L’administration intra-nasale de NGF est-elle une voie thérapeutique potentielle dans la maladie d’Alzheimer ? Le facteur de croissance nerveux (Nerve Growth Factor ou NGF) est le principal facteur trophique pour les neurones cholinergiques du cerveau basal antérieur. Chez les rongeurs et les primates non-humains, le NGF stimule la synthèse de choline acétyltransférase et protège les neurones de l’atrophie, qu’elle soit induite par une lésion expérimentale ou associée au vieillissement. Comme la dégénérescence progressive de cette région cérébrale est en grande partie responsable des troubles cognitifs observés chez les patients Alzheimer, le NGF pourrait donc constituer un agent thérapeutique potentiel. L’application de NGF pose cependant un problème majeur car, comme beaucoup d’autres substances trophiques de nature peptidique, il ne passe pas la barrière hémato-encéphalique. Son activité a cependant été démontrée par administration intra-cérébroventriculaire chez l’animal et lors de quelques essais chez l’homme, approche qui dût être abandonnée du fait des risques chirurgicaux. Une autre méthode d’application, moins invasive, est cependant possible : l’administration par les voies des nerfs olfactifs et trigéminés. C’est précisément cette approche qui a été explorée dans cette étude expérimentale chez la souris. Les souris transgéniques AD11 expriment des anticorps qui neutralisent l’activité biologique du NGF. De ce fait, elles présentent une neurodégénérescence progressive des neurones du cerveau basal antérieur et du noyau de Meynert, une accumulation intracellulaire de la protéine tau phosphorylée et des dépôts de peptide β-amyloïde. La reconnaissance visuelle et la mémoire spatiale de ces souris sont déficitaires. L’évolution de ces déficits a été évaluée par le test de reconnaissance des objets et le labyrinthe de Morris. Parallèlement, l’effet de l’administration intra-nasale de NGF (sept administrations à deux jours d’intervalle) a été testé. Les animaux contrôles ont été traités avec le véhicule du NGF (tampon phosphate). Les premiers déficits dans la reconnaissance des objets se manifestent chez les souris AD11 après 4 mois et sont amplifiés après 8 mois, les souris contrôles ne montrant aucun déficit. Il est à noter que les premiers signes de déficits coïncident avec l’apparition de protéines tau hyperphosphorylées dans le cortex entorhinal. Les déficits de mémoire spatiale apparaissent à 7 mois et sont amplifiés à 9 mois. L’administration de NGF pallie en grande partie les déficits : chez les animaux traités, les temps d’exploration de nouveaux objets sont plus longs, la capacité de discrimination entre objets anciens et nouveaux persiste et l’identification de nouveaux lieux, par rapport aux lieux familiers, est facilitée. Ces résultats montrent que l’administration intra-nasale de NGF favorise, chez les souris AD11, leurs capacités à se souvenir d’objets familiers et à les associer à un contexte particulier. La voie olfactive pourrait donc constituer une fenêtre pour l’accès de substances thérapeutiques au cerveau. Ph. van den Bosch de Aguilar Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve Temps d’exploration NGF Véhicule Nouvel objet vs objet familier p < 0,01 ns Nouvel objet vs objet familier dans contextes différents p < 0,01 ns Nouvelle localisation vs localisation familière p < 0,01 p < 0,05 Effet bénéfique de l’administration intra-nasale de NGF sur les déficits mnésiques des souris transgéniques AD11. De Rosa R, Anchetta Garcia A, Braschi C, Capsoni S, Maffei L, Berardi N, Cattaneo A. Intranasal administration of nerve growth factor (NGF) rescue recognition memory deficits in AD11 anti-NGF transgenic mice, Proc Natl Acad Sci. 2005; 102: 3811-3816. ©2005 Successful Aging SA Af 324 - 2005