L’irradiation médicale diagnostique de nos patients :
quels risques ?
Proposition d’une fiche pratique d’information patient
M.Delchambre1; T.Delchambre2; Y.Gaboreau3
1 : médecin généraliste, Grenoble ; 2 : Interne en radiodiagnostic, CHU Grenoble ; 3 : CCU-MG, DMG Grenoble
Introduction
Les médecins généralistes sont les premiers prescripteurs d’imagerie médicale diagnostique en France. Ils doivent aux patients
une information claire loyale et appropriée sur les risques cette exposition aux rayonnements ionisants à faible dose.
Question de recherche
A quels risques exposons-nous aujourd’hui nos patients lors des irradiations diagnostiques ?
Matériel et Méthode
Revue systématique de la littérature depuis 2000 via Pubmed, littérature grise, sites internet nationaux et internationaux
Résultats
1/ Quelle quantité de rayonnements?
2/ Pour quels risques ?
Examens Dose efficace
En millisievert
(mSv)
Nb équivalent
de
radiographie
thoracique
Durée équivalente
d’exposition
naturelle
Radio
graphies Membres et articulations < 0,01 <0,5 < 1,5 jours
Thorax 0,02 1 3 jours
Massif facial 0,1 5 15 jours
Rachis cervical 0,3 15 45 jours
Rachis dorsal 0,4 20 60 jours
Rachis lombaire 1,8 90 270 jours
Bassin de face 1,2 60 180 jours
Hanche 0,35 17 52 jours
Abdomen sans préparation 1,9 95 285 jours
Mammographie de dépistage 0,16 8 24 jours
Scanners cérébral 2,1 105 315 jours
Angio-scanner thoracique 15 750 6,1 ans
Abdo-pelvien 10 500 4,1 ans
1 segment rachidien 8,4 420 3,4 ans
Scinti
graphies Thyroïdienne 5,6 280 2,3 ans
Pulmonaire 2,9 145 1,2 ans
Osseuse corps entier 3,9 195 1,6 ans
2 types de risque : si la cellule irradiée est somatique =
Risque cancérogène
Risque d’apparition de cancer mortel chez l’individu
si la cellule irradiée est germinale =
Risque Héréditaire transmissible
Risque d’apparition de maladie génétique chez sa
descendance
Incidence spontanée en France 25% 73,8% des naissances
Etude « Life Span Study » : suivi des 86500
survivants d’Hiroshima et Nagasaki depuis
1950.(2)
< 100 mSv chez l’homme : risque identique
≥ 100 mSv: augmentation du risque, proportionnel à la
dose reçue
risque identique chez l’homme même à fortes doses
mise en évidence d’effets chez la souris et le
drosophile.
Extrapolation permettant le calcul du risque Simple extrapolation :
- Des effets des fortes doses aux faibles doses Double extrapolation :
- De l’expérimentation animale à l’homme
- Des fortes doses aux faibles doses
Calcul du risque maximal encouru
Selon (CIPR) (3) et (UNSCEAR) (5) Après exposition à 10 mSv : + 0,05% de risque
L’imagerie diagnostique = + 3300 décès /an soit 2,3%
des décès par cancer !! (4)
Après exposition à 10 mSv : + 0,002% de risque
Information pour le patient Sur 10000 personnes exposées à 10mSv : + 5 cancers
mortels Sur 10000 personnes exposées à 100mSv :
+ 2 cas de maladies génétiques
Information pour la femme enceinte >J8
uniquement si utérus compris dans le volume
exploré (6)
Probabilité pour l’enfant de ne pas avoir de cancer passe de 99,75 % - à 99,65% en cas de radiographie.
- à 99,6 % en cas de scanner
Absence de tératogénèse si dose reçue par utérus <100 mSv
Courbe 2.
Selon UNSCEAR
(2 )
+ CIPR
(3)
calcul selon une relation
linéaire sans seuil :
extrapolation des effets
observés à fortes doses
par principe de précaution
= risque maximal
encouru par l’individu.
Courbe 1.
Contestation par l’Académie
Française de médecine.
Calcul en tenant compte des mécanismes de défense cellulaire.
Les faibles doses stimuleraient l’organisme aux
interventions de réparation cellulaire d’où la moindre
incidence d’effets stochastiques.
C’est la théorie de la réponse adaptative ou Hormésis.
(7)
Discussion : La Relation Effet-dose
Les effets stochastiques n’ont, en théorie, pas de seuil de survenue
mais ne sont en réalité observables qu’à partir de 100 mSv.
Tableau 1. Dose efficace reçue par acte comparée au nombre de
radiographie thoracique et à la durée d’exposition naturelle en France
(1)
Conclusion
L’imagerie médicale diagnostique n’est pas sans risque.
Les irradiations par scanners cumulés peuvent
constituer un réel danger.
Le médecin généraliste a une double responsabilité
auprès du patient : l’informer des risques et être acteur
de sa radioprotection.
Risques des rayonnements ionisants faibles doses =Effets stochastiques de survenue
aléatoire, tardive ; conséquence de l’altération non létale du matériel génétique cellulaire
Références
1. Etard C, Sinno-Tellier S, Aubert B. Rapport EXPRI: Exposition de la population française aux rayonnements ionisants liée aux
actes de diagnostic médical en 2007. 2010 juin;
2. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation (UNSCEAr). Effects of Ionizing Radiation: Report to the
General Assembly. 2006;
3. International Commission on Radiological Protection (ICRP), 2007. Recommandations of the ICRP. IRCP Publication 103 Annals
of the ICRP Volume 37(2-4) Oxford, Pergamon Press.
4. Lochard J., Schneider T. Rapport n
°
268. Quelques éléments sur la radioactivité, les effets des faibles doses et la
radioprotection. 2000 Aout;
5. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation. Hereditary Effects of Radiation: Report to the general
Assembly. 2001;
6. ICRP. Grossesse et irradiation médicale. Publication 84. 2000
7. Gambini D-J, Granier R. Manuel pratique de radioprotection. 3e éd. Lavoisier; 2007.666 p.
Tableau 2. Les effets stochastiques : calcul du risque aux faibles doses (<100 mSv) et information du patient