14-a-Ascher:Mise en page 1 24/01/08 8:18 Page 150 Effet de serre, changement climatique et capitalisme cleantech François Ascher* L ES questions de l’effet de serre et du changement climatique ont pris une importance nouvelle dans le monde entier, même si la sensibilité à ces questions est encore très inégale. L’idée que leur prise en compte pourrait, ou devrait, changer très profondément les formes d’occupation des territoires, les modes de production, les façons de vivre et les rapports internationaux s’impose peu à peu. La place prise par ces questions entraînera certainement diverses évolutions. Mais les changements ne seront pas ceux le plus souvent annoncés ou souhaités, principalement la restriction drastique de nombreuses consommations (en particulier celles qui utilisent beaucoup d’énergie), la diminution des mobilités des personnes et des marchandises, de nouvelles formes d’organisation de la production, le retour à des formes urbaines très denses. Une autre évolution – telle est en tout cas l’hypothèse que je voudrais développer ici – semble en revanche plus plausible : les logiques économiques et politiques des sociétés des pays développés sont en train de sélectionner dans les enjeux environnementaux ceux qui sont susceptibles d’être le support de nouvelles productions marchandes. Celles-ci constitueront un élément central des dynamiques économiques des années à venir, l’impact de cette nouvelle économie sur les rejets de gaz à effet de serre sera réel, mais les changements dans les façons de vivre, de produire et d’habiter ne seront pas révolutionnés autant que peuvent l’imaginer ceux qui sont aujourd’hui à la pointe des luttes contre le changement climatique. J’ai critiqué il y a une quinzaine d’années les prospectivistes qui annonçaient que les nouvelles technologies de l’information et de la * Professeur à l’Institut français d’urbanisme (université Paris 8). Il vient de faire paraître les Nouveaux compromis urbains. Lexique de la ville plurielle, La Tour-d’Aigues, L’Aube, 2008. Février 2008 150