modes de financement extra-bancaires

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Article extrait de jurisassociations n° 445 du 1er octobre 2011. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
DOSSIER
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MODES DE FINANCEMENT
EXTRA-BANCAIRES : DE
L’ÉPARGNE LOCALE AUX
FINANCIERS SOLIDAIRES
Les banques n’ont pas le monopole du financement. Les dernières
estimations montrent en effet qu’elles ne contribueraient qu’à
hauteur de 22 % aux créations d’entreprise et cette part serait
encore bien moindre s’agissant du financement de l’économie
solidaire.
L
a puissance publique et les fondations ont un poids majeur dans
l’appui financier au secteur associatif.
Confrontés à la raréfaction des ressources
de l’une et à la sélectivité des interventions
des autres, les porteurs de projet optent
pour des financements dont l’histoire et les
modes d’intervention sont indissociables
du monde bancaire : les financements solidaires.
Basés sur l’association de personnes physiques et/ou morales qui désirent mettre en
commun leurs ressources et leurs compétences afin de soutenir l’initiative solidaire,
ces financements interviennent à tous
les stades de la vie d’un projet. Ils ont en
commun de répondre de manière globale
aux demandes qui leur sont formulées.
En revanche, se devant de sécuriser les
ressources qu’ils gèrent, ils peuvent paraître
exigeants et sélectifs.
1. Au nombre desquelles on compte la
Caisse d’épargne, le Crédit mutuel, le Crédit
agricole ou encore la Banque populaire.
2. Voir JA n° 430/2010, p. 43.
3. Slogan de la Nouvelle Économie fraternelle (NEF),
pionnière de la finance solidaire en France.
jurisassociations 445 - 1er octobre 2011
UN PEU D’HISTOIRE
Les premières traces de financement solidaire datent de l’Antiquité lorsque, pour
financer temples et cultures, des groupes
d’entraide coopératifs sont apparus mettant
en commun leur épargne. Né avec l’activité économique, le mutualisme a évolué
au gré des mutations économiques, a su
innover pour, souvent, être le précurseur de
nouvelles formes de financement. Ainsi, au
xixe et au début du xxe siècle, les formes de
financement mutualistes, qui consistaient
à collecter l’épargne locale pour financer
les projets locaux, ont été à l’origine du
secteur bancaire coopératif et mutualiste.
Ces banques1 se caractérisent encore par
un actionnariat solidaire : le sociétariat.
Néanmoins, les banques mutualistes ne
répondent pas à l’ensemble des besoins de
financement : certains projets deviennent
difficilement finançables et certains épar-
gnants recherchent plus de proximité et de
traçabilité dans les investissements réalisés.
De fait, les formes de financement alternatives demeurent et continuent d’innover.
LE RENOUVEAU DU MUTUALISME
FINANCIER
Parce que l’économie solidaire est protéiforme, les structures qui la composent
comme leur environnement immédiat
ont toujours été tentés de répondre aux
besoins particuliers par des financements
sur mesure. Ainsi, dans les années 1970,
pour le financement des projets de retour
à la campagne, ont été créés des clubs
d’épargne dédiés ; dans les années 1980, des
financements sont apparus pour soutenir
les demandeurs d’emploi créateurs de leur
entreprise ; enfin, en 2009, les fonds de dotations destinés à drainer des ressources vers
des projets ciblés font leur apparition.
Du côté du monde associatif, la tendance
est plutôt à l’entre-soi : on observe des fonds
de solidarité au fonctionnement plus ou
moins formalisé, dont le principe est que les
excédents de trésorerie des uns comblent les
besoins des autres2.
Initialement basés sur la confiance, tant les
clubs d’épargne que les fonds mutualisés
tendent à se professionnaliser en se dotant
d’un cadre juridique et de procédures d’intervention afin de sécuriser les dépôts qui
alimentent leurs fonds d’intervention.
Confidentielle dans les années 1980,
l’épargne solidaire commence à développer sa notoriété auprès du grand public.
En effet, à l’heure de la financiarisation anonyme, de nombreux citoyens et
acteurs économiques tendent à penser que
« l’argent relie les hommes »3. Ainsi, les
solutions d’épargne qui permettent le finan-
des sociétés financières, plans d’épargneentreprise, adhésion à un club d’épargne...
Un organisme, Finansol, labellise ces formes
d’épargne et les recense sur son site4.
La solidarité interstructures
ou fonds mutualisés
Formalisés ou non, les fonds mutualisés
fonctionnent sur la solidarité interstructures.
Confidentielle dans les années 1980,
l’épargne solidaire commence à développer
sa notoriété auprès du grand public. En effet,
à l’heure de la financiarisation anonyme, de
nombreux citoyens et acteurs économiques
tendent à penser que « l’argent relie les
hommes ».
“
”
L’ORIGINE DES FONDS
La provenance des ressources impacte
nécessairement le niveau de souplesse du
financement : on ne finance pas de la même
manière sur fonds publics ou entre associations qui se connaissent.
L’épargne
À l’instar des banques qui prêtent les fonds
qu’elles ont en dépôt, des financeurs extrabancaires collectent de l’épargne pour
investir autrement. Qu’elle soit militante ou
salariale, l’épargne collectée revêt différentes
formes : placements solidaires dans des fonds
communs de placement, actionnariat dans
4. www.finansol.org.
5. On mentionnera notamment les CIGALES, clubs d’investisseurs pour une gestion alternative de l’épargne.
Un des fonds les plus anciens et les plus
connus est Socoden, créé en 1965 par le
Mouvement des SCOP afin de financer la
création, le développement ou la restructuration de coopératives.
Cette société financière dont toute SCOP
est actionnaire est exclusivement financée
par et pour les SCOP et dirigée par des
représentants de SCOP. Elle a soutenu près
de la moitié des SCOP.
L’hybridation des ressources
Entre ces deux modèles, des organismes
comme l’association France Active et la
Société d’investissement France Active
(SIFA) ont inventé des modes d’intervention
où l’origine des fonds est mixte. Ainsi, les
fonds locaux d’apport associatif de France
Active sont abondés par des dotations de
banques, de collectivités locales et d’entreprises. L’actionnariat de la SIFA est composé
de plans d’épargne-entreprise, de collectivités locales, de banques, d’entreprises, de
fondations et d’épargnes individuelles.
LES DIFFÉRENTS MODES
D’INTERVENTION
De l’indivision volontaire, qui regroupe
une dizaine d’épargnant intervenant dans le
capital d’une coopérative5 en création, à la
société financière, qui collecte de l’épargne
solidaire via des fonds communs de placement pour soutenir une fédération nationale, les formes d’intervention demeurent
riches et variées.
Selon l’option retenue, la proximité avec les
projets financés est plus ou moins grande.
Par exemple, dans un fonds mutualisé, l’entreprise adhérente peut participer à la sélection des projets, rencontrer le créateur, voire
donner un coup de main ! A contrario, un
salarié dont le plan d’épargne-retraite a été
investi dans un support solidaire recevra un
bulletin d’information sur les placements
effectués en son nom. Le contact avec l’entreprise ou l’association sera moins direct.
Cette moindre proximité s’explique par un
niveau d’intermédiation plus important : en
confiant l’étude et la sélection des projets à
des professionnels, l’épargnant fait le choix
de limiter son risque.
Afin de limiter la prise de risques, force est
de constater que les financeurs solidaires
interviennent de plus en plus aux côtés des
banques... D’extra-bancaires, ne deviennent-ils pas para-bancaires ? 
AUTEUR
TITRE
Barka Bouzaga
Chargée de mission,
France Active
1er octobre 2011 - jurisassociations 445
Article extrait de jurisassociations n° 445 du 1er octobre 2011. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
cement d’une économie locale et solidaire
sortent du cadre confidentiel et militant.
Aujourd’hui, des organismes de finance
solidaire peuvent intervenir dans tous les
secteurs de l’économie solidaire : emploi,
logement et, d’une manière très large, dans
le secteur associatif. Ils interviennent sous
forme de prêts ou de prêts participatifs, ou
encore de prises de participation.
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