doing, relating Ecological Complex property services/ rights regimes amenities Individual Common Solar Energy Restoration, Conservation Education, training, research. Institutional rules, norms, etc. Building Well Being (Individual and Community) having, being doing, relating - having, - being Public Wastes Natural Capital Human Capital Economic Production Process SocialCapital GNP Goods and Services having Consumption (based on changing, adapting preferences) Evolving Cultural Norms and Policy Investment Manufactured Capital negative impacts on all forms of capital Materially closed earth system (decisions about, taxes community spending, education, science and technology policy, etc., based on complex property rights regimes) Waste heat source: Costanza, R., J. C. Cumberland, H. E. Daly, R. Goodland, and R. Norgaard. 1997. An Introduction to Ecological Economics. St. Lucie Press, Boca Raton, 275 pp. Multiples dimensions de la valeur d’une ressource • Combiner les notions vues, l’exemple d’une forêt; complexité&discussion : Output Service Utilisateurs Rivalité Excluabilité Marché Bois coupé Input Entreprise Rivalité Excluable Marchandisé Arbres Aménité Ménage Non-rivalité Non-excluable Non-march. Minéraux I E R E M Flore I, A, S E, M R, NR E, NE M, NM Faune I, A, S E, M R, NR E, NE M, NM Prot. inondations Support E, M NR NE NM Qualité de l’eau D, A, I E, M R, NR E, NE NM Protection du sol S, I E NR NE NM Climat local S E, M NR NE NM E, M NR NE NM Séquest. Carbone Déchet, S Adapté de: Perman et al (2003), Natural resource and environmental economics. Pearson.