Chicago et Ecole de Chicago

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Ecole de Chicago
1800-1900
1
L’évolution de la Population de Chicago
Population de la Ville de Chicago[53]
Année
Population
Rang
national
1840
4 470
92
1850
29 963
24
1860
112 172
9
1870
298 977
5
1880
503 185
4
1890
1 099 850
2
1900
1 698 575
2
1910
2 185 283
2
1920
2 701 705
2
1930
3 376 438
2
1940
3 396 808
2
1950
3 620 962
2
1960
3 550 404
2
1970
3 366 957
2
1980
3 005 072
2
1990
2 783 726
3
2000
2 896 016
3
2008
2 853 114
3
2
W. L. Thomas (1863-1947), Florian Znaniecki (1881-1956)
George Herbert Mead (1863-1931)
• L’Ecole de Chicago trouve son origine dans un
ouvrage en cinq volumes, publiés de 19181920, Le Paysan Polonais en Europe et en
Amérique. Les bases d’une sociologie de la
ville et ses communautés.
• William Isaac Thomas (1863-1947), Florian
Znaniecki (1881-1956), Robert E. Park (18641944), Luis Wirth (1897-1952) George Herbert
Mead (1863-1931)
• Thomas a obtenu des crédits d’une fondation
privée pour entreprendre son enquete sur ler
sort des immigrés polonais.
Robert Ezra PARK (1864-1944) Louis WIRTH (1897-1952)
3
Chicago
•
•
•
•
•
•
•
Chicago est le prototype de la jeune métropole américaine.
1870
300.000
1890
1.000.000
1910
2.000.000
1930
3.400.000
Un cité qui rayonne par son modernisme: gratte ciel, grands magasins, quartiers d’affaires,
musées, hopitaux, université…
Mais la ville attire aussi des vagues d’immigrés `æ la recherche d’un emploi; lieu où se4
concentrent des poches de misère, où règnent la criminalité, alcool, prostitution.
Chicago ville pluriethnique
• Chicago est une ville pluriethnique. Pour les
sociologues de l’université locale elle
constitue un véritable laboratoire social.
Groupe
Chicago
Illinois
États-Unis
Blancs
42 %
73,5 %
77,2 %
Noirs
36,8 %
15,1 %
12,9 %
Asiatiques
4,3 %
3,4 %
4,2 %
Amérindiens
0,4 %
0,3 %
1,5 %
Autres
16,5 %
8%
4,2 %
Répartition de la population par groupe ethnique en 2000
5
Ecole de Chicago
•
•
Crée en 1892, le département de la sociologie de Chicago était le 1er de son espèce aux
Etats-Unis. Entre 1910 et 1935, les sociologues de l’Université de Chicago vont à travers
l’étude de la ville, de l’immigration et de la déviance, forger un des courants les plus
influents de la sociologie américaine.
C’est la première école qui étudie les relations interethniques et la délinquance dans les
grandes villes aux Etats-Unis. Chicago est un laboratoire sociale accueillant nombreux
immigrant de l’étranger ainsi que du sud des Etats-Unis.
•
6
Chicago et Ecole de Chicago
•
•
•
•
•
•
L’évolution de Chicago s’explique par l’afflux massif de migrants ruraux et
d’immigration étrangers.
Cette nouvelle population se divise en quartiers raciaux; mais rapidement des
problèmes sociaux aparaissent: conlits raciaux, ghettos, misère, prostitution et
délinquance juvénile.
En 1886 et 1919, la ville victime d’émeutes violentes qui traduisent un malaise
social.
Les sociologues décident d’intervenir pour régler ces problèmes. Pour y parvenir ils
cherchent à se placer au coeur de la vie des populations déracinées, afin de mieux
comprendre leur rapport à la société.
Au début ils avaient une vision d’une société dominée par le darwinisme social
ou le libéralisme compensée par la conviction de pouvoir contribuer
activement à l’amélioration du bien-etre social (réformisme). Leur recherche
évolue aussi vers ce qui se nomme l’intéractionnisme symbolique, soutenant
que la sociologie s’intéresse à la conception que l’individu se fait du monde
social. Ils priviligient l’observation directe et le point de vue de l’acteur.
L’Ecole de Chicago s’évolue d’une approche holiste vers une vision plus
individualiste.
7
Ecole de Chicago
• «Une approche empirique qui se propose d’étudier la société dans son
ensemble ».
• Des techniques particulières de recherche sur le terrain, « sociologie
qualitative ».
• Les méthodes ethnographiques
• l’utilisation des documents personnels.
• De la sociologie en bibliothèque à a recherche sur le terrain
• Appliquant un des principes de l’ineractionnisme, prendre le point de vue
subjectif des individus pour atteindre une objectivité plus scientifique. (des
lettres ; histoires de vie)
• Sources documentaires, lettres, histoire de vie,…
• Le travail de terrain est également à base de la recherche empirique
caractéristique de l’Ecole de Chicago…
8
Méthodes
Observation participante: elle consiste pour un enqueteur à s’impliquer dans le groupe qu’il
étudie pour comprendre sa vie de “l’intérieur”.
Interactionnisme et l’ethnométhodologie
Emprunte à l’ethnologie son goût pour le terrain et les petites communautés. Faire des
monographies.
Anthropologie et monographie.
Lutter contre le recueil des donnés à l’aide des questionnaires soumis à l’exploitation statistique.
Critique de la caractère illusoires de la standardisation des questionnaires et l’arbitraire des
catégories retenues comme variables. L’incertitude entre comportements en situations
9
réponses recueillis en situation d’enquete.
Interaction et théorie
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Le fonctionnement des interactions quotidiennes observables contient tous les éléments de la
théorie sociale. Il suffit de savoir observer sans vouloir chercher à découvrir un sens caché. Le
sens de l’action sociale est produit au cours de l’action elle-même.
Il faut insister l’observation attentive des processus sociaux qui se réalisent à travers les
interactions directes des acteurs.
Ecartons les théories et observons les significations qui s’engendrent au cours des interactions
singulières et qui mobilisent les savoirs véhiculés par les acteurs eux-mêmes durant les
échanges.
L’interaction comme signification vécue
La notion d’interaction pour exprimer l’unité minimale des échanges sociaux et désigner une
situation sociale où chacun agit et se comporte en fonction de l’autre.
Weber avait déjà mis l’accent dans ses essais de sociologie compréhensive, sur la définition
de l’activité sociale comme comportement significatif orienté vers l’autre.
Analyser une interaction revient à se réferer chaque fois dans des situations particulières dans
lesquelles s’effectue l’interprétation d’où vient l’importance des monographies et le souci
d’analyser les processus en train de se dérouler.
Pour les interactionnistes beaucoup de situations sont floues et laissent une certaine marge de
manœuvre ou d’improvisation.
Il n’y a pas de faits en soi, extérieurs aux individus. Le sens est soumis dans les interactions.
10
Ville
• Chicago 4.500 en 1840 2 millions en 1900
• La moitié de la population est d’origine étrangère , Allemagne, Irlande,
Pologne, Russie, Italie. En 1914 les Noirs du Sud.
• Il s’agit la cohabition des populations très différents.
• Le groupe d’appartenance primaire et secondaire s’exprime dans la ville.
• La ville est plutôt un état d’esprit, un ensemble de coutumes et de
traditions, d’attitudes et de sentiments organisés.
• Autrement dit la ville n’est pas simplement un mécanisme matériel et
une construction artificielle. Elle est impliquée dans le processus vitaux
des gens qui la composent : c’est un produit de la nature humaine.
• La ville est à l’homme civilisé ce que la maison est au paysan. L’habitat
naturel de l’homme civilisé.
11
Ecologie urbaine
• Pour Robert Park (1864-1944), autre figure emblématique de l'école,
s'instaure au cœur de la ville un équilibre entre les processus de
désorganisation sociale et ceux, toujours précaires, de réorganisation. Ce
qu'il nomme « écologie urbaine » sont les effets réciproques entre
l'environnement urbain et les individus qui l'animent (E. Burgess, R.
McKenzie, R. Park, The City, 1925).
• Comme dans le milieu naturel, l’individu s’adapte à la ville qu’il
modifie à son tour. Cette communauté humaine se caractérise par des
équilibres et des déséquilibres entre groupes en concurrence. Les
sociologues tentent d’expliquer ainsi la perpétuelle recomposition à
laquelle est soumise la ville de Chicago.
• Selon Roderick D. Mac Kenzie (1925) l’écologie humaine se définit
comme l’étude des relations spatiales et temporelles des êtres humains
en tant qu’affectées par des facteurs de sélection, de distribution et
d’adaptation liées à l’environnement. Elle exclut des facteurs
héréditaires et biologiques mais intègre la possibilité d’innovation et de
mobilité propre à l’homme confronté à son milieu.
12
Un regard positif sur l’immigration
Thomas et Znaniecki repensent l’immigration à travers la théorie de
l’organisation et de la désorganisation.
• Ils rejetaient le réductionnisme biologique en montrant que le
comportement des immigrants n’était pas lié un problème de race,
mais directement lié aux problèmes sociaux intervenus dans leur vie
quotidienne.
• « le variable réelle est l’individu pas la race ».
13
Les minorités raciales et ethniques
• Pour eux le problème des noirs n’était pas différent de celui des migrants: il
s’agissait à chaque fois de groupes marqués par une différence et promis à
l’acculturation, puis à l’assimilation à la société américaine.
• Après les émeutes raciales de 1919, une enquete sur les relations inter-raciales et la
condition des noirs à Chicago. L’enquete met en évidence le problème spécifique du
racisme en ce qui concerne les noirs…
•
14
L’homme marginal
• Directement en rapport avec les migrations,
l’objet d’étude devient celui de “l’homme en
marge” (migrants de deuxième génération ou
métisse).
• En raison de sa double appartenance religieuse,
linguistique, ou culturelle, le migrant se trouve
rejeté.
• Un homme entre deux. Deux sociétés deux
cultures. Il veut rester et partir.
• Un double conscience, il est celui qui, contraint
de devenir comme les autres, n’y parvient que
rarement et encore davantage celui qui y étant
parvenu ne peut que vivre son refus personnel
au milieu d’un profond sentiment de confusion
identitaire.
15
La Ville
• Un des ouvrages les plus importants de l’Ecole de Chicago
“The City” est signé en 1925 par Burgers, Mc Kenzie et Park.
Chicago, qualifiée de “laboratoire social” y est étudiée sous
l’angle de la répartition dans l’espace des communautés et des
classes sociales.
• Impersonnalité et superficialité des contacts; la montée de
l’individualisme mène à une différenciation sociale accrue, et
à la porte des contacts primaires.
• La distance sociale permet de rendre compte de la nature des
interactions des individus dans une ville moderne. Dans une
société individualiste comme la société américaine souligne
Park chaque individu doit théoriquement etre traité en fonction
de ses mérites comme individu.
• La pluralité des mondes constituant la ville contraint les
individus à jouer différentes représentations pour divers
publics. L’origine première du mot « personne » et
« masque ». Dans les rôles nous nous connaissons nousmêmes
16
La Ville
La ville est une construction purement artificielle. Doté d’une
organisation morale et matérielle et leurs interactions font qu’elles
s’adaptent et se modifient l’une l’autre.
• Chaque quartier de la ville acquiert quelque chose du caractère et des
qualités de ses habitants. Les sentiments particuliers de sa population se
transforme en voisinage.
•
« Aires morales » et groupes sociaux urbains… Dès 1925 Robert
Ezra Park essaye de comprendre le développement des communautés
ethniques ou sociales dans la ville. Il cherche « à considérer la ville
non comme un phénomène géographique mais comme une sorte
d’organisme social ». les rapports de classe, les politiques urbaines
municipales, les mécanismes d’agrégation et désagrégation des
communautés.
• Etudier la ville sous deux angles : l’ordre écologique et l’ordre moral.
Il étudie el premier en recourant à la dimension spatiale. Le second
est l’étude des interactions locales, qui expliquent le développement
de comportements hors normes dans certaines aires morales.
• Ségrégation et agrégation : division sociale de l’espace urbain fait
l’originalité. Les concepts d’invasion permettent d’identifier les
mécanismes de ségrégation et d’agrégation (d’alliance) spatiale.
• La ségrégation résulte de l’action de séparer, d’écarter de mettre à part.
La ségrégation est une forme de distance sociale qui se traduit par une
séparation dans l’espace.
17
La Ville
•
•
•
Le contexte urbain d’une sociologie urbaine
Le voisinage : la proximité et es contacts de voisinage sont la
base des formes les plus simples d’association. Une
concentration de population noire est entrain de devenir une
communauté étroite et organisée.
Les colonies et les aires de ségrégation : l’isolement des
colonies d’immigrants et des colonies raciales dans les ghettos
tend à préserver l’intimité et la solidarité des groupes locaux et
des groupes de voisinage. Le sentiment d’appartenance au
voisinage fusionne avec les intérêts de classe et raciales.
•
18
Sociologie urbaine
•
•
•
•
•
•
•
Les distances spatiales et affectives se renforcent mutuellement. Classe, race.
Le proverbe qui fait de la ville le milieu naturel de l’homme libre ne demeure vrai
que dans la mesure où l’individu trouve dans le hasard, dans la diversité des intérêts
et dans l’immense coopération inconsciente qu’offre la vie urbaine l’occasion de
choisir sa propre profession et de développer ses talents particuliers. La ville offre
un marché aux talents particuliers des individus et la compétition entre personnes…
La mobilité et l’isolement. La mobilité d’une population est un facteur
déterminant de son développement intellectuel.
Les conditions matérielles de la ville ont rendu d’autant plus indispensables les
réajustements aux conditions nouvelles. Le marché, les bourses…
Dans les grandes villes, les relations humaines ont toutes les chances d’être
impersonnelles et rationnelles, régies par l’intérêt et l’argent, un laboratoire de
recherche sur le comportement collectif.
La ville est à la fois le lieu massif de l’expérience des hommes de la modernité
et le centre d’impulsion de la vie éco, culturelle et politique.
Contraint de faire quotidiennement l’expérience de la pluralité des régions morales,
le citadin développe une vision relativiste et un sens de tolérance des différences.
19
La déviance
• En 1923, une enquête sur les
“hobos” (sans-abri). Elle montre
comment ces gens forment une
micro-société avec sa culture, ses
spécificités, ses lois non écrites, et
ses lieux.
• Nels Anderson, Olivier Schwartz,
Hobo, sociologie du sans-abri.
Suivi de l’Empirisme irréductible,
traduit en français en 2011.
• Les hobos sont des célibataires,
des travailleurs journaliers, des
précaires.
20
Crime et délinquance
• La criminalité est à Chicago à l’image de l’histoire de la ville: irlandaise au
début du 20e siècle, elle devient polonaise et italienne à l’époque de la
prohibition.
• Après la guerre des gangs de 1924, Frederic Trasher réalise une étude sur les
“gangs de quartier” qui décrit les bandes de jeunes comme une forme de
réorganisation sociale.
• La délinquance a 2 dimensions : le gang reflète la désorganisation de l’ensemble
de la ville, en même temps qu’un souci d’indépendance, de réorganisation
sociale
• a) l’étude des gangs de Chicago les gangs de Chicago en 1927 représenteraient
25.000 jeunes. Les gangs occupent « la ceinture pauvreté » où la population
change sans cesse ; où tout est désorganisé. Le gang est alors la réponse à la
désorganisation sociale.
• b) l’étude du crime organisé : lien entre le crime et l’organisation sociale de la
ville? Le bon citoyen et le gangster sont les produits de l’environnement urbain.
21
Délinquance juvénile
• La délinquance doit être rapportée à son
contexte dans l’histoire de vie de l’individu.
S’il est élevé dans un quartier à risque, si la
famille est brisée, il risque de s’engager dans
une carrière de délinquant. Les institutions de
redressement ont échoué (% 70).
• Délinquance juvénile et tissu urbain :
« écologie de délinquance et du crime ». zones
d’habitats très différenciées, la criminalité
associée à la structure physique de la ville. « la
situation domine ».
• Le statut économique
• La mobilité de la population et hétérogénéité
de sa composition
• La pauvreté
• L’inefficacité des structures communautaires
ou de l’action publique
22
Vision optimiste de l’immigration
• ROBERT EZRA PARK (1864 – 1944)
« La Ville. Propositions de recherche sur le comportement humain en milieu
urbain » Article publié en 1915
La ville est le « laboratoire social » par excellence
L’ordre spatial révèle l’ordre social
• Le cycle des relations ethniques chez Park: le processus de désorganisationréorganisation jalonne les interactions entre les groupes sociaux
autochtones et migrants. Il distingue 4 étapes;
1. la rivalité : c’est la forme d’interaction la plus élémentaire. L’absence de
contact social.
2. le conflit : « d’une façon générale on peut dire que la rivalité détermine la
position d’un individu dans la communauté ; le conflit lui assigne une place
dans la société ».
3. l’adaptation : « une conversion » il y a coexistence entre des groupes qui
demeurent des rivaux potentiels mais qui acceptent leurs différences.
4. l’assimilation : les différences entre les groupes se sont estompées et leurs
valeurs respectives mélangées. L’assimilation est un phénomène de groupe.
23
Les méthodes de recherche
• L’Ecole de Chicago initie l’utilisation des méthodes
ethnographiques en sociologie.
• En sociologie, les données empiriques sont de nature
qualitative et/ou quantitative.
• « Travail de terrain » (field work) : l’ensemble des activités du
chercheur qui visent à récolter des données empiriques.
• Observation et entretien
• Qu’est-ce qu’on observe ?
• Comment est-ce qu’on observe ?
Les actions et les interactions
• L’interaction : relation interpersonnelle directe entre deux
individus au moins.
“L’interactionnisme symbolique” (expression de Herbert Blumer)
L’observation comme méthode
• Comment on observe ?
•
•
•
•
Selon la modalité de participation > observation incognito/ à découvert
Selon le niveau de participation > observation participante/non-participante
Carnet de note
Entretiens informels / formels
•
Extrait : Howard S. Becker, Outsiders, Etudes de sociologie de la déviance 1963, p.
107-108
« J’ai recueilli le matériel utilisé dans cette étude par observation participante, c’est-à-dire en
partageant le travail et les loisirs des musiciens. Quand j’ai réalisé cette étude, en 1948 et
1949, j’étais musicien professionnel depuis quelques années et j’appartenais aux milieux
musicaux de Chicago. J’ai travaillé au cours de cette période avec de nombreux orchestres de
différents types, et j’ai pris des notes abondantes sur les événements qui se produisaient
pendant que j’étais en compagnie d’autres musiciens. La plupart des personnes ne savaient
pas que je faisais une étude sur les musiciens. Je n’ai réalisé que de rares entretiens en
procédant de manière formelle, et je me suis plutôt attaché à écouter et à noter les
conversations ordinaires entre musiciens. La plupart de mes observations ont été effectuées
au cours du travail, et même sur l’estrade pendant que nous jouions »
L’observation comme méthode 2
• Le travail de terrain de longue durée
• La culture et l’univers symbolique des
observés
• Le vocabulaire (lexique indigène), les normes
internes au groupe, les dispositions
corporelles
• La posture du chercheur : neutralité
bienveillante
Howard Becker (1928 -)
Outsiders, Etudes de sociologie de la
déviance, 1963 traduit en français en 1985
Tous les groupes sociaux instituent des
normes et s’efforcent de les faire appliquer.
•Certaines actions sont prescrites – ce qui
est bien
•D’autres sont interdites – ce qui est mal
•Lorsqu’un individu transgresse une norme,
il peut être perçu comme étranger au
groupe (outsider)
•C’est le processus de
l’étiquetage (labelling)
27
La critique de Becker
• 1) Approche statistique : est déviant ce qui s’écarte de
la moyenne
• 2) Approche pathologique : est déviant ce qui révèle
une maladie, un mal
• La source de la déviance est située à l’intérieur de
l’individu
• La métaphore médicale par analogie avec l’organisme
se base sur une distinction entre ce qui est fonctionnel
et ce qui est dysfonctionnel pour la société ou pour le
groupe. C’est une question politique.
• 3) Approche relativiste : définit la déviance par le
manque d’obéissance aux normes
• Becker est proche du relativisme mais la
trouve insuffisante pour examiner les
ambiguïtés de l’étiquetage.
28
La définition de la déviance par
Becker
• Becker propose d’étudier plutôt la situation et les
interactions qui font qu’on juge un acte comme
déviant.
• « Les groupes sociaux créent la déviance en instituant
des normes dont la transgression constitue la
déviance. »
• « La déviance est une propriété du comportement luimême, mais dans l’interaction entre la personne qui
commet l’acte et celles qui réagissent à cet acte. »
• Par conséquent, la déviance, c’est le résultat du
processus de l’étiquetage.
Qui impose les normes?
• Selon Becker, pour l’étude des comportements
désignés comme déviants, il ne suffit pas d’adopter le
point de vue de ceux qui condamnent ces
comportements.
• Les normes sont imposées de force par les dominants.
Jeunes/Personnes âgées ;
Hommes / Femmes ;
Blancs / Noirs ;
Minorité autochtone / Minorités ethniques immigrées
Autre concept-clé :
la carrière déviante
• Comment expliquer les processus qui poussent
les individus à transgresser les normes ?
• La carrière déviante commence par un
apprentissage et se poursuit par un engagement
graduel dans un cercle de socialisation.
• Processus de rationalisation et de justification
• Qui est l’outsider? Qui est l’insider?
• Le point de vue de l’intérieur du groupe déviant
peut prévaloir sur les normes conventionnelles.
L’isolement et l’auto-ségrégation
• Chapitre 5 de Outsiders
“La culture d’un groupe déviant : les musiciens de
danse”
Les musiciens de jazz ont une culture (ou sousculture) déviante
- Groupe stable sur une longue période
- Une conception d’eux-mêmes et des autres
membres de la société
- Système de croyances sur ce qu’ils sont
- Musiciens / Caves (l’auditoire, les autres)
Les entrepreneurs de morale
-Ceux qui créent les normes (croisade morale pour la
législation)
-Ceux qui font appliquer les normes (agents coercitifs de
l’Etat)
Toute étude empirique de la déviance doit prendre en
compte “ceux qui transgressent les normes et ceux qui les
font respecter”.
•Le rôle du sociologue consiste à délimiter les contours
de chaque monde, à étudier les rôles joués par
différents acteurs et à comprendre la manière dont
vivent leur coopération au sein de leur monde
L’interactionisme symbolique
chez
Erving Goffmann (1922-1982)
• Asiles, étude sur la condition sociale des
malades mentaux, paru en 1961
• Méthode quasi-ethnographique
• Observation directe de longue durée
dans un hôpital psychiatrique à
Washington.
• Le sociologue s’installe à l’hôpital et
observe les interactions entre les reclus
(les soignés et les soignants) et les
administrateurs
• Interaction : « des relations syntaxiques
qui unissent les actions des diverses
personnes mutuellement en présence »
34
Description ethnographique de
l’asile
• Extrait : Introduction de Robert Castel à Asiles, pp.9-10
« La texture d’Asiles est [...] faite essentiellement de la description
prosaïque de l’existence à l’hôpital telle que la vivent les malades :
comment ils mangent, dorment et travaillent, intriguent pour
humaniser leur environnement en se procurant de menus
privilèges, comment se font et se défont les amitiés et les haines, se
constituent les coteries et les clans dans la promiscuité des salles de
séjour ou des équipes de travail, quels rapports, de la complicité
précaire à l’antagonisme larvé, unissent et opposent les malades au
personnel de l’hôpital. Bref, c’est la litanie obsédante de l’existence
journalière des quartiers dans le temps figé de la détention, à peine
rythmé par les quelques fêtes rituelles de l’institution, kermesses,
bals, Noël des malades, soirées de charité, dérisoires comices dans
ce que Flaubert appelle la litière du quotidien et dont on éprouve
ici toute la monotone pesanteur »
Institution totale (totalitaire)
Goffman analyse l’asile comme une institution totale (totalitaire)
Les caractéristiques de l’asile valent aussi pour la prison, le couvent, les
casernes militaires ou le camp de concentration
•Contrôle social total sur le mode de vie
•La promiscuité entre les reclus
•La prise en charge de tous les besoins de l’individu
•L’isolement par rapport au monde extérieur dans un espace clos
•L’observance obligée d’un règlement qui s’immisce dans l’intimité de
l’individu
•L’irréversibilité des rôles de membre du personnel et de pensionnaire
•La référence constante à une idéologie consacrée comme seul critère
d’appréciation de tous les aspects de la conduite
« L’institution totalitaire est en effet à la fois un modèle réduit, une épure et
une caricature de la société globale » (Robert Castel)
Adaptation et identité dans une
institution totale
Comment les individus gèrent-ils leur enfermement dans l’asile?
•Goffman observe la “sous-culture” des internés et remarque des
stratégies pour échapper à la déshumanisation.
•Les adaptations primaires : obéissance entière au règlement de
l’institution
•Les adaptations secondaires : « toute disposition permettant à l'individu
de parvenir à des fins illicites et de tourner les prétentions de
l'organisation relatives à ce qu'il devrait faire »
C’est la vie clandestine de l’institution publique
•La mortification de la personnalité : à l’identité personnelle se substitue
une identité organisationnelle
•« Conversion » : lorsque le malade accepte la définition du médecin et se
comporte en patient idéal
•« Colonisation » : lorsque le régime institutionnel engloutit l’individu. Le
reclus sera incapable de s’adapter à la société extérieure
La vie sociale comme un théâtre
• Le monde social est un théâtre et l'interaction une représentation.
« l'acteur doit agir de façon à donner, intentionnellement ou non,
une expression de lui-même, et les autres à leur tour doivent en
retirer une certaine impression »
• Chaque individu doit jouer des rôles multiples au cours des
interactions quotidiennes et au cours de la vie. Les interactions se
déroulent comme des représentations théâtrales
• La face, c’est l’impression qu’on veut donner pour être conforme au
rôle joué. Garder la face; faire bonne figure ; ne pas perdre la face :
la valeur sociale positive de l’individu
• La façade, c’est le décor et l’apparence qui fournissent le contexte
• Les lieux de l’interaction sont analysés par la distinction des régions
antérieures (la scène) et des régions postérieures (les coulisses)
Exemple : une salle de classe ou un dîner
Le monde est une cérémonie
La mise en scène de la vie quotidienne, tome I. La
présentation de soi, (1959) traduit en français en 1973
•Inspiré par Durkheim, Goffman définit les rites
d’interaction comme des occasions d’affirmer l’ordre moral
et social.
•Dans toutes les rencontres face-à-face, les individus suivent
des lignes de conduite implicites et tacites.
•Ce sont les « règles cérémonielles » même si elles n’ont pas
de dimension solennelle.
•Les individus disposent d’un « répertoire symbolique »
•Goffman analyse les interactions les plus ordinaires :
Les règles de bienséance lors d’un dîner, entrer dans un
magasin pour faire les courses, aller au cinéma, avoir un
rendez-vous amoureux, traverser la chaussée…
•“La fonction essentielle de l’activité rituelle est de
permettre l’existence de rencontres autocontrôlées afin de
garantir le maintien des sociétés”
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Stigmate, normalité, identité
•
Stigmate, les usages sociaux des handicaps (1963) traduit en
français en 1975
Stigmate signifie une marque laissée sur le corps.
Le stigmate chez Goffman, c’est un attribut social dévalorisant –
qu’il soit corporel ou non (handicapé, juif, homosexuel).
Cet attribut constitue un écart par rapport aux attentes
normatives des autres à propos de son identité. Chaque
individu est plus au moins stigmatisé en fonctions de
circonstances, mais certaines personnes le sont plus que les
autres.
• Le stigmate s’analyse donc en termes relationnels. Il renvoie
autant à la catégorie à proprement parler qu’aux réactions
sociales qu’elle suscite et aux efforts du stigmatisé pour y
échapper.
• Jeux possibles de négociations identitaires :
« Lorsque la différence n’est ni immédiatement apparente, ni déjà
connue, lorsqu’en deux mots, l’individu n’est pas discrédité,
mais bien discréditable. »
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