LES TERMES DESIGNANT LES SONINKES, LEUR ETHNIE, LEUR

publicité
LES TERMES DESIGNANT LES
SONINKES, LEUR ETHNIE, LEUR
LANGUE OU LEUR CULTURE
Par Professeur Mamadou Khalifa SOUMARE
Linguiste
Professeur d’Enseignement Supérieur
Ecole Normale Supérieure (ENSUP) – Bamako/Mali
L’appellation Soninké
L’appellation Soninké: vocable utilisé par les
Soninkés pour designer leur identité ethnique.
Selon la légende, les traditions orales, SONNA
serait la ville natale de Mama Dinga, le
patriarche des Soninkés. SONINKE serait alors
« l’habitant de SONNA ou SONNI ». La
localisation
du
site
reste
à
prouver
scientifiquement. On constate cependant des
traces de cette appellation dans plusieurs
localités du Mali.
SONINKE = SARAKHOLLE
La dénomination Sarakhollé est utilisée par les
wolofs, les Français et son équivalent chez les
gambiens est « Serewulli » ou « Sarawulli ».
Selon certains, « Sarakhollé » serait une expression
wolof signifiant « parler de la gorge » à cause des
sons gutturaux abondants dans le parler Sonninké.
Selon d’autres, il s’agit d’une expression Soninké
« sare – xulle » signifiant « personne de teint clair ou
homme blanc ». En effet, la tradition orale attribut au
Soninké une origine blanche, yemenite, hindoue,
égyptienne, etc…
SONINKE = SARAKHOLLE (Suite/Fin)
Quant à l’hypothèse linguistique, le mot sarakholé
serait la résultante d’un procedé phonétique appelé
métathèse, c’est-à-dire un procédé d’inversion
portant sur des syllabes ou des mots dans la langue.
Donc, « Saraxulle » serait dérivé de « Sara – xulle »
signifiant mot-à-mot « personne – rivière ». Ce
serait donc « xolle – sare » « homme des rivière »
qui par métathèse est devenue « sara – xulle ». Ce
phénomène est fréquent en Soninké.
Exemples: gijin – pare = farin – gije (phacochère)
nyaaxame = nyamaxe (repas du soir)
nyaxamala = nyamaxala (gens de caste)
La dénomination « Marka »
• « Maraka » : les Bambaras et les autres
mandingues nomment les Soninkés par le terme
« maraka » ou « marka », une analyse
linguistique et historique peut conduire à
différentes interprétations :
• Partant de la langue Soninké, le « mara » en tant
que substantif signifie « grenier » ou « région
administrative ».
• Comme verbe il peut signifier diriger,
domestiquer, dominer, garder, stocker, etc….
La dénomination « Marka » (suite)
Le mot « mara » en bambara comme verbe est
presque synonyme de celui du Soninké. Il
signifie diriger, stocker et il a le sens de région
administrative.
« maraka » pourrait à première vue être
décomposé de la manière suivante :
« marakan »: en mara et kan ou mara et ka
Mara – kan : verbe mara + kan : substantif
Mara – ka : verbe + suffixe ka : formation
impossible en bambara, le suffixe – ka ne
pouvant fonctionner qu’avec les substantifs en
Bambara.
La dénomination « Marka » (suite)
Dès lors, on pourrait pencher vers l’hypothèse
marakan = mara-kan, langue de ceux qui
dominent, qui stockent, qui domestiquent, etc…
Nous savons que l’ethnie Soninké est par
excellence l’ethnie qui stocke, qui thésaurise, qui
conserve (référence aux dioulas, commerçants)
et
marka
est
aussi
synonyme
de
« conservateurs ».
La dénomination « Marka » (suite)
Historiquement, nous savons que Soundiata Keita
s’était refugié un moment à Méma, au Wagadou
et il s’est fait accompagner au Mandé par des
Soninkés pour conquérir le pouvoir, et ces
Soninkés sont devenus des « mandé-mori », parce
qu’étant lettrés en Arabe, ils se sont vu confier
l’administration, la collecte des impôts et
l’éducation des enfants dans la Mandé. Les
mandingues qui nomment les Soninkés
« Markas » ; ceci pourrait se traduire par la
langue de ceux qui administrent, de ceux qui ont
dominés, en souvenir de l’empire du Wagadou.
La dénomination « Marka » (Suite/Fin)
Les Bambara parlent aussi de :
•
Maraka – je
•
Maraka – fin
•
Maraka – jalan
Le Maraka – je est celui qui parle la langue
Soninké avec netteté
Le Maraka – fin est celui dont la langue est
bambara mais revendiquant une origine Soninké
Le Maraka – jalan sont des populations ayant
des patronymes Soninkés (Cissé, Sakho, Tounkara,
etc…)
et
soutenant
farouchement
leur
appartenance à l’ethnie Soninké.
La dénomination Wakhoré – wangara
Il existe une version de Dinga en pays songhay
qui se réfère à un habitant yéménite qui au cours
de ses voyages rencontra un génie propriétaire
des lieux dont il vainquit les sortilèges et épousa
les deux filles du sorcier et une servante; il eut
de l’aîné un fils Wakhôré, et de la seconde il eut
Wangara et le troisième fils que lui donna la
servante est Songhay. Wakhôré serait l’ancêtre
des Soninkés, Wangara se réfère aux Malinkés
et Songhay est l’ancêtre des Songhays.
La dénomination Wakhoré – wangara (suite)
Le génie avant sa mort aurait prédit que la
famille Wakhôré règnerait d’abord, puis les
Wangara et enfin les Songhay (ce qui se serait
réalisé par la succession des trois empires :
Ghana – Mali – Songhay).
Une autre version de Dinga du delta central
nigérien rapporte que le Dinga des Songhay
aurait épousé cinq femmes qui lui auraient
donné dix-sept enfants.
La première épouse, Sétakhoullé Daffé de Djenné
est restée sans enfant. Dinga alla à Dia où il
épousa Assakhoullé Soudourou qui lui donna
trois jumeaux, l’un mourut à bas âge.
La dénomination Wakhoré – wangara (suite)
L’ainé Siriman Missané dit Diafouné serait
l’ancêtre des Djikkinés, le cadet Diakhaba Founé
serait l’ancêtre des Souarés. Dinga alla ensuite à
Dioka et épousa Diangono – Boro qui lui donna
six enfants. Terenkiné – Térenkalla, Lampakhé
(ancêtre des Berté) Karaguidé (ancêtre des
Séméga), Tougon – Modé Kabonga (Père de
Diabé), le sixième est mort en bas âge.
La quatrième épouse de Dinga Katana – Boro est
mère de cinq enfants, Magan Diabé, Magan Tané
Foulanké (tous ancêtres des Cissé), Magan –
Mamadou et Magan Komma sans postérité.
La dénomination Wakhoré – wangara (suite)
La cinquième épouse Singaguillé – Sounékoro
mit au monde trois enfants : Mamadi, ancêtre
des Touré, Fasséro père des Kouma, le 3ème
enfant mort en bas âge.
Même si aujourd’hui l’équation Soninké –
Songhay ne résiste pas à la critique nous
constatons que les deux ethnies partagent les
mêmes légendes.
Une autre hypothèse de l’équation Wangara –
Wakhoré se réfère à la diaspora soninké qui
aurait donné naissance à un groupe particulier
dénommé tantôt Wangara tantôt Wakhoré
suivant les milieux où ils sont installés.
La dénomination Wakhoré – wangara (Suite/Fin)
Les Wangaras et les Wakhorés sont identifiables
dans ce cas par leurs patronymes, ce sont des
patronymes tels que : Saghanogo, Diabakhaté,
Cissé-Haidara, Bagayogo, Timité, etc. Des
membres appartenant à d’autres ethnies se sont
aussi approprié les appellations Wangara –
Wakhoré mais d’origine Bambara, Senoufo,
Songhay, Bobo, Haoussa, etc., ceci à cause de
leur érudition dans le domaine de l’Islam parce
que détenteur de l’imamat dans leur milieu.
Wangara – Gangara ou Gangari
Le vocable Wangara rappelle celui de Gangara
terme désignant des populations Soninkés qui
étaient installées dans l’Assaba et le Tagant et
dont les descendants ont pour ancêtre des
Makhan, Mallen Duo Soumaré fondateur du
Guidimakha
(Guidimakha).
Guidimakha
signifiant « Giden Maxan » ou « Makhan de la
montagne » ou le Hairé (montagne ou colline)
expression peulh désignant actuellement une
zone du Guidimakha mauritanien.
Soninké – Songhoy – Sonianké
Sur le plan linguistique, les deux communautés
appartiennent à deux familles différentes : le
Soninké est de la famille linguistique « Mandé »
et le Songhoy est de la famille « nilosaharienne ». Néanmoins, il n’y a pas de raisons
qu’ils n’aient pu exister des liens entre eux. En
effet, il existe dans le Songhoy et le Zarma ceux
qu’on appelle « Sonianké », ce sont des
animistes parlant Songhay – Zarma mais qui
font leurs incantations en langue Soninké qu’ils
ne parlent plus et qu’ils considèrent comme la
langue de leurs ancêtres et mais n’étant plus
parlée aujourd’hui que par des étrangers venus
d’ailleurs : les Soninkés.
Soninké – Songhoy – Sonianké (suite/Fin)
Car en les écoutant réciter ces incantations tout
locuteur soninké comprend aisément une partie de
leur discours. Exemple : ils disent « An Kantan liηo »
en parlant de la puissance de la hache de foudre.
Quant à Soninké et Sonianké, ce sont des termes très
voisins phonétiquement et la tradition orale et
l’histoire Shonghoy – Zarma est encore conservée en
langue Soninké par les Djessérés. On ne peut que
constater un impact certain des Soninkés sur les
Songhoys. Ainsi, les Wakhorés qui sont nombreux
dans le Dendi au Niger ne sont que des Soninkés qui
sont perdus parmi les ethnies Songhoy. Quand un
Soninké écoute un Djésséré, il comprend ce qu’il dit et
ce vocable Djésséré n’est autre que l’équivalent de
Guessére (phénomène phonétique de palatalisation de
(d) devenu (J) devant une voyelle avant (e).
Diakhanké = Soninké
Les recherches s’accordent sur l’appartenance de la
communauté diakhanké à l’ethnie à l’ethnie
Soninké, elle a été fondée par Salim Souaré
(comme sous l’appéllation mandingue Diakha Laye
Souaré ou M’Bemba Laye. Le patriarche des
Diakhankés serait originaire de Diakha au Macina
malien. A l’origine, il s’agissait de quatre foyers,
quatre clans : Souaré, Dramé, Fofana et Fadiga;
ensuite, se sont ajoutés Diakité – Kaba, Sylla,
Gassama-Diaby, Dansokho, Sawané, Sakho, etc…
Diakhanké peut être traduit par « habitants de
Diakha », et Diakha est à rapprocher des noms des
localités de Dia, Diakhaba, Djenné, etc…
Soninké – Songhoy – Sonianké
Sur le plan linguistique, la langue Diakhanké
ressemble plus au mandingue qu’au soninké,
mais le groupe est certes apparenté au soninké
mais il a adopté la langue mandingue
Les diakhankés sont aussi appelés les toubaka en
Guinée.
Sillanké = Soninké
Il s’agit d’un groupe assez réduit habitant au Burkina
faso et au Niger. Au Burkina, tous les Sillankés sont
originaires de Baghiemdé appelé Goor-xoore par
eux-mêmes (le nom du village rappelle celui de Gori
du Djafounou). On distingue parmi eux deux
groupes: les Sillanko – Sul qui seraient venus de
Nioro (Mali) et les Sillanko – Zi leurs captifs.
Par ailleurs, l’appélation Sillanké désigne aussi des
populations d’origine Soninké au Niger et certains
d’entre eux se sont installés vers la frontière avec le
Nigeria où ils ont créé un village du nom de Youri en
souvenir de la capitale du Kingui (Mali).
Sillanké = Soninké (suite/Fin)
Ce sont essentiellement des Diawara et des Sylla
et ils parlent un Soninké fortement influencé par
la langue peulh. L’appellation sillanké s’est
étendue à la communauté Soninké immigré
exerçant le commerce à Niamey. Les
généalogistes appelés Djessérés en milieu
Djèrma font leurs généalogie en langue Soninké
tout en traduisant en Djèrma
Je Vous remercie
Téléchargement