Chapitre 2: Le contrôle des opérations de concentration

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Chapitre 2
Le contrôle
des opérations de concentration
Etienne Pfister
Introduction
 1200 projets de FA que les autorités
concurrentielles américaines ont dû
traiter, 279 pour la Merger Task Force de
l’UE.
 Ces opérations ont connu une forte
progression au cours des années 90, puis
diminuent au début de la décennie 2000.
Etienne Pfister
2
Un contrôle justifié mais difficile…
 Objectif: Eviter la formation d’une entreprise
dominante à même d’étouffer la concurrence.
 Mais ce contrôle est difficile:


Préventif…
Donc prospectif…
Etienne Pfister
3
Structure du chapitre
Les procédures
de contrôle
Notification
Déroulement de la procédure
L’approche
structurelle
Le marché pertinent
Le degré de concentration
L’analyse
concurrentielle
Les effets concurrentiels d’une F&A
Les obstacles à l’exercice d’un pouvoir
de marché
Les gains d’efficience des F&A
Etienne Pfister
4
I. Pourquoi mettre en place un
contrôle des concentrations ?
Fusions et acquisitions
sur le secteur du transport aérien:
quel impact sur les prix ?
Etienne Pfister
5
a) Présentation: Les F&A
dans le transport aérien aux USA
 Le secteur connaît périodiquement des vagues de fusion
depuis sa libéralisation, à la fin des années 70.

Ainsi, 30 opérations sont enregistrées dans la seconde moitié des
années 80 aux Etats-Unis.
 Ces opérations sont souvent avalisées par les autorités
concurrentielles:


En effet, l’ouverture à la concurrence notamment internationale a
entraîné d’importantes surcapacités.
Le marché du tourisme et des voyages d’affaires est très fluctuant:
seules de grandes entreprises peuvent supporter ce risque élevé.
Etienne Pfister
6
Exemples de F&A
Etienne Pfister
7
b) Comparaison
des variations de prix
Itinéraires
similaires
Variation de prix
sur un itinéraire où il
y a eu fusion…
Variation de prix
sur un itinéraire où
il n’y a pas eu fusion
Etienne Pfister
8
Comparaison
des variations de prix
Etienne Pfister
9
c) Distinction: variations de prix à
l’annonce de la F&A et après la F&A
 A l’annonce de la fusion:

Le premier effet sera de réduire la concurrence



Les firmes qui vont fusionner savent déjà qu’elles seront
partenaires par la suite…
Donc pourquoi continuer à se faire concurrence?...
Sauf pour les firmes en détresse: elles veulent continuer à
rentabiliser leurs coûts fixes afin d’éviter la faillite…
 Après la fusion:

Les firmes peuvent réaliser des synergies


Qui permettent de réduire les coûts et donc de baisser les
prix…
Mais les firmes en détresse voudront certainement amortir les
pertes réalisées avant la F&A…
Etienne Pfister
10
Comparaison des variations
de prix à l’annonce de la fusion
Lors de l’annonce de la fusion, les firmes en détresse
financière continuent de baisser leur prix:
Objectif: remplir les avions pour rentabiliser les coûts fixes
Et les firmes concurrentes font de même…
Etienne Pfister
11
Comparaison des variations de
prix la fusion achevée…
 Les firmes en détresse financière augmentent fortement les prix
 Les autres firmes ont tendance à diminuer le prix:



Elles profitent des économies d’échelles et des synergies générées par la
fusion…
Les rivaux doivent suivre…
N’oubliez qu’en net, sur l’ensemble de la période, il y a hausse de prix
pour les deux types de fusion…
Etienne Pfister
12
d) L’augmentation des prix
est-elle automatique ?
 Régression

Variable dépendante: variation relative de prix des
firmes fusionnées…
Concentration*
normal
Concentration*
détresse
Etienne Pfister
Distance
13
Donc…
 Plus l’itinéraire est étudié est « concentré », plus
les prix vont augmenter sur l’ensemble de la
période…

Car la concurrence est naturellement plus faible…
 Plus la distance est longue, plus les prix vont
augmenter…

Car la concurrence est naturellement plus faible…

Moindre concurrence de l’automobile ou du train…
Etienne Pfister
14
Même régression, mais étudions
les firmes rivales…
Les concurrents augmentent d’autant plus facilement leur
prix que le niveau de concentration est élevé…
Ils pourraient baisser le prix, mais non…
On appelle cet effet la « dominance collective »
Etienne Pfister
15
Variation de la
concentration
Variation de
prix
e) Les effets des synergies
Etienne Pfister
16
Interprétation
 Carrés rouges:

La concentration diminue plus lorsque les firmes fusionnées
partagent un itinéraire (logique)…
 Carrés verts:

Les firmes qui ne partagent pas de « hub » font peu de synergies:
elles vont surtout augmenter le prix

Même celles qui ne partagent pas d’itinéraire commun ?
 Carrés bleus:

Les firmes qui partagent un « hub » ont tendance à ne pas
augmenter les prix…

Voire à les diminuer si jamais elles n’ont pas d’itinéraire commun…
 Carrés roses:

Les fusions avec des firmes en détresse conduisent toujours à des
augmentations de prix…
Etienne Pfister
17
Conclusion
 Les fusions-acquisitions peuvent conduire à une
hausse des prix…

Donc à une perte d’efficience économique…
 Mais ce n’est pas systématique:



Dans certains cas, les synergies réalisées entre les
firmes fusionnées vont permettre une baisse des
prix…
S’il y partage d’un « hub »
Si la concurrence reste assez forte…
 Pour tenir compte de ces différents effets, il faut
un contrôle des concentrations…
Etienne Pfister
18
II. LES PROCEDURES
 Anciennes aux Etats-Unis (Clayton Act, 1914), les
procédures de contrôle sont plus récentes en France
et dans l’UE.
 UE: le Règlement 4064 n’est adopté qu’en 1990, il
connaît encore aujourd’hui des amendements.
 France: loi de 1977 et ordonnance de 86, auxquelles
succède la loi sur les NRE de 2001.
 Point commun: procédure en deux étapes:
notification, puis contrôle.
Etienne Pfister
19
a. Le principe de notification
 Une opération de concentration est « notifiée » aux
autorités de concurrence avant qu’elle n’ait lieu.
 Cela permet de réduire l’incertitude et d’éviter des
coûts de restructuration importants.
 Le dossier de notification comprend alors des
renseignements sur les modalités de la FA, les
marchés concernés, les conditions d’offre et de
demande, ou encore les conditions d’entrée…
 Le défaut de notification entraîne des amendes
s’élevant jusqu’à 5 ou 10 % du CAHT.
Etienne Pfister
20
Mais toutes les opérations de
concentration ne font pas nécessairement
l’objet d’une notification
 La concentration est entendue au sens large: il s’agit
du changement de contrôle d’une entreprise ou
d’une influence déterminante (et non d’un
actionnariat majoritaire).
 Mais seules les opérations d’envergure doivent être
notifiées…
 Le seuil utilisé se rapporte au CA, qui a le mérite de
la simplicité mais qui risque de négliger des FA de
petite taille créant une position dominante sur un
marché de niche.
Etienne Pfister
21
La définition des seuils de contrôle est
très aisée pour les Etats-Unis…
1 des 2 parties réalise un
CA > 100 mn$, l’autre
réalisant un CA supérieur à
10 mn$
L’opération porte sur des
actifs/actions valorisés à
plus de 50 mn$
Notification obligatoire
Etienne Pfister
22
Mais plus complexe dans l’UE…
Oui
CACM
>5mrd
CAI UE
>250mn
(2 ent.)
Oui
Contrôle
communautaire
2/3 CAI dans un
Oui
seul Etat mbre
Non
CACM
CAIUE>
CAC 3Etats
CAI 3Etats
Non >2.5mrdOui 100 mnOui mbres >100mnOui >25mn
(2 ent.)Etienne Pfister
(2 ent.) 23
…qui doit tenir compte des autorités
nationales.
3 conditions de notification en France
(Loi NRE de 2001)
CATM
>150mn euros
CAI en France
pour 2 entreprises
> 15 mn euros
Etienne Pfister
L’opération n’est
pas contrôlée par
l’UE
24
Les autorités appliquent la doctrine
des effets…
 Une opération de concentration peut être contrôlée
par des autorités étrangères, y compris si les
entreprises ne disposent pas d’actifs dans ce pays,
dès lors que l’opération modifie la concurrence
dans ce pays.
 Ainsi, la fusion Hoechst/Rhône-Poulenc a nécessité
plus de 60 notifications…
 Et il se peut que les autorités nationales ne
parviennent pas aux même conclusions
(GE/Honeywell)…
Etienne Pfister
25
b. Déroulement du contrôle
Une logique commune…
Pays
Critère d’examen
USA
Réduction substantielle de la Bilan économique
concurrence
UE
Création d’une position
dominante
France Atteinte à la concurrence
Etienne Pfister
Bilan retenu
Bilan économique
(2004)
Bilan économique
et social
26
De l’examen préliminaire à l’examen
approfondi…
 Un examen préliminaire, de 5 semaines environ,
permet d’autoriser rapidement une opération ne
posant pas de problème particulier.
 Sinon, une enquête approfondie (4/5 mois max.) est
lancée: renseignements, éclaircissements et
objections, etc.
 Mais ces enquêtes sont assez rares (entre 5 et 10 %
des notifications): elles concernent évidemment les
opérations les plus importantes.
Etienne Pfister
27
Quelle est l’issue du contrôle ?
 L’acceptation: 90 % des notifications (UE).
 L’interdiction: moins de 1 % des notifications.
Ex.: RTL/Veronica/Endemol (1995)
Ex.: WorldCom/Sprint (2000)
Ex.: Schneider/Legrand (2001)
 L’acceptation sous conditions: 9 %
- structurels: vente d’actifs (fusion entre des concurrents)
- comportementaux: résiliation de contrats d’exclusivité,
licences, (fusions verticales).
Ex.: Lustucru/Panzani: revente de l’activité « Pâtes
sèches »
Ex.: Elf/TotalFina: reventes
stations d’essence.
Etiennede
Pfister
28
Compte tenu de leur importance, les remèdes
font actuellement l’objet de débats…
 Les remèdes structurels, qui impliquent une modification
des droits de propriété, ont la préférence des autorités car, a
priori, ces opérations n’ont pas besoin d’être surveillées,
compte tenu des contraintes imposées par les autorités …
 Mais ils présentent aussi des désavantages (cf. guidelines):
- irréversibles,
- cession des actifs à un concurrent faible,
- il n’existe pas toujours de concurrent viable à qui céder
les actifs (Boeing/McDonnell Douglas),
- la revente d’un actif à un concurrent peut encourager la
collusion (Nestlé/Perrier).
Etienne Pfister
29
S’agit-il au final d’une simple
formalité ?
 Non: les enquêtes approfondies (98 entre 90 et
2001) ont des issues plus difficiles:
- 20% sont acceptées sans conditions,
- 58% sont acceptées sous conditions,
- 18% sont rejetées.
 Les autorités tendraient à devenir plus sévères
depuis 1996.
 L’amende en cas de non respect de la décision est
10 % du CA, accompagnée d’une séparation des
entreprises.
Etienne Pfister
30
II. L’APPROCHE STRUCTURELLE:
L’EVALUATION
D’UNE POSITION DOMINANTE
 Pour évaluer l’impact d’une F&A, les autorités
doivent :
1. identifier les produits/procédés/services
concernés par cette opération…
2. évaluer la répartition des parts de marché…
 Ces deux étapes sont celles du « marché
pertinent » et de l’ « évaluation de la
concentration ». Cette approche est qualifiée de
« structurelle » par les spécialistes.
Etienne Pfister
31
a. Le marché pertinent
Des exemples
Quelques principes
Etienne Pfister
32
Utilisation du marché pertinent
Le marché des concerts de rock
 Forte augmentation des prix des concerts de
rock depuis 1996:

+90% entre 1996 et 2003…
 Différentes explications possibles…


Dont une réduction de la concurrence sur le
secteur de l’organisation des concerts…
Mais la définition du marché pertinent est
cruciale…
Etienne Pfister
33
Prix moyen des billets de concerts (en $)
Exemples
Etienne Pfister
34
Evolution du prix des concerts (Average)
Evolution du niveau général des prix (CPI)
Etienne Pfister
35
Prix des concerts et prix des autres
spectacles
Etienne Pfister
36
1998: 30% des
concerts
1200 stations
de radio
2001:70% des
concerts
2003: 40% des
concerts
Britney Spears a accusé l’entreprise de ne plus
jouer ses chansons sur ses radios parce qu’elle
avait refusé de leur confier l’organisation de ses concerts
Plus généralement, l’industrie des concerts est très concentrée:
4 entreprises organisent 80 % des concerts:
Il leur serait facile de s’entendre pour faire monter les prix…
Etienne Pfister
37
Une concentration croissante
Part de marché totale des 4 plus grands
organisateurs de concerts et de CCC
Etienne Pfister
38
Est ce aussi simple ?

Ce qui compte, c’est la concentration de l’organisation des
concerts dans une ville donnée


Je vais voir un concert à Nancy, pas à Paris ou à Lyon…
Or cette concentration est toujours restée très, très forte…


En moyenne, les quatre plus grands promoteurs de concerts pour
une ville donnée organisent 90 % des concerts…
Pourquoi alors les prix augmenteraient-ils fortement à partir de
1996 ?
Etienne Pfister
39
Part de marché totale des 4 plus grands promoteurs
par ville, moyenne (1981-2001)
Etienne Pfister
40
ii) Critères qualitatifs de définition
du marché pertinent
Substituabilité au
niveau de la demande
Substituabilité au
niveau de l’offre
Marché
Critères
qualitatifs
Etienne Pfister
Critères
quantitatifs
41
Des critères qualitatifs de
substituabilité
Demande
Barrières
juridiques
Produits
Ecarts de
prix
Marques
Distribution
Segmentation
géographique
Etienne Pfister
42
Quelques exemples d’utilisation de la
demande…
 1996: Kimberly Clark/Scott (mouchoirs en papier):
l’Europe continentale achète surtout des mouchoirs
en pochette, les pays anglo-saxons privilégient les
boîtes.
 Dans plusieurs cas, le marché a été découpé en
fonction des acheteurs: acheteurs civils/miliaires,
particuliers/entreprises…
Etienne Pfister
43
Quelques exemples d’utilisation des
caractéristiques de produit…
 L’usage du produit est un des critères les plus
importants: mouchoirs en pochettes/en boîte (même
usage), cirage/lacets (usage différentBenckiser/Sara Lee 2000)…
 SEB-Moulinex (2002): 13 marchés du petit électroménager, en fonction des caractéristiques du
produit.
Ex.: un marché des mini-fours : « les fours d’un
poids d’environ 20 kilos et d’une capacité variant
de 10 à 35 litres qui servent à la cuisson de tous
aliments, dans la limite de leur capacité »
Etienne Pfister
44
Quelques exemples d’utilisation de la
segmentation géographique…
 Promodès/Carrefour (2000): regarder chaque zone de
« chalandises » et considérer dans quelle mesure la
disparition d’un magasin diminue la concurrence…
 JV Hitachi/NEC (2000): faible coûts de transport des
mémoires (% au prix), similitudes des préférences, pas
d’obstacle aux importations: le marché européen est un
marché unique.
 Kimberly Clark/Scott: pas d’exportations européenne de
papier hygiénique vers l’Angleterre en dépit de faibles
coûts de transport. Ceci indique une forte préférence
nationale. Le marché pertinent
est donc national.
Etienne Pfister
45
Quelques exemples d’utilisation des
écarts de prix…
 Perrier/Nestlé (1992): les eaux de source ne sont
pas substituables aux boissons gazeuses puisque
les écarts de prix entre les deux types de boisson
sont élevés.
 Kimberly Clark/Scott: écarts de prix de 40 %
sur le papier hygiénique entre l’Angleterre et
l’Europe continentale. A nouveau, le marché
pertinent est national.
Etienne Pfister
46
Quelques exemples d’utilisation des
marques…
 Guinness/Grand Metropolitan (1997): il
n’existe pas de marché de spiritueux,
uniquement les marchés des différentes
boissons alcoolisées…
 En effet, importance des dépenses de
publicité centrées sur un type de boisson
(gin, whisky) et sur une marque de produit
(et non d’entreprise).
Etienne Pfister
47
Quelques exemples d’utilisation des
canaux de distribution…
 Affaire Sara Lee/Benckiser (2000) sur les
produits d’entretien de la chaussure. La
Commission a estimé que les canaux de
distribution segmentaient ce marché:
- grandes et moyennes surface: prix faible, peu
de conseil,
- magasins spécialisés: prix élevés, marques
spécifiques, conseil.
Etienne Pfister
48
Quelques exemples d’utilisation des
obstacles juridiques et économiques…
 Fusion AstraZeneca (1999): sur le marché
pharmaceutique, les marchés pertinents sont nationaux
en raison des réglementations, des procédures de mise
sur le marché, des remboursements différenciés…
 Schneider/Legrand (2001): le marché pertinent du
matériel électrique est national: règles d’installation,
organismes nationaux de certification…
Etienne Pfister
49
iii) Tests quantitatifs
 Test de corrélation des variations de prix ou de
ventes: si les prix/ventes sont peu corrélés, les marchés
sont distincts.
 Nestlé/Perrier (1992): les prix des boissons gazeuses et
des eaux minérales ne sont pas corrélés.
 Coca-Cola/Orangina: le prix des boissons gazeuses à
l’orange n’est pas corrélé avec celui des jus de fruit.
 Limites: facteur commun (pétrole), quel seuil ?, délais
d’ajustement de la demande, saisonnalité (soldes,
ventes d’été), complémentarité, longueur de la
période…
Etienne Pfister
50
Autre critère quantitatif:
le test de l’élasticité prix croisée…
=0: biens indépendants
e=[dQX/QX]/[dpY/pY]
>1: biens substituts
<-1: biens complémentaires
Etienne Pfister
51
… mais qui est rarement utilisé…
 Problème de seuil.
 Délai d’ajustement.
 L’élasticité diminue avec le nombre de
firmes.
 Effet de seuil dans la réaction par rapport à
une variation de prix.
Etienne Pfister
52
…si ce n’est sous la forme du test
SSNIP
Hausse du prix
de X de 5%
Baisse de la demande
suffisamment forte
Baisse de la demande
trop faible
Le marché pertinent
doit être élargi
Le bien X constitue son
propre marché pertinent
Etienne Pfister
53
Autre critère quantitatif:
le test de stationnarité…
 Une série chronologique est stationnaire si elle retourne
à une valeur constante après un choc, le test prenant en
compte la vitesse du retour. Sur un même marché, le
rapport des prix de deux biens doit être stationnaire.
 Supprime l’influence commune et prend en compte les
délais d’ajustement.
 Encore peu utilisé car relativement récent, ce test a
néanmoins permis d’établir la stationnarité des prix du
saumon en Angleterre et en Ecosse.
Etienne Pfister
54
Autre critère quantitatif:
le « test du choc »
 Analyser l’impact d’un choc (technologique,
promotionnel, de change, etc.) sur la consommation
de produits potentiellement substituts.
 Ex. : Offre promotionnelle sur les yaourts allégés
« 3 pour 2 ». Si ce produit est sur le même marché
que les yaourts traditionnels, les ventes de ces
derniers doivent diminuer.
Etienne Pfister
55
b. La mesure de la
concentration
 Une fois défini le marché pertinent, on peut
apprécier la concentration du marché afin
d’évaluer comment l’opération de F&A peut
créer un pouvoir de marché.
 Deux mesures de la concentration ont été
utilisées.
Etienne Pfister
56
Première mesure: l’indice de
concentration…
 Le CRn est la somme des n premières parts
de marché. Plus il est élevé, plus le marché
est concentré entre des leaders.
 Limites:
- le CR ignore les firmes au delà de n;
- le CR ne tient pas compte de
l’hétérogénéité des firmes;
- le CR obtenu dépend de n.
Etienne Pfister
57
Seconde mesure:
le ratio d’Herfindhal…
 H=somme des parts de marché au carré.
 Compris entre 0 et 10 000.
 A nombre de firmes égal, H est d’autant plus élevé
que la répartition des parts de marché est
inégalitaire.
 1/H=« nombre équivalent »: nombre de firmes
identiques pouvant être sur le marché compte tenu
de la concentration.
Etienne Pfister
58
Utilisation de l’indice d’Herfindhal
aux Etats-Unis
Valeur de H après la fusion
Augmentation de H
50
100
Acceptation Contestation Contestation
1800
1000
Acceptation Acceptation Contestation
Acceptation Acceptation Acceptation
Etienne Pfister
59
c. Les limites
de l’approche structurelle
 L’approche structurelle est assez simple:
1. Délimitation du marché pertinent,
2. Evaluation du niveau de concentration,
3. Estimation de l’impact de la F&A sur le niveau
de concurrence.
 2 limites:
1. Une vision statique de la concurrence.
2. Une relation simpliste entre concentration et
pouvoir de marché
Etienne Pfister
60
Une vision statique des marchés…
 L’innovation peut modifier les frontières du marché
pertinent: les marchés ne sont donc pas figés,
statiques...
 Tout dépend alors de l’horizon temporel retenu par
les autorités de concurrence, selon l’effort
d’anticipation qui est réalisé et pris en compte dans
l’analyse.
 A priori, plus les autorités intègrent la dynamique
des marchés, plus c’est favorable aux parties.
 Mais ce n’est pas systématique: Tetra Laval/Sidel.
Etienne Pfister
61
Xerox invente le
photocopieur sur
papier
Canon lance
les imprimantes
à bas prix
Invention
du fax
70s: marché des
matériels de bureau
Machines à écrire
Photocopieurs sur
papier enduit
Calculatrices
Les firmes d’optique et de l’électronique
commencent à investir le marché
Les firmes du secteur des ordinateurs et des
imprimantes entrent sur le marché
Les entreprises des télécommunications
rentrent sur le marché.
Source: Philippe (1998), RFE.
Etienne Pfister
62
L’utilisation de l’indice d’Herfindhal
amplifie encore ce biais de représentation
 En effet, l’indice d’H constitue une photographie du
secteur et néglige l’éventuelle entrée de concurrents
grâce à l’innovation ou à l’imitation.

Ex.: dans le secteur de l’imagerie médicale, l’indice d’H
sur les scanneurs à résonance magnétique passe de 10000
en 1980 à 2300 en 1987…
 Les guidelines américaines recommandent donc aux
autorités concurrentielles de prendre en compte
cette dynamique dans leur évaluation de la
concentration.
Etienne Pfister
63
III. L’ANALYSE CONCURRENTIELLE
DES CONCENTRATIONS
 L’approche structurelle ne suffit pas à évaluer
l’impact d’une F&A sur le pouvoir de marché et la
concurrence: une part de marché élevée ne conduit
pas nécessairement à un pouvoir de marché
important ! ! !
 De manière générale, lorsqu’une concentration
entraîne des parts de marché élevées, les autorités
conduisent une enquête supplémentaire, basée sur
une « analyse concurrentielle » de l’opération.
Effets
concurrentiels
Obstacles au
pouvoir de marché
Etienne Pfister
Gains
d’efficience
64
a. Les différents effets
concurrentiels d’une F&A
Concentration
horizontale
Effet
unilatéral
Dominance
collective
Concentration
verticale
Forclusion
Etienne Pfister
Concentration
conglomérale
Effet
portefeuille
Contacts
multimarchés
65
L’effet unilatéral
 Une F&A horizontale réduit le nombre de concurrents
sur le marché: le prix du marché augmentera d’autant
plus que les concurrents adoptent une attitude passive et
refusent de réagir à la baisse des quantités/hausse des
prix des concurrents fusionnés.
 Dans ce contexte, les autorités sont particulièrement
attentives au « ratio de diversion »: la part des
consommateurs qui reportent leur consommation sur un
produit substitut appartenant lui aussi à l’entité
fusionnée. Plus ce ratio est élevé, plus la hausse des prix
sera tentante.
Etienne Pfister
66
L’effet de dominance collective
 En augmentant la concentration, la fusion peut
faciliter les comportements d’entente: plusieurs
indices susceptibles de faciliter la collusion sont
donc recueillis (transparence du marché,
représailles crédibles, barrière à l’entrée, faible
élasticité de la demande).
 L’argument a été mobilisé à plusieurs reprises à
partir de 1998, pas toujours avec succès: Kali/Salz
(99), Gencor/Lonrho, AirTour/FirstChoice
Etienne Pfister
67
Exemple: la F&A ASD/ORP sur la
distribution de médicaments
3 « grands »
(ASD, OCD, CERP)
2 « mavericks » (ORP,
Phoenix)
Oligopole
Statistiques détaillées,
contacts fréquents
Marché
transparent
Coûts fixes,
faibles marges
Représailles
possibles
Marché agressif
grâce aux mavericks
L’oligopole est
contestable…
Etienne Pfister
Le rachat est
interdit
Mais il ne le sera
plus si ORP est
absorbé
68
Concentration et fermeture du marché
(« foreclusion »)
 Une fusion verticale peut handicaper l’accès au marché
amont des firmes concurrentes. On peut alors assister à
des fusions verticales en chaîne.
Jeppesen (cartes de
navigation numérisées)
Boeing
Airbus
Impacts de la fusion Jeppesen/Boeing:
- refus de vente,
- prix plus élevés pour Airbus,
- transferts d’informations stratégiques.
Solutions:
- Airbus recourt à un autre fournisseur,
- Le Conseil interdit les transferts
d’information sans autorisation du client
Etienne Pfister
69
Concentration conglomérale
et effet de portefeuille
 En réunissant plusieurs marques importantes de
marchés différents sous une même entité, une F&A peut
porter atteinte à la concurrence:


- les concurrents ne peuvent offrir de portefeuille aussi
attractif,
- les marques sont appréciées des consommateurs, notamment
si les deux sont complémentaires.
 La nouvelle entité peut alors:
- pratiquer des prix plus faibles en cas d’achats groupés,
- boycotter un distributeur si celui-ci n’achète pas les
deux marques ou des marques
« de second rang ».
Etienne Pfister
70
Quelques exemples d’application
 Coca-Cola/Orangina: aurait considérablement défavorisé
Pepsi dans la mesure où Coca a déjà Fanta;
 Sara Lee/Benckiser (rachat de la marque Baranne):SR
dispose déjà de Kiwi et de plusieurs autres marques
connexes. Trop risqué.
 GE/Honeywell: systèmes de contrôle pour
moteurs+produits avioniques et non avioniques: ventes
jumelées très attractives.
 Johnson/Bayer: l’effet de portefeuille aurait pu être
utilisé mais une firme tierce propose la même gamme de
produits. En outre, les achats sont très sélectifs: une
gamme entière est rarement
référencée.
Etienne Pfister
71
Fusions conglomérales et
« contacts multimarchés »
Firme X
Firme Y
Firme Z
Marché A Marché B Marché C
80%
20%
0%
20%
80%
0%
0%
0%
100%
Y pourrait diminuer ses tarifs pour entrer sur le marché A,
mais cela entraînerait une guerre des prix sur le marché B.
En revanche, Y peut essayer d’entrer sur le marché C.
Mais si X et Z fusionnent, cette stratégie d’entrée ne sera plus
possible: pour Z, fusionner avec une firme de marchés
connexes permet de protéger
son propre marché.
Etienne Pfister
72
b) Les obstacles
au pouvoir de marché
Caractéristiques de
la demande:
élasticité-prix,
pouvoir des clients,
durabilité des biens.
Forte part
de marché
Etienne Pfister
Barrières à l’entrée
73
Si l’élasticité-prix de la demande est forte,
une hausse des prix est peu probable
 En effet, une forte élasticité indique qu’en cas de
hausse de prix, les consommateurs diminuent
fortement leur consommation, soit en s’abstenant
du produit/service, soit en recourant à un produit
substitut.
 Dès lors, la firme en position dominante n’a pas
intérêt à augmenter son prix car la baisse des
quantités vendues ferait plus que compenser la
hausse des prix.
Etienne Pfister
74
Si les clients disposent d’un certain pouvoir de
négociation, une hausse des prix est peu
probable…
 En particulier, si les clients constituent un
oligopole ou un passage obligé pour la
réalisation de profits élevés, une hausse des prix
est peu probable.
 L’argument est notamment évoqué dans le cas
de la grande distribution, mais les termes du
débat ne sont pas forcément très univoques.
Etienne Pfister
75
Le pouvoir de négociation de la
grande distribution.
Détenteur d’une
ressource rare:
les « linéaires »
Fragile face aux
entreprises détentrices
de plusieurs marques
prestigieuses (Guiness)
Développement
des marques de
distributeurs
Etienne Pfister
76
La durabilité des biens constitue un
autre obstacle au pouvoir de marché…
Biens
durables
Achats peu
fréquents
Biens
durables
Ils
s’usent
peu
Baisse
Les agents
progressive anticipent la
des prix
baisse des prix
Le prix sera
donc faible
…Les consommateurs
utiliseront plus le bien
dont ils disposent déjà
Si les produits
neufs ont un
prix élevés…
Marché des tracteurs
Peu de
progrès
technique
Durée de Marché de
vie élevée l’occasion
Etienne Pfister
Pièces
Capacités
détachées et d’utilisation
entretien
excédentaires
77
Du côté de l’offre, des barrières à
l’entrée ou à la mobilité peu élevée
empêchent la hausse des prix
Rapidité de
l’entrée
Coût de l’entrée
(irrécupérable?)
Probabilité de
l’entrée
Les autorités
prennent en
compte…
Etienne Pfister
Importance
de l’entrée
78
Typologie des barrières à l’entrée…
Barrières légales
(brevets, AMM, etc.)
Economies
d’expérience
Intégration verticale
Effet de
gamme
Externalités de
réseau
Effet de
marque
Prix limite
Etienne Pfister
79
L’absence de barrières à l’entrée
caractérise les « marchés contestables »
Rachat Air
Liberté par AOM
2 monopoles:
Orly/Toulon
Orly/Perpignan
Hausse de prix sur
ces itinéraires ?
Non
Concurrence
potentielle d’Air
France (50 % des
créneaux à Orly)
Développement
du TGV
Méditérranée
Etienne Pfister
80
c) Les gains d’efficacité
de la concentration
 Une F&A peut générer des gains d’efficience:
F&A horizontale
F&A conglomérale
Economies d’échelles,
Diminution des coûts
Economies de gamme,
Complémentarité technologique
Elimination de la
double marge
F&A verticale
Etienne Pfister
81
Le modèle de Williamson (1968)
p
D
A+C: perte de surplus des cons.
B+C: hausse de profit
C
A
C1
B
C2
Q2
Etienne Pfister
Q1
q
82
Portée et limites de l’analyse de
Williamson (1968)
 Si A>B, la fusion diminue le bien être total.
 Plus la demande est élastique, moins les prix vont
augmenter et plus la F&A sera efficiente.
 Mais Williamson fait que l’hypothèse que le marché est
concurrentiel ex ante: si tel n’est pas le cas, les
quantités vendues sont plus faibles, la baisse de coût a
moins d’impact, il est moins probable qu’une F&A soit
efficiente.
 On peut aussi s’interroger: le surplus des firmes a-t-il la
même portée que le surplus des consommateurs ?
Etienne Pfister
83
Les autorités concurrentielles ne
prêtent alors qu’une attention limitée
aux gains d’efficience…
 Dans la plupart des pays (France, USA), les firmes doivent
démontrer l’existence et l’ampleur des gains d’efficience et
que seule une F&A permet de les réaliser.
 Pourquoi cette méfiance ?
- les gains d’efficience sont difficiles à estimer, notamment
les gains dynamiques (innovation)
- il faut tenir compte de l’asymétrie d’information,
- il faut tenir compte des échecs des F&A: les gains sont
souvent surestimés.
Etienne Pfister
84
CONCLUSION:
Un processus en trois étapes
Etape 1:
Quelle est l’importance
de la nouvelle entité ?
Etape 1:
Notification
Etape 2:
Délimitation du marché,
de la part de marché et de
la concentration
Etape 2:
La fusion aboutit-elle à
une position dominante ?
Etape 3:
Cette position dominante risque-t-elle
de nuire aux consommateurs ?
Etienne Pfister
Etape 3:
Effets concurrentiels, limites
au pouvoir de marché, gains
d’efficience
85
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