FORUM MEDICAL des FACULTES de Médecine de Purpan et Rangueil 21 Octobre 2010 « Syncope de l’enfant : quand s’inquiéter » Dr Yves Dulac Unité de cardiopédiatrie Hôpital des enfants CHU Toulouse Plan Définition Etiologie des syncopes de l’enfant Bilan des syncopes Syncopes cardiaques graves : - mécaniques - rythmiques Conclusion : qui explorer ? Les malaises et syncopes sont une cause fréquente de consultation en pédiatrie et sont le plus souvent bénins d’origine vaso-vagale. Dans certains cas néanmoins, une syncope peut révéler une pathologie cardiaque potentiellement sévère qu’il faut savoir dépister. Une syncope se définie comme une perte de connaissance brutale et brève accompagnée d’une perte du tonus postural. Habituellement, les syncopes d’origine cardiaque sont isolées et la récupération est spontanée, rapide sans confusion post-critique. L’interrogatoire est important et doit s’enquérir des antécédents familiaux de l’enfant, préciser les circonstances exactes du malaise : effort, baignade, fièvre. L’interrogatoire et l’examen clinique permettent habituellement de reconnaître les malaises bénins d’origine vaso-vagale mais dans tous les cas, un électrocardiogramme doit être fait. Un malaise survenant dans des circonstances telles que chaleur, foule, station debout prolongée, faim, précédé de prodromes sans traumatisme important, de durée brève, de moins de 1 minute, rarement associé à des convulsions est évocateur d’une origine vaso-vagale. En revanche, la survenue sans prodrome à l’exercice ou lors d’émotion, de malaise avec traumatisme notamment de la face durant plus de 1 minute éventuellement associé à des convulsions peut être évocateur d’anomalie cardiaque notamment rythmologique potentiellement sévère à l’origine de mort subite telle que le QT long, tachycardie ventriculaire polymorphe, un trouble conductif par bloc auriculo-ventriculaire complet, le syndrome de Wolff-Parkinson-White (figure 1). Dans ces cas et en fonction du contexte, le bilan justifiera une échographie cardiaque, un Holter ECG, tilt test, un test d’effort. Dans certains cas : une exploration électrophysiologique, une imagerie par scanner ou IRM, des tests de provocation seront nécessaires. Les cardiopathies qui peuvent potentiellement être responsable de syncopes liées à une diminution brutale du débit cardiaque en particulier à l’effort sont : les hypertensions artérielles pulmonaires primitives, les obstacles aortiques ou sous-aortiques, certaines myocardiopathies notamment hypertrophiques et obstructives. Les anomalies d’implantation des coronaires : les anomalies d’implantation de la coronaire gauche à partir de l’artère pulmonaire et les anomalies de trajet des artères coronaires seront dépistées par un coroscanner. Les troubles du rythme et de la conduction peuvent être à l’origine de syncopes potentiellement sévères et à l’origine de mort subite. Le bloc auriculo-ventriculaire complet congénital est une anomalie rare habituellement dépisté en anténatal ou chez le petit nourrisson lors d’examen systématique en raison d’une bradycardie. Très rarement, une syncope révèle un trouble conductif et est une indication formelle à l’implantation d’un stimulateur cardiaque. Les troubles du rythme ventriculaires polymorphes peuvent être à l’origine de syncopes sévères en particulier le syndrome du QT long congénital et les tachycardies ventriculaires cathécolergiques. L’espace QT est mesuré chez l’enfant avec la formule de Bazet : QT corrigé = QT mesuré sur √ RR précédant en millisecondes (figure 2). On parle de QT long quand le QTc est supérieur à 450 ms. On connaît actuellement plus d’une dizaine de mutations responsables d’un syndrome de QT long dont le phénotype est différent en fonction du type de mutation : Les enfants LQT1 ont des syncopes d’effort typiques (natation), Les patients LQT2 sont sensibles aux stimulations auditives Les enfants LQT3 ont des troubles du rythme au repos et la nuit. Tous les enfants suspects de syndrome de QT long doivent être traités par bétabloquant sous la forme d’avlocardyl chez le petit nourrisson et de nadolol chez l’enfant plus grand. Les tachycardies ventriculaires cathécolergiques sont dépistées chez des enfants qui font des syncopes répétées provoquées par les efforts ou l’émotion. L’examen clinique, l’échocardiographie et l’ECG de repos sont normaux. L’épreuve d’effort permet de faire le diagnostic reproduisant les troubles du rythme ventriculaires polymorphes au-delà d’une certaine fréquence ventriculaire : apparition d’extra-systoles ventriculaires de plus en plus nombreuses, polymorphes puis bidirectionnelles, puis TV polymorphes (figure 3). Des mutations dans les gène de la ryanodine (RyR2) ou de calséquestrine ont été mises en évidence et justifient une enquête familiale. D’autres pathologies très rares chez l’enfant peuvent être révélées par un trouble du rythme ventriculaire syncopal :le syndrome de Brugada a été décrit chez l’enfant notamment dans un contexte de fièvre près d’une fois sur deux (figure 4). Les dysplasies arythmogènes du ventricule droit, le syndrome du QT court peuvent être à l’origine de syncopes notamment chez l’adolescent. Le syndrome de Wolff-Parkinson-White peut en dehors des accès de tachycardie supraventriculaire être à l’origine de trouble du rythme ventriculaire lié à la conduction d’un trouble atrial rapide par une voie accessoire très perméable. Cette complication peut survenir à partir de l’adolescence. Un diagnostic de syndrome de Wolff-Parkinson-White chez un enfant ayant fait une syncope est une indication à une exploration électro-physiologique et à une ablation de la voie accessoire. Les malaises vagaux et les syncopes vaso-vagales sont à l’origine de la très grande majorité des syncopes de l’enfant. L’examen clinique et l’électrocardiogramme sont toujours normaux. En conclusion, toute syncope d’effort (sport, baignade), associée à des précordialgies ou des palpitations, à des anomalies de l’examen clinique ou de l’électrocardiogramme, à des antécédents familiaux de mort subite ou de « comitialité », de syncope atypique ou récidivante ou survenant chez un sujet à risque (cardiopathie connue) justifient des explorations cardiologiques complémentaires. Dans les cas restant inexpliqués, des Holters ECG longue durée de type Reveal, peuvent être justifiés. Figure 1 Étiologies Vaso-vagale Circonstances favorisantes Chaleur, station debout Effort, baignade prodromes oui non traumatisme rare Oui: face durée < 1 minute > 1 minute convulsions rares oui Risque mort subite non oui Figure 2 Mesure du QT : QTc : QT mesuré /√ RR Cardiaque: QT long TVP , BAVC, WPW Figure 3 TV catécholergique Figure 4 Syndrome de Brugada et fièvre chez l’enfant