Frédéric Rieux Laucat se souvient amusé qu’il
souhaitait être dentiste... «J’ai suivi une première
année de médecine » nous raconte-t-il, «mais,
numérus clausus oblige, je me suis tourné vers la génétique
et l’immunologie qui m’intéressaient particulièrement».
Il intègre donc un cursus universitaire à la Faculté des
sciences de Paris 6 et eectue son doctorat au sein de
l’Unité 132 de l’Inserm, dirigée à l’époque par le Pr
Claude Griscelli, puis par Alain Fischer.
Les débuts de la génétique
Il travaille alors sur l’identication de mutations
génétiques à l’origine de décits immunitaires.
«Quand j’ai commencé ma thèse, la génétique moléculaire
bénéciait tout juste de l’apport de la PCR» se rappelle
le chercheur, «il fallait des semaines, voire des mois, pour
séquencer un gène, aujourd’hui, il ne faut que 2
jours!». Il se passionne très vite pour cette thématique
et part en Post-Doctorat avec l’idée de revenir dans
le laboratoire. «Juste avant la n de ma thèse, j’ai mis en
évidence les premières mutations du gène FAS chez des
patients qui présentaient un syndrome lymphoprolifératif
avec auto-immunité (ALPS)» explique F. Rieux- Laucat,
« je suis parti en Post-Doc à Cologne, dans le laboratoire
de Klaus Rajewsky, pour développer un modèle souris et
Frédéric Rieux Laucat est
responsable d’équipe au
sein de l’Unité Inserm
768, dirigée par le Pr Alain
Fischer, et dont le thème
de recherche porte sur le
“Développement normal et
pathologique du système
immunitaire.
Rencontre avec...
Frédéric
RIEUX -LAUCAT
Janvier 2011
revenir dans le laboratoire avec cette expertise ».
Une interaction très forte avec la clinique
Frédéric Rieux Laucat dirige aujourd’hui une
équipe de 5 personnes au sein de l’Unité 768.
Depuis son retour de Post-Doctorat, en 1997, il
étudie les mécanismes qui contrôlent la tolérance
au Soi. “Nous étudions diérentes situations
pathologiques pour essayer de comprendre les
mécanismes fondamentaux impliqués” explique-t-il.
“La grande force de notre laboratoire est sa proximité
avec les médecins et les patients, nous participons
aux stas cliniques et les cliniciens sont présents aux
réunions scientiques, nous partons du malade pour
comprendre les mécanismes fondamentaux et essayer
d’apporter un diagnostic plus précis et obtenir de
nouvelles pistes thérapeutiques”. Le laboratoire
collabore ainsi avec tous les centres nationaux et
européens pour récolter des échantillons sanguins
et eectuer les études. “Nous sommes un centre de
férence pour cette pathologie” précise F. Rieux-
Laucat.
“Nous travaillons toujours sur les mutations du gène
FAS” poursuit-il, nous avons d’abord découvert
que les patients pouvaient porter des mutations
germinales, puis des mutations somatiques et plus
récemment, nous avons montque certains patients
présentaient également des mutations somatiques
associées à des mutations germinales” (voir notre
encadré). Cette nouvelle découverte constitue une
avancée importante dans la compréhension des
mécanismes génétiques qui sous-tendent l’auto-
immunité et qui ressemblent aux mécanismes
impliqués dans la survenue des cancers. Elle
permettra à termes d’améliorer la prédiction du
déclenchement de cette maladie. Dans ce but,
l’équipe de F. Rieux-Laucat travaille aussi sur la
détermination de marqueurs biologiques prédictifs.
Patience et longueur de temps...
Selon F. Rieux-Laucat, le chercheur doit se montrer
patient. “Je répète souvent à mes étudiants que le
temps de la recherche et celui de la médecine ne sont
pas les mêmes, la recherche nécessite de recommencer,
d’insister” explique-t-il, mais nous devons également
être impatients pour avancer, être pugnaces. La
proximité des cliniciens nous rappelle quotidiennement
les dicultés rencontrées pour répondre aux attentes
des patients et de leurs familles. Ceci est d’autant plus
motivant pour essayer de comprendre les mécanismes
à lorigine de ces pathologies et apporter des solutions
nouvelles” conclut F. Rieux-Laucat, aussi motivé
que les premiers jours de son arrivée dans l’Unité
768, il y a 20 ans.
V. Arnaud - Service communication Inserm DR Paris V
Zoom sur...
Fas est une protéine pouvant médier la mort par
apoptose des lymphocytes T humains activés.
Lorsque l’apoptose dépendante de Fas ne peut
avoir lieu, en raison de mutations génétiques,
un syndrome lymphoprolifératif associé à des
manifestations auto-immunes est observé chez
l’homme. Cependant, dans certaines familles, des
porteurs de la mutation ne développent jamais
la maladie. En étudiant une sous population
lymphocytaire caractéristique de la pathologie,
F. Rieux-Laucat et son équipe ont identié chez
les patients, et pas chez les porteurs sains, des
événements génétiques somatiques qui aectent le
second allèle de FAS, en plus de la mutation héritée
(germinale). Cela suggère que les pathologies auto-
immunes résultent de l’accumulation de mutations
de gènes « suppresseurs dauto-immunité », et peu
probablement s’étendre à d’autres pathologies
auto-immunes, comme le diabète de type I. J Clin
Invest. Volume 121 Number 1 January 2011.
Frédéric Rieux-Laucat
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