activité antifongique d`extraits de thymelaea lythroides sur trois

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Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2004, 143, 31-38
ACTIVITÉ ANTIFONGIQUE D’EXTRAITS DE
THYMELAEA LYTHROIDES SUR
TROIS CHAMPIGNONS PATHOGÈNES DU RIZ (*)
N. DOHOU (1), K. YAMNI (1), A. BADOC (2), A. DOUIRA (1)
Les racines, écorces, feuilles, fleurs et fruits de Thymelaea
lythroides, plante médicinale répandue dans la forêt de la Mamora
dans la région du Gharb au Maroc, ont été extraits par quatre
solvants : éther de pétrole, chloroforme, acétate d’éthyle et
méthanol. Les extraits présentent une activité antifongique
variable sur Curvularia lunata, Helminthosporium oryzae et
Pyricularia oryzae, champignons pathogènes du Riz. La
sporulation apparaît plus inhibée que la croissance mycélienne.
INTRODUCTION
Parmi les ressources naturelles, les plantes médicinales et
aromatiques jouent un rôle non négligeable dans l’économie au Maroc [5].
Dans le cadre d’une contribution à la valorisation du patrimoine naturel
marocain, des recherches sur Thymelaea lythroides ont été engagées. C’est
une espèce endémique ibéro marocaine bien connue de la région du Gharb
et tout particulièrement de la forêt de la Mamora. Peu d’études ont été
effectuées sur cette plante [4]. Nous avons récemment effectué des études
(*) Manuscrit reçu le 9 avril 2004.
(1) Laboratoire de Botanique et de Protection des plantes, Département de Biologie,
Faculté des Sciences de Kénitra, Université Ibn Tofaïl, BP 133, 14000 Kénitra,
(2) Laboratoire de Mycologie et Biotechnologie végétale, GESVAB - EA 3675,
Faculté des Sciences pharmaceutiques, Université Victor-Segalen Bordeaux 2,
146, rue Léo-Saignat, 33076 Bordeaux Cedex. [email protected]
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phytochimiques [1-2] qui ont mis en évidence la richesse de la plante en
métabolites secondaires, notamment en polyphénols.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Matériel végétal
Thymelaea lythroides Barr. et Murb., de la famille des Thyméléacées
(ordre des Malvales), a été récoltée dans la forêt de Mamora, à différents
stades végétatifs pour l’obtention de feuilles (février 2002), fleurs (février
2002), fruits (mars - avril 2002), écorces et racines (été 2002). Chaque partie
de la plante a été ensuite séchée à l’ombre, à l’abri de l’humidité et
conservée dans des récipients hermétiquement fermés, à température
ambiante et à l’abri de la lumière jusqu’à leur extraction.
Extraction des substances naturelles
Le matériel végétal est tout d’abord broyé dans un broyeur électrique
(type Krups, Power X). Il est ensuite extrait simultanément avec quatre
solvants qui sont dans l’ordre croissant de polarité l’éther de pétrole, le
chloroforme, l’acétate d’éthyle et le méthanol.
L’extraction des substances naturelles à partir de chaque partie de la
plante est effectuée en utilisant un appareil Soxlhet selon la méthode
préconisée par la Pharmacopée française. Les quantités de matériel végétal
placées dans les cartouches sont d’environ 50 g (racines, écorce, fleurs) ou
100 g (feuilles, fruits). Les extraits finaux sont obtenus après concentration
et élimination du solvant par évaporation rotative. Les extractions ont été
répétées au moins trois fois.
Tests biologiques
L’activité antifongique des extraits a été recherchée in vitro. Les
microorganismes testés sont trois pathogènes récoltés dans les rizières
marocaines : Curvularia lunata (isolat SF), Helminthosporium oryzae (isolat
Hot) et Pyricularia oryzae (isolat FK1).
L’étude de l’activité antifongique des extraits naturels a été effectuée
sur un milieu solide gélosé (le PSA : 200 g de pomme de terre, 20 g de
saccharose, 15 g d’agar-agar, 1000 ml d’eau distillée) en comparant leur
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action à diverses concentrations (entre 500 et 1500 ppm selon l’effet obtenu)
sur les stades de la vie du champignon : croissance mycélienne et
sporulation. Les extraits ont été mis en suspension dans 0,5 ml au maximum
d’éthanol à 95° et mélangés au PSA à chaud avant distribution dans des
boîtes de Petri.
Les résultats obtenus sont exprimés en pourcentage d’inhibition
(PI) [6] :
PI AB
Ax= 100
A : Diamètre moyen de la croissance ou nombre de spores estimé
du champignon sur milieu témoin.
B : Diamètre moyen de la croissance ou nombre de spores estimé
du champignon en présence de l’extrait à tester.
Trois boîtes de Petri ont été utilisées par condition et au moins trois
répétitions ont été effectuées à des temps différents.
De l’équation de régression linéaire entre les logarithmes népériens
des concentrations (en abscisses) et les pourcentages d’inhibition de la
croissance ou de la sporulation (en ordonnées), on détermine les
concentrations réduisant de 50 (CI50) et 90 % (CI90) la croissance
mycélienne ou la sporulation.
RÉSULTATS
La croissance mycélienne de Curvularia lunata à 1000 ppm (1 mg
d’extrait / ml de milieu gélosé) a été inhibée et le maximum d’inhibition est
obtenu avec les extraits chloroformiques des fleurs et des fruits (rendements
respectifs de 76,1 et 73,3 %) (Figure 1). Pour les extraits des autres organes
étudiés, l’inhibition est moins importante avec des pourcentages allant
jusqu’à 62 %. Ce sont surtout les fleurs, les fruits (extraits à l’acétate
d’éthyle) et les feuilles (extraits au chloroforme et à l’acétate d’éthyle) qui
présentent le plus d’activité avec des inhibitions dépassant les 40 %.
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Fig. 1 : Effet antifongique des extraits de diverses parties de Thymelaea
lythroides à l’éther de pétrole (E), au chloroforme (C), à l’acétate d’éthyle
(A) et au méthanol (M) sur la croissance de trois champignons.
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L’effet des extraits à la même concentration est plus marqué sur la
sporulation (Figure 2). La plupart des extraits ont présenté un pourcentage
d’inhibition supérieur à 60 %. Certains ont même inhibé totalement la
sporulation, comme l’extrait méthanolique des fleurs et l’extrait
chloroformique des fruits.
Pour la croissance mycélienne, les extraits chloroformiques des
fleurs et des fruits et méthanoliques des fleurs présentent les CI50 les plus
faibles. Pour la sporulation, les mêmes extraits, ainsi que l’extrait
chloroformique des feuilles et les extraits méthanoliques des feuilles et des
fleurs, sont les plus actifs avec des valeurs de CI50 et CI90 les plus faibles.
La croissance d’Helminthosporium oryzae a été inhibée à plus de
20 % par les différents extraits à 1000 ppm (Figure 1). L’extrait
chloroformique des feuilles et les extraits des fleurs sont les plus actifs.
L’extrait méthanolique des fleurs a totalement inhibé la croissance
mycélienne.
L’inhibition de la sporulation (Figure 2) est totale pour la plupart des
extraits à 1000 ppm et toujours supérieure à 90 %.
Le calcul des CI50 et CI90 confirme que l’extrait méthanolique des
fleurs est le plus actif sur la croissance. Pour la sporulation, les valeurs de
CI50 et CI90 sont faibles (inférieures à 600 ppm) et mettent en évidence un
important pouvoir antifongique des extraits.
La croissance mycélienne de Pyricularia oryzae (Figure 1) a été
totalement inhibée par l’extrait à l’éther de pétrole de l’écorce, les extraits
chloroformique et à l’acétate d’éthyle des fleurs et l’extrait méthanolique
des fruits à 1000 ppm. Les CI50 de ces extraits sont comprises entre 500 et
650 ppm et les CI90 entre 800 et 900 ppm. Les autres extraits présentent une
inhibition de 15 à 75 %, voire une stimulation de la croissance.
Aucun des extraits de T. lythroides, utilisés à 1000 ppm, n’a permis
au champignon de sporuler. Tous les extraits présentent une CI50 inférieure à
250 ppm et une CI90 inférieure à 500 ppm, démontrant qu’ils sont plus
efficaces sur la sporulation que sur la croissance.
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