Ferdinand

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Histoire des États
germaniques : Le
Saint-Empire
Septième cours :
De la paix d’Augsbourg (1555) à
la Germanie westphalienne
Septième cours :
1 — Réforme et radicalisation
2 — La guerre de 30 ans
3 — Les « derniers » Habsbourg
1 — Réforme et radicalisation
1.1 — Les autres protestantismes
• À une situation déjà complexe s’ajoute dès les années 1520
une autre difficulté : à partir du moment où l’Église ne
dispose plus du monopole de l’interprétation des textes va
se produire une multiplication des interprétations.
• Luther a tracé la voie, mais nombreux sont ceux qui, en
empruntant celle-ci, considèrent que Luther ne va pas
assez loin.
• Il y eut le muntzérisme, une forme de contestation sociale
radicale proposée par Thomas Müntzer, jadis un ami proche
de Luther.
• Son mouvement ne connaitra pas une longue prospérité, le
prédicateur tombant lui-même en 1525 lors de la répression
de la guerre paysanne.
• D’autres
formes
de
protestantisme
auront
des
conséquences plus importantes sur l’évolution politique et
vont provoquer la radicalisation du parti catholique. Ou
inversement. Deux de ces formes sont germaniques, l’autre
sera une importation française.
• Si la réflexion d’Ulrich Zwingli est d’abord religieuse, elle
prend des formes politiques qui s’expliquent par la situation
politique ambigüe des cantons.
• Luther sera toujours fidèle à son maître politique, alors que
Zwingli défendra une conception politique différente, basée
sur la « forme naturelle » de l’organisation humaine, la
communauté « démocratique ».
• Pour Zwingli, Église et peuple ne font qu’un, car la
première n’est que l’émanation de la seconde.
• Ce « démocratisme » n’empêche pas une dérive
autoritaire : partisan de l’élection des curés, Zwingli
en vient à imposer à ses disciples une discipline de fer
et un dogme très intolérant, d’où son rejet radical des
autres formes de protestantisme, donc l’anabaptisme.
• Le mouvement de Zwingli restera limité à Zurich, mais
son radicalisme provoquera les deux guerres de Kapel
(1529 et 1531), premiers conflits militaires entre
catholicisme et protestantismes. C’est au cours de la
seconde guerre que Zwingli trouva la mort.
• Encore plus radical, l’anabaptisme nait aussi à Zurich,
en réaction à la mollesse et à la lenteur de Zwingli.
• Extrême gauche de la réforme, l’anabaptisme rejette
toute forme d’autorité, nouvelle ou ancienne, en
matière d’interprétations des textes.
• Mouvement spirituel et individualiste, l’anabaptisme
n’a pas vraiment de fondateurs.
• Les anabaptistes ne gardent comme symbole du culte
qu’un second baptême à l’âge adulte, le premier
n’étant pas valide car imposé.
• Pas de cérémonies ni de fêtes religieuses : les
adeptes se réunissent en groupes pour lire ensemble et
interpréter les textes.
• Vu comme des anarchistes, malgré leur peu d’intérêt
pour la question du pouvoir temporel, les anabaptistes
seront persécutés par tout le monde,
• Le mouvement se diffusera dans l’ouest et le centre du
Saint-Empire, mais les communautés anabaptistes ne
seront jamais très importantes en nombre.
• À côté de ces mouvements très marginaux (les
différents traités de paix des guerres de religion ne leur
laissent aucune place), le calvinisme, qui aura un
impact fondamental en Germanie, nait lui aussi dans
les cantons suisses.
• En fait, Jean Calvin est natif de Noyon, mais sa
rupture avec l’église en 1530 l’oblige à fuir en Suisse, à
Bâle, où il écrit en 1536 sa première œuvre, qui fonde
le calvinisme : l’Institution de la religion chrétienne.
• Puisque pour Calvin, le salut ne réside pas que dans la
foi, mais bien dans la foi et les œuvres, le calvinisme
est plus politisé que le luthérianisme, car il prône
l’implication sociale du croyant.
• Son rapport au pouvoir est très différent et
l’obéissance du croyant au pouvoir politique que tente
d’imposer Luther lui est étrangère.
• Reprenant certains éléments du zwinglisme, le
calvinisme intégral propose le remplacement de
l’Église institutionnelle par la communauté des
croyants, qui s’organise et se gouverne elle-même.
• Le rapport au livre et à l’instruction, fondamental dans
le luthérianisme, est chez Calvin accentué.
• Chez les protestants, l’instruction est fondamentale, car
elle permet de s’affranchir du monopole de l’Église
sur l’interprétation des textes.
• Comme la communauté des croyants est plus
importante chez Calvin, elle doit avoir accès aux fruits de
la littérature : le duché calviniste des Deux-ponts sera
le premier territoire européen à proclamer et à établir
l’instruction pour tous, au milieu du XVIe siècle.
• Alors que les luthériens de Germanie, malgré leurs
différends avec l’empereur, lui demeurent fidèles, le
calvinisme, qui restera en Allemagne marginal, a joué
un rôle fondamental dans le déclenchement de la guerre
de Trente Ans, les calvinistes allemands (concentrés
dans le Palatinat) considérant comme accessoire la
fidélité à l’empereur, être humain comme les autres.
1.2 — La « contre-réforme » catholique
• En parallèle à l’éclatement des courants protestants,
l’Église tente de répondre à la crise, car nombreux
sont ceux qui, au sein de la hiérarchie catholique,
ressentent le même malaise que Luther.
• L’appellation traditionnelle de « contre-réforme » est
contesté car laisse supposer qu’il ne s’agit que d’une
réponse au luthérianisme, alors qu’elle se veut une
réponse, institutionnelle, à la crise de l’Église.
• Le mouvement eut une influence en Allemagne, mais
celle-ci est étrangère au processus et ce sont des
théologiens espagnols, italiens et français qui
dirigeront le Concile de Trente (1545-1563).
• Cette absence témoigne de l’affaiblissement de
l’Allemagne, en proie à l’influence de mouvements
religieux naissants à l’extérieur du monde impérial.
• La guerre de Trente Ans sera de ce point de vue la
manifestation
intérieure
d’une
confrontation
idéologique et politique en bonne partie extérieure,
même si le luthérianisme allemand en fut d’abord
l’élément déclencheur.
• Née en tant que manifestation de l’esprit national, la
logique de la réforme en vient à provoquer le
déclassement politique de l’Empire.
• Cette absence des Allemands a aussi une explication
empirique : au moment de la paix d’Augsbourg, le
protestantisme concerne près de 90 % de la population.
• Si le catholicisme demeure implanté auprès des
élites, ces dernières ne peuvent pas toujours imposer
sur le terrain le principe « Tel prince, tel religion ».
• C’est pour cela que l’Église catholique leur viendra en
aide. Le Concile ne cherche pas à modifier le dogme,
mais à le redéfinir, à le préciser.
• Il vise aussi à réorganiser les institutions et le clergé,
pour lui permettre de faire front à la menace..
• Au XVIe siècle, la papauté dispose de beaucoup
d’argent, d’autant qu’elle peut compter sur la richesse
de la couronne espagnole. Grâce à ces ressources, la
réforme catholique peut prendre une forme militante,
qui permettra de regagner une partie des positions
perdues.
• La Compagnie de Jésus constitue une bonne
illustration des efforts faits par l’Église catholique sur le
plan de la prédication, même si les Jésuites ne sont
pas les seuls à participer à la contre-offensive.
• L’autre fondement de la reconquête partielle de
l’Empire par le catholicisme repose dans la foi
inébranlable de certains chefs politiques : les
empereurs Ferdinand 1er et Ferdinand II et les ducs de
Bavière, château fort du catholicisme, Guillaume IV et
Maximilien 1er.
• La conjugaison des efforts théologiques, des
ressources
financières
et
des
convictions
religieuses de ces protagonistes pourra faire en sorte
qu’au milieu du XVIIe siècle, la reconquête,
quoiqu’imparfaite, concernera près de la moitié des
habitants de l’Allemagne.
• Malheureusement, entre temps, la radicalisation des
uns et des autres et l’implication des puissances
étrangères auront transformé les terres germaniques
en boucherie.
2 — La guerre de 30 ans
2.1 — Vers la défenestration
• La paix d’Augsbourg n’a été qu’un compromis de
circonstance : c’est l’épuisement et la lassitude, et non
la tolérance et la compréhension, qui ont obligé les
protagonistes à négocier.
• Et ce compromis était boiteux : dans une Allemagne
éclatée et en cours de modernisation, la logique
médiévale sous-jacente au principe de base de la paix
d’Augsbourg évacuait les changements dont Luther
avait été porteur, soit l’individualisation et
l’intériorisation de la religion.
• De même, puisque dans l’Allemagne du XVIe siècle, les
maîtres changent fréquemment, qu’advient-il d’une
terre catholique, mais dont le nouveau maître est
protestant, ou inversement?
• La paix d’Augsbourg avait voulu figer la répartition
religieuse à 1555, mais un prince militant pouvait-il
accepter de diriger un territoire d’une autre confession?
Comment réagirait la population à une conversion?
Et qu’advient-il alors des vastes domaines morcelés et
comprenant des territoires des diverses confessions?
• Tous les cas de figures possibles (conversions du
prince ou de la population, expulsions, saisies)
surviennent au cours de la période 1555-1620, d’un côté
comme de l’autre.
• Et le problème des riches terres ecclésiastiques
n’est pas non plus résolu en 1555, d’autant que la
richesse de certains de ces domaines attisent la
convoitise.
• De même, il s’agit des seules terres de Germanie où la
diversité religieuse est possible et où le militantisme
des uns et des autres peut s’exercer.
• Autre donnée fondamentale : la politique impériale. En
fonction du militantisme de l’empereur, les tensions
croissent ou diminuent.
• En abandonnant la lutte, Charles Quint a confié à son
frère Ferdinand 1er (1556-1564) les rênes de l’État,
lequel s’est rallié sans enthousiasme au compromis
et s’emploie à favoriser la réforme catholique.
• À sa mort, son fils Maximilien II (1564-1576) monte sur
le trône et même s’il demeure catholique, on lui
suspecte un penchant pour le luthérianisme.
• Chef de l’empire chrétien, il ne pouvait se convertir, mais
son orientation dépourvue de militantisme catholique
permet une décennie de paix.
• Les choses changent avec Rodolphe II (1576-1612),
dont l’enfance passée à la cour d’Espagne ont fait un
fervent catholique. On le dit instable et impulsif, ce qui
rend son militantisme dangereux.
• Car il reste à l’empereur certains leviers d’influence,
particulièrement en matière judiciaire, car dans les
deux institutions judiciaires supérieures crées par les
réformes de Maximilien 1er, l’empereur dispose de
pouvoir de nomination important.
• Comme le Conseil Aulique s’occupe des problèmes de
succession dans les différents États, l’influence que
ses décisions peuvent avoir sur la répartition des forces
confessionnelles est important.
• Ferdinand y favorisant des catholiques, les décisions
de ces instances penchent du côté des États et familles
fidèles à Rome, suscitant le mécontentement des
protestants,
qui
s’emploient
à
bloquer
le
fonctionnement du Reichstag, où ils sont majoritaires.
• Avec le temps, l’esprit d’Augsbourg s’efface et deux
générations plus tard, les chefs des différents camps
sentent la nécessité d’imposer par la force un
règlement de la situation à leur avantage.
• Au début du XVIIe siècle, protestants et catholiques
fourbissent leurs armes. Les calvinistes sont les
premiers à le faire et en 1608 est fondée une Union par
le prince électeur palatin Frédéric IV, qui noue des
relations avec des forces « étrangères », dont les PaysBas.
• Les luthériens restent d’abord à l’écart d’une
organisation clairement attaché à des forces opposées à
l’empire, mais une crise va les pousser à se rallier : la
situation de la ville libre protestante de Donauwörth et
de l’abbaye catholique qui s’y trouvent.
• Le cas est emblématique : la ville et l’abbaye disposent
de l’immédiateté et peuvent chacun définir la religion
légale sur le territoire.
• Mais comme l’abbaye est sur le territoire de la ville,
les conflits sont inévitables.
• En 1609, l’empereur ordonne au Duc de Bavière
Maximilien 1er d’assurer la pratique du culte
catholique sur le territoire de l’abbaye, alors que l’on
suspecte les autorités de la ville de vouloir l’empêcher.
• Après sa victoire contre les autorités de la ville, le duc
annexe le territoire et procède à un nettoyage
confessionnel, chassant les habitants refusant de se
convertir au catholicisme.
• C’est ce même duc qui, en 1609, pour répondre à
l’activisme de l’Union, fonde une Ligue avec un certain
nombre de princes territoriaux catholiques.
• Ces deux événements vont accélérer le ralliement à
l’Union de nombreux territoires luthériens d’abord
méfiant à l’endroit de cette dernière.
• Une crise de succession en 1610 aura un impact
fondamental sur l’avenir du pays, car à l’issue de la
crise, les Hohenzollern prendront pied sur le Rhin,
posant les bases de leur future prétention à unifier
les territoires germaniques contre les Habsbourg.
• À ces tensions entre États s’ajoutent celles à
l’intérieur de ceux-ci, car si leurs ancêtres peuvent
s’être convertis par intérêt, les chefs du début du XVIIe
siècle, élevés dans l’une des deux confessions, ont une
tendance au militantisme plus grande.
• Compte tenu de l’importance prise par les Habsbourg
depuis quelques siècles, il n’est guère surprenant de
constater que la crise éclatera dans leurs États.
• À sa mort, Ferdinand 1er a divisé les États
habsbourgeois entre ses fils et la politique menée sur
cet ensemble manque de cohérence.
• Maximilien II ne s’est pas opposé au protestantisme
et ses successeurs, Rodolphe et Mathias n’ont pas été
en mesure de s’opposer au progrès des luthériens sur
leurs terres, qui réclament dans les différentes Diètes la
tolérance, pour cause d’alliance contre les Turcs.
• En 1590, le cousin de Rodolphe II, l’archiduc d’Autriche
Ferdinand 1er, monte sur le trône de Graz en Styrie.
• C’est un catholique fervent et agressif qui, en
quelques années, nettoiera ses États presque
totalement acquis au luthérianisme au profit de sa foi
catholique, convertissant de force et expulsant les
récalcitrants.
• Comme ses cousins n’ont pas de fils, Ferdinand 1er
s’impose comme le probable futur maître des terres
autrichiennes et de la couronne impériale, d’autant
que la majorité des princes électeurs sont alors
catholiques. Les protestants des terres habsbourgeoises
regardent d’un œil inquiet la situation.
• L’étincelle partira de Bohême, dont la population
encore pour beaucoup hussite cohabite avec les princes
allemands convertit au luthérianisme.
• En 1618, des églises protestantes construites sur le
territoire catholique de l’archevêché de Prague sont
détruites sur ordre impérial, tendant jusqu’au point de
rupture une atmosphère déjà malsaine.
• De sorte que le 23 mai 1618, lorsque deux
gouverneurs impériaux et leur secrétaire sont jetés
par les fenêtres du palais par leurs interlocuteurs
luthériens (ils s’en sortiront indemne, grâce à la
présence d’un tas de fumier) au cours d’une vive
discussion, l’incendie « éclatera ».
• Même si les combats ne débuteront que l’année
suivante, cet acte de lèse-majesté a été retenu par la
tradition comme point de départ de la boucherie.
2.2 — Le conflit intérieur
• Le véritable élément déclencheur se trouve aussi en
Bohême : sans celui-ci, la défenestration serait demeuré
un épisode d’insubordination sans conséquences,
hormis pour les principaux acteurs.
• Ce ne fut pas le cas. Depuis toujours, la Bohême jouit
d’un statut particulier car c’est la Diète qui a le dernier
mot en ce qui concerne le chef du royaume.
• En temps normal, la confirmation du chef de la Bohême
par la Diète était devenue une formalité et depuis
Ferdinand de Habsbourg, la Diète s’était contentée de
confirmer la ligne dynastique héréditaire.
• Mais l’époque n’est pas « normale » et les grands de
Bohême sont en colère contre Ferdinand et refusent
de se soumettre à sa catholique intransigeance.
• Ils auraient pu choisir un autre catholique ou un luthérien
modéré, mais optèrent pour l’électeur du Palatinat,
Frédéric V, calviniste convaincu, et chef de l’Union
protestante fondée une décennie plus tôt.
• L’affront pouvait d’autant moins être toléré que la
Bohême, plus vaste État de l’empire, est très peuplée et
très riche. Son passage dans le camp des protestants
remettait en question l’équilibre des forces.
• Mais ce n’est pas Ferdinand qui lance le bal : la Ligue
catholique de Maximilien de Bavière mobilisa ses
forces contre l’armée de Bohême, qui fut facilement
vaincue à la bataille de la Montagne Blanche en 1620.
• Frédéric V fut mis au ban de l’empire et dut s’enfuir en
Angleterre. Cette guerre de Bohême marque le premier
acte de la guerre de Trente Ans.
• La répression des protestants en Bohême fut
violente, l’aristocratie, majoritairement protestante, fut
en grande partie mise au ban de l’empire.
• Les biens des protestants furent saisis pour être
redistribués à d’autres nobles, catholiques, fidèles de
l’empereur, choisis un peu partout sur le territoire
impérial.
• Quant au hussisme encore très présent, il fut aussi
victime de la contre-offensive catholique, qui
s’employa à extirper le culte du sol de Bohême. Par le
biais des autorités nobiliaires et religieuses, l’empereur
gouvernait désormais directement la Bohême.
• Les grands États de l’Union protestante ne
bougèrent guère pour venir en aide au calviniste
Frédéric V, le culte de Calvin suscitant auprès des
luthériens un rejet aussi fort que celui de Rome.
• Mais certains petits États protestants avaient déclaré
leur désir de venir en aide à l’infortuné comte palatin et
roi de Bohême : la Ligue, désireuse de profiter de son
élan, se porta contre eux, infligeant aux protestants de
nouvelles défaites.
2.3 — L’internationalisation de la guerre
• Cette remise en question de l’équilibre au profit des
catholiques inquiéta les puissances protestantes
voisines.
• Car la vague protestante ne s’était pas limitée aux
terres d’empire et au cours du XVIe siècle, tous les
États d’Europe occidentale furent la proie des guerres
de religion.
• Au Danemark, en Suède, en Angleterre et dans ces
Pays-Bas au statut ambigu, différentes formes de
protestantisme s’était imposée et la vague catholique
déferlant sur le territoire de l’empire à partir de 1620
préoccupe les pouvoirs.
• Les efforts de la Ligue s’étaient portés avant tout en
Allemagne du Nord où se trouvaient les plupart des
évêchés contestés entre catholiques et protestants.
• Le Danemark fut le premier à se joindre à la guerre
civile, car Christian IV était maître de certains de ces
territoires contestés. Le jeu des alliances fit le reste.
• À la Ligue catholique, à l’Union protestante et aux
armées étrangères, Ferdinand II, ajouta ses propres
forces, mobilisées sur les vastes territoires des
Habsbourg et dont le commandement fut confié à un
noble de Bohême, Wallenstein, opportunément
reconverti au catholicisme.
• Cette nouvelle armée impériale s’imposa contre
Christian IV, qui fut contraint en 1629, après une série
de défaites, à signer la paix, laissant l’armée impériale
catholique camper sur les rives protestantes de la
Baltique. C’est ainsi que le deuxième acte de la guerre
est aussi remporté par les forces catholiques.
• Fort de cette victoire militaire, Ferdinand fit l’erreur de
promulguer un Édit de restitution, qui lui fut soufflé à
l’oreille par les Jésuites qui l’entouraient.
• Cet Édit obligeait les territoires ecclésiastiques passés à
la réforme à se reconvertir au catholicisme.
• La victoire de Ferdinand angoissa les chefs de la
Ligue catholique, qui ne désiraient pas la
reconsolidation de l’empire, et comme Ferdinand tenait
à obtenir l’élection de son fils à titre de roi des Romains,
il lâcha Wallenstein en guise de bonne volonté.
• Pendant ce temps, Richelieu s’employait à convaincre
les électeurs de rejeter le fils de l’empereur et de
l’autre côté de la Baltique, après avoir battus Polonais
et Moscovites, Gustave Adolphe de Suède, inquiet de
cette remontée en puissance des catholiques, décida
d’impliquer ses forces.
• C’est l’apparition de la puissance suédoise comme
facteur politique et militaire. Pieux, intelligent et habile,
le roi-général de Suède veut profiter de sa défense du
protestantisme pour transformer la Baltique en lac
suédois et évincer son adversaire danois.
• Assuré du soutien de Richelieu, le champion protestant
débarque en juillet 1630 sur les côtes nord de la
Baltique, alors que l’armée impériale est désarticulée par
le renvoi de Wallenstein, ce qui lance le troisième acte
du conflit.
• Après avoir convaincu de nombreux princes protestants
et consolidé sa base d’opérations, Gustave-Auguste
inflige aux catholiques une défaite, en novembre
1631, qui marque l’effondrement de l’influence
catholique au nord et la poussée vers le sud des
forces protestantes.
• Rappelé par Ferdinand, Wallenstein reprit la tête de
l’armée impériale et livra une bataille aux Suédois en
Saxe en novembre 1632.
• Si le sort des armes fut indécis, le fait que l’on compte
alors parmi les victimes le roi de Suède semble
indiquer un nouveau retournement du sort.
• Mais le sursaut protestant avait déjà eu lieu et avec lui,
la chance pour les forces catholiques de l’empire
d’imposer le retour de Rome s’était évanouie. La
mort du roi ne mit pas fin à l’intervention, la jeune reine
Christine choisissant de poursuivre l’effort.
• Wallenstein fut à nouveau poussé hors de la scène
par des nobles jaloux de sa puissance. Cette fois,
l’empereur fit assassiner son champion, après l’avoir
transformé en rebelle.
• L’armée impériale demeura fidèle à son empereur et
infligea une défaite à l’armée suédoise et au parti
protestant en 1635, qui furent obligés de négocier une
paix de compromis.
• L’acte quatre semble prendre fin par cette victoire, qui
même si elle propose le retour à la situation d’avant
l’Édit de restitution, concède de larges pouvoirs
politique et militaire à l’empereur.
• Ferdinand III succède à son père en 1637, alors que la
France catholique décide de s’impliquer davantage au
côté des princes protestants contre la puissance
catholique des Habsbourg...
• Cinquième acte : l’offensive française est fulgurante aux
Pays-Bas espagnols sur le Rhin et en Allemagne du sud.
• Mais pas plus les armées françaises que les autres ne
parviennent à s’imposer. Au début des années 1640, la
lassitude commence à se faire sentir.
• Pendant que les opérations militaires se poursuivent,
des négociateurs se réunissent en Westphalie, à
Münster et à Osnabrück.
• Les pourparlers trainent en longueur pendant
quelques années, chaque camp attendant une victoire
décisive pour imposer ses termes.
• C’est alors qu’en 1648, les Suédois s’emparent d’une
partie de Prague et les Français occupent la Bavière.
• Coincé entre ce sursaut de ses adversaires, Ferdinand
III donne l’ordre à ses diplomates d’accepter les
conditions de ses ennemis.
• L’ironie est qu’après avoir à deux reprises frôlé une
victoire totale et remporté plusieurs batailles, l’empire
perd la guerre. Et la paix sera douloureuse.
2.4 — La paix de Westphalie
• La paix de Westphalie est établie sur trois traités,
signés en janvier et octobre 1648, qui mettent fin à la
fois à la guerre de Trente Ans (octobre) et à celle entre
l’empire espagnol et les Pays-Bas (janvier).
• Si celle-ci concerne tout de même l’empire (car elle
marque le départ définitif des Pays-Bas), ce sont
surtout les deux traités d’octobre qui importent ici.
• Le traité de Münster est signé avec la France, qui
obtient l’officialisation de son annexion des trois
évêchés occupés dès 1552, étendant sa puissance
jusqu’au Rhin, grâce à cette victoire remportée au prix
du maintien, sur une moitié de l’Allemagne, du
protestantisme
• Quant à la Suède, ses gains sont entérinés au même
moment par le traité d’Osnabrück.
• Elle obtient des bases territoriales au sud de la
Baltique (Poméranie occidentale, évêchés de Brême et
de Verden), qui lui permettent de se mêler de la politique
germanique en gagnant un accès au Reichstag.
• Les traités concernent aussi l’organisation territoriale
de l’empire et de certains territoires (Électorat de
Saxe, de Brandebourg et de Bavière).
• Les traités entérinent la création d’un 8e électorat : en
1623, lorsque Frédéric V fut dépossédé de son titre
d’électeur du Palatinat, celui-ci fut transmis à la
Bavière. Mais une fois la guerre terminée, l’électorat de
Bavière fut restauré.
• L’église impériale se trouve privée de la moitié des
principautés qu’elle détenait avant la réforme, ce qui
fait d’elle, au côté des villes l’un des grands perdants.
• L’empereur est un autre grand perdant : diverses
dispositions des traités remettent en question les
institutions des réformes de Maximilien.
• L’empereur perd le droit de déclarer la guerre, de
signer la paix et de commander l’armée, prérogatives
passant entre les mains du Reichstag.
• Il s’agit là d’une volonté de la France, désireuse de
briser la puissance des Habsbourg : si la famille
d’Autriche veut faire la guerre, elle ne pourra plus
compter avec certitude sur l’armée du Reich et devra
se limiter à ses propres forces.
• D’une certaine façon, l’État autrichien nait de cette
distinction institutionnelle avec l’empire.
• Quant aux questions religieuses, les traités mettent en
place un certain nombre de normes.
• On note l’abandon du principe Cujus Regio, Ejus
Religio, en dissociant complètement la foi des
populations de celle de ses maîtres, plaçant une pierre
fondamentale dans la construction de l’État de droit, car
la religion devient donc une affaire privée.
• La question religieuse est évacuée de la nature du
Saint-Empire, ce qui permettra la cohabitation du
catholicisme, du luthérianisme et du calvinisme (les
« sectes », comme les anabaptistes, demeurent
interdites).
• Enfin, France et Suède s’imposent comme les gardiens
de l’ordre westphalien et les traités stipulent que les
princes qui considéreront être victimes d’une violation
des accords pourront faire appel à l’une de ces deux
puissances.
• À la conclusion des traités, l’empire est désormais
composé de 350 États de tailles différentes et
possédant des statuts variés.
3 — Les « derniers »
Habsbourg
3.1 — Évolution politique
• De 1648 jusqu’au dernier Habsbourg direct, le SaintEmpire connaitra quatre empereurs dont les règnes
sont passablement effacés.
• Ce n’est pas étonnant, car la conclusion des traités
laisse une place très discrète à l’empereur.
• Le facteur extérieur joue un rôle important : la
confusion entre les intérêts des Habsbourg et ceux de
l’empire, alors que la période voit la fin des Habsbourg
d’Autriche et de la menace ottomane, fait passer les
problèmes de l’empire au second plan.
• Des difficultés supplémentaires sont soulevées par une
sorte « d’internationalisation » de l’empire, alors que
les traités permettent à certains princes, germaniques
ou non, d’accéder à un statut faisant d’eux presque
des égaux de l’empereur.
• Cette internationalisation se manifeste sous deux
formes. D’abord certains princes étrangers deviennent
maîtres de certains territoires allemands (roi de
Suède ou du Danemark).
• D’autre part, l’interpénétration dynastique fait en sorte
que certains princes allemands deviennent maîtres
de territoires outre-mer, comme Georges de Hanovre,
qui devint en 1727 roi de Grande-Bretagne et d’Irlande,
tout en conservant son titre d’Électeur.
• La Prusse constitue un cas à part, alors que l’Électeur
du Brandebourg obtient en 1701 le droit de se qualifier
de roi en Prusse, territoire autonome n’ayant jamais fait
partie de l’empire.
• Au début du XVIIIe siècle, quatre rois étrangers, dont
trois ayant le statut d’électeurs se retrouvent parmi les
princes d’empire au Reichstag et les relations entre
l’empire et les maîtres de ces territoires prennent de
plus en plus la forme de relations avec des États
étrangers.
• Le collège électoral connait au cours de la période des
transformations allant dans le sens de l’affaiblissement
de l’autorité impériale sur les territoires luthériens et
calvinistes et en 1692, la majorité des électeurs sont
catholiques.
• Ces évolutions font de l’empereur un personnage de
moins en moins important, les institutions assurant le
maintien de l’empire en tant que large confédération
d’États devenus pour l’essentiel souverains.
• Quelques mots sur les personnalités qui, du début de
la guerre de Trente Ans à l’extinction des Habsbourg
directs, se sont succédé sur le trône.
• Le règne de Ferdinand II (1619-1637), qui succède à
Mathias 1er (1612-1619) est occupé par la guerre et
l’empereur n’a d’autres préoccupations que celle-ci.
• Malgré son implication politique, l’empereur s’efface
devant les grands chefs militaires, dont Wallenstein.
• Ferdinand III (1637-1657) succède à son père, les
électeurs ne faisant aucune difficulté pour le reconnaitre
roi de Rome.
• Alors qu’il s’est illustré sur le champ de bataille en
tant que commandant, Ferdinand ne laissera de trace
dans l’histoire de l’empire que dans la mesure où il dût
se soumettre aux vainqueurs de la guerre, entrainant
le départ de nombreux territoires.
• Après 1648, les institutions de l’empire et le contexte
l’empêcheront de donner la pleine mesure de ses
capacités. Il meurt en 1657, laissant le trône à son fils
Léopold 1er (1658-1705).
• Léopold, pacifique et cultivé, verra son règne dominé
par les guerres contre la Suède (qui prend fin en 1660),
l’Empire ottoman ou la France, dans le cadre de la
guerre de succession d’Espagne.
• Héritant d’une situation intérieure plus calme, Léopold
s’emploiera à favoriser la reconstruction des terres
habsbourgeoises, donnant l’exemple à d’autres princes
territoriaux.
• Malgré sa volonté de créer une plus grande unité
économique au sein de l’empire, il se heurtera aux
désirs d’indépendance des princes et à une
bureaucratie impériale peu en phase avec la réalité
économique et politique de l’empire.
• Joseph 1er (1705-1711) élu roi des Romains dès 1690,
est couronné empereur à la mort de son père. Mort de
la syphilis à 32 ans à peine, il n’aura pas eu le temps
d’avoir de fils (d’autant que son épouse devient infertile
par sa faute) ni de faire beaucoup de choses.
• Ses quelques années de règne sont dominées par la
personnalité d’Eugène de Savoie, grand chef militaire
et prince protecteur des arts, alors que l’empereur luimême demeure effacé.
• Enfin, Charles VI (1711-1740) fut couronné empereur à
la mort de son frère ainé. Ses premières années sont
consacrées à sa lutte pour conserver son trône
d’Espagne, qu’il dût abandonner à la France des
Bourbons par le traité de Rastatt (1714).
• Occupé à lutter le reste de son règne pour tenter de
conserver certains autres de ses États patrimoniaux, il
n’aura qu’un rôle effacé dans le cadre impérial.
• N’ayant pas de fils vivant à sa mort, Charles VI, par sa
Pragmatique Sanction de 1713, laisse le trône des
Habsbourg à sa fille, qui mettra beaucoup de temps à
s’imposer. Et lorsqu’elle y parviendra, l’empire ne sera
plus guère qu’une coquille vide.
3.2 — Évolution démographique, économique et
sociale depuis la réforme
• La guerre de Trente Ans fut une catastrophe
démographique pour les pays allemands. Même si les
évaluations traditionnelles des pertes humaines sont
aujourd’hui remises en question, il reste que selon les
nouvelles méthodes d’enquête démographique, le
pourcentage de pertes serait près de 25 % du total.
• Les territoires n’ont pas tous été atteints de la même
façon, alors que dans le Brandebourg, en Souabe et
dans le Palatinat, les pertes ont probablement atteint
70 % de la population.
• Alors que les pays germaniques venaient de rétablir la
population d’avant la Grande peste, cette nouvelle
ponction prendra plus d’un siècle à être effacée, au
moment même où les autres puissances européennes
prennent leur envol économique.
• Les
villes
ont
été
moins
affectées
démographiquement, grâce à leurs murailles et
fortifications : les chefs des armées préféraient
négocier avec les villes une « contribution » plutôt
que de perdre temps et hommes pour réaliser un siège
sans garantie de succès.
• Dans les campagnes, armées et pillards s’en
donnaient à cœur joie et les paysans n’avaient guère
d’autres choix que la fuite ou la mort.
• Les villes et les forêts, constituaient la seule chance de
salut des paysans qui avaient le malheur de voir l’une
des forces passer sur leurs terres. Nombreux sont les
villages abandonnés ou détruits.
• Les destructions sont nombreuses et il faudra du temps
pour remettre le pays sur pied. Certaines régions se
relèveront rapidement, mais la guerre marque le
déclassement définitif de certaines autres.
• C’est le cas de nombreuses villes libres qui durent
renoncer à leur statut d’immédiateté pour s’intégrer à
un territoire princier.
• La puissante Magdebourg ne fut plus en mesure de
survivre seule et se soumit au Brandebourg, dont la
reconstruction fut rapide et efficace.
• Même dans les cas où elles parvenaient à maintenir leur
indépendance, les villes durent souvent céder une
partie de leur territoire à des princes territoriaux, qui
ont l’avantage de la force.
• L’une des conséquences sociales les plus
remarquables de la guerre est la mise en place de ce
que l’on a nommé le « deuxième servage » : au
moment où la paysannerie d’Europe commence à
secouer ses chaines, en Allemagne, la situation de
l’après-guerre favorise la mise en place de systèmes
politiques absolutistes et très autoritaires.
• L’absolutisme a le vent en poupe, le XVIIe siècle
étant celui de Louis XIV et l’Angleterre de l’aprèsCromwell semble un temps prendre aussi cette direction.
• Mais le cadre étatique des États de l’Ouest fait en sorte
que l’absolutisme allège d’une certaine façon la
pression sur la paysannerie, alors qu’en Allemagne,
les nombreux petits territoires voient les dirigeants
accentuer cette pression.
• Les besoins de la reconstruction favorisent cet
absolutisme, car le repeuplement des campagnes
encourage les princes à forcer les déplacements de
population de diverses façons.
• Un rôle particulier sera joué par l’intolérance religieuse
de certains États dans le repeuplement des territoires.
Ce fut le cas des huguenots français chassés par la
révocation de l’Édit de Nantes qui s’établirent en
particulier dans le Brandebourg, dont les chefs sont
désormais calvinistes.
• À l’inverse, les conditions de vie et la reconstruction
accélérée sous la conduite de pouvoirs autoritaires vont
favoriser le départ de nombreuses populations en
Amérique du Nord et vers l’est.
• Cependant, cette émigration ne sera pas assez
importante pour remettre en question le rattrapage
démographique.
• L’économie connaitra des moments très difficiles,
car la durée de la guerre a provoqué l’effondrement des
réseaux commerciaux, d’autres économies remplaçant
la production allemande, disparue des marchés.
• La reconquête de ceux-ci fut d’autant plus difficile que
l’époque voit le triomphe du mercantilisme et du
protectionnisme.
• La production mettra du temps à se rétablir, car en
plus des destructions, la crise démographique a entrainé
la disparition de deux à trois générations d’artisans,
avec leur savoir et leur expérience.
• Seul le temps permettra de compenser cet
archaïsation des savoirs et l’arrivée des huguenots en
sera d’autant facilitée.
• Un autre facteur explique les difficultés économiques
que connaitra l’Allemagne au cours des XVIIe et XVIIIe
siècles : l’absence de colonies, alors que les rivaux
européens déploient leur puissance dans le monde.
• En fait, à l’exception des Provinces-Unies, qui
parviendront à se transformer en puissance
économique, les territoires germaniques restent à
l’écart du mouvement colonial.
• L’Allemagne est avant tout continentale, mais elle
dispose d’un assez long littoral, ce qui d’ailleurs avait
fait d’elle une puissance commerciale au Moyen-âge.
• La raison principale de cette absence est politique :
les moyens importants réclamés par les explorations
font défaut aux petits États germaniques.
• Ainsi, ils ne peuvent faire jeu égal avec la puissance
française, espagnole ou anglaise.
• Et tournés vers la consolidation de leurs territoires,
les princes territoriaux n’ont guère eu de ressources à
consacrer à la projection coloniale.
• Sans colonie, les territoires germaniques se trouvent
exclus des changements économiques en cours.
• Le manque de ressources, de matières premières et
de débouchés comptent parmi les facteurs explicatifs
de la faiblesse économique des États allemands
jusqu’au XVIIIe siècle.
• Sur le plan social, la période voit une détérioration
générale de la condition paysanne, mais aussi de la
classe bourgeoise, sa faiblesse économique finissant
par avoir un impact sur son indépendance politique.
• Le siècle est celui du triomphe des États princiers et
de la haute noblesse territoriale
• Malgré les difficultés économiques, la conjonction de
l’affaiblissement économique et politique des autres
classes et de l’effacement du pouvoir impérial
permettra aux princes territoriaux de développer sur
leurs possessions les puissances étatiques qui
détermineront
l’évolution
ultérieure
des
terres
germaniques.
• Si la chose est évidente pour la Prusse et l’Autriche,
c’est aussi le cas, de façon moins spectaculaire, pour
d’autres territoires, comme la Bavière ou la Saxe.
3.3. — Politique étrangère
• Compte tenu des traités de Westphalie, la politique
étrangère de l’empire ne put qu’être très limitée.
D’autant qu’au lendemain de la guerre, certains
territoires sont occupés par des puissances étrangères.
• Dans de nombreux cas, elles font chanter populations
et princes, exigeant des sommes rondelettes pour prix
de leur départ. Malgré la situation, les bourgeoisies
urbaines réuniront les sommes nécessaires.
• La France concentre la rancœur des Allemands et si
l’opposition entre les deux moitiés de l’empire de
Charlemagne est ancienne, elle atteint alors un
nouveau niveau d’intensité.
• La hargne qui nait alors en Allemagne à l’endroit de la
politique française va de pair avec l’attraction
culturelle puissante de la France.
• La domination du continent par Paris, ajoutée à cette
attraction, provoque un fort rejet de la France au sein
de la bourgeoisie et d’une partie du peuple, d’autant
plus que la marche de la puissance occupante se
poursuit après 1648.
• C’est le cas de la politique dite des « réunions » par
laquelle Louis XIV s’emploiera à rattacher, en Alsace et
en Sarre, les territoires autour des villes capturées
pendant la guerre de Trente Ans.
• Cela concerne aussi d’autres villes, comme Besançon
et Strasbourg, capturées par la force et par la ruse et
qui sont autant d’arrachement du corps impérial.
• Et il y aussi les comportements des forces françaises,
comme l’utilisation pour la première fois dans l’histoire
de la tactique de la terre brûlée par Louvier, lors de la
retraite des armées françaises dans le cadre de la
guerre de la Ligue D’Augsbourg.
• Bref, la période voit l’émergence du côté des Allemands
d’un « ennemi héréditaire » dont la politique va
contribuer à former une « francophobie » qui facilitera la
prise de conscience nationale de la population.
• Sur le front est, la situation est meilleure. Ici il devient
par contre difficile de distinguer la politique impériale
de celle de l’Autriche, car certains territoires rattachés
à Vienne au cours de la période ne relèveront pas de
l’empire, mais de la maison habsbourgeoise.
• La période voit la fin de la menace turque sur le flanc
oriental, car depuis la tentative de Soliman en 1529
pour s’emparer de Vienne, l’État ottoman, en proie à
des luttes intestines, n’a guère eu la possibilité de lancer
des offensives.
• La dernière tentative menée en 1683 par les Turcs
contre Vienne sera dangereuse, mais la supériorité
technique des Autrichiens permettra de repousser
l’offensive.
• La contre-offensive qui suivra conduira en 1686 à la
libération des terres hongroises.
• En 1688, l’électeur de Bavière s’empare de la
forteresse de Belgrade, marquant la fin de la menace
ottomane sur le monde chrétien, tout en mettant en
place les conditions de la confrontation à venir entre
Vienne et Saint-Peterbourg pour le contrôle des
Balkans.
• Le royaume de Hongrie sera reconstitué par la suite
et placé sous la domination de Vienne. Il en sera de
même de territoires situés plus au sud, comme la
Croatie.
• Même s’il ne s’agit pas de territoires du Saint-Empire, la
domination
autrichienne
va
favoriser
le
développement de la culture germanique sur de
nombreux territoires peuplés de populations très
diverses, mais à majorité slaves et orthodoxes.
• La Guerre de Succession d’Espagne, si elle concerne
d’abord et avant tout les Habsbourg, a un impact
important sur l’empire, provoqué par la quasiidentification des intérêts de la dynastie autrichienne à
ceux de l’empire.
• Les défaites habsbourgeoises auront logiquement
pour conséquence un autre affaiblissement, définitif
cette fois, du pouvoir impérial.
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