UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2011-2012 UNIVERSITE DE NANTES L’innervation des corps érectiles chez la femme Par DEVYS Cédric LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : • • • • • • • • • • • • • • • • Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Pr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr E. FRAMPAS Dr A. HAMEL Dr O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2011-2012 UNIVERSITE DE NANTES L’innervation des corps érectiles chez la femme Par DEVYS Cédric LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : • • • • • • • • • • • • • • • • Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Pr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr E. FRAMPAS Dr A. HAMEL Dr O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique REMERCIEMENTS Aux Professeurs d’Anatomie, qu’ils trouvent dans ce travail l’expression de notre respect et de notre intérêt pour leurs enseignements. A Monsieur le Docteur Ploteau, tout particulièrement, pour nous avoir confié ce sujet de mémoire. A Monsieur Lagier et à Monsieur Blin, pour leurs conseils et leur aide précieuse. A Madame Charrier et à Madame Trichet, pour leur disponibilité et leur compétence en matière d’Histologie. Aux moniteurs d’Anatomie, pour leur partage d’expérience. Aux étudiants du Master d’Anatomie, pour l’ambiance de travail. A Titite et à nos quatre loupiots, pour leurs encouragements et leur curiosité de connaître l’origine sensitive du nerf pudendal. Aux anonymes qui par leur don ont rendu ce travail possible. TABLE DES MATIERES I. INTRODUCTION ..................................................................... 2 II. RAPPELS ............................................................................... 3 A. B. Embryologie des organes génitaux externes ........................................ 3 Anatomie ............................................................................................... 4 1. L'appareil érectile............................................................................... 4 2. Vascularisation de l’appareil érectile ................................................. 5 3. Innervation de l’appareil érectile ........................................................ 6 C. Histologie .............................................................................................. 7 D. Anatomie fonctionnelle .......................................................................... 8 III. A. B. IV. A. B. C. D. E. F. G. V. A. B. C. D. VI. MATERIEL ET METHODES ................................................ 9 Etude macroscopique............................................................................ 9 Etude microscopique ........................................................................... 10 RESULTATS : DESCRIPTION .......................................... 11 Dissection n°1 .................................... ................................................. 11 Dissection n°2 .................................... ................................................. 12 Dissection n°3 .................................... ................................................. 13 Dissection n°4 .................................... ................................................. 14 IRM pelvienne du sujet n°5 ........................ ......................................... 14 Dissection n°6 .................................... ................................................. 14 Résumé des principales observations ................................................. 15 RESULTATS : ILLUSTRATIONS ...................................... 16 Rapports, morphologie et structure ..................................................... 16 Vascularisation et innervation ............................................................. 20 L’innervation somatique ...................................................................... 24 L’innervation autonome ....................................................................... 29 DISCUSSION ..................................................................... 30 A. B. Sur le trajet du NDC et quelques autres observations ........................ 30 Deux applications cliniques ................................................................. 31 1. Le cas des mutilations sexuelles féminines ..................................... 31 2. Le cas des troubles de la miction .................................................... 32 C. Limites de notre étude ......................................................................... 33 VII. CONCLUSION ................................................................... 33 VIII. ANNEXES .......................................................................... 34 IX. REFERENCES................................................................... 35 L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 1 I. INTRODUCTION « Le clitoris est, comme les corps caverneux de la verge, susceptible d'entrer en érection. Mais cette érection est incomparablement moins parfaite que pour les corps caverneux de l'homme ».i L'anatomie des corps érectiles chez la femme a longtemps été traitée en termes comparatifs. Cette anatomie connaît cependant un regain d'intérêt depuis une quinzaine d’années. Les travaux de O’Connellii ont ainsi permis la redécouverte d’une région, remarquablement bien décrite en son temps par Kobelt.iii Les applications sont nombreuses : dyspareunies, mutilations génitales, incontinence. La meilleure connaissance anatomique de cette région offre de nouvelles perspectives. Ainsi, le traitement de certaines incontinences chez la femme pourrait s'envisager en stimulant le nerf dorsal du clitoris (NDC).iv Notre étude porte sur l'innervation des corps érectiles chez la femme, et plus particulièrement sur le NDC. Le NDC est l'une des branches terminales du nerf pudendal (NP). Son trajet et sa terminaison ont fait l'objet de travaux récents.v vi Nous chercherons à confronter nos observations aux résultats de ces travaux. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 2 II. RAPPELS Les corps érectiles sont constitués chez la femme des corps caverneux et des bulbes vestibulaires. A. Embryologie des organes génitaux externes Le développement précoce des organes génitaux externes est similaire chez l’embryon féminin et l’embryon masculin.vii Au stade indifférencié : • à la 3ème semaine, la membrane cloacale est bordée latéralement de deux ébauches mésenchymateuses recouvertes par de l’ectoderme. A la 4ème semaine, ces deux ébauches fusionnent médialement pour former le tubercule génital. Le tubercule génital s’allonge à la 7ème semaine pour former le phallus ; • à la 6ème semaine, la membrane cloacale, qui est entourée par les plis uro-génitaux et par les plis labio-scrotaux, se subdivise en membrane uro-génitale et anale. La différenciation débute autour de la 10ème semaine de développement, en l’absence d’androgènes chez l’embryon féminin : • le phallus s’allonge et forme le clitoris où du tissu érectile se développe. Le tissu érectile est d’origine mésenchymateuse ; • les plis uro-génitaux deviennent les petites lèvres et les plis labioscrotaux deviennent les grandes lèvres. Les grandes lèvres fusionnent en arrière pour former la commissure labiale postérieure, et en avant pour former le mont de pubis ; • l’invagination circulaire de l’épithélium à l’extrémité du clitoris donne le prépuce ou capuchon. L’aspect définitif est acquis à partir de la 12ème semaine. Dérivés adultes des structures urogénitales embryonnairesviii : Structure embryonnaire Tubercule génital / phallus Plis uro-génitaux Plis labio-scrotaux Femme Clitoris : • Gland • Corps caverneux • Bulbes vestibulaires Tissu périanal Raphé périnéal Petites lèvres Grandes lèvres Homme Pénis : • Gland • Corps caverneux • Corps spongieux Tissu périanal Raphé périnéal Partie ventrale du pénis et urètre pénien Scrotum L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 3 B. Anatomie La vulve, qui désigne l'ensemble des organes génitaux externes de la femmeix, a une quantité infinie de formes et de tailles.x Elle comprend les structures suivantes : • un appareil labial constitué des grandes lèvres et des petites lèvres ; • un appareil glandulaire constitué des glandes vestibulaires majeures (de Bertholin), des glandes vestibulaires mineures et des glandes paraurétrales (de Skène) ; • un appareil érectile constitué d'un organe médian (clitoris) et de deux organes latéraux (les bulbes vestibulaires). Schéma n°1 : vue inférieure du périnée féminin Avant Gauche Gland du clitoris Pilier du clitoris Muscle ischio-caverneux Bulbe vestibulaire Muscle bulbo-spongieux Glande vestibulaire majeure Muscle transverse superficiel du périnée Muscle sphincter externe de l’anus Muscle élévateur de l’anus Grand fessier Coccyx 1. L'appareil érectile Le clitoris se situe à la partie supérieure et antérieure de la vulve. Long en moyenne de 6 à 7 centimètres à l'état de flaccidité, le clitoris est en grande partie caché. Il s'envisage en trois parties : • deux piliers, formés par les corps caverneux. Situés à la face interne des branches ischiopubiennes, les piliers sont très adhérents à l'os donc peu mobiles. Ils sont recouverts par les muscles ischio-caverneux et convergent vers l'avant et le haut pour former le corps du clitoris ; L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 4 • le corps du clitoris est de forme cylindrique. D'abord oblique en avant et en haut, le corps se coude juste en avant de la symphyse pubienne, formant le genou du clitoris. Le corps se dirige alors vers le bas et l'arrière jusqu'au gland. Au niveau du genou, le clitoris est maintenu à la symphyse pubienne par le ligament suspenseur du clitoris. De nature fibroélastique, le ligament suspenseur prolonge la ligne blanche, entoure le corps du clitoris et se poursuit jusqu'aux grandes lèvres ; • le gland du clitoris correspond à l'extrémité distale du corps du clitoris. Seule partie visible, il est de forme conique, recouvert d'une peau fine et glabre. Il peut être enfoui sous un capuchon ou prépuce, repli cutané qui dépend des petites lèvres. A la face postérieure, un petit repli médian (le frein) rattache le clitoris aux petites lèvres. Les bulbes vestibulaires enserrent le vagin. Longs de 3 à 3,5 centimètres, ils se situent donc en dedans des piliers du clitoris. Leur extrémité antérieure se place entre le méat urétral et le clitoris. A ce niveau, les bulbes vestibulaires et le clitoris communiquent par l'intermédiaire d'un plexus veineux (de Kobelt). Les bulbes vestibulaires sont recouverts du muscle bulbo-spongieux. Le muscle bulbo-spongieux s'insère en arrière sur le centre tendineux du périnée et se termine par deux faisceaux au niveau du genou du clitoris. 2. Vascularisation de l’appareil érectile • Les artères destinées au clitoris et à son capuchon forment des branches terminales de l'artère pudendale interne. Elles sont au nombre de deux de chaque côté : 1/ l'artère profonde du clitoris ou artère caverneuse, qui parcourt le corps caverneux en son centre et 2/ l'artère dorsale du clitoris, qui passe sous le muscle transverse profond du périnée, traverse le ligament suspenseur du clitoris pour cheminer au dos du clitoris. Les bulbes vestibulaires reçoivent chacun une artère issue de l'artère pudendale interne. • Les veines du clitoris sont nombreuses. Sont décrites une veine dorsale superficielle qui aboutit à la grande veine saphène et une veine dorsale profonde qui rejoint le plexus veineux rétro-pubien (de Santorini). Ventralement, de plus petites veines rejoignent le plexus intermédiaire (de Kobelt). Les veines des bulbes vestibulaires s'organisent en un réseau profond et un réseau superficiel. Elles s'anastomosent avec les réseaux de voisinage (clitoris, vagin, appareil labial) pour s'aboucher dans la veine pudendale interne. • Le drainage lymphatique se fait vers la région inguinale. Pour le clitoris, coexistent un réseau superficiel et un réseau profond. Le réseau profond, à la face dorsale, rejoint le réseau pré-symphysaire avant de se drainer dans la région inguinale. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 5 3. Innervation de l’appareil érectile Les corps érectiles reçoivent deux types d’innervation : 1/ somatique, assurée par le NP (racines S2-S3-S4, parfois S1 et S5) et sa branche terminale le NDC ; 2/ végétative, avec le nerf caverneux (NC) et le nerf spongieux (NS) issus du plexus hypogastrique inférieur (PHI). • Innervation somatique : à la sortie du canal pudendal (d’Alcock), le NP donne le nerf rectal inférieur, des rameaux périnéaux (superficiel et profond) et le NDC. Le NDC est décrit comme un nerf essentiellement sensitif à prédominance S2 dans 60,5% des cas (S1 4% et S3 35,5%).xi D’autres nerfs d’origine thoraco-lombaire chevauchent les territoires du NP : 1/ le nerf ilio-hypogastrique innerve la région prépubienne ; 2/ le nerf ilio-hypogastrique innerve les grandes lèvres en association avec le nerf génito-fémoral.xii • Innervation autonome : le PHI est destiné à l’innervation végétative des viscères pelviens et des organes érectiles.xiii Situé dans la cavité pelvienne, c’est un plexus nerveux, ganglionné, pair, dont la partie distale forme le plexus vaginal. Du plexus vaginal naissent trois branches principales, qui sont responsables de la continence urinaire et de la fonction sexuelle : 1/ le plexus urétral destiné au sphincter urétral, 2/ le NC destiné aux corps caverneux du clitoris et 3/ le NS destiné aux bulbes vestibulaires.xiv Le système somatique et le système autonome sont étroitement liés : des communications sont décrites entre le NC et le NDC à l’endroit où le NC pénètre dans le corps du clitoris.xv Schéma n°2 : trajet du NDC et territoires sensitifs périnéaux en vue inférieure Territoires sensitifs Trajet du NDC Nerf ilio-hypogastrique Nerf ilio-inguinal Nerf génito-fémoral NDC Nerf clunial inférieur (rameaux périnéaux du nerf cutané postérieur de la cuisse) Nerf pudendal Nerf périnéal Nerf pudendal Nerf rectal inférieur Avant Gauche L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 6 Schéma n°3 : vue médiale d’un hémi-bassin gauche, représentant le plexus hypogastrique inférieur Haut Avant Artère iliaque externe Chaîne ganglionnaire sacrée (orthosympathique) S2 S3 Nerf hypogastrique issu du plexus hypogastrique supérieur (orthosympathique) Nerfs splanchniques pelviens (parasympathique) S4 Plexus hypogastrique inférieur Plexus vaginal Rectum et utérus réclinés C. Histologie Quatre entités peuvent être décrites : 1/ le corps et les piliers du clitoris, 2/ le gland du clitoris, 3/ le prépuce, 4/ les bulbes vestibulaires. • Le corps et les piliers du clitoris sont constitués d’un système d’aréoles ou sinus caverneux entourés d’une enveloppe fibreuse : l’albuginée. Au niveau du corps du clitoris, les corps caverneux droit et gauche sont séparés l’un de l’autre par un septum médian incomplet. • Le gland du clitoris est formé par un noyau central de nature conjonctive, recouvert extérieurement par une muqueuse dermique papilliforme. Il y a à ce niveau une forte densité de terminaisons nerveuses et de mécanorécepteurs. Le tissu érectile est présent dans des proportions plus modestes que dans le corps. • Le prépuce est formé d’un épithélium malpighien. • Les bulbes vestibulaires sont constitués de tissu érectile mais ne sont pas entourés d’une albuginée.xvi xvii L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 7 Schéma n°4 : coupe transversale du corps du clitoris Haut NDC Veine dorsale superficielle et veine dorsale profonde Artère dorsale du clitoris Gauche Tissu conjonctif celluleux Albuginée des corps caverneux Artère caverneuse Septum médian incomplet Aréoles des caverneux Petites veines rejoignant le plexus intermédiaire D. Anatomie fonctionnelle Les corps érectiles jouent un rôle important dans l’orgasme féminin : • le gland du clitoris est une zone érogène primaire de la femme, comme le canal vaginal. Ces deux zones érogènes primaires possèdent leur autonomie orgasmique, mais leur fonctionnement est habituellement synergique. L'orgasme clitoridien est un catalyseur physiologique de l’orgasme vaginal ; • le mode de stimulation des zones érogènes primaires est de type mécanique et alternatif. Le gland du clitoris est riche en mécanorécepteurs comme les corpuscules de Krause-Finger (corpuscules de la volupté). Les stimuli mécaniques sont véhiculés par le NDC (système somatique) ; • la tumescence clitoridienne (ou érection clitoridienne) qui suit la stimulation est liée à l’élévation de la pression intra-caverneuse par augmentation du flux sanguin dans les artères des corps caverneux. C’est l’influx cholinergique parasympathique contenu dans le NC qui est responsable de cette vasodilatation artérielle (système autonome) ; • la coudure du clitoris persiste ou s’accentue lors de l’érection clitoridienne, ce qui place le gland du clitoris plus proche de l’entrée du vagin. Dilaté par le pénis, le canal vaginal comprime quant à lui les piliers du clitoris. Ceci expliquerait la sensibilité de la paroi antérieure du vagin (point G) lors du rapport sexuel.xviii L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 8 III.MATERIEL ET METHODES Nous avons mené notre étude en deux temps avec une approche macroscopique puis une approche microscopique : • L’approche macroscopique a eu pour principaux objectifs de préciser les rapports des corps érectiles de la femme, d’en étudier la vascularisation et l’innervation, avec une attention plus particulière portée sur le trajet des nerfs et leur distribution. • L’approche microscopique a cherché à mettre en évidence la richesse de l’innervation au niveau du corps et du gland du clitoris. A. Etude macroscopique Nous avons réalisé 4 dissections de sujets de sexe féminin, tous très probablement ménopausés. • Dissection n°1 : sujet de sexe féminin, âgé de 91 ans et 1 mois, conservé formolé. Le prélèvement a été effectué le 18 octobre 2011. L’abord suivi a été gynécologique. • Dissection n°2 : sujet de sexe féminin, âgé de 94 ans et 4 mois, conservé frais. Le prélèvement a été effectué le 15 février 2012. L’abord suivi a été gynécologique. Nous avons injecté au latex les artères iliaques internes droite et gauche en prenant soin de clamper les artères iliaques externes et les artères fémorales. La dissection a révélé l’implantation chez ce sujet d’un système de contrôle urinaire de type AMS 800TM. • Dissection n°3 : sujet de sexe féminin, âgé de 83 ans et 6 mois, conservé formolé. Le prélèvement a été effectué le 8 mars 2012. L’abord suivi a été gynécologique. • Dissection n°4 : sujet de sexe féminin, âgé de 88 ans et 3 mois, conservé formolé. Le prélèvement a été effectué le 8 mars 2012. La coupe sagittale médiane effectuée après congélation a permis un abord interne. Nous avons utilisé comme matériel de dissection : un bistouri n°4 avec lame n°23, des ciseaux droits et pointus, des ciseaux co urbes, des pinces à disséquer à mors striés et des pinces à préhension. Nous avons analysé l’IRM pelvienne d’1 sujet féminin. • Sujet n°5 : patiente suivie en gynécologie-obstétrique au CHU de Nantes. Les acquisitions ont été effectuées en 2012 avec une séquence T1 dite anatomique (l’eau apparaît en hyposignal). L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 9 Nous avons également réalisé une dissection de sujet masculin, à des fins comparatives. • Dissection n°6 : sujet de sexe masculin, âgé de 80 ans et 0 mois, conservé frais. Le prélèvement a été effectué le 6 avril 2012. L’abord suivi a été antérieur. B. Etude microscopique Nous avons réalisé des coupes histologiques chez deux des 4 sujets ayant fait l’objet de l’étude macroscopique. • Dissection n°2 : nous avons réalisé deux prélèvements au niveau du corps du clitoris, juste en aval de l’entrée des NDC dans le clitoris. Les deux prélèvements étaient espacés de 3mm. Le tissu environnant n’a pas été conservé. • Dissection n°3 : nous avons réalisé quatre prélèvements sériés au niveau du corps du clitoris (x3), en aval de l’entrée des NDC dans le clitoris, et au niveau du gland (x1). Chaque prélèvement était espacé de 3 à 4mm. Le tissu environnant a été conservé. Les coupes ont été réalisées avec une épaisseur de 4µm. La coloration utilisée a été une coloration standard H&E (Hématéine & Eosine). L’observation a été faite au microscope optique. Photo n°1 : aspect macroscopique d’un prélèvement effectué au niveau du corps du clitoris (sujet n°2) Schéma n°5 : vue latérale du clitoris montrant le plan de coupes pour les prélèvements sur le sujet n°2 et sur le sujet n°3 Haut Ligament suspenseur Avant 3d / 2b 3c / 2a 3b 3a Urètre L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 10 IV. RESULTATS : DESCRIPTION A. Dissection n°1 Première étape : observation des organes érectiles et de leurs rapports Dans un premier temps, nous avons cherché à isoler le ligament suspenseur du clitoris. Pour ce faire, nous avons dégagé le pubis, mieux mis en valeur par un travail préliminaire sur les régions adjacentes : mise à jour du triangle fémoral et des muscles les plus superficiels. Nous avons ensuite réséqué les grandes et les petites lèvres, laissant apparaître le gland du clitoris qui se poursuit plus en amont par le corps et le genou du clitoris. Deuxième étape : étude de l’innervation Dans un deuxième temps, notre objectif a été d'isoler le nerf dorsal du clitoris (NDC), aisément retrouvé en distalité en décollant le clitoris de la symphyse pubienne. Pour accéder au NDC plus proche de sa jonction avec le nerf pudendal (NP), nous nous sommes servi des branches ischio-pubiennes comme principal repère. Le NDC a été retrouvé comme s’individualisant très tôt dès la sortie du canal pudendal (anciennement d’Alcock). (Photo n°14) Pour suivre le trajet du NDC jusqu’au genou du clitoris, il a été nécessaire de décoller les muscles et les corps caverneux, solidement attachés à l’os. L’étude du trajet du NDC nous a en outre permis de constater la richesse de l'innervation du périnée antérieur (branches périnéales du NP) et du périnée postérieur (nerf rectal inférieur, autre branche du NP). Troisième étape : l'ensemble urétro-clitorido-vulvaire Dans un troisième temps, nous avons extrait la filière génitale : vagin, utérus, trompes utérines. Pour ce faire, nous avons libéré les ligaments utérins par voie endopelvienne et nous avons réséqué la vessie. (Photo n°5) Lors de l’exérèse de la filière génitale, nous avons conservé les corps érectiles pour montrer leur proximité avec le vagin. Est à noter également le rapport intime que le clitoris entretient avec l’urètre. Le clitoris a ensuite été isolé pour mieux rendre compte de sa structure tridimensionnelle. (Photo n°6) L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 11 B. Dissection n°2 Première étape : observation des organes érectiles et de leurs rapports Comme précédemment, nous avons cherché à isoler le ligament suspenseur du clitoris. Les grandes lèvres ont ensuite été réséquées et la graisse nettoyée, laissant apparaître la partie distale des piliers droit et gauche du clitoris, ainsi que le genou et le corps du clitoris. Nous avons noté la proximité du clitoris avec les bulbes vestibulaires, par ailleurs très adhérents au vagin. (Photo n°4) Deuxième étape : étude macroscopique de l’innervation, vascularisation artérielle et de la vascularisation veineuse de la Les nerfs et les artères ont été mis en évidence in situ depuis leur émergence du canal pudendal (d’Alcock). Puis l’extraction du périnée antérieur et postérieur a permis d’individualiser à droite et à gauche : • le NP et ses branches de division ou de terminaison : le nerf rectal inférieur1, des rameaux périnéaux (superficiel et profond) et le NDC ; • l’artère pudendale et ses branches de division ou de terminaison : artère rectale inférieure, artères périnéales, artère dorsale du clitoris. (Photo n°8 et photo n°9) Une coupe transversale à travers les bulbes vestibulaires a permis de mieux en cerner la nature spongieuse et veineuse. • A droite, cette coupe a révélé 1/ la veine superficielle du clitoris, qui rejoint la grande veine Saphène, et 2/ la veine profonde du clitoris, qui rejoint le plexus veineux rétro-pubien (de Santorini). • Le plexus veineux rétro-pubien a été bien identifié comme entourant l’urètre. (Photo n°11) • Un dernier élément veineux a été relevé à la partie inférieure (ventrale) du clitoris où de petites veines rejoignent le plexus intermédiaire (de Kobelt). (Photo n°10) Troisième étape : étude microscopique du corps du clitoris L’étude microscopique nous a permis de mettre en évidence au niveau du corps du clitoris : 1 • le paquet vasculo-nerveux dorsal ; • les artères caverneuses et des filets nerveux les accompagnant ; A gauche le nerf rectal inférieur n’a pu être préservé. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 12 • les aréoles (ou cavités communicantes) cloisonnées par des lames fibreuses ; • le septum médian incomplet correspondant à l’union des deux corps caverneux. C. Dissection n°3 Première étape : observation des organes érectiles et de leurs rapports Comme lors de la dissection n°1, nous avons décollé le clitoris de la symphyse pubienne. Cela a permis d’observer le NDC droit et le NDC gauche dont le diamètre était de 2mm au niveau du genou du clitoris. (Photo n°15) La coupe frontale des corps caverneux et des bulbes vestibulaires a permis de préciser leurs rapports tout en confirmant leur nature spongieuse. (Photo n°7) Deuxième étape : étude microscopique du corps et du gland du clitoris L’étude microscopique nous a permis d’affiner les observations faites sur les lames réalisées à partir des prélèvements de la dissection n°2. Nous avons ainsi mis en évidence au niveau du corps et du gland du clitoris : • le paquet vasculo-nerveux dorsal avec 1/ les branches des NDC, 2/ les artères dorsales du clitoris et 3/ la veine profonde du clitoris ; (Photo n°12) • concernant les structures nerveuses : 1/ les nombreuses ramifications des NDC jusque dans le gland , 2/ de nombreux mécanorécepteurs du type corpuscules de Meissner (derme du gland) et corpuscules de Pacini (hypoderme du corps), 3/ la richesse de l’innervation du gland jusque dans les papilles dermiques. Nous avons ainsi dénombré plus de 50 fibres nerveuses d’un diamètre supérieur ou égal à 50µm dans la coupe la plus distale ; (Photos n°17, n°18, n°19, n°20) • concernant les corps caverneux : 1/ les aréoles (ou cavités communicantes) cloisonnées par des lames fibreuses, 2/ les artères caverneuses et les filets nerveux les accompagnant ; • concernant les tissus de soutien : 1/ des enveloppes clitoridiennes, riches en fibres élastiques, 2/ le septum médian correspondant à l’union des deux corps caverneux ; • de nombreux éléments veineux à la partie inférieure du corps du clitoris, partie qui communique avec les bulbes vestibulaires via le plexus intermédiaire. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 13 D. Dissection n°4 Première étape : observation des organes érectiles et de leurs rapports La coupe sagittale médiale réalisée a mieux rendu compte de la manière dont l'organe était enfoui sous la graisse du mont de vénus et la graisse labiale. (Photo n°2) Nous avons noté également l’interconnection des structures veineuses déjà analysées lors de la dissection n°2 (position du pl exus veineux intermédiaire et position du plexus veineux rétro-pubien). Deuxième étape : étude de l’innervation Sur l’hémi-bassin gauche : • nous avons enlevé le ligament large mais nous ne sommes pas parvenus à isoler les fibres du plexus hypogastrique inférieur au milieu des fibres fasciales (lames sacro-recto-génito-pubiennes) ; • nous avons ensuite retiré les vaisseaux et les viscères pelviens. Ceci nous a permis de suivre le trajet du NDC jusqu’au NP puis, après section du ligament sacro-épineux, jusqu’aux racines sacrées lui donnant naissance (S2-S3-S4). (Photo n°13) Sur l’hémi-bassin droit : • nous avons enlevé le ligament large puis nous avons ouvert l’hémibassin en dissociant l’articulation sacro-iliaque. Nous avons isolé le PHI en position para-rectale. La contribution de la chaîne ganglionnaire sacrée au PHI a été notée ; (Photo n°21) • nous avons pu suivre quelques fibres nerveuses du PHI jusqu’en position para-vaginale, où ces fibres forment le plexus vaginal. E. IRM pelvienne du sujet n°5 Les acquisitions réalisées ont permis de mieux figurer les rapports du clitoris, des bulbes vestibulaires, de l’urètre et du vagin. La dimension cachée du clitoris est apparue clairement dans les coupes axiales. (Photo n°3) F. Dissection n°6 A des fins comparatives, nous avons recherché en sous-pubien les Nerfs Dorsaux du Pénis (NDP) chez un sujet masculin. Nous avons constaté qu’à ce niveau, les NDP avaient un diamètre de 1mm environ et se divisaient rapidement en plusieurs branches très sinueuses. Les NDP étaient accompagnés des artères dorsales. (Photo n°16) L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 14 G. Résumé des principales observations Sur les corps érectiles de la femme, leur structure et leurs rapports : • le clitoris est surtout un organe profond, découvert sous la graisse labiale et le fascia profond du périnée ; • le clitoris s'envisage en 3D : il forme une pyramide à base triangulaire dont l'apex serait le point de génuflexion créé par le ligament suspenseur ; • le clitoris et les bulbes vestibulaires entretiennent des rapports intimes avec l'urètre et la paroi antérieure du vagin ; • les corps caverneux et les bulbes vestibulaires sont de nature spongieuse. Sur l’innervation des corps érectiles de la femme : • le NP, qui est issu du plexus sacré, donne une innervation très riche au périnée postérieur et antérieur via notamment le NDC ; • le NDC s’individualise très tôt à la sortie du canal pudendal. Son trajet est parallèle à la branche ischio-pubienne jusqu’à la symphyse pubienne ; • le NDC plonge dans le clitoris au niveau de son genou. A cet endroit, le NDC a un diamètre de 2mm environ. Sur la face dorsale du clitoris, le NDC droit et le NDC gauche se situent à 11 heures et à 1 heure respectivement ; • comme l’ont montré les coupes histologiques réalisées, le NDC donne de nombreuses ramifications qui se poursuivent jusqu’au gland du clitoris ; • au niveau du gland du clitoris, l’étude microscopique a montré la richesse des structures nerveuses, en particulier la présence de mécanorécepteurs du type corpuscules de Meissner et corpuscules de Pacini ; • le plexus hypogastrique inférieur, qui donne leur innervation autonome aux corps érectiles via le plexus vaginal, a pu être mis en évidence en para-rectal. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 15 V. RESULTATS : ILLUSTRATIONS A. Rapports, morphologie et structure Photo n°2 : vue médiale de l’hémi-bassin droit, montrant les rapports du clitoris aux organes pelviens (sujet n°4) Haut Promontoire Avant Corps utérin Vessie Rectum Vagin Méat urétral Corps du clitoris L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 16 Photo n° 3 : IRM pelvienne en coupe transversale, montrant les rapports des corps érectiles (sujet n°5) Avant Gauche Pilier du clitoris Bulbe vestibulaire Photo n°4 : vue de face, montrant l’insertion du ligament suspenseur du clitoris (sujet n°2) Haut Gauche Ligament suspenseur Pilier du clitoris Bulbe vestibulaire L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 17 Photo n°5 : vue antéro-latérale gauche de la filière génitale (sujet n°1) Haut Trompe Gauche Gland du clitoris Corps de l’utérus Vagin Pilier du clitoris Photo n°6 : vue inférieure du clitoris, montrant son aspect 3D de pyramide (sujet n°1) Haut Gland Gauche Corps Genou Pilier L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 18 Photo n°7 : vue antérieure, montrant la nature spongieuse des corps caverneux (sujet n°3) Haut Symphyse pubienne Gauche Corps caverneux L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 19 B. Vascularisation et innervation Photo n°8 : vue gynécologique du périnée antérieur et postérieur, montrant l’innervation et la vascularisation artérielle (sujet n°2) Avant Gauche NDC Nerfs périnéaux Nerf pudendal Nerf rectal inférieur Artère pudendale interne L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 20 Photo n°9 : vue gynécologique avec clitoris récliné sur la gauche, montrant les principales branches de division du nerf pudendal et de l’artère pudendale interne (sujet n°2) Avant Gauche NDC Symphyse pubienne Artère dorsale du clitoris Urètre Nerfs périnéaux Nerf pudendal Artère pudendale interne Centre tendineux du périnée Anus Nerf rectal inférieur L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 21 Photo n°10 : vue inférieure du corps et du gland du clitoris, montrant les veines rejoignant le plexus intermédiaire (sujet n°2) Avant Gland Gauche Veines rejoignant le plexus intermédiaire Photo n° 11 : vue supérieure endo-pelvienne, montrant les veines rejoignant le plexus rétro-pubien (sujet n°2) Avant Veines du plexus rétro-pubien Droite Urètre Vagin Rectum L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 22 Photo n° 12 : coupe histologique du corps du clitoris, montrant le paquet vasculo-nerveux dorsal, les artères caverneuses et les communications avec les bulbes vestibulaires (sujet n°3, coupe 3c) 1 2 6 3 4 2 5 7 1 4 DroiteC. 1 Artères dorsales du clitoris Haut 2 NDC 3 Veine dorsale profonde 4 Artères caverneuses 5 Septum médian 6 Communications avec les bulbes vestibulaires 7 Aréoles des corps caverneux L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 23 L’innervation somatique Photo n° 13 : vue antéro-médiale de l’hémi-bassin gauche, montrant l’origine sacrée du nerf pudendal (sujet n°4) Haut Gauche Avant L5 S1 S3 Nerf obturateur S2 S4 Nerf pudendal NDC L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 24 Photo n° 14 : vue gynécologique, montrant l’individualisation du NDC à la sortie du canal pudendal (sujet n°1) Avant Droite NDC Branche ischio-pubienne Nerf pudendal L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 25 Photo n° 15 : vue antérieure, montrant le trajet sous-pubien des NDC et leur entrée dans le clitoris au niveau de son genou (sujet n°3) Haut Symphyse pubienne Droite NDC gauche Photo n° 16 : vue antérieure, montrant le Nerf Dorsal du Pénis au même niveau (sujet n°6) Haut Symphyse pubienne Droite NDP gauche L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 26 Photo n° 17 : coupe histologique du corps du clitoris, montrant les branches de division du NDC (sujet n°3, coupe 3c) 1 4 2 Photo n° 18 : coupe histologique au niveau du corps du clitoris, montrant que le NDC est accompagné de mécanorécepteurs (sujet n°3, coupe 3d) 3 1 1 NDC (tronc principal) 2 Branches de division du NDC 3 Corpuscule de Pacini : capsule épaisse, couche lamellaire de cellules de Schwann 4 Aréoles des corps caverneux L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 27 Photo n° 19 : coupe histologique du gland du clitoris, montrant la richesse de l’innervation distale (sujet n°3, coupe 3a) 1 0 2 0 6 7 0 2 8 8 13 1 3 2 0 4 Photo n° 20 : coupe histologique du gland du clitoris, montrant la présence de nombreux mécanorécepteurs (sujet n°3, coupe 3a) 3 3 2 1 Cadrans localisant 56 sections de nerfs d’un diamètre supérieur ou égal à 50µm 2 Epithélium Malpighien 3 Corpuscules de Meissner L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 28 D. L’innervation autonome Photo n° 21 : vue antérieure de l’hémi bassin droit, ligament large réséqué et rectum récliné sur la gauche, montrant les fibres orthosympathiques formant le plexus hypogastrique inférieur (sujet n°5) Haut Gauche Articulation sacro-iliaque ouverte Plexus hypogastrique inférieur Rectum récliné sur la gauche Fibres rejoignant le plexus vaginal L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 29 VI. DISCUSSION A. Sur le trajet du NDC et quelques autres observations Plusieurs travaux anatomiques récents se sont attaché à décrire le trajet du NDC depuis le NP jusqu’au clitoris. Nos observations concordent avec celles de ces travaux, à savoir : • dans sa partie proximale, le NDC longe la partie inférieure de la branche ischio-pubienne parallèlement aux piliers du clitoris ; • dans sa partie distale, le NDC chemine d’arrière en avant sur la face dorsale du corps du clitoris pour se terminer dans le gland. Cependant : • une étude effectuée sur 6 cadavres de sujets féminins a proposé un trajet un peu différent pour la partie proximale : le NDC traverserait le muscle bulbo-spongieux avant d’atteindre le pilier du clitoris.v Nous n’avons pas fait cette observation, d’ailleurs contredite par une étude ultérieure ; vi • concernant la morphologie du NDC, nous n’avons pas constaté la sinuosité décrite par Aubin A.xix Notre étude microscopique a confirmé la richesse de l’innervation et la présence de nombreuses structures sensorielles au niveau du gland du clitoris, ce qui concourt à la fonction de l’organe : • cette richesse est connue de longue date : « le gland du clitoris est comparativement beaucoup plus riche en nerfs que le gland du pénis car les deux troncs des NDC sont relativement trois à quatre fois plus forts que ceux du pénis ».iii Chez le sujet n°6 et en sous-pubien, les NDP nous sont effectivement apparus plus ténus que les NDC observés chez les sujets n°1, 2, 3 et 4 au même niv eau ; • nous avons observé la présence de corpuscules de Meissner et de corpuscules de Pacini en nombre important. Nous n’avons pas mis en évidence cependant de corpuscules de Krause-Finger (corpuscules de la volupté), décrits dans les traités d’anatomie. Dans son étude histologique, O’Connell HE n’a fait mention que des corpuscules de Pacini ; xvi • les descriptions histologiques du clitoris étant en général très succintes et dépourvues de schéma ou de photo, nous avons travaillé par analogie avec le pénis pour analyser les coupes histologiques. Ceci nous a permis d’établir le schéma n°4. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 30 B. Deux applications cliniques L’étude du trajet du NDC et de l’innervation des corps érectiles chez la femme présente un intérêt clinique. Nous nous sommes intéressés à deux applications, détaillées ci-après. 1. Le cas des mutilations sexuelles féminines L’OMS estime à 140 millions le nombre de femmes victimes d’une mutilation sexuelle féminine (MSF) dans le monde. Les MSF comportent l’ablation de tissus génitaux normaux et sains. Elles ne comportent aucun avantage pour la santé et entravent le fonctionnement naturel de l’organisme féminin. • Les MSF sont les plus communes dans : 1/ l'ouest, l'est et le nordest de l'Afrique, 2/ certains pays d'Asie, 3/ au Moyen-orient et 4/ dans certaines communautés d'immigrants en Amérique du Nord et en Europe. • Les MSF sont le produit de divers facteurs : culturels, religieux et sociaux. Dans les régions où elles sont pratiquées, les MSF sont souvent considérées comme faisant partie de la nécessaire éducation d'une jeune fille et c’est la pression sociale qui incite à perpétrer cette pratique. Les praticiens pensent souvent que ces interventions ont un fondement religieux même si aucun texte religieux ne les prescrit. • Les MSF sont source de complications : urologiques, sexuelles, gynécologiques, obstétricales, psychologiques. • Les MSF sont classées en quatre catégories : I. La clitoridectomie : ablation partielle ou totale du clitoris (petite partie sensible et érectile des organes génitaux féminins) et, plus rarement, seulement du prépuce (repli de peau qui entoure le clitoris). II. Excision : ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans excision des grandes lèvres (qui entourent le vagin). III. Infibulation : rétrécissement de l'orifice vaginal par la création d'une fermeture, réalisée en coupant et en repositionnant les lèvres intérieures, et parfois extérieures, avec ou sans ablation du clitoris. IV. Autres : toutes les autres interventions néfastes au niveau des organes génitaux féminins à des fins non médicales, par exemple, piquer, percer, inciser, racler et cautériser les organes génitaux. Source : www.who.int Les MSF concernent plus de 50 000 femmes en France, essentiellement des femmes originaires d’Afrique. Un grand nombre bénéficient chaque année d’une chirurgie plastique reconstructrice du clitoris. La chirurgie réparatrice des clitoridectomies offre de bons résultats anatomiques et fonctionnels, L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 31 comme l’a montré Foldès P. dans une série de 453 patientes2 : • au plan anatomique : restauration du massif clitoridien (au minimum de son volume) dans 87% des cas ; • au plan fonctionnel : amélioration nette de la sexualité dans 75% des cas. Les techniques de la chirurgie réparatrice reposent sur la libération du corps du clitoris (section du ligament suspenseur) et sur le respect du paquet vasculo-nerveux dorsal. Deux éléments clés rendent possible la chirurgie réparatrice : 1/ le clitoris est en grande partie un organe profond (clé du résultat anatomique), 2/ le clitoris est richement innervé (clé du résultat fonctionnel). Notre étude nous a permis de valider chez 4 sujets la constance de ces deux éléments. 2. Le cas des troubles de la miction La neuromodulation (NM) est un traitement qui peut être proposé pour corriger deux types de troubles urinaires : 1/ l’hyperactivité vésicale, qui se manifeste par une envie d’uriner fréquente et urgente, associée ou non à des fuites d’urine par urgence, 2/ la rétention ou la dysurie sans obstacle anatomique (difficultés à vider la vessie). La NM est rarement proposée en première intention. Pour l’hyperactivité vésicale, sont en général proposés : des mesures hygiéno-diététiques, une rééducation des muscles périnéaux, des médicaments de la famille des anticholinergiques. Pour la rétention ou la dysurie sans obstacle anatomique, l’alternative est représentée par les auto-sondages propres intermittents. Le principe de la NM est d’appliquer via une électrode un courant électrique près de la racine spinale ventrale S3 (voire S2 ou S4) qui participe à la commande de la vessie et du sphincter de l’urètre. Dans 30% à 50% des cas, cette technique permet un meilleur contrôle de la miction.3 En général, la NM est pratiquée au niveau des racines sacrées. D’autres sites d’implantation des électrodes sont cependant utilisés ou à l’étude : • Le nerf tibial (racines L4 à S3) par exemple peut être stimulé en un point situé 5cm au-dessus de la malléole interne juste derrière le bord interne du tibia.xx • Le NDC (racines sacrées) et son homologue chez l’homme offrent des sites potentiels d’implantation. iv Dans cette optique, notre étude a confirmé chez 4 sujets la constance du trajet des NDC droit et gauche. 2 Source : Ministère de la Santé et des Sports, Le praticien face aux Mutilations Sexuelles Féminines (juillet 2010) 3 Source : www.urofrance.org L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 32 C. Limites de notre étude Notre travail a porté sur une petite série de femmes très probablement ménopausées. Nous savons pourtant l’involution des corps érectiles chez la femme en l’absence d’imprégnation hormonale. Le recours à l’imagerie permettrait de contourner en partie cet écueil. L’étude des corps érectiles est ainsi possible en IRM, sans produit de contraste et en séquence de saturation de graisse. Si le NDC ne peut être vu, il est réputé accompagner l’artère dorsale du clitoris, comme nous l’avons constaté dans nos propres travaux de dissection.xxi Enfin, d’autres techniques d’imagerie ont été utilisées pour étudier l’anatomie fonctionnelle des corps érectiles, comme l’échographie.xviii Nous n’avons pas mis en évidence l’innervation issue du plexus hypogastrique inférieur. Cette innervation a été décrite : « le plexus vaginal envoie en avant quelques filets clitoridiens qui se perdent dans les corps caverneux du clitoris ».xxii Des techniques immunohistochimiques ont également prouvé l’existence de cette innervation chez le fœtus humain. Des communications entre le système somatique (NDC) et le système autonome (NC) ont en outre été décrites.xxiii Nous n’avons pas réalisé de dissection en injectant les corps érectiles et les veines. L’injection des corps érectiles est importante selon Kobelt, afin de « juger de la forme extérieure de cet organe ». Quant à l’injection veineuse, elle permettrait de mieux mettre en évidence le plexus intermédiaire et les autres structures veineuses décrites dans notre travail. VII. CONCLUSION D’origine somatique et végétative, l’innervation des corps érectiles chez la femme est d’une grande richesse. En ce qui concerne l’innervation somatique, nos travaux ont permis de confirmer la constance du trajet du NDC chez les 4 sujets étudiés. Le NDC est une branche terminale du NP, « nerf social du périnée ». Son diamètre est de 2mm environ au niveau du genou du clitoris et ses ramifications dans le corps et dans le gland du clitoris sont très importantes. Les applications cliniques liées au NDC existent. Le NDC a une grande importance dans le résultat fonctionnel de la chirurgie réparatrice en cas de clitoridectomie. Le NDC est aussi un site de stimulation à l’étude pour le traitement de certains troubles de la miction. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 33 VIII. ANNEXES Nous avons souhaité faire revivre quelques extraits de l’œuvre de Kobelt. Sources : • Pour les légendes : Kobelt, traduit de l’allemand par Kaula H, De l’appareil du sens génital des deux sexes dans l’espèce humaine et dans quelques mammifères, 1851 ; • Pour les illustrations : Kobelt, Männlichen und weiblichen Wollust-Organe des Menschen und einiger Säugethiere, 1844. L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 34 IX. REFERENCES i Testut L, Traité d'Anatomie, Tome IV p.802 ii O'Connell HE, Hutson JM, Anderson CR, Plenter RJ, Anatomical relationship between urethra and clitoris, The Journal of Urology, Juin 1998 iii Kobelt traduit de l’allemand par Kaula H, De l’appareil du sens génital des deux sexes dans l’espèce humaine et dans quelques mammifères, 1851 iv Martens FM, Heesakkers JP, Rijkhoff NJ, Surgical access for electrical stimulation of the pudendal and dorsal genital nerves in the overactive bladder : a review, The Journal of Urology, 2011 v Vaze A, Goldman H, Jones JS, Rackley R, Vasavada S, Gustafson KJ, Determining the course of Dorsal Nerve of Clitoris, Urology, 2008 vi Ginger VA, Cold CJ, Yang CC, Surgical Anatomy of the Dorsal Nerve of the Clitoris, Neurourology and Urodynamics, 2011 vii Pansky B traduit de l’américain par Horn GF, Embryologie humaine, Ellipses, p.256-269 viii Cochard LR traduit de l’américain par Catala M, Atlas d’embryologie humaine de Netter, Masson, p.182 ix Testut L, Traité d'Anatomie, Tome IV p.788-818 x Buisson O avec Foldès P, Qui a peur du point G ? : Le plaisir féminin, une angoisse masculine, 2011 xi Huang JC, Deletis V, Vodusek DB, Preservation of pudendal afferents in sacral rhizotomies, Neurosurgery 1997 xii Labat JJ, Robert R, Algies pelvi-périnéales chroniques : une approche globale xiii Fetiveau G., Le plexus hypogastrique inférieur, M.S.B.M Anatomie Nantes, 2001-2002 xiv Moszkowicz D, Alsaid B, Benoit G, Peschaud F Etude anatomique et immunohistochimique de l’innervation pelvipérinéale de la femme avec reconstruction 3D. Peut-on encore diminuer les séquelles sexuelles et urinaires de la dissection rectale pour cancer ?, e-mémoires de l’Académie Nationale de Chirurgie, 2011 xv Moszkowicz D, Alsaid B, Bessede T, Zaitouna M, Penna C, Benoit G, and Peschaud F., Neural Supply to the Clitoris: Immunohistochemical Study with Three-Dimensional Reconstruction of Cavernous Nerve, Spongious Nerve, and Dorsal Clitoris Nerve in Human Fetus, The Journal of Sexual Medecine, Avril 2011 xvi O’Connell HE, Anderson CR, Plenter RJ, Hutson JM, The clitoris : a unified structure. Histology of the clitoral glans, body, crura and bulbs, Urodinamica, 2004 xvii Yang CC, Cold CJ, Yilmaz U, Maravilla KR, Sexually responsive vascular tissue of the vulva, BJU International, 2005 xviii Buisson O, Foldes P, Jannini E, Mimoun S, Coitus as revealed by ultrasound in one volunteer couple, The Journal of Sexual Medicine, août 2010 xix Aubin A, Approche anatomique du clitoris, M.S.B.M Anatomie Nantes, 2001-2002 xx Keppene V, Mozer P, Chartier-Kastler E, Ruffion A, Neuromodulation dans la prise en charge des troubles vésico-sphinctériens neurologiques, Progrès en urologie, 2007 xxi O’Connel HE, DeLancey JOL Clitoral anatomy in nulliparous, healthy, premenopausal volunteers using unenhanced magnetic resonance imaging, The Journal of Urology, juin 2005 xxii Testut L, Traité d'Anatomie, Tome III p.281 xxiii Yucel S, De Souza A Jr, Baskin LS, Neuroanatomy of the human female lower urogenital tract, The Journal of Urology, juillet 2004 L’innervation des corps érectiles chez la femme – Cédric DEVYS 35 L’innervation des corps érectiles chez la femme Laboratoire d’Anatomie – Faculté de Médecine de Nantes Résumé But L’anatomie des corps érectiles chez la femme connaît un regain d’intérêt depuis quelques années. Cette étude porte sur l’innervation des corps érectiles chez la femme et plus particulièrement sur le Nerf Dorsal du Clitoris (NDC) dont le trajet et les terminaisons ont été analysés. Matériel et méthode L’approche suivie a été à la fois macroscopique et microscopique. Pour l’étude macroscopique, 4 dissections cadavériques de sujets de sexe féminin ont été pratiquées dont 3 avec un abord gynécologique et 1 avec un abord sagittal. A des fins comparatives, 1 dissection cadavérique de sujet de sexe masculin a été réalisée. Les travaux anatomiques ont été complétés en imagerie par l’analyse d’une IRM pelvienne d’une patiente de sexe féminin. Pour l’étude microscopique, des coupes histologiques du corps et du gland du clitoris ont été effectuées chez 2 des sujets de sexe féminin ayant fait l’objet de l’étude macroscopique. Résultats Le NDC s’individualise très tôt à la sortie du canal pudendal. Son trajet est parallèle à la branche ischio-pubienne jusqu’à la symphyse pubienne. Le NDC plonge dans le clitoris au niveau de son genou. A ce niveau, le NDC a un diamètre de 2mm environ. Le NDC donne de nombreuses ramifications qui se poursuivent jusqu’au gland du clitoris. Le gland du clitoris est très riche en structures nerveuses, notamment en mécanorécepteurs. Conclusion L’innervation des corps érectiles chez la femme est d’une grande richesse, en partie liée au NDC. Les applications cliniques liées au NDC existent. Ainsi, le NDC est important dans le résultat fonctionnel de la chirurgie réparatrice de clitoridectomie. Le NDC est aussi un site de stimulation à l’étude pour le traitement de certains troubles de la miction. Mots clés Corps érectiles, clitoris, bulbes vestibulaires, nerf dorsal du clitoris, clitoridectomie