LES ADDICTIONS Marion DELMAS, Melissa HADOUX Psychologues cliniciennes ECIMUD Bichat Introduction I Définitions : Toxicomanie/ conduites addictives Dépendances Illustrations de conduites addictives II Neurobiologie de la dépendance III Facteurs de risques Biologiques Socioculturels Psychologiques IV Comorbidités psychiatriques Psychoses Névroses Etats-Limites V Clinique du toxicomane Mise en place de la dépendance affective Rapport à l’Autre Rapport au corps… et au soin Conclusion : Pourquoi une approche globale du patient toxicomane ? La toxicomanie: consommation répétée d’une drogue qui entraîne un désir d’en consommer à nouveau et de s’en procurer par tous les moyens Addictions: ensemble des conduites dont les traits caractéristiques peuvent être définis par la recherche avide d’un objet, la répétition de l’acte, l’apparente dépendance à l’objet choisi, l’utilisation risquée du corps, la recherche de satisfaction immédiate, la proximité de la destruction et de la mort. Trois facteurs de la conduite addictive : les propriétés de l’objet addictif, la prédisposition de l’usager, l’environnement de l’usager L’usage récréatif : C’est une consommation de substance psychoactive qui n’entraîne ni complications pour la santé, ni troubles du comportement ayant des conséquences nocives sur les autres. L’usage nocif ou usage à problème : C’est une consommation susceptible de provoquer des dommages physiques (détérioration de l’état physique), des dommages affectifs, psychologiques et sociaux pour le consommateur et pour son environnement proche (attitude dangereuse, infractions répétées, aggravations des problèmes familiaux sociaux, incapacité à se passer du produit plusieurs jours). Notion d’accoutumance : C’est la persistance du désir à prendre un produit pour retrouver la sensation de bien-être qu’il procure. Notion de tolérance : C’est l’absorption répétée d’un produit qui entraîne la diminution de ses effets et par la même l’augmentation de ses doses pour obtenir les effets initiaux. Selon le DSM IV, il y a dépendance à une substance si 3 ou plus des critères suivants sont présents : 1. Tolérance manifestée par le besoin d'accroître les doses consommées pour obtenir une intoxication ou un effet désiré ou par une diminution des effets à dose consommée constante. 2. Symptômes de sevrage à la suite d'une période d'abstinence, évités ou améliorés par une nouvelle prise de la substance. 3. Prise de la substance en plus grande quantité ou pendant plus longtemps que prévu. 4. Un désir persistant ou des efforts infructueux pour diminuer ou contrôler de la consommation. 5. Beaucoup de temps passé à utiliser ou à se procurer la substance. 6. Abandonner ou réduire ses activités sociales, professionnelles ou de loisir à cause de l'usage de la substance. 7. Continuer à utiliser malgré la connaissance des risques pour la santé. La dépendance physique : Etat où l’organisme assimile à son propre fonctionnement la présence d’un produit développant des troubles physiques parfois graves en cas de manque (non-présence du produit dans l’organisme), l’ensemble de ces troubles constituant ce que l’on appelle le syndrome de sevrage. La dépendance physique est liée aux mécanismes d’adaptation de l’organisme à une consommation prolongée et peut s’accompagner d’une accoutumance. Le « craving » : La définition que propose l’OMS du « craving » est « le désir d’éprouver, de nouveau, les effets d’une substance psychoactive précédemment expérimentée. Ce désir est connu comme un moteur important de la poursuite de la consommation et des rechutes après une période d’abstinence, même très longue (Zickler, 2000). Le « craving » peut être déclenché par des stimuli externes et environnementaux tels que la vision, l’odorat, les bruits et les situations sociales liées à la consommation (Zickler, 2000). L’humeur d’une personne peut également être un stimulus pour ces symptômes (Franken et al., 1998). Dépendance physique Dépendance psychique Dangerosité sociale Héroïne (opioïdes ) Alcool Tabac Cocaïne Très forte Très forte Forte Très forte Très forte Très forte Très forte Forte (cancer) MDMA Psychostimulant s Benzodiazépines Faible Très faible Faible Moyenne Forte mais intermitte nte Mal connue Moyenne Forte Faible (exception s possible) Faible (sauf conduite automobil e) Très forte Faible ( ?) L’alcool se lie à de nombreux récepteurs biologiques comme les récepteurs à glutamate, GABA, sérotonine, nicotine. L’alcool est impliqué dans l’augmentation de la libération de dopamine dans le système mésocorticolimbique. Le cannabis entraîne une faible libération de dopamine selon un mécanisme encore étudié et discuté. Les récepteurs cannabinoïdes sont présents en forte densité dans le système limbique (dans le noyau accumbens, dans le cervelet, l’hippocampe et le cortex). La cocaïne agit en empêchant la recapture de la dopamine au niveau des synapses. Ce faisant, elle augmente la présence et donc l’effet de la dopamine dans les synapses au niveau du cerveau des émotions (système limbique). L’ecstasy augmente la présence de sérotonine dans les synapses en bloquant sa recapture. Dans une moindre mesure, elle augmente également celle de la dopamine. L’héroïne est transformée dans le cerveau en morphine. Celle-ci se lie aux récepteurs opioïdes naturels (récepteurs des endorphines). Elle stimule également le système de la dopamine, mais par un mécanisme indirecte, en diminuant le contrôle des neurones GABA sur les neurones à dopamine. La nicotine du tabac, comme toutes les autres substances psychoactives induisant une dépendance, accroît la libération de dopamine par certains neurones. La nicotine imite l’action d’un neuromédiateur naturel, l’acétylcholine. Elle se lie aux récepteurs nicotiniques dans le cerveau. La nicotine facilite également la libération des endomorphines, ce qui expliquerait en partie son effet antalgique (contre la douleur). Les dépresseurs du système nerveux central : Ils ralentissent le fonctionnement du système nerveux, provoquent souvent une dépendance physique et peuvent avoir, à forte dose, des conséquences graves (dépression respiratoire). Cette classe inclut notamment l’alcool, les hypnotiques (barbituriques), les tranquillisants (benzodiazépines), les neuroleptiques et les analgésiques (opiacés, morphine, héroïne…) Les stimulants : Ils stimulent le fonctionnement du système nerveux, provoquent souvent une dépendance et peuvent provoquer, à long terme, la paranoïa ou des dépressions graves. Cette classe inclut notamment les stimulants mineurs (café, tabac), les stimulants majeurs (amphétamines, anorexigènes, cocaïne, ecstasy, GHB), les stimulants de l’humeur et les antidépresseurs Les hallucinogènes ou perturbateurs : Ils perturbent le fonctionnement du système nerveux et la perception de la réalité et peuvent, à long terme, modifier durablement la personnalité du consommateur (syndrome post hallucinatoire persistant). Cette classe inclut notamment le chanvre indien, les solvants (éther, colles), les anesthésiquesvolatils, le LSD, la mescaline, la psilocybine, la kétamine, etc… 4 sources majeures de renforcement dans la dépendance à une substance : Le plaisir éprouvé L’automédication des symptômes de sevrage L’habitude L’environnement La dépendance physique résulte de l’adaptation de l’organisme en réponse à l’utilisation répétée d’une substance. Elle correspond à un nouvel équilibre homéostatique et nécessite une administration continue de la substance pour maintenir un fonctionnement normal. Tolérance à une substance : nécessité d’augmenter les doses pour obtenir l’effet attendu. Sensibilisation à un produit : Il y a augmentation des effets pour une même dose . Facteurs de risques liés à l’environnement : Sociaux : exposition précoce aux produits, marginalité… Socioculturels : immigration, acculturation… Familiaux : relations violentes, conflictuelles, comorbidité psychiatrique familiale, évènements de vie traumatiques (deuils, séparations, abus sexuels, grossesses non désirées…) Entourage : pairs qui consomment régulièrement, rites d’initiation, marginalisation… Facteurs de protections : Niveau élevé d’intelligence Capacité à résoudre les problèmes Compétences sociales Estime de soi Soutien familial adapté Compétences scolaires