La surface des océans, tout un monde en mouvement

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Fiche n°268 - Mai 2007
La surface des océans,
tout un monde en mouvement
omprendre l’effet de
serre mobilise la communauté scientifique autour
de l’étude de la couche
éclairée de l’océan (30 à 120
mètres). Celle-ci joue un rôle
dans l’absorption du gaz
carbonique atmosphérique
en l’intégrant sous forme de
matière organique, entraînée
ensuite vers les profondeurs.
Des chercheurs de l’IRD
émettent l’hypothèse qu’une
partie de ce flux remonterait
et alimenterait les organismes
vivants de l’écosystème situé
dans les premiers centimètres
de l’océan. Or, le fonctionnement de cet écosystème, peu
connu, pourrait également
intervenir dans les échanges
de carbone entre les masses d’eau et l’air. À l’aide de
modèles, des océanographes
de l’IRD ont cherché à mieux
comprendre la répartition de
cette faune de surface et des
particules organiques qu’elle
absorbe. Celles-ci apparaissent 10 fois plus concentrées
dans les zones de convergences océaniques que dans
les autres aires marines. Une
telle accumulation aurait des
conséquences sur la répartition de certains poissons et
pourrait remettre en question
les calculs du taux de carbone absorbé par l’océan.
© IRD/Loïc Charpy
C
Plancton dans les fonds de l'atoll Clipperton, de son vrai nom de baptême français, Île de La Passion
(Polynésie française
Depuis cinquante ans, grâce aux progrès
techniques, on connaît beaucoup mieux
les propriétés de l’eau de mer en profondeur. Cependant, les premiers centimètres de
l’océan restent les moins bien connus. Ils sont
en effet difficiles à prélever et à étudier en
raison du mélange induit par la présence du
navire océanographique entre cette couche
superficielle et les strates d’eau plus profondes. Pourtant, il existe au sein de la couche
de surface tout un écosystème, comportant
de nombreux organismes vivants comme
des bactéries, du zooplancton et de plus gros
animaux, à l’instar des poissons volants, qui
s’y nourrissent et s’y reproduisent.
Communément, Les recherches se focalisent plutôt sur l’ensemble de la partie
éclairée de l’océan (30 à 120 premiers
mètres) où le phytoplancton élabore la
matière organique (production primaire)
grâce à la chlorophylle - son pigment vert
- au cours de la photosynthèse. Par ce
processus, l’océan se révèle capable de
piéger le gaz carbonique de l’atmosphère
en l’intégrant à la matière organique produite et en le stockant par sédimentation
vers les profondeurs. Ce mouvement descendant de particules carbonées mobilise
toute l’attention des océanographes.
>>
Institut de recherche pour le développement - 213, rue La Fayette - F-75480 Paris cedex 10 - France - www.ird.fr
Fiche n°268 - Mai 2007
Pour en savoir plus
CONTACTS :
YVES DANDONNEAU
IRD Laboratoire d'océanographie et du climat : expérimentations et approches
numériques (LOCEAN).
+33 (0)1 44 27 44 83
[email protected]
RELATIONS AVEC LES MÉDIAS :
+33 (0)1 48 03 75 19 ;
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INDIGO, PHOTOTHÈQUE DE L’IRD
+33 (0)1 48 03 78 99 ;
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IRD AUDIOVISUEL
+33 (0)1 48 02 56 24 ;
[email protected]
www.audiovisuel.ird.fr/
RÉFÉRENCES :
DANDONNNEAU YVES, MENKES
CHRISTOPHE, DUTEIL OLAF,
GORGUES THOMAS, Concentration
of floating biogenic material in
convergence zones, Journal of
Marine Systems (2007). Sous
presse.
doi:10.1016/j.jmarsys.2006.02.016
MOTS-CLEFS :
COUCHE SUPERFICIELLE
OCÉANIQUE,
MATÉRIEL FLOTTANT, ZONES DE
© IRD/ Arnaud
Bertrand
CONVERGENCES
Remontée du filet à plancton à
bord du N/O Olaya lors d'une
campagne océanographique.
Dans ce contexte, des chercheurs de l’IRD (1)
émettent l’hypothèse qu’une partie de ce
flux de carbone remonterait au lieu de descendre, alimentant ainsi la faune de surface. L’ensemble de ces êtres vivants et des
particules organiques qu’ils absorbent reste
encore très peu connu et est désigné sous
le terme « matériel biogénique flottant ». Afin
de mieux comprendre la répartition de ces
particules présentes à la surface des océans
et notamment leurs liens avec les « points
chauds » de nourriture observés depuis plusieurs années (2), les scientifiques ont utilisé
un modèle physique de circulation océanique,
couplé à un modèle reproduisant le comportement des écosystèmes.
Les résultats de cette simulation montrent
que la distribution du matériel biogénique
ne suit pas celle de la production primaire
dont il est issu. En effet, les organismes
de la couche superficielle associés à leur
matière organique sont soumis à l’influence directe des courants de surface. Ceuxci entraînent ce matériel flottant jusqu’aux
zones de convergences océaniques, lieu
de rencontre de deux masses d’eau. Ces
« fronts », où les concentrations de matériel
biogénique sont jusqu’à 10 fois supérieures
à celles des autres régions marines, ne se
révèlent pas plus riches en phytoplancton
et en chlorophylle que les eaux environnantes. La couche de surface des zones
de convergences ne représente un lieu
d’accumulation que pour les débris flottants
de la vie marine et les organismes qui s’en
nourrissent.
L’existence de telles concentrations de
biomasse flottante dans les aires peu productives et pauvres en matière organique
représente une aubaine pour les poissons
en quête de nourriture. Elle permet notamment d’expliquer pourquoi la pêche au
thon s’effectue essentiellement près de ces
fronts, ce qui jusqu’alors n’avait pas été
clairement élucidé.
Par ailleurs, les propriétés optiques de cette
matière flottante s’avèrent assez proches
de celles de la chlorophylle. En conséquence, ce matériel biogénique influence
l’observation de la couleur de l’océan de
la même manière que le pigment vert. Il
fausse ainsi les systèmes de calcul qui utilisent ces données satellite de couleur pour
estimer la concentration en chlorophylle et
donc celle du phytoplancton. Les grandes
quantités de chlorophylle détectées dans
les zones de convergences correspondraient en réalité à la présence des débris
flottants. Une meilleure compréhension
de la distribution de la chlorophylle et
du matériel biogénique qui s’accumule
dans les fronts permettrait donc de mieux
connaître et de mieux utiliser la couleur de
l’océan comme indicateur de la circulation
océanique et des processus biologiques,
biogéochimiques de l’écosystème.
Enfin, l’accumulation de micro-organismes et de débris flottants est susceptible
d’influencer l’absorption du gaz carbonique (CO2) par l’océan. En effet, les êtres
vivants de l’écosystème des premiers centimètres aquatiques respirent et produisent
du CO2. Dans ce contexte, l’existence d’un
excédent de gaz carbonique juste sous la
surface pourrait remettre en question les
méthodes d’estimation de la quantité de
CO2 absorbée par l’océan.
Un dispositif de prélèvement en surface
est en cours de mise au point. Il constitue
un préalable indispensable à l’étude de ce
thème important pour la compréhension
des phénomènes climatiques et de la
concentration du carbone atmosphérique,
paramètre clé du réchauffement de la
planète (3).
(1) Ces recherches ont été menées par le
Laboratoire d'océanographie et du climat :
expérimentations et approches numériques
(LOCEAN), qui rassemble des scientifiques
de l’IRD, du CNRS, de l’Université Paris VI
et du MNHN.
(2) Voir la fiche 190, décembre 2003, accessible à www.ird.fr/fr/actualites/fiches/2003/
fiche190.htm
(3) Il s’agit du programme GRABISU, au
sein du programme national LEFE-CYBER,
dont une des priorités actuelles consiste à
mettre au point de nouvelles techniques
de prélèvement de la pellicule superficielle
de l’océan.
Rédaction IRD : Céline Bézy
Marie Guillaume-Signoret, coordinatrice
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33(0)1 48 03 76 07 - fax : +33(0)1 40 36 24 55 - [email protected]
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