DEFINITION, EPIDEMIOLOGIE, CLINIQUE, PHYSIOPATHOLOGIE des PRINCIPALES INFECTIONS NOSOCOMIALES A l ’issu de ce cours, les étudiants doivent être capable de décrire les infections nosocomiales urinaires, pulmonaires, les infections sur cathéter et les infections de site opératoire, notamment donner pour chacune d ’elles: la définition les principaux signes cliniques la physiopathologie la fréquence, l ’incidence, la morbidité, la mortalité les facteurs de risque d ’acquisition les méthodes usuelles de diagnostic les mesures essentielles de prévention Rensignements : Dr F. Barbut UHLIN Hôpital Saint-Antoine Septembre 2004 1- ENQUETE NATIONALE DE PREVALENCE DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (rappels) (ENP juin 2001) Résultats nationaux FREQUENCE DES INFECTIONS NOSOCOMIALES Répartition des sites infectieux Enquête nationale de prévalence 2001 Autres 13% (dite « un jour donné ») Cutanée 11% 1533 établissements 381 303 lits (78% des lits d’hospitalisation français) Patients infectés : 6.9% Infections: 7.5% Urinaire 40% Septicémie 4% Inf. KT 3% Pulmonaire 19% ISO 10% FRÉQUENCE GLOBALE DES INFECTIONS ET DES INFECTÉS ENP 1996 ENP 2001 Evolution Patients infectés acquis importés 8.0% 6.7% 1.3% 6.9% 5.9% 1% -12% Infections acquises importées 7.6% NC 6.4% 1.1% -16% 2- INFECTIONS URINAIRES NOSOCOMIALES (IUN) Conférence de consensus SPILF + AFU 27 novembre 2002 Epidémiologie CDC : 42 % des infections nosocomiales ENP 2001 : 40 % des infections nosocomiales Environ 1 à 3 % des malades hospitalisés : prévalence en diminution (généralisation du système clos) Enquête du NNISS réanimation (95-2001) : 2-10 pour 1000 jours de sondage Germes responsables d ’IUN Akpabie A. Bouza E. 2001 2001 Avec sonde Sans sonde (gériatrie) (multicentrique européenne) ENP 2001 E. coli 38.7 25.1 40.5 36.9 Proteus sp. 11.1 7.3 7.4 7.7 Klebsiella sp. 7.1 10 9.9 5.8 Pseudomonas sp. 10 10.5 4.1 9.6 S. aureus 5.2 3.7 3.3 7.6 Entérocoque 12.5 13.2 15.7 8.5 Candida sp. NP 16.4 6.6 4.3 Akpabie A, Med Mal Inf 2001, 32, 461-67 ; Bouza et al., CMI 2001, 7, 532-542 Germes responsables d ’IUN Plus grande hétérogénéité des bactéries responsables d’IUN (versus les infections communautaires) Importance des infections à levures (infections sévères), à pyocyanique et Staphylocoque Plus grande résistance aux antibiotiques : S. aureus R meticilline (60%) K. pneumoniae BLSE ou R Q Urines infectées = réservoir +++ de bactéries Epidémiologie Mortalité Si sondage : risque de mortalité x 3 (marqueur de co-morbidités associées) Décès directement imputable à l'infection = 0,1 % Coût 1992 : coût USA = 615 millions de $ = 181 $ par infection Durée de séjour : en moyenne entre 1 et 2 jours Facteurs de risque extrinsèques Instrumentations Endoscopie (cystoscopie) et/ou chirurgie : 20 % des infections Sondage urinaire (80 % des infections) Technique de pose Durée (si > 6 j, RR =6) Chaque journée le risque de 5 % 25 % de bactériuries après 7 j Système ouvert 100% de bactériuries après 3 j Mauvaise vidange (résidu vésical) Lésions vésicales : sonde, ballonnet Système clos de drainage urinaire Valve anti-reflux Collecteur Site de drainage du collecteur Site de prélèvement Sonde urinaire Facteurs de risque intrinsèques Sexe féminin (2F pour 1H) Age > 50 ans Diabète Antibiothérapie préalable Vessie neurologique Diarrhée nosocomiale (taux x 8) Durée du séjour hospitalier Physiopathologie 3 modes d ’acquisition : voie endo-luminale jadis dominante avec le système ouvert minoritaire chez la femme voie extra-luminale ou périurétrale +++ au moment de la pose bactéries digestives colonisant le méat migration des bactéries à la surface externe de la sonde voie hématogène et lymphatique PHYSIOPATHOLOGIE des IUN sur sonde (Maki DG, EID 2001, 7, 1-6) Physiopathologie Relations entre hôte et bactérie Modifications de la flore fécale Facteurs d'adhésion bactérienne : pili, hémagglutinine, Ag K Biofilm le long de la sonde : éléments bactériens (glycocalyx) et protéines urinaires Mauvaise vidange (résidu vésical) Lésions vésicales : sonde, ballonnet Aspects cliniques Malade sondé (80 %) Forme asymptomatique fréquente (colonisation) Retard au diagnostic Fréquence des formes évoluées (20-30% évoluent vers une infection parenchymateuse: pyélonéphrite, prostatite.. et 0.5-4% se compliquent de bactériémies) Malade non sondé (20 %) Signes d'appel plus fréquents : dysurie, pollakiurie, brûlures mictionelles, douleurs sus pubiennes, fièvre Aspects cliniques proches des infections "communautaires" DEFINITION- DIAGNOSTIC (CSHPF de France) Bactériurie asymptomatique = colonisation (présence de bactéries dans l’arbre urinaire sans manifestation clinique) Si sondage récent (< 1 semaine): ECBU 105 cfu/ml 103 UFC/ml (conf . de consensus) Si absence de sondage : 2 ECBU consécutifs 105 cfu/ml (même germe, pas plus de deux germes isolés) Bactériurie symptomatique = infection (agression tissu par germe générant une réponse inflammatoire) Fièvre et/ou signes urinaires (pollakiurie, dysurie, envie impérieuse, douleur sus pubienne) + Uroculture 105 cfu/ml ou Uroculture 103 cfu/ml ET leucocyturie 104 /ml Traitement 1- Bactériurie asymptomatique Sonde en place : ne pas traiter (sauf exception) A l'ablation de la sonde : pas de traitement immédiat contrôle ECBU à 48 h Pas de sonde : traitement classique 2- Infection urinaire basse (bactériurie symptomatique) Traitement conventionnel (7 à 10 jours) Quinolone, cotrimoxazole, bêtalactamine PREVENTION MESURES D’EFFICIACITE PRROUVEE : Limiter les indications du sondage Limiter la durée Respecter une technique aseptique de pose protocole écrit lavage antiseptique des mains Utiliser un système clos de drainage sac en position déclive Respecter les règles d'hygiène locale et générale PREVENTION MESURES D’EFFICACITE NON PROUVEE : Désinfection systématique du méat urétral Lavage de vessie Introduction d’antiseptique dans la poche de drainage Changement de sonde systématique Utilisation de sonde recouverte d ’ATS ou d ’ATB Antibioprophylaxie avant la pose de sonde vésicale 2- PNEUMOPATHIES NOSOCOMIALES EPIDEMIOLOGIE 2e cause d'infection nosocomiale 0,5 à 1 % des patients hospitalisés Incidence plus élevée en réanimation : 20 à 40 % des patients 15-20 /1000 jours de ventilation 1re cause de décès par infection nosocomiale Augmentation durée d ’hospitalisation : + 7-9 jours Mortalité : 30 à 60 % Germes responsables de pneumopathies nosocomiales % 60 % 60 50 40 30 % 30 % 30 20 10 10 % 10 % ? 0 BGN S. aureus Staph. Candida Autres Polycoag. sp. microbien nég. Epidémiologie des bacilles à Gram négatif KES 25 % Acinetobacter 15 % Autres 15 % Pseudomonas 45 % Deux types de pneumonie nosocomiale Précoces (< J5) : Tardives (> J5) Flore oropharyngée commensale : Staph. méti-S Pneumocoque Haemophilus E. coli Germes hospitaliers multirésistants : Pseudomonas Staph. méti-R Acinetobacter KES Facteur prédisposant : trouble de conscience Facteurs prédisposants : score de gravité initial ventilation prolongée INTUBATION Physiopathologie • Micro-inhalation de sécrétions oropharyngées +++ • Inoculation directe par voie hématogène • Voie transdiaphragmatique (rare) • Inoculation aérienne (aspergillus) Physiopathologie Colonisation rétrograde par la flore digestive favorisée par : la présence d'une sonde nasogastrique le décubitus l'impossibilité de boire, les troubles de la déglutition l'usage de morphiniques ou de curares l'administration préalable d'antibiotiques Rôle de l'environnement mains du personnel médical et paramédical Physiopathologie Colonisation favorisée par la présence d'une sonde nasogastrique Physiopathologie Contamination directe possible par le matériel de ventilation : pièges à eau, nébuliseurs, circuits de ventilation. Facteurs de risque Pneumonies : Age > 70 ans Pathologie pulmonaire chronique (BPCO) Intubation > 3 jours Inhalation liquide gastrique Altération de la conscience Chirurgie thoraco-abdominale récente Diagnostic Diagnostic radiologique (RX, scanner) : opacités parenchymateuses anormales, récentes et évolutives ET soit l ’identification d ’un germe à partir de l ’expectoration de la PTT du LBA : 5% de cellules infectées ou > 104 bact/ml de la brosse : > 103 bact/ml de la ponction abcès pulmonaire histologie soit une sérologie (légionelle) soit au moins un des signes suivants expectorations purulentes récentes fièvre > 38°5 en l ’absence d ’autres causes hémoculture positive en l ’absence d ’autre cause Diagnostic : endoscopie bronchique Diagnostic : brossage bronchique protégé Brosse non sortie Bouchon en place Brosse téléscopique protégée Brosse sortie ; bouchon de polyéthylène ayant sauté Diagnostic Brossage bronchique protégé Seuil de positivité : 103 ufc/ml Technique retenue par la SRLF Pour : Contre : Prélèvement dirigé et protégé Invasif 30 % de faux négatifs Faible volume de sécrétions respiratoires recueilli Diagnostic Lavage broncho-alvéolaire Seuil de positivité : 104 ufc/ml 7 % de cellules infectées Pour Contre Renseignements apportés par l'examen direct Technique invasive ; désaturation Quantité importante de sécrétions respiratoires recueillies Importance du territoire exploré Diagnostic Aspiration endotrachéale Diagnostic Aspiration endotrachéale Seuil de positivité : 106 ufc/ml Pour Contre Technique simple, non invasive Prélèvement non distal, non protégé Coût faible 20 % de faux positifs et de faux négatifs Prévention 1- Limiter le risque infectieux exogène Lavage des mains Port de gants pour les soins du ventilé Eau stérile Stérilisation des circuits de ventilation après chaque patient Prévention 2- Lutter contre les facteurs de risque infectieux endogène Colonisation des voies aériennes : Désinfection soigneuse de l'oropharynx avant intubation Aspirations de l'oropharynx et du nez à intervalles réguliers, après réalisation de lavages locaux (technique du « no touch ») Inhalation de sécrétions oropharyngées: de liquide gastrique et de sécrétions oropharyngées Position demi-assise Eviter la sédation profonde et la curarisation Usage de sondes gastriques de petite taille Usage de sucralfate dans la prévention anti-ulcéreuse (discuté) Prévention Patient légèrement sédaté, en position demi-assise Prévention Manipulation de la sonde d'aspiration avec une compresse stérile