Introduction
Le traitement du carcinome médullaire métasta-
tique de la thyroïde métastatique constitue un
défi. Lorsque toutes les possibilités chirurgicales
ont été épuisées, le médecin traitant n’a d’autre
choix que d’assister à l’évolution terminale en
instaurant des mesures palliatives. En effet, dans
le carcinome médullaire métastatique de la thy-
roïde métastatique, contrairement aux autres
tumeurs solides, on ne dispose d’aucun traite-
ment systémique offrant un rapport bénéfice/
risque adéquat.
En ce qui concerne le carcinome différencié de
la thyroïde, la médecine nucléaire offre depuis
longtemps une option thérapeutique éprouvée
avec l’iode-131. Les tumeurs métastatiques sont
traitées par cette méthode thérapeutique à visée
curative depuis des décennies déjà. Cette mé-
thode a amélioré le pronostic du carcinome thy-
roïdien différencié, et elle a démontré en outre
que le transport spécifique de nucléides radio-
actifs dans les cellules tumorales peut aboutir à
la guérison, également dans des situations poly-
métastatiques. L’application de ce traitement
systémique prometteur par radio-isotopes du
cancer thyroïdien différencié à d’autres tumeurs,
notamment le carcinome médullaire de la thy-
roïde, représente l’un des défis majeurs auxquels
la médecine nucléaire sera confrontée ces pro-
chaines années.
Radio-immunothérapie anti-CEA
L’an passé justement, un pas dans cette direction
a été franchi par le groupe de travail français de
Chatal et al. [1]. Ces chercheurs ont utilisé un
anticorps dont un bras se lie à l’antigène carcino-
embryonnaire (CEA) présent en très grande
quantité à la surface des cellules du carcinome
médullaire de la thyroïde. Avec son second bras,
cet anticorps se lie à un haptène chargé d’iode-
131 radioactif, appliqué quatre jours plus tard et
qui a irradié les cellules tumorales. Les auteurs
ont constaté une réponse biochimique chez 18
sur 29 patients traités. Par ailleurs, il est remar-
quable de noter que les patients du groupe du
carcinome thyroïdien médullaire à progression
rapide ont présenté une meilleure survie par
rapport au collectif de contrôle non traité. Dans
ce groupe, les patients ayant répondu au traite-
ment ont survécu plus longtemps que les patients
n’ayant pas répondu.
Il faut toutefois mentionner que ces résultats ont
été obtenus par un groupe de travail isolé et
auprès d’un collectif limité. De même, le concept
de l’étude n’est pas dépourvu de toute critique,
le groupe de contrôle étant un collectif histori-
que non traité. Cependant, cet article souligne
le potentiel spécifique du traitement aux radio-
nucléides, et il a fait partie des points forts de la
médecine nucléaire l’an dernier.
L’inconvénient majeur de la radio-immuno-
thérape anti-CEA est sa forte toxicité sur le sys-
tème hématopoïétique. Sur 29 patients, quatre
ont développé une neutropénie de degré IV, cinq
patients une thrombopénie de degré IV et un pa-
tient a développé une myélodysplasie.
Traitement par radionucléides contre
les récepteurs à la somatostatine
La plupart des carcinomes médullaires de la
thyroïde expriment à leur surface, en plus du
CEA – à l’instar de nombreuses autres tumeurs
neuro-endocriniennes – le sous-type 2 de récep-
teurs à la somatostatine. Cette protéine de
surface sert de cible dans le traitement par radio-
peptides, ayant pour cible les récepteurs à la so-
matostatine. On utilise pour ce faire l’analogue
de la somatostatine DOTA-TOC. Après admi-
nistration intraveineuse, le DOTA-TOC chargé
d’Yttrium-90 radioactif se lie au récepteur à la
somatostatine à la surface de la cellule, puis il est
internalisé dans la cellule et irradie celle-ci. Un
effet secondaire avantageux de ce traitement est
l’effet «feux croisés» lors duquel une cellule tu-
morale voisine ayant déjà perdu son récepteur
correspondant par dédifférenciation se voit
également irradiée. Un autre avantage du médi-
cament radioactif réside dans le traçage de sa
distribution dans l’organisme et dans son accu-
mulation dans la tumeur visible à la scintigraphie
(fig. 1 x).
Le traitement DOTA-TOC a été développé à Bâle,
et il est appliqué depuis 1997. Depuis lors, il a
été appliqué chez des patients avec carcinomes
thyroïdiens dédifférenciés et médullaires métas-
HIGHLIGHTS 2006 Forum Med Suisse 2007;7:21–22 21
Médecine nucléaire: traitement systémique
du carcinome médullaire thyroidien au stade
métastatique par radionucléides
Fabienne Itena, b, Beat Müllerb, Jan Müller-Branda, Martin A. Waltera, b
Universitätsspital Basel
aInstitut für Nuklearmedizin, bAbteilung für Endokrinologie