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Analyse contextuelle en matière de Gestion Intégrée des
Ressources en Eau (GIRE) en Haïti
DRAFT – Version 04
18 avril 2006
réalisée à la demande de PROTOS
Jere dlo a nan tout sans
Francis ROSILLON
Université de Liège
Département des Sciences
et Gestion de l’Environnement
B 6700 ARLON Belgique
« … L’Etat (haïtien) doit assurer une gestion intégrée durable des ressources
hydriques qui garantisse leur pérennité, leur qualité, l’accès de la population à
leurs bienfaits ainsi que la prévention des risques qui leur sont liés du fait de
phénomènes naturels ou d’activités anthropiques »
(Projet de décret sur la gestion de l’environnement, version soumise au Conseil
des Ministres du 3 septembre 2005, extraits article 109)
2
Sommaire
Avant – propos
1. Introduction
2. Objectifs
3. Méthodologie
4. Avertissements relatifs à la disponibilité des informations et à la fiabilité des données
1. Situation générale du pays : vers un désastre écologique et humain ?
1.1. Un petit pays peu habitable
1.2. Une population en croissance
1.3. De fortes pressions sur les ressources
1.4. Risques naturels et catastrophes
1.5. Un lourd passé historique
1.6. Des difficultés d’organisation
1.7. Quel développement durable pour Haïti ?
1.8. Synthèse et conclusions du chapitre 1
2. Analyse du secteur de l’eau : Ressources – Besoins – Usages
2.1. Les ressources en eau : entre l’eau du ciel et l’eau de la mer
2.1.1. Le cycle naturel de l’eau en Haïti
2.1.2. Les disponibilités en eau
2.1.3. Evolution de la situation : des tendances à la baisse des débits
2.1.4. Ressources en eau et changement climatique
2.2. Les besoins en eau
2.2.1. Les besoins en eau potable
2.2.2. Les besoins d’assainissement
2.2.3. Les besoins de production agricole
2.2.4. Les autres besoins de production
2.2.5. Les autres besoins sociaux et moraux
2.3. Les fonctions et usages
2.3.1. Alimentation en eau
2.3.2. Assainissement de base
2.3.3. Usages de production
2.3.4. Autres usages
2.4. Etat des ressources et des milieux
2.4.1. Les ressources
2.4.2. Les milieux liés à l’eau
2.5. Les impacts sur la santé humaine
2.6. Conclusions du chapitre 2
3. Evaluation de l’organisation du secteur de l’eau
3.1. Le cadre légal
3.2. Les Ministères concernés
3.3. Les opérateurs du sous-secteur « Eau et Assainissement »
3.3.1. Les organismes publics
3.3.2. Les Eglises et les ONG
3.3.3. Les firmes privées
3.3.4. Les acteurs locaux
3
3.4. La réforme du secteur de l’eau
3.4.1. Un projet de loi-cadre sur l’eau
3.4.2. La réforme du sous-secteur « Eau potable et assainissement »
3.5. Les opérateurs concernant l’usage « Irrigation »
3.6. La gestion des cours d’eau et des bassins versants
3.7. La décentralisation
3.8. Le financement du secteur de l’eau
3.9. Le recours à l’expertise en matière d’acquisition de connaissances
3.10. Haïti et la communauté internationale
3.11. Conclusions du chapitre 3
4. Analyse de la GIRE au niveau MACRO
4.1. Les rendez-vous manqués de la GIRE : quatre leviers à mieux exploiter
4.1.1. Le décret sur la gestion de l’environnement
4.1.2. La reformulation de la politique de l’eau et le projet de loi-cadre
4.1.3. L’atelier de concertation interministérielle sur la gestion des bassins versants
4.1.4. Le colloque relatif à la GIRE en Haïti
4.2. Haïti, en dehors de la mouvance planétaire …
4.3. Analyse de la GIRE à travers la méthode SEPO
4.4. Pour que la GIRE devienne effective
4.5. Une proposition organisationnelle de renforcement de la GIRE en 5 étapes, au niveau
macro
4.6. Conclusions du chapitre 4
5. Rôle des ONG et de PROTOS en particulier en matière de GIRE (au niveau
MACRO)
5.1. Contributions possibles des ONG pour la GIRE
5.2. PROTOS et ses partenaires
5.2.1. Propositions à l’intention de PROTOS
5.2.2. Propositions à l’intention des partenaires de PROTOS actuels et futurs
5.3. Conclusions du chapitre 5
6. Analyse de la GIRE au niveau MESO à travers trois études de cas et Contributions de
PROTOS et de ses partenaires
6.1. L’Ile de la Gonâve : pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan GIRE insulaire
6.1.1. Le contexte
6.1.2. Analyse de la GIRE à l’île de la Gonâve
6.1.3. Propositions pour l’élaboration d’un plan GIRE de l’île de la Gonâve
6.2. Saut d’Eau : pour un plan communal GIRE
6.2.1. Le contexte
6.2.2. Analyse de la GIRE à Saut d’Eau
6.2.3. Pour renforcer la GIRE à Saut d’Eau
6.3. Les Moustiques : pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan GIRE pour le sousbassin de la rivière Moustiques
6.3.1. Le contexte
6.3.2. Analyse de la GIRE dans le bassin versant des Moustiques
6.3.3. Propositions pour renforcer la GIRE dans le BV des Moustiques
6.4. Conclusions du chapitre 6
7. Conclusions et recommandations
4
ANNEXES :
 Références bibliographiques
 Liste des personnes rencontrées et des participants à l’atelier national
 Modèles de fiche de renseignements
 Acronymes et abréviations
5
Avant-propos
1. Introduction
Un développement durable humain implique la satisfaction des besoins des populations
actuelles sans boycotter les besoins des générations futures. Dans ce sens, la mobilisation et
l’affectation des ressources naturelles potentielles en vue de répondre aux demandes de tout
être humain est un souci de toute société pour un développement harmonieux de ses
populations.
Devant cette situation, tous les êtres humains de cette planète, en fonction de leur lieu de vie,
bénéficient de conditions différentes, plus ou moins favorables, en fonction des potentialités
naturelles du pays et des possibilités, via les exportations, de pallier au déficit de ressources.
Dans la plupart des pays développés, des Etats organisés parviennent légitimement à assurer
le développement harmonieux de leur population à travers une série de services divers en
réponse aux besoins. Il n’en est pas de même dans les pays dit sous-développés où le concours
de situations naturelles difficiles auxquelles s’ajoutent parfois des catastrophes générant
autant de situations d’urgence, associées à une incapacité institutionnelle d’assurer une bonne
gouvernance, conduit le développement durable dans l’impasse. La question du
développement devrait être posée dans le cadre d’une réflexion la plus large possible au
niveau d’un Etat souverain, en associant des aspects historico-politiques, sociaux,
environnementaux, culturels, économiques, … bref toutes les dimensions du développement
durable.
A l’heure où l’information est véhiculée à travers la planète de part en part en temps réel, les
difficultés de certains pays à réussir leur développement devraient être une préoccupation
universelle, alors que les responsabilités sont partagées entre le Nord et le Sud. La
coopération est une des réponses apportées à cette problématique. Depuis de nombreuses
années, dans une période post-coloniale, les pays nantis développent des programmes d’aide
gouvernementaux et non-gouvernementaux via les missions des ONG. Celles-ci sont des
centaines à travers le monde à intervenir dans divers secteurs.
En écho à la problématique universelle de l’eau, plusieurs ONG ont investi ce secteur, en
prise directe avec les besoins quotidiens des populations. L’eau, c’est la vie et c’est une noble
tâche, en renforçant l’accès à l’eau et à l’assainissement, d’apporter sa contribution pour
améliorer les conditions de vie des habitants.
Parmi ces ONG, PROTOS intervient dans le secteur de l’eau depuis de nombreuses années.
Par sa présence directe dans 8 pays du Sud, cette ONG veut aider à développer des processus
durables et libérateurs qui sont intégrés dans le contexte culturel et social local et qui ont
comme finalité une amélioration du bien-être matériel et immatériel des groupes démunis de
la population du Sud. Vu son expertise dans ce domaine, PROTOS prône spécialement une
gestion équitable, durable et participative de l’eau tant dans le Nord que dans le Sud. Cette
démarche s’inscrit entièrement dans une approche GIRE tant vantée par la communauté
internationale et mis en exergue lors des grands rendez-vous des Nations Unies autour de la
problématique de l’eau.
2. Objectifs
6
Afin de recadrer et d’améliorer l’efficacité de l’ONG en Haïti, une analyse contextuelle de la
GIRE à l’échelle de ce pays a été sollicitée par PROTOS.
La présente étude devait avoir comme finalités :
- d’estimer la situation des différentes fonctions de l’eau dans un contexte déterminé : il
s’agissait de prendre en compte l’ensemble des usages et fonctions en rapport avec les
divers secteurs d’activités (alimentation en eau potable, assainissement, agricultureélevage, industries et mines, environnement, pêche, tourisme, énergie, transport, sans
oublier les dimensions culturelles et spirituelles liées à l’eau, d’étudier les relations et
les influences entre tous ces usages et fonctions ;
- de mettre en évidence les dysfonctionnements ou inégalités d’accès aux différents
services ou fonctions de l’eau ;
- d’analyser le rôle des acteurs locaux et des plates-formes existantes dans la
planification, la mise en œuvre et la gestion des différentes fonctions et de la GIRE en
général, avec une attention particulière aux mécanismes de participation des citoyens,
des usagers, des collectivités locales et des femmes ;
- de décrire le cadre légal, le contexte politique, économique et social dans lequel se
réalisent les investissements en matière de GIRE ;
- de relever les expériences, projets en cours, les bonnes pratiques constatées et de
suggérer des pistes d’actions concrètes et applicables à court et moyen terme, et ceci
pour les différents rôles que PROTOS et ses partenaires veulent jouer.
Il s’agit donc d’analyser des résultats et des tendances vers la GIRE mais aussi de mener une
méta-analyse quant à la façon de les obtenir. Cette réflexion est développée à deux niveaux de
perception :
un niveau MACRO, à une échelle nationale, où PROTOS veut faire la promotion et le
plaidoyer de la GIRE ;
un niveau MESO à une échelle régionale où PROTOS veut faciliter et appuyer la
concertation.
PROTOS a donc retenu la République d’Haïti pour mener cette étude, pays en proie
actuellement à d’énormes difficultés d’ordre organisationnel, conséquence d’une situation
passée et présente chaotique.
De nombreuses études, séminaires et ateliers quant à la gestion de l’eau en Haïti ont été
organisés ces 30 dernières années (voir bibliographie). Il ressort que la première
recommandation en faveur d’une amélioration de l’accès à l’eau et à l’assainissement consiste
« à créer un organisme de haut niveau institutionnel, doté de pouvoirs plus ou moins étendus,
qui coifferait toutes les institutions du secteur et serait le seul interlocuteur agréé des
bailleurs de fonds, des ONG et autres partenaires publics et privés », (Simonot, PNUD,
1997).
Cette priorité, mise en exergue dans le rapport du PNUD, nous a été confirmée par les
partenaires rencontrés lors de la première mission en novembre 2005. Faut-il déjà conclure
que cette étude de plus conduira à la même constatation ?
3. Méthodologie
7
Cette analyse menée sous la responsabilité d’un consultant externe qui à priori dispose de peu
d’informations sur la situation en Haïti, nécessite avant tout, la mobilisation de nombreuses
données et informations afin de pouvoir appréhender la situation. En complément de
recherches bibliographiques, deux missions sur place ont permis de se rendre compte de la
situation et de découvrir (partiellement) les réalités concrètes, de pouvoir rencontrer de
nombreux acteurs de l’eau, les partenaires de PROTOS et autres ONG et de compléter les
informations. Ces missions se sont déroulées :
- pour la première mission : du 3 au 11 novembre 2005 ;
- pour la seconde mission : du 22 février au 4 mars 2006.
L’acquisition des données a donc pu s’opérer à partir de sources diverses :
- 1. Recherches bibliographiques
Haïti, et spécifiquement la problématique de l’eau en Haïti, fait l’objet d’une inflation de
documents, tant d’institutions gouvernementales au plus haut niveau tels les travaux du
PNUD, de l’UNICEF ou de l’OMS, de productions nationales issues de diverses institutions,
des ONG et des milieux académiques.
Une rapide recherche sur Internet (Google, 25/02/06), conduit, à partir des deux mots clés
« Haïti eau », à une liste de 3.460.000 sites. L’ajout d’un troisième mot, à savoir « GIRE »,
fait chuter le nombre à 206. La version anglophone « Haïti water » produit 23.800.000
références tandis que « IWRM » en plus, fait passer ce chiffre à 809. Faut-il voir par là un
signe à la méconnaissance de la GIRE en Haïti ?
Il s’agira, parmi cette masse d’informations, de pouvoir discerner les documents importants et
fiables, aider en cela par l’équipe de PROTOS en Haïti. En annexe bibliographique, sont
repris les principaux documents consultés dont la majorité ont été mis à disposition par
PROTOS et les acteurs rencontrés dans le pays.
- 2. Interviews et rencontres avec des personnes ressources, acteurs dans le secteur de l’eau
Lors de la première mission, un certain nombre de contacts ont pu être organisés par l’équipe
PROTOS–Haïti. (Voir en annexe, programme des rencontres). Les principaux acteurs tant
institutionnels, qu’au niveau d’ONG, de bailleurs de fonds et du milieu académique ont pu
être rencontrés, sans compter les séances de travail avec les responsables de PROTOS (Anne
Coutteel, Tom D’Hayer et Martine Haentjens).
- 3. Visites de terrain
Celles-ci ont essentiellement été consacrées à :
- Une prise de connaissance de la zone métropolitaine de Port-au-Prince ;
- Visite dans la commune de Saut d’eau, prise de connaissance du projet « Dlo se lavi » et
rencontre avec l’Ingénieur de CONCERN, responsable du projet ;
- Visite de l’Ile de la Gonâve, commune de Anse-à-Galets et rencontre avec l’équipe
CONCERN et la plate-forme de la commune de Anse-à-Galets et des secteurs 5 et 6 de la
commune de Pointe-à-Raquettes, là où la problématique de la disponibilité en eau est la plus
cruciale ;
- Visite du bassin versant de la rivière Moustiques et de quelques chantiers réalisés par
ODRINO.
- 4. Des ateliers de restitution et d’échanges (lors de la seconde mission)
8
- 3 ateliers ont été organisés au niveau MESO :
Pour chacun des trois cas étudiés, un atelier de restitution aux partenaires du projet a été
organisé. Après une présentation de l’étude au niveau MACRO et MESO, un échange relatif à
la GIRE, spécifiquement relative au cas étudié était organisé.
Programme :
- 23 février 2006 : atelier à l’île de la Gonâve avec la Plate-forme Eau et CONCERN ;
- 24 février 2006 : atelier à Saut d’Eau avec les membres du comité « Dlo se lavi » et
CONCERN ;
- 27 février 2006 : atelier dans le BV de la rivière Moustiques avec des représentants
des comités locaux de l’eau, des comités d’irrigants et ODRINO.
- 1 atelier national à Port-au-Prince s’est tenu le 2 mars 2006 en présence de 35 participants
(liste des participants en annexe). Le programme de cet atelier portait sur les premiers
résultats de l’étude :
 présentation de la situation générale du pays ;
 le secteur de l’eau en Haïti ;
 la GIRE en Haïti au niveau MACRO ;
 la GIRE à travers l’étude de trois cas au niveau MESO ;
 la place des ONG.
4. Avertissements relatifs à la disponibilité des informations et à la fiabilité des données
Une des principales problématiques à laquelle nous avons été directement confrontés lors de
cette étude, est un manque de données fiables et actualisées concernant le domaine de l’eau.
La référence la plus significative, en termes de connaissances du secteur de l’eau, remonte à la
fin des années 80. Sous l’égide des Nations Unies, une vaste étude consacrée au
développement et à la gestion des ressources en eau en Haïti a été menée, en étudiant la
disponibilité en eau et l’adéquation aux besoins. Une cinquantaine de rapports ont été
produits, les données nationales étant déclinées à l’échelle régionale. Visiblement, ce sont
généralement toujours ces données qui sont recopiées d’une étude à l’autre.
A l’ancienneté des données, s’ajoute parfois un doute concernant leur fiabilité1. De plus, des
informations de base tel que le pourcentage de la population ayant accès à l’eau font
références à différentes valeurs2.
Ces difficultés sont loin d’être résolues, vu la situation actuelle. Au contraire, le contexte
chaotique3 et l’instabilité des institutions viennent encore amplifier les problèmes évoqués cidessus.
Nous avons cependant pu développer l’analyse exposée dans le présent rapport en espérant
que celle-ci ne s’éloigne pas trop de la réalité. Le recoupement des informations auprès de
divers interlocuteurs directs a permis de réduire le niveau d’incertitude. Néanmoins, à la
lecture de ce rapport, il est bon tenir compte des réserves évoquées dans cette introduction.
1
A titre d’exemple, des données microbiologiques de qualité de l’eau renseignant des concentrations en
coliformes fécaux supérieures aux concentrations en coliformes totaux sont plus que douteuses.
2
Concernant Port-au-Prince, les pourcentages d’accès à l’eau pour une même période varient de 22 à 51% en
fonction des sources d’information.
3
En 2004, le MARNDR a été mis à sac avec notamment pour conséquence, la perte des données des services.
9
1.
Situation générale du pays : vers un désastre écologique et humain ?
Haïti est un des pays les plus pauvre au monde, le plus pauvre de l’hémisphère Nord. Il
occupe le 153ème rang sur 173, selon l’Indice de Développement Humain (IDH) des Nations
Unies.
Première république noire devenue indépendante en 1804, Haïti a connu une instabilité
politique durant la plus grande partie de ces deux siècles d’existence, cette situation n’étant
pas favorable à un développement humain durable.
Parallèlement à ce contexte politique chaotique, l’environnement n’a cessé de se dégrader
pour conduire aujourd’hui à une situation très préoccupante. D’aucuns n’hésitent pas à parler
de désastre écologique et humain. Certains, dont Paul PARYSKI du Programme des Nations
Unies (cité par PELT, 2005), vont même jusqu’à donner peu de chance à ce pays de s’en
sortir en se demandant si un point de non-retour n’a-t-il déjà pas été atteint ?
Parmi les facteurs de développement, l’eau occupe une place primordiale mais avant
d’analyser ce secteur, il nous paraissait utile de replacer le contexte haïtien dans un cadre plus
général, en mettant en exergue quelques grandes préoccupations qui influencent directement
le développement du pays et le bien-être des populations. En écho à une démographie
galopante (principale force motrice du pays), les pressions de plus en plus intenses sur le
milieu naturel et les ressources conduisent à la dégradation d’un espace de moins en moins
viable, l’héritage d’un lourd passé historico-politique et des lacunes d’organisation ne
parvenant pas à maîtriser ces pressions.
1.1. Un petit pays peu habitable
Haïti partage avec la République Dominicaine une des îles des Grandes Antilles, un complexe
insulaire au sein de l’Océan atlantique et de la mer des Caraïbes (voir figure 1). Tel un
croissant de lune orienté vers l’Ouest, Haïti occupe la partie occidentale de l’île d’Hispaniola,
la seconde en dimension après Cuba. Ce territoire de 27.750 km² (36% de l’île) est formé de
deux péninsules séparées par le golfe de la Gonâve, telle une mâchoire de crocodile prête à
avaler l’île de la Gonâve. D’autres îles, notamment l’île de la Tortue au Nord et l’île à Vache
au Sud-Ouest font partie du pays.
Le pays est constitué de 8 unités géomorphologiques présentant une convexité souvent
orientée vers le Sud-Ouest. Du Nord au Sud, on peut distinguer : le massif du Nord, la plaine
du Nord, le plateau central, la presqu’île du Nord-Ouest et les montagnes noires, la plaine et la
vallée de l’Artibonite, la chaîne des Matheux et les montagnes du Trou d’eau, la plaine de
Cul-de-Sac et enfin, le massif de la Hotte et le massif de la Selle.
Depuis 1987, le pays est administrativement partagé en 4 régions, 9 départements (un dixième
a été créé récemment), 134 communes, elles-mêmes constituées de quartiers et de sections
communales.
10
Figure 1 : Carte de situation d’Haïti
A l’origine, les premiers indigènes avaient nommé leur île Ayiti, c’est-à-dire « Terre des
hautes montagnes ». Le pays est donc essentiellement montagneux. Le sommet le plus haut,
celui de la Selle, atteint une altitude de 2.680 m.
Orographie
Pentes (%)
Superficies (ha) Pourcentage de la
superficie du pays
806.250
29,5
Plaines et Plateaux
0 à 10
Plateaux et Piémonts
10 à 20
206.400
7,5
Piémonts et Mornes
20 à 30
148.350
5,0
Mornes et Cols raides
30 à 40
161.250
6,0
Pentes abruptes
> 40
1.448.800
52,0
Tableau 1 : Orographie, pentes et superficies correspondantes en Haïti (OPS/OMS, 2003)
Cet espace limité et ses caractéristiques géomorphologiques sont déterminants dans
l’occupation du pays par les populations qui vont manifester des besoins, certains ne pouvant
être satisfaits qu’à partir de l’exploitation et de la gestion des ressources naturelles, dont les
ressources en eau.
Entre plaines et montagnes, le territoire national offre donc des possibilités spatiales limitées
qui ne permettent pas partout l’installation de lieux d’habitat et de vie. 63% du pays sont
constitués de terrains en pente forte (plus de 20%) au niveau desquels les installations
d’habitations ne sont pas recommandées. L’habitat est donc concentré dans les plaines et en
11
bordure de mer avec l’installation d’une population en pleine croissance. Mais là où
l’occupation est la plus problématique (zones les plus arides ou dans les zones inondées
régulièrement), on va jusqu’à évoquer un déplacement des populations (OPS/OMS, 2003).
1.2. Une population en croissance
Avec un territoire de 27.750 km² et une population estimée à 8,6 millions d’habitants en 2006,
Haïti présente une densité de population de 310 habitants/km², parmi les plus élevées au
monde, se rapprochant de la densité observée en Belgique et aux Pays-Bas, pays européens
les plus denses. Notons que les chiffres de population varient sensiblement d’un rapport à
l’autre. Ainsi, NIYUNGEKO (2005) cite le chiffre de 8.271.000 habitants se répartissant en
milieu urbain (3.457.000) et en milieu rural (4 .814.000).
65% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et l’espérance de vie est seulement
de 53 ans contre 70 ans pour la moyenne régionale. L’analphabétisme touche la moitié des
adultes4. Le PNB par habitant est en baisse constante depuis 6 ans (Commission européenne,
2005) tandis que la valeur de la gourde haïtienne oscille entre 30 et 42 gourdes pour un dollar
US. La dette extérieure est évaluée à 1,3 milliards de $ US.
En 2000, les taux d’accès à l’eau étaient de 49% pour les habitants en milieu urbain et 45% en
milieu rural tandis qu’en matière d’assainissement, ceux-ci étaient de 50% en milieu urbain et
seulement 16% en milieu rural (http://earthtrends.wri-org). D’après ces mêmes sources, le
score exprimant le degré de liberté civile et de droit politique en Haïti était de 6/7 (1/7
représentant la situation la plus libre, 7/7 la moins libre).
La figure 2 montre l’évolution et la projection de la démographie entre les années 1950 et
2050. Le taux moyen annuel de croissance pour la période 1990-2005 est de 2,2%, le taux
brut de natalité de 35% et le taux de fertilité de 4,4 pour une moyenne régionale de 2,8
(OPS/OMS, 2003). En l’an 2020 et au rythme actuel, la population d’Haïti dépassera 12,15
millions d’habitants et sera constituée de 50% d’habitants en milieu urbain et 50% en milieu
rural5. D’autres scénarios en termes de prévisions démographiques vont jusqu’à prédire un
nombre total d’habitants pouvant atteindre 20 millions dans moins de 15 ans
(http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/amsudant/haiti.htm, 2006).
La population rurale, avec un taux annuel de croissance de 0,95%, suivra probablement une
croissance linéaire modéré, à cause surtout du phénomène de l’exode rural (environ 8 millions
d’habitants en 2050), alors que la population urbaine, avec un taux annuel de croissance de
4,7%, approchera les 20 millions d’habitants en l’an 2050. 35% de la population est
actuellement localisée au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
Cette promiscuité spatiale se marque essentiellement dans les villes confrontées à une
urbanisation non contrôlée qui conduit à un dépassement rapide des infrastructures de base.
Une raréfaction des terrains et une bidonvilisation galopante affectent tous les espaces
urbains. Avec ses 2 millions d’habitants, la zone métropolitaine de Port-au-Prince ressemble à
un immense bidonville d’où émergent quelques quartiers résidentiels. L’absence de plan
4
D’autres chiffres plus pessimistes encore, sont mentionnés par Pelt (2005) :
- 70% de la population vit sans eau potable ;
- 85% des habitants sont analphabètes ;
- espérance de vie : 49 ans pour les hommes, 56 ans pour les femmes ;
- taux de mortalité infantile : 70 ‰ ;
- taux de mortalité infantile chez les enfants de moins de 5 ans : 125 ‰.
5
en 1980, 76% des habitants vivaient en milieu rural, en 1995 : 67%, estimation 2003 : 64%, OMS 2003.
12
d’urbanisation conduit à une anarchie en termes d’occupation spatiale, les nouveaux arrivants
n’hésitant pas à envahir les mornes à la périphérie de Port-au-Prince, autant de sites réputés
dangereux et insalubres constitués de ravines et pentes escarpées.
En référence à une répartition de la densité de population variable d’un endroit à l’autre,
l’organisation du pays fait habituellement référence à trois zones distinctes :
- la zone métropolitaine de Port-au-Prince ;
- les villes secondaires de plus de 2.000 habitants ;
- la zone rurale.
L’organisation du secteur de l’approvisionnement en eau potable, notamment, n’échappe pas
à cette zonation.
Actuellement, rien ne laisse supposer qu’une politique démographique efficace de
stabilisation de la population puisse être appliquée. Cette absence de maîtrise de la croissance
démographique ne risque-t-elle pas, à terme, de conduire à l’explosion de cette bombe à
retardement placée face au géant américain, que constitue Haïti ? Actuellement déjà, les
familles les plus pauvres tentent leur chance en République Dominicaine ou essayent d’entrer
clandestinement aux USA sur des bateaux de fortune.
Figure 2 : Croissance démographique, période 1950 – 2050 (OPS/OMS, 2003, d’après les
données recueillies à l’Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique)
La croissance démographique, principale force motrice décrite dans le système d’indicateurs
DPSIR, conditionne les conditions de vie des habitants et les possibilités de développement.
La pression sur l’espace est d’autant plus forte vu la configuration géographique du pays
succinctement décrite ci-dessus.
Ce constat simple et accablant d’une population fort nombreuse par rapport aux potentialités
spatiales et naturelles du pays ne peut conduire qu’à une impasse en termes de développement
13
durable à moins que celui-ci ne soit soutenu de l’extérieur du pays, par des apports de
matières premières et de services pour satisfaire les besoins des populations.
1.3. De fortes pressions sur les ressources
Une telle densité de population génère d’énormes pressions sur l’espace et sur les ressources
naturelles. L’urbanisation grignote le peu d’espace disponible et réduit les espaces de liberté
indispensables pour permettre le maintien et le renouvellement des zones naturelles
productrices de ressources.
Les facteurs de dégradation de l’environnement sont nombreux. La colonisation agressive de
l’espace territorial pour développer une production agricole, le régime foncier peu adapté à
une protection des terres, la précarité des conditions matérielles d’existence des populations,
les catastrophes naturelles, les incendies, … conduisent à une disparition de la couverture
végétale (Septembre, 2005). Cette situation se traduit par une forte dégradation de
l’environnement conduisant à des phénomènes d’érosion importants dus à une déforestation
croissante. A ce jour, la couverture forestière serait de moins de 1,4% alors qu’en 1960 il
restait encore 60% de forêts (et 18% en 1952) (OPS/OMS, 2003). 15 à 20 millions d’arbres
seraient coupés chaque année. 36 millions de tonnes de terre arable sont perdus chaque année
et 10.000 ha de terres cultivables disparaissent (Pelt, 2005).
Cette déforestation n’est pas sans conséquence par rapport à l’état des ressources en eau, en
entraînant notamment une augmentation du ruissellement et une perte de capacité des
réservoirs (voir plus loin). Les interrelations entre une politique énergétique et la gestion des
ressources en eau paraissent évidentes.
Une crise de l’énergie …6
Ce phénomène de déforestation est aujourd’hui, surtout entretenu pour tenter de satisfaire une
partie des besoins énergétiques du pays. La pratique de la fabrication de charbon de bois,
principale source d’énergie du pays (72%), amène les habitants à couper les arbres sans
discernement, sans parallèlement mener des actions de reboisement. Cette dépendance
énergétique vis-à-vis du bois de feu semble donc être la principale cause de dégradation,
amplifiée par de mauvaises pratiques culturales. La production de bois de feu (3,4 à 3,7
millions de tonnes consommées par an dont 37% convertis en charbon de bois) met en péril
l’équilibre des écosystèmes qui ne peuvent plus assurer efficacement leur rôle de protection et
de production des ressources en eau et des sols. Les alternatives provenant des produits
pétroliers et du gaz, de l’hydroélectricité représentent une faible part de marché par rapport au
charbon de bois. A l’instar de la République Dominicaine, il serait utile de promouvoir, voire
de subventionner, l’usage du gaz propane mais actuellement, le prix élevé des carburants
n’est pas favorable.
En matière d’énergies renouvelables, certains préconisent une diversification de la production
énergétique du pays : énergie solaire7, éolienne8, en insistant surtout sur la production de
biogaz (biodiesel) à partir des déchets. La production d’éthanol à partir de la bagasse de canne
6
Dans un contexte de coopération Sud-Sud, lors de la rencontre de Roseau (10 nov. 2005), trois pays des
Caraïbes (Haïti, La Dominique et Sainte-Lucie) ont adopté un plan concerté en énergie et environnement tout en
intégrant les dimensions du développement durable (Alterpresse).
7
Énergie solaire : essais il y a quelques années en Haïti, dans le département du Nord-Est mais les installations
ont été l’objet d’actes de vandalisme des panneaux solaires.
8
Des éoliennes (à l’arrêt !), ont pu être observées à Port-de-Paix lors de la seconde mission en février 2006.
14
(barbojo) ou d’autres déchets végétaux (paille de riz, déchets café, …) est possible (Soto J-L.,
Colbert R., 2005).
Un patrimoine menacé et une biodiversité en péril
Ces pressions sur les habitats naturels conduisent aussi à une perte de biodiversité. Il y a
quelques années, on dénombrait encore plus de 5.000 espèces de plantes supérieures dont un
tiers endémique tandis que les aires protégées et les réserves naturelles couvraient une
superficie de 7.000 ha (0,3% du territoire national). Les forêts en 2000 s’étendaient sur 88.000
ha, soit 3% du pays (Earth Trends, 2003). Les écosystèmes côtiers sont particulièrement
atteints et les 1.771 Km de côtes fragilisés par une urbanisation anarchique, les rejets de
polluants vers la mer entraînant une contamination des poissons9.
total Nombre d’espèces
menacées
(et protégées ?)
Plantes supérieures
5.242
27
Mammifères
20
4
Oiseaux
62
14
Reptiles
115
8
Amphibiens
47
1
Poissons
184
2
Tableau 2 : Etat de la biodiversité pour la période 1992-2002 (Earth Trends, 2003)
Espèces concernées
Nombre
d’espèces
La plupart des animaux sauvages qui peuplaient l’île à l’origine ont disparu, subsistent des
oiseaux communs et de rares Caïmans. Une pauvreté floristique se développe avant que
d’aucuns ne prédisent que le territoire national ne devienne un vaste désert d’ici 2015 si rien
n’est entrepris au niveau de la protection de l’environnement10.
1.4. Risques naturels et catastrophes
Outre la pression anthropique, cette dégradation de l’environnement est accentuée par les
effets des catastrophes naturelles entraînant un lourd bilan en terme de perte en vies humaines
et en dégâts matériels. Nous évoquerons ci-dessous les principaux risques naturels et
catastrophes.
- Les secousses sismiques
Comme toutes les îles des Caraïbes, Haïti est exposée aux secousses sismiques dues au
déplacement de la plaque tectonique des Caraïbes à une vitesse de 2,5 à 4 cm par an. De 1770
à nos jours, on a enregistré 8 épisodes sismiques importants. En 1887, Le Cap et le Môle
Saint-Nicolas sont à moitié détruites entraînant la mort de 5.500 personnes.
Actuellement, le risque de séisme doit être pris au sérieux sachant qu’il n’existe aucun
système de surveillance du territoire national et que les normes de construction ne sont pas
appliquées (OPS/OMS, 2003).
9
En 1987, plus d’une dizaine de milliers de tonnes de déchets toxiques ont été déversées dans un port désaffecté
des Gonaïves par le transporteur Khean Sea (www.haitipressnetwork).
10
Cette situation catastrophique a sans doute conduit le gouvernement haïtien a adopté un Plan d’Action pour
l’Environnement (PAE) lancé officiellement par le Premier Ministre en septembre 1999 mais dont la mise en
œuvre a été depuis lors retardée (www.cepis.ops-oms.org, 2000).
15
- Les cyclones et inondations
Ceux-ci se forment dans la mer des Caraïbes et dans le Golfe du Mexique, à la rencontre des
vents alizés et des masses d’air froid venues des grandes plaines américaines et de l’Afrique
occidentale. De juin à novembre, le pays peut être atteint par des vents circulaires de 100 à
300 km/h accompagnés de pluies violentes provoquant des inondations. Celles-ci peuvent
aussi être dues à de violentes averses orageuses.
En novembre 1994, l’orage tropical Gordon a entraîné la mort de plus de 800 personnes à
Port-au-Prince et à Jacmel, tandis que 3.500 résidences étaient détruites (Knowles et al.,
1999). Les fortes inondations de mai 2004 ont quant à elles provoqué la mort de 1.600
personnes et ont mis en danger 10.000 familles, la localité de Fonds-Vérettes ayant été
presque entièrement rasée par des flots dévastateurs.
Le cyclone Georges en 1998 reste aussi gravé dans la mémoire des haïtiens, provoquant la
mort de 173 personnes et 18.000 sans abri, et plus proche de nous, en automne 2004, les
Caraïbes sont balayés par 4 cyclones : Charley, Frances, Yvan et Jeanne. Ce dernier, le plus
meurtrier, provoqua la mort de 2.500 personnes dont 600 dans la seule ville des Gonaïves. En
2005, Haïti n’a pas été épargné par les cyclones ayant surtout dévastés la Floride et la
Nouvelle-Orléans.
- Les glissements de terrain
L’érosion a pris des proportions catastrophiques ces 50 dernières années. La perte totale des
terres arables est estimée à 1.500 ha/an (OPS/OMS, 2003). Le glissement d’un sol argileux
sur la roche mère est la conséquence de fortes pluies sur des terrains non couvert de
végétation et en pente forte. Ces glissements de terrain entraînent dans certains cas la coupure
de routes et pistes (voir figure 3).
Figure 3 : Coupure de la piste à l’entrée de Saut d’eau (photo F. Rosillon, nov. 2005)
16
- La sécheresse
Variable d’un endroit à l’autre, la sécheresse constitue un désastre latent et permanent en Haïti
avec de graves conséquences sur la production agricole. Les 2/3 des haïtiens vivent du secteur
agricole avec des exploitations familiales de subsistance. Les principales zones sèches sont
localisées sous le vent derrière la chaîne de montagnes qui fait écran aux alizés, des vents NESW dominant en Haïti. La région Nord-Ouest, Belle-Anse et Anse à Pitres, ainsi que certaines
zones du plateau central sont particulièrement touchées.
1.5. Un lourd passé historique11
La république d’Haïti,
premier pays des Caraïbes à s’être révolté contre l’esclavage et l’avoir aboli,
premier Etat noir indépendant,
et aujourd’hui, incapable de faire face à la pauvreté grandissante de sa population …
- La colonisation
Colonie espagnole après la découverte par Christophe Colomb en 1492, l’île Hispaniola est un
lieu d’importation d’esclaves noirs africains. En 1697, lors du traité de Ryswick, l’Espagne
reconnaît à la France la possession de la partie occidentale de l’île qui devient alors la colonie
de Saint-Domingue (la future Haïti). Une ordonnance de Louis XIV, appelée le Code noir,
réglemente le régime de l’esclavage. Ce code restera en vigueur dans toutes les Antilles et en
Guyane française jusqu’en 1848. La colonie de Saint-Domingue devint l’une des colonies les
plus riches des Antilles. Cette prospérité reposait sur les cultures commerciales de sucre et de
café employant près de 500.000 esclaves, encadrés par 3.000 blancs. La révolte des noirs
débuta en 1791 et la liberté des esclaves fut proclamée le 29 août 1793. Quelques années plus
tard, le soulèvement des anciens esclaves contre la France, conduisit avec l’aide des
Britanniques et des Espagnols à la défaite des armées françaises en 1803. L’indépendance fut
proclamée le 1er janvier 1804 aux Gonaïves et la colonie de Saint-Domingue devint
officiellement Haïti, provenant du mot amérindien Ayiti. Ce fut la première république noire
libre.
- 200 ans d’indépendance … et d’instabilité
L’indépendance déboucha sur une période confuse qui ne faisait que commencer. Ainsi, entre
1804 et 1957, quelque 24 chefs d’Etat sur 36 seront renversés ou assassinés. Le pays qui
connut une période de prospérité relative fin du 19ème et début du 20ème siècle, fut gouverné
par des Mulâtres (dont Alexandre Sabès, dit Pétion) jusqu’en 1910.
Dès 1906, les Américains commencent à occuper le pays jusqu’à une occupation militaire en
1915. Celle-ci durera jusqu’en 1934. Une période de retour à l’instabilité, dopé par la crise
économique mondiale, encouragea les velléités dictatoriales de dirigeants locaux.
François Duvalier dit « Papa Doc » fut élu président de la République en 1957 grâce au
soutien des Noirs qui virent en lui le moyen de mettre fin au règne des Mulâtres. Rapidement
un régime dictatorial s’installa, celui-ci soutenu par une milice paramilitaire semant la terreur
(les tontons macoutes). Autoproclamé, Président à vie en 1964, Papa Doc mourut en avril
1971. Son fils, Jean-Claude surnommé Baby Doc, accéda à la Présidence de la République.
Sur les traces de son père, le nouveau Président poursuit, après l’amorce d’une timide
libéralisation, un régime dictatorial miné par la corruption et l’incompétence jusqu’au
11
D’après http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/amsudant/haiti.htm, 2006.
17
soulèvement populaire de 1986 qui renversa le fils Duvalier. Mais la fin de la dictature des
Duvalier ne signifia pas la fin de la répression et des juntes militaires s’empareront du
pouvoir. Entre deux régimes militaires, le pays connaît la démocratie sous la Présidence de
Jean-Bertrand Aristide pendant une brève période de quelques mois (de janvier à septembre
1991).
Suite à l’intervention américaine, le Président Aristide fut rétabli dans ses fonctions en
octobre 1994. C’est finalement René Préval qui assura les rennes du pouvoir jusqu’au
élections législatives de mai 2000 qui vit à nouveau le retour de Jean-Bertrand Aristide à la
Présidence. Aristide commença un mandat controversé et une nouvelle période de confusion
placé sous des signes de corruption, trafic de drogue, détournement d’argent, vols,…
conduisit à un véritable régime d’anarchie.
En avril 2004, alors qu’arrivent les premiers Marines américains, avant-garde d’une force
internationale envoyée par l’ONU, le Président Aristide est forcé de quitter le pays (le 29
février 2004). Un gouvernement de transition sous la Présidence de Boniface Alexandre et la
direction de Latortue, Premier Ministre intérimaire, est mis en place. La sécurité du pays est
assurée par la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH)
composée aujourd’hui de 6.700 militaires et 1.600 policiers. Mais à l’heure où se déroule
l’élection présidentielle (février 2006), le rétablissement de l’ordre et de la sécurité est loin
d’être acquis. René Préval sort vainqueur d’élections caractérisées par une organisation
chaotique. Et en ce moment (mars 2006), la ville de Port-au-Prince est toujours prise en otage,
particulièrement dans certains quartiers fortement peuplés qui sont toujours la proie de gangs
qui s’affrontent et sèment l’insécurité dans la population.
1.6. Des difficultés d’organisation
Assumé un tel passé n’est pas évident aujourd’hui et les périodes de stabilité et de démocratie
se résument à quelques années. Le bilan de deux siècles d’indépendance ne permet pas aux
décideurs actuels de s’appuyer sur leurs expériences passées en terme d’organisation efficace
du pays. Oubliant la période du régime des Duvalier, lorsqu’on évoque ces 30 dernières
années, on retient plutôt de nombreux coups d’Etat, des situations d’embargo et de blocus, des
élections contestées et 13 Présidents entre 1986 et 2005.
L’Etat n’est pas à même d’assumer son rôle de régulateur, tout en étant le garant de la
démocratie et du bon fonctionnement de la société en faveur d’un développement durable.
Une perte de légitimité et de confiance envers les institutions, des carences en matière de
compétences, une inefficacité chronique dans une ambiance d’instabilité et d’insécurité se
manifestent à tous les niveaux d’organisation. Le service public est peu crédible à l’image de
l’Etat haïtien.
Selon Luckner(1995), l’efficacité sociale de l’Etat est mise en cause. Il doit la prouver et se
légitimer en conséquence, en intervenant de façon éclairée et compétente. Ceci est valable
dans tous les domaines et notamment dans le secteur « eau potable et assainissement », pour
faire des institutions publiques, une référence sociale majeure de modernité, de rationalité et
d’équité. En fait, c’est plutôt l’inverse qui se passe :
- pas d’équité sociale car les ressources publiques ne profitent qu’à une minorité ;
- pas de modernité avec des réseaux d’adduction d’eau vieux, obstrués et pollués ;
- aucune rationalité quand les capitaux rares sont investis là où la densité de population
est la plus faible, sans compter le gaspillage des ressources.
La communauté internationale apporte son aide au gouvernement de transition en vue de
tenter de relever les principaux défis. Les coopérations gouvernementales et non-
18
gouvernementales se poursuivent, malgré les difficultés du moment, Haïti étant le premier
bénéficiaire au monde de l’aide internationale en matière de coopération (Pelt, 2005).
En vue de mieux coordonner ces divers appuis, un Cadre de Coopération Intérimaire (CCI)
(tout est intérimaire en Haïti ces dernières années …) a été mis en place en mars 2004. Le CCI
précise le cadre de référence pour toute assistance à Haïti, et accompagne l’agenda politique
en concentrant ses activités sur quatre axes :
- gouvernance politique et dialogue national ;
- gouvernance économique et renforcement institutionnel ;
- relance économique ;
- accès aux services de base (dont l’accès à l’eau analysé dans la suite du rapport).
1.7. Quel développement durable pour Haïti ?
Dans une période de transition qui n’en finit pas, entre désespoir et optimisme, Haïti se trouve
à nouveau aujourd’hui à un tournant de son histoire. Il ne peut se permettre de rater une fois
de plus le train de la démocratie et de la bonne gouvernance. Cela devient une question
urgente de survie pour l’ensemble du peuple haïtien confronté à d’énormes difficultés en vue
de satisfaire ses besoins tout en préservant la satisfaction des besoins des générations futures.
Il s’agira de dépasser le stade de l’urgence et de l’intérimaire pour ancrer durablement un
système d’organisation et de gestion qui pourra procurer aux haïtiens cette satisfaction.
Figure 4 :
2005 Environmental
Sustainability Index
pour HAITI
www.yale.edu/esi/
19
A propos des objectifs du millénaire pour la lutte contre la pauvreté, Chavannes (2005) pense
que ceux-ci ne seront pas atteints, au contraire, la situation sera pire en 2015 qu’avant la
déclaration des ODM ; en cause, la situation d’Haïti (mauvaise gouvernance, déficit
démocratique, corruption, …) mais aussi des responsabilités partagées par les pays du Nord
(l’organisation du commerce mondial à revoir, la dette du tiers-monde qualifiée de crime
contre l’humanité, …).
Sur l’échelle de l’Indice de Développement Durable ou Environmental Sustainability Index
(ESI) développé par les Universités américaines de Yale et Columbia pour l’année 2005, Haïti
occupe la 141ème place sur 146 pays (voir figure 4).
1.8. Synthèse et conclusions du chapitre 1
En synthèse à ce premier chapitre, selon le modèle DPSIR, nous avons tenté d’identifier
succinctement les principaux indicateurs de développement durable qui caractérisent Haïti
aujourd’hui (voir figure 5). Chaque composante (ou groupe d‘indicateurs) peut être illustrée
par les tendances suivantes, qui ont brièvement été présentées dans cette partie relative au
contexte général d’Haïti :
- pour la composante Forces Motrices : une population en pleine croissance qui
manifeste une série de besoins à satisfaire dans l’urgence en l’absence de
considérations environnementales ;
- pour la composante Pressions : des pressions très lourdes conduisant à l’émission
d’une charge polluante domestique, agricole et industrielle et à une consommation de
l’espace territorial du pays et des ressources naturelles en vue de tenter de satisfaire les
besoins. A ces pressions anthropiques, s’additionnent celles générées lors des
catastrophes dites « naturelles » ;
- pour la composante Etats : un état des ressources naturelles (terre, eau, biosphère, …)
particulièrement dégradé avec le risque d’une situation de non-retour, une économie
faible et une dégradation du climat social ;
- pour la composante Impacts : incidences sur les écosystèmes et perte de biodiversité.
Un manque de ressources limite le niveau de vie du pays et la qualité en terme de
développement humain s’en trouve sérieusement affectée. En termes d’hygiène et de
santé publique, de graves problèmes se posent ;
- pour la composante Réponses : une absence de politique de développement durable
avec un Etat et des institutions incapables d’apporter aujourd’hui des réponses
adéquates et efficaces aux problèmes soulevés précédemment. Notons une aide
internationale importante accompagnée d’un appui financier non négligeable à travers
des coopérations gouvernementales et non-gouvernementales.
20
Figure 5 : Essai de description succincte des groupes d’indicateurs de développement durable
selon le modèle DPSIR12 pour Haïti (Rosillon, 2006)
En conclusion de cette première partie, la voie vers le développement durable pour Haïti reste
semé d’embûches. Quelques grandes problématiques ont été évoquées13. Loin d’être
exhaustif, nous avons voulu mettre en exergue quelques tendances d’ordre général qu’on ne
peut ignorer avant d’analyser un secteur particulier comme la gestion intégrée de l’eau.
12
DPSIR : Système d’indicateurs de développement durable : Drinving Forces, Pressures, States, Impacts,
Responses.
13
A côté des aspects démographiques, environnementaux, socio-économiques, historiques, politiques,
institutionnels, n’oublions pas les aspects culturels et philosophiques.
21
2. Analyse du secteur de l’eau : Ressources - Besoins - Usages
La satisfaction des besoins liés à l’eau est possible pour autant que des usages pouvant
apporter des réponses aux demandes des populations soient développés. L’exploitation des
fonctions naturelles des milieux aquatiques permettra également de répondre à d’autres
besoins. Ces usages pourront s’inscrire dans un contexte de développement durable pour
autant que les ressources potentielles renouvelables le permettent.
RESSOURCES
(colonne d’eau / milieux)
en terme de potentialités
BESOINS
manifestés par une population
pour assurer son bien-être
GESTION
Usages à développer
et à organiser
Fonctions à valoriser
Figure 6 : Le secteur de l’eau : des ressources à la satisfaction des besoins
Dans ce sens, nous présenterons ci-après successivement face aux ressources disponibles, les
besoins et les usages. Il s’agira dans un premier temps, d’établir un constat de la situation
actuelle avant d’analyser le modèle d’organisation du secteur au chapitre suivant. L’état des
ressources et des milieux liés à l’eau (au sens du modèle DPSIR) et les impacts générés par
les usages seront succinctement présentés à la fin de ce chapitre 214.
2.1. Les ressources en eau : entre l’eau du ciel et l’eau de la mer
2.1.1. Le cycle naturel de l’eau en Haïti
La connaissance des ressources en eau d’un pays peut être approchée en tentant d’établir le
cycle de l’eau dans le pays concerné, celui-ci présentant souvent des frontières ne
correspondant pas à des limites naturelles de bassin hydrographique. Les estimations
quantitatives pour les différentes phases du cycle ne seront qu’approximatives et les variations
temporelles d’une année à l’autre et spatiale d’une région à l’autre du pays doivent être prise
en compte pour une analyse plus poussée. Néanmoins, cette représentation globale permettra
déjà de dégager quelques grandes tendances qui vont conditionner la façon d’appréhender la
gestion de l’eau en Haïti.
14
Dès maintenant, nous tenons à préciser que notre approche s’appuiera sur une base de réflexion la plus large
possible, n’excluant à priori aucun des éléments qui puissent intervenir dans le niveau de vie des habitants
composé d’éléments matériels et immatériels bien présents dans le domaine de l’eau.
22
De multiples études et un grand nombre de rapports et séminaires (voir bibliographie)
présentent une synthèse plus ou moins détaillée des ressources en eau en Haïti. Il semble que
toutes ces données trouvent leur même origine dans un rapport de la Commission technique
créée le 26 janvier 1990 par le MPCE et réalisé en coopération avec l’OPS/OMS et le PNUD
en octobre 1990. Cette commission avait été mise en place pour réaliser une évaluation des
activités dans le cadre de la Décennie internationale de l’eau potable et de l’assainissement
(DIEPA, 1980-1990). La base d’information sur les ressources en eau souterraine s’appuyait
sur 5.000 points d’eau inventoriés, 1.000 sondages de prospection électrique, 800 analyses
d’eau, 50 forages d’exploration. Le réseau hydrologique comptait 30 stations fin 1990 mais
ces réseaux n’ont pratiquement plus fonctionné après 1991 (Emmanuel E. et Lindskog P.,
2000). D’autres données proviennent d’Euroconsult (1989) et de BRGM (1989), (ds Margat,
1990).
Ces données datent maintenant de plus de 15 ans et mériteraient d’être réactualisées mais les
dispositifs d’acquisition semblent faire défaut. Il serait utile de pouvoir s’appuyer sur un
réseau pluviométrique, limnimétrique en eaux de surface et pièzométrique en eaux
souterraines. Actuellement, on peut se demander que restent-il réellement des stations de
mesure installées par le passé ? En avril 98, seulement 3 des 35 stations limnimétriques et
25% des stations du réseau hydrométéorologique fonctionnaient encore (Knowles et al.,
1999). Et aujourd’hui en 2006, il semble que ces dernières statons ne soient plus
opérationnelles.
Figure 7 : Le cycle de l’eau en Haïti, données exprimées en milliards de m³ par an (PNUD,
1991)
23
Une pluviométrie moyenne de 1.400 mm/m²/an permet d’amorcer le cycle de l’eau en Haïti.
En une année, c’est donc un volume de 40 milliards de m³ d’eau qui arrose le pays et qui se
répartit en différents flux plus ou moins importants (voir figure 7). Plus de la moitié retourne
vers l’atmosphère tandis que le reste ruisselle en surface ou s’infiltre dans le sol. 90% de
cette eau retourne vers la mer.
Les eaux souterraines
Les aquifères contenus dans les plaines littorales et alluviales dont les plaines de Cul-de-Sac
et de Gonaïves font l’objet d’une exploitation anarchique et non contrôlée. Les aquifères
discontinus correspondent à des faciès géologiques d’origine détritique, souvent des faciès
calcaires cristallins affectés par d'abondantes discontinuités et fissures favorisant l’infiltration
des eaux. Les régions les plus riches en eau souterraine sont celles du Sud-Ouest, Centre et
Nord.
Les cours d’eau
Ce sont dans les Massifs du Nord, de la Hotte et de la Selle que prennent naissance les
principales rivières. La plupart des cours d’eau présentent des linéaires limités et pour les plus
importants, généralement inférieurs à 100 km. La rivière l’Artibonite (voir figure 8) est le plus
grand cours d’eau avec un linéaire de 253 km mais comme les autres grands cours d’eau, le lit
est peu profond. A ces cours d’eau permanents, s’ajoutent des ruisseaux prenant naissance
lors des pluies sur les pentes montagneuses et qui disparaissent ensuite dans les plaines plus
sèches. Ceux-ci atteignent la mer pendant les inondations. Certains cours d’eau présentent un
écoulement souterrain15. Les cours d’eau possèdent un régime torrentiel plutôt qu’un régime
permanent stable.
Figure 8 : L’Artibonite à proximité de Mirebalais (photo F. Rosillon, fév. 2006)
15
Exemple : la rivière Lastic à Fond Parisien d’une longueur de 19 km.
24
Les apports d’eau de la République Dominicaine sont estimés annuellement à 1,0 milliard de
m³. Ceux-ci proviennent essentiellement de l’Artibonite qui prend sa source dans ce pays.
27% du territoire du bassin versant se trouvent en République Dominicaine. Selon
Margat(1990), 1/3 de son débit proviendrait du pays voisin. Deux autres rivières forment sur
une partie de leur cours la frontière avec la république Dominicaine avant de se rejeter dans
l’Océan Atlantique (pour la Rivière du Massacre) et dans la mer des Antilles (pour la rivière
Pédernales).
Rivières
-
Artibonite
Rivière de la Grande anse
Rivière de l’Estère
Les Trois Rivières
Rivière de cavaillon
6 autres rivières
Débit en m³/sec
100
27
19
12
9,5
8à3
Tableau 3 : Débit des principaux cours d’eau en m³/sec (Septembre, 2005 et MTPTC, 1995,
Livre blanc)
Les plans d’eau et les milieux aquatiques
Le plus grand lac naturel, l’Etang saumâtre situé à l’extrémité Est de la Plaine de Cul-de-Sac
s’étend sur 181 Km² et ne possède pas d’exutoire. Le lac de Péligre dans la partie supérieure
de l’Artibonite, est lui d’origine artificielle et couvre 30 km². En 1999, celui-ci avait déjà
perdu 30% de son volume de capacité en eau à cause de l’ensablement de la cuvette.
Parmi les autres milieux aquatiques intervenant dans la cycle de l’eau, on trouve aussi des
zones humides et zones marécageuses, et notamment les mangroves dont la plus vaste étendue
est localisée au Sud de la Gonaïves (32 km de long x 5 km de large). On note aussi la
présence de la mangrove à l’île de la Gonâve.
Caractéristiques du cycle de l’eau en Haïti
Le cycle de l’eau en Haïti est notamment caractérisé par la rapidité avec laquelle l’eau
pluviométrique rejoint la mer16. Ce phénomène peut s’expliquer par :
- la conformité géomorphologique du territoire avec une surface limitée d’interception des
pluies en forme de croissant de lune ouvert vers la mer. Cet espace qui se présente sous forme
d’une couronne de quelques dizaines de km d’épaisseur n’est pas propice au développement
de longs réseaux hydrographiques avec d’importants linéaires de cours d’eau17. Cela ne
permet pas un long temps de transit dans les masses d’eaux de surface :
- le relief et les fortes pentes accentuent les vitesses d’écoulement des eaux et les phénomènes
de ruissellement ;
- cette phase du cycle est aussi influencée par la faible couverture végétale des bassinsversants, l’érosion des sols et le creusement de ravines offrant au ruissellement de l’eau des
voies rapides vers l’aval et vers l’exutoire final marin ;
- à cette phase de ruissellement important, correspond un faible taux d’infiltration des eaux
pluviales vers les masses d’eau souterraines.
16
Un des enjeux devrait consister à allonger les temps de séjour en retenant l’eau douce le plus longtemps
possible dans des réservoirs.
17
La plus longue rivière, l’Artibonite, ayant un linéaire de 253 km + 68 km en République Dominicaine.
25
Une autre particularité du cycle de l’eau en Haïti est l’apparition, suite à une exploitation
excessive des nappes, de contre-courant de la mer vers les masses d’eau souterraines, ce flux
n’ayant pu être quantifié. Ces eaux salées marines viennent donc contaminer les réservoirs
souterrains d’eau douce allant jusqu’à rendre les eaux pompées impropres à la consommation.
Mais gardons-nous bien de généraliser cette problématique qui devrait être mieux documentée
localement. Il semble cependant que la principale menace se situe à Sartre dans la plaine de
Cul-de-Sac et aux Gonaïves, la surexploitation des eaux souterraines due aux pompages pour
les camions citernes et pour répondre aux besoins d’irrigation provoque une invasion d’eau
marine dans les aquifères (OPS/OMS, 2005).
2.1.2. Les disponibilités en eau
Si on veut assurer un développement durable, seules les ressources en eau renouvelables
pourront être exploitées. Celles-ci sont évaluées à 14 milliards de m³ par an, 12,5 milliards en
eaux de surface et 1,5 en eaux souterraines (MDE, 1998). Aujourd’hui, le potentiel exploité
est de l’ordre de 10%, à savoir 1,4 milliard de m³ d’eau chaque année.
En l’absence d’aménagement régulateur (barragers de retenue), selon Margat(1990), les
ressources en eau potentielles régulières représentant l’essentiel des ressources en eau
mobilisables seraient de l’ordre de 3 milliards de m³/an.
L’intensité de la pression des communautés sur les ressources disponibles peut atteindre
différents niveaux en fonction du pourcentage d’eau utilisée par rapport aux ressources
disponibles :
- niveau bas si moins de 10% sont utilisés (pas de problème) ;
- niveau moyen : entre 10 et 20 % (eau : facteur limitant le développement) ;
- niveau élevé : entre 20 et 40 % (gestion rigoureuse nécessaire) ;
- niveau très élevé : plus de 40% (situation de pénurie).
Avec 3 milliards de m³/an, Haïti se trouverait donc à un niveau moyen mais tout en rappelant
qu’en matière d’AEP, les besoins ne sont couverts qu’à 50%. La disponibilité en eau par
habitant serait donc de l’ordre de 1.628 m³ par an. Apparemment, en référence à la notion de
Water Stress Index18, la situation ne semble pas catastrophique en ce qui concerne Haïti,
actuellement. Si on ose établir une projection à l’échéance 2050 avec une population de
l’ordre de 20 millions d’habitants, tout en maintenant le volume d’eau renouvelable constant,
la quantité disponible par habitant chute à 700 m³/an. Nous serions dans ce cas, face à une
sérieuse situation de pénurie.
Rappelons que ces observations sont à considérer avec réserve, en fonction de variations
spatiales qui peuvent être importantes. Ainsi, concernant les données pluviométriques, cellesci peuvent atteindre des valeurs de 3.600 mm/an au niveau de la presqu’île du Sud et chuter à
400 mm/an dans le Nord-Ouest (OPS/OMS, 2003). Deux régions mobilisent ensemble les 2/3
des ressources potentielles du pays : la région Sud-Ouest avec le bassin de la Grande-Anse et
la région Centre-Nord avec le bassin de l’Artibonite. Très localement, et à titre d’exemple,
entre la commune de Saut d’eau où visiblement l’eau coule abondamment une grande partie
de l’année (voir figure 9) et les secteurs montagneux de la commune de Pointe-à-Raquettes
18
Falkenmark (dans Engelman et al., 1993) a défini le concept de Water Stress Index. Celui-ci estime qu’un
pays atteint un niveau de stress hydrique lorsque la quantité d’eau douce renouvelable annuellement est
inférieure à 1.700 m³ par habitant ; le niveau de pénurie correspondant à une quantité inférieure à 1.000 m³ par
habitant.
26
sur l’île de la Gonâve, ou Passe Catabois dans le sous-bassin des Moustiques au Nord-Ouest,
nous pouvons observer deux réalités bien différentes d’un même pays.
Figure 9 : L’eau dans le village de Saut d’eau (photo Rosillon, nov. 2005)
En fonction de l’altitude et des zones agro-écologiques, la disponibilité effective en eau sera
variable. Aussi, on peut examiner la situation en classant le pays en trois zones distinctes
(Balthazar, 2005) :
- Les zones montagneuses de haute altitude (supérieure à 600m ) :
Celles-ci sont caractérisées par une pluviométrie abondante mais des difficultés de capter
cette eau qui s’évacue rapidement vers l’aval. La collecte des eaux pluviales semble être le
mode privilégié d’approvisionnement en eau. Mais les cours d’eau sont éloignés des villages
et il existent très peu d’émergence de sources. Les coûts d’exploitation sont élevés19.
- Les zones de moyenne altitude (600 à 200 m) :
Les émergences de sources sont plus nombreuses mais l’approvisionnement reste difficile, eu
égard à l’éloignement des villages par rapport aux points d’eau.
- Les zones de basse altitude :
Ce sont les zones les plus riches en eau, tant en matière d’eau de surface avec des points de
confluence et des cours d’eau à débit plus élevé que dans les deux zones précédentes et aussi
en eaux souterraines avec la présence de nappes importantes.
2.1.3. Evolution de la situation : des tendances à la baisse des débits
La dégradation environnementale des bassins-versants produit des effets négatifs sur la
régulation des débits des sources et des rivières, la réalimentation des nappes, le
ruissellement, … Dans l’ensemble, on enregistre une baisse significative du débit des sources
au cours de ces dernières années. A titre d’exemple, le tableau 4 présente la situation de 4
sources de Port-au-Prince en 1982 et 2002, alors que pendant cette même période la
population de Port-au-Prince est passée de 719.617 habitants à 1.210.305.
19
L’utilisation de béliers hydrauliques pourrait apporter une solution au problème énergétique des installations.
27
Nom de la source
Mariani
Turgeau
Cérisier
Source Frères
Zone ou Bassin versant
1982
298
52
40
65
Carrefour
Pétion-Ville/Frères
Pétion-Ville/Frères
Pétion-Ville/Frères
Débit en L/s
2002
139
32
9
35
Tableau 4 : Comparaison des débits de 4 sources de Port-au-Prince en 1982 et 2002
(OPS/OMS, 2005)
Au niveau des cours d’eau, la tendance est aussi à la baisse. En l’espace de 40 ans (19501990), le débit à l’étiage des cours d’eau a diminué d’environ 50% (voir tableau 5).
Rivières
Débit étiage (m³/s) 1950
Débit étiage (m³/s) 1990
Grande Rivière du Nord
Limbé
Trois Rivières
Fer-à-cheval
La Thème
Saut-d’Eau
Rivière grise
Grande Anse
Grande Rivière de Nippes
3,44
2,22
8,00
3,08
5,20
0,80
3,90
22,20
3,20
0,75
0,94
4,80
1,12
3,10
0,73
1,90
12,40
1,72
Tableau 5 : Débit à l’étiage de quelques rivières : évolution 1950 – 1990 (OPS/OMS, 1996)
2.1.4. Ressources en eau et changement climatique
Les scénarios de changement climatique à l’horizon 2030 – 2060 risquent de perturber le
cycle de l’eau, accentuant encore le degré de vulnérabilité du pays.
Q (mm) W (106m3)
Année
P (mm)
Er (mm)
Ep (mm)
1961-1990
1388
1057
1586
356
9769
2030
1201
968
1708
233
6385
2060
911
814
1908
97
2661
P:Précipitation; Er:Évapotranspiration réelle; Ep:Évapotranspiration potentielle;
Q:ruissellement; W: volume potentiel des ressources hydriques.
Tableau 6 : Valeur moyenne calculée des principaux paramètres hydrologiques pour la
période 1961-1990 et Valeur estimative des principaux paramètres hydrologiques pour les
années 2030 et 2060 (Bretous et al., 2002)
Trois conséquences sont à prévoir :
- une élévation de la température accompagnée d’une augmentation très sensible de
l’évaporation et de l’évapotranspiration ;
28
une élévation du niveau de la mer risquant d’accentuer les remontées d’eau salée dans
les nappes en majorité côtières ;
- des conséquences négatives sur la production agricole et sur les problèmes de
nutrition.
A cela, il convient d’ajouter les effets du changement climatique sur la probabilité d’une
augmentation des catastrophes dites « naturelles ».
-
2.2. Les besoins en eau
La description proposée des besoins en eau en Haïti s’inspire de la typologie des besoins
humains classés par Maslow(1968) sous forme d’une pyramide, cette forme de représentation
ayant été adaptée au domaine de l’eau (voir figure 10). Cette typologie des besoins est établie
de la base de la pyramide à son sommet en passant des besoins matériels vitaux à la vie de
toutes espèces aux besoins immatériels humains (sociaux et moraux).
Besoins moraux
Symbolique
de l’eau
Esthétique
Source
de méditation, de paix,
d’équilibre psychique
Besoins sociaux
Cadre de vie épanouissant
Source d'inspiration culturelle
Sports et loisirs liés à l’eau
Besoins matériels
Énergie, transport, matières premières
pour la production de biens,
eau de refroidissement
Extraction de granulats
Besoins physiologiques de base :
alimentation, sanitaire, applications médicales
Figure 10 : Typologie des besoins en eau en Haïti selon la pyramide de Maslow adaptée au
domaine de l’eau (Rosillon, 2001)
29
Au-delà du simple approvisionnement en eau …
Des enquêtes menées par Balthazar (2005) sur les systèmes d’approvisionnement en eau en
Haïti ont permis de dégager quelques considérations :
- l’eau courante est d’une manière générale facteur de progrès avec une amélioration
des conditions de vie et spécialement d’hygiène des populations désservies ;
- la présence d’eau dans une zone augmente son attractivité avec une tendance à un
afflux de population ;
- dans ce sens, l’eau est un facteur de cohésion sociale ;
- la gestion participative de l’eau conduit vers la prise en compte d’autres secteurs et
d’autres problématiques, l’eau étant un levier de citoyenneté ;
- l’eau peut être aussi un objet de convoitise et un enjeu de pouvoir ;
- le secteur de l’approvisionnement en eau est un des secteurs de création d’emplois
durables parmi les plus dynamiques ;
- l’accès à l’eau permet une amélioration de la sécurité des familles (filles et femmes
ne devant plus marcher de nombreux kilomètres tôt le matin ou tard le soir, en
courant des risques à la recherche de l’eau).
2.2.1. Les besoins en eau potable
Les besoins sont variables en fonction de la commodité de l’accès à l’eau : 40 litres lorsque
l’eau est fournie dans l’habitation, 15 litres si la source est éloignée de moins de 200 m, 7
litres, si la source est à plus de 1.000 m (Caircross S., 1987 dans Knowles et al., 1999).
Mais pour Haïti, les normes de calcul des besoins en eau potable ont été fixées par le
deuxième atelier national de la DIEPA en novembre 1982 (voir tableau 7).
Contexte / Situation de fourniture d’eau
Milieu rural dispersé
Localités inférieures à 2.000 habitants
Fontaines publiques (FP)
Localités entre 2.000 et 5.000 habitants
La zone métropolitaine + les 10 villes
principales (chefs lieux de départements)
Dispositif de fourniture d’eau
Fontaine publique (FP)
Branchement particulier (BP)
Pompe à bras
Source aménagée
Impluvium
Quantité par habitant
20 L/Jour
30 L/Jour
30 L/Jour
70 L/Jour
100 L/Jour
Nombre de personnes desservies
250
14
250
250
100
La distance à parcourir pour atteindre un point d’eau doit varier entre 200 et 500 m
Tableau 7 : Besoins en eau potable en fonction de différentes situations (DIEPA, dans
OPS/OMS, 1996)
30
Selon le Ministère de l’Environnement (1998), les besoins en eau potable de l’ensemble du
pays ont représenté en 1997, 137 millions de m³ répartis en 52 millions pour le milieu rural,
85 millions pour le milieu urbain dont 33,5 millions pour Port-au-Prince. En 2015, les besoins
devraient être de 230 millions de m³, 65 pour le milieu rural et 165 pour le milieu urbain dont
68 pour Port-au-Prince.
Le programme de reformulation de la politique de l’eau en Haïti (mai 1998) avance des
chiffres très différents avec un problème surtout dans le Plateau Central et dans les zones à
dominance karstique (voir tableau 8). Mais entre les besoins à couvrir et les volumes d’eau
effectivement distribués subsistent des déficits importants (voir tableau 14).
Année
Volume en m3 par an (1)
Volume en m3 par an (2)
1997
2000
2005
2015
2050
57.979.650
58.002.979
69.728.761
101.216.811
384.366.522
137.000.000
230.000.000
Tableau 8 : Evolution des besoins en eau à l'horizon 2050
Sources :
(1) Programme de reformulation de la politique de l'eau en Haïti, mai 1998
(2) MDE, 1998
2.2.2. Les besoins d’assainissement
En termes d’assainissement de base, les besoins à couvrir portent sur le traitement des
8.600.000 équivalents-habitants rejetant une charge polluante d’origine domestique. A cela,
s’ajoutent les charges polluantes liées à divers secteurs d’activité pour lesquelles aucunes
informations n’ont pu être obtenues.
2.2.3. Les besoins de production agricole
Selon Margat (1990), les besoins annuels en terme d’irrigation seraient de l’ordre de 5.000 m³
d’eau par ha de terres irriguées : de 5.000 m³/an.ha et 0,6 l/s.ha en pointe en région Sud à
8.000 m³/an.ha et 1 l/s.ha en pointe, au Nord et Nord-Ouest. Ceux-ci constituent l’eau
virtuelle qui accompagne chaque aliment produit.
Avec un potentiel de 150.000 ha de terres irrigables et 70.000 ha effectivement irrigués, les
besoins en 1997 étaient estimés par le MDE (cité par Emmanuel E. et Lindskog P., 2000)
entre 0,75 et 1,5 milliards de m³ avec une efficience des système en place entre 25 et 50%,
tandis qu’en 2050, une extension de la surface irrigable conduirait à une demande portant sur
une quantité de 2,3 à 4,3 milliards de m³, tenant compte d’un efficience des systèmes entre 30
et 70%.
2.2.4. Les autres besoins de production
Les besoins en eau entrant dans la fabrication de divers produits et l’eau de process industriel
n’ont pu être quantifiés.
Sur le plan énergétique, Haïti est largement déficitaire en terme de sources d’énergie et les
besoins de la population sont loin d’être couverts. Ces besoins par habitant restent aussi
31
difficilement quantifiables tout en notant des différences entre milieu rural et milieu urbain.
L’énergie hydroélectrique produite répond dans une faible proportion à ces besoins.
2.2.5. Les autres besoins sociaux et moraux
Eux aussi sont difficilement quantifiables, mais tout en étant indispensables à un
développement harmonieux des êtres humains. Toute société manifeste des besoins en terme
de loisirs. L’attrait de la plage et l’intérêt d’activités en mer (baignade, plongée) semblent
assez limités dans le chef des haïtiens ; par contre les expatriés seraient plus attirés par ce
genre de loisirs.
Enfin, en Haïti, à travers la présence de nombreuses églises et par le culte Vaudou, la
dimension sacrée de l’eau revêt une importance particulière.
2.3. Les fonctions et usages
Comme indiqué précédemment, les réponses aux besoins en eau pourront être apportées à
travers les usages humains des ressources et la valorisation des fonctions des milieux
aquatiques.
Il ne s’agit pas de générer de nouvelles ressources, celles-ci étant limitées, mais de gérer les
demandes. Actuellement, le problème ne se pose pas en termes de mobilisation de nouvelles
ressources hydriques, mais plutôt dans la mise en valeur et dans l’exploitation de ces
ressources (Luckner, 1995). Ressources + milieux constituent en fait une somme de
potentialités d’usages et de fonctions en réponse à de multiples besoins.
Deux usages « forts » retiennent toutes les attentions en Haïti : l’alimentation en eau des
population et l’irrigation. Le Projet de décret sur la gestion de l’environnement, version
soumise au Conseil des Ministres du 3 septembre 2005, définit cependant les usages selon
l’ordre prioritaire suivant (article 116) :
1) la satisfaction des besoins en eau potable et d’hygiène ;
2) la survie des écosystèmes aquatiques ;
3) l’irrigation et l’agriculture à des fins alimentaires nationales ;
4) la satisfaction des besoins pour l’industrie et l’hydroélectricité ;
5) l’irrigation de plantations à des fins d’exportation ;
6) la mise en valeur de l’eau à des fins récréatives et touristiques.
Les consommations en eau sont présentées dans le tableau 9, auquel il convient d’ajouter la
consommation des centrales hydro-électriques estimées à 4.000 millions de m³/an.
Régions
AEP
Irrigation
Autres
Total
(Ind. alim.)
Nord
5,0
8,4
0,4
13,8
Nord – Ouest 11,0
161,0
172,0
Centre Nord 8,0
410,0
418,0
Centre Sud
80,0
333,5
4,0
417,5
Sud – Est
1,5
69,0
70,5
Sud – Ouest
5,5
187,0
0,25
192,75
Total
111,0
1.168,0
4,65
1.266,9
Tableau 9 : Consommation en eau en millions de m³/an (OPS/OMS, 1996)
32
2.3.1. Alimentation en eau
L’approvisionnement en eau des populations constitue une préoccupation majeure pour les
habitants et pour les dirigeants. En 1995, selon Luckner (1995), 60% de la population urbaine
et 80% de la population rurale vivent dans des zones dépourvues de services d’eau potable et
d’assainissement.
Il est impossible d’obtenir une idée exacte du nombre de personnes ayant accès à l’eau, tant
les taux varient d’une étude à l’autre. Les taux de couverture mentionnés dans les rapports
2003 et 2004 OPS/OMS, sont repris dans les tableaux 10 et 11 ci-après. Mais il semblerait
que ces chiffres soient discutables, particulièrement en milieu urbain où le taux d’urbanisation
est généralement sous-estimé. Ainsi, selon le WASAMS(2000, données IHSI), en fonction du
taux d’urbanisation retenu, les taux de couverture en eau potable passent de 45% à 22,5%.
Figure 10 : Approvisonnement par borne fontaine (photo F. Rosillon, fév. 2006)
Situation
1993
2003
2004
Milieu urbain
49,5 %
53,3%
Milieu rural
43,6%
51,6%
Ensemble du pays
52%
Tableau 10 : Taux de couverture relative à l’accès à l’eau de la population (OPS/OMS, 2003
et 2004)
Zone d’intervention
Taux de couverture / année
2000
2001
2002
Zone métropolitaine
53,7
53.3
51.8
Villes secondaires
45
43.6
49.4
Milieu rural
51
55.6
57.6
Ensemble du pays
51
53.1
54.8
Tableau 11 : Evolution de la couverture en (%) de 2000 à 2002 (OPS/OMS, 2002)
33
Avec une population estimée à 8.600.000 habitants en 2006, le taux de couverture des besoins
en eau potable continue de baisser passant d’un déficit de 206.000 m³/jour en 1995 à 371.000
m³/jour en 2006 (Luckner, 1995).
Les modes d’approvisionnement
L’approvisionnement se fait à partir de prélèvements en eaux souterraines avec l’installation
de puits et forages, et par le captage de sources. La distribution s’opère via les réseaux et
branchements privés, fontaines publiques et kiosques. Les eaux pluviales sont partiellement
collectées dans des citernes ou des impluviums dans les zones rurales de haute altitude et dans
certaines habitations localisées sur les hauteurs de Port-au-Prince.
Selon Luckner(1995), le réseau national compte 1.167 sources captées efficaces à 50% et un
millier de puits équipés de pompes à main hors d’usage pour la plupart, une centaine de
forages équipés de motopompes diesel et d’électropompes ne fonctionnant pas 24H sur 24.
En milieu rural, entre août 1980 et janvier 1993, les POCHEP ont permis de fournir de l’eau à
199.890 habitants via 90 systèmes d’adduction. Dans le même temps, 741 fontaines publiques
et 1.827 prises à domicile ont été installées (MTPTC, 1995, Livre blanc).
En 2002, la CAMEP fournit l’eau à partir de 51.879 branchements particuliers et 217 bornes
fontaines tandis que le SNEP compte 13.470 branchements actifs et 46 bornes fontaines
(OPS/OMS, 2005). Mais la situation à Port-au-Prince semble très complexe où seulement
35% de la population en 1995 avaient accès au système d’eau. Le service d’eau est assuré
pendant une partie du temps, parfois seulement deux fois par semaine. Les problèmes sont la
conséquence de pertes importantes estimées à 60% dans les réseaux de distribution, suite aux
fuites des canalisations, aux détournements et aux vols d’eau. Un mauvais fonctionnement des
installation de captage (problème d’énergie, de déficience mécanique des pompes, …) et la
contamination des sources et des nappes aggravent encore la situation. En milieu rural, les
problèmes sont occasionnés par une chute de débit des sources, un mauvais captage des
émergences et un déboisement des bassins versants.
Le mode d’approvisionnement est adapté en fonction de la zone considérée (voir tableau 12).
Mode d’approvisionnement
Type de milieu
Sources
Forages
Pompe
à
bras (3)
Nombre
Débit
Nombre
(m³/jour)
Zone
Débit
Nombre
(m³/jour)
18
85.285
35
53.772
28
23.198
12
24.780
Milieu rural
700
(1)
25
(2)
Total
746
métropolitaine
Villes
secondaires
72
449
449
Tableau 12 : Mode d’approvisionnement en eau par type de milieu (OPS/OMS, 2005)
(1) : Les débits des sources en milieu rural varient de 5 à 1.700 m³/j
(2) : Débits de forages : de 129 à 518m³/j
(3) : Une pompe à bras peut fournir 10m³/j.
34
Sources
d’approvisionnement
CAMEP
Moyens
Quantité fournie
(millions de m³/an)
36
18 sources gravitaires
5 stations de pompage
SNEP
Captage de sources
26
Forages
POCHEP
90 systèmes d’AEP
18
Camions citernes
200 camions
8
Autres (ONG, Organismes ?
?
internationaux, …)
Industrie alimentaire
800 forages
4
Tableau 13 : Consommation en eau selon les sources d’approvisionnement (OPS/OMS, 1996)
Zones
Population
Besoins en m³/j
Volumes distribués Déficit
en m³/j
m³/j
96.795
28.199
Zone
1.249.936
124.994
métropolitaine
Villes secondaires 1.955.029
136.852
48.894
Milieu Rural
4.724.083
94.481
33.673
Total
7.929.048
356.327
179.362
Tableau 14 : Besoins, volumes distribués et déficit en eau potable en
OPS/OMS, 2005)
en
87.058
60.808
176.065
2003(données
Ces chiffres sont à considérer avec réserve en vérifiant notamment l’état des installations.
Dans l’ensemble, la réalité pourrait être encore plus préoccupante. Aujourd’hui, sur les 35
forages en zone métropolitaine, combien sont-ils encore en état de fonctionnement ? Par
ailleurs, les pertes sur le réseau (de l’ordre de 30% en zone métropolitaine selon les données
ci-dessus), ne sont-elles pas sous-estimées par rapport à la réalité ? Un état des lieux actualisé
mériterait d’être réalisé.
2. 3.2. Assainissement de base
Les services en matière d’assainissement sont très déficients. Dans les meilleurs des cas, la
gestion des eaux usées se traduit par l’installation de latrines plus ou moins entretenues. Les
dispositifs d’épuration sont inexistants dans le pays. Port-au-Prince bénéficie d’un système de
drainage des eaux pluviales qui recueille des déchets divers, eaux usées et excrétas et qui se
comble de sédiments20.
On estime à environ 25%, le taux de couverture des besoins en assainissement de base (43%
en milieu urbain et 16% en zones rurales, Knowles et al., 1999). Selon l’OMS (2005), le taux
de couverture, entre 1980 et 1997 aurait évolué de 10% à 27%. Dans la plupart des cas, les
excrétas sont rejetés directement dans la nature et emportés avec les eaux de ruissellement
avec un risque de péril sanitaire.
Les taux d’évacuation des excréta, toujours selon l’OMS (2005) sont estimés à :
- en milieu urbain : 1993 : 44,4% 2003 : 42,2% ;
- en milieu rural :
1993 : 31,8% 2003 : 24,8%.
20
Notamment à cause de l’exploitation de carrières de matériaux de construction et de l’occupation anarchique
des terrains versant Nord du Morne Hôpital.
35
Latrines en milieu rural
Un programme de construction des latrines a commencé en 1980, soutenu par l’UNICEF. En
1995, près de 155.000 latrines communautaires et monoparentales ont été installées, servant
24% de la population rurale de la zone concernée (Knowles et al., 1999).
Déchets solides
La production de déchets solides par habitant varie de 0,3 à 0,5 kg par jour. Dans certaines
villes, les activités de collecte, de transport et d’entreposage sont réalisées. On ne peut pas
parler de traitement et souvent les déchets sont déplacés d’un site vers un autre. Le problème
est particulièrement préoccupant dans les zones fortement peuplées où les déchets ramassés
sont entreposés dans des dépotoirs sauvages localisés dans les ravins, sur le littoral et les
rivages. La décharge de Truitier construite en 1981 pour recevoir les déchets d’une partie de
la zone métropolitaine semble très mal entretenue (OPS/OMS, 2005).
En 2002, 1.800 tonnes de déchets sont produites chaque jour à Port-au-Prince et seulement
15% sont collectés. En 2003, 30% du volume des déchets seraient collectés à Port-au-Prince,
dans les autres villes 42% et en milieu rural 16% (Knowles et al., 1999).
2.3.3. Usages de production
Productions agricoles
80% de l’eau utilisée en Haïti est employée à des fins d’irrigation. En 1996, on estime la
consommation annuelle à 1.170 millions de m³ (données OPS/OMS, 1996), 90% provenant
des eaux de surface, y compris des sources et 10% des eaux souterraines, dans les zones à
faible pluviométrie (MTPTC, 2005, Livre blanc). Des forages et des puits d’irrigation ont par
exemple été creusés dans la plaine des Gonaïves et Cul-de-Sac. Mais à cause du mauvais
fonctionnement des installations et des pertes, entre 42.000 et 70.000 ha seraient
régulièrement irrigués. Il n’existe donc pas de grandes cultures irriguées.
Lors du colloque GRI (janvier 2005), on note que 80.000 ha sont équipés et répartis en 180
périmètres, tout en estimant que le potentiel irrigable gravitairement serait de l’ordre de
160.000 ha et la possibilité d’étendre à 400.000 ha en utilisant d’autres techniques plus
développées (irrigation par aspersion ou goutte à goutte). Mais comme dans le secteur de
l’alimentation en eau potable, un problème d’organisation se pose aussi en matière
d’irrigation.
La petite irrigation villageoise est aussi pratiquée mais les périmètres méritent une
réhabilitation. 26 périmètres couvrant une superficie de 3.800 ha ont été identifiés par le
projet de réhabilitation des petits périmètres irrigués soutenu par le FIDA (IFAD, 2006).
Autres productions pour des besoins industriels et commerciaux
Depuis que la société HASCO a cessé de produire du sucre à partir de 1991, il n’existe plus
vraiment de grandes industries agro-alimentaires. Cependant, on peut estimer la
consommation en eau du secteur dans la plaine du Cul-de-Sac (préparation de jus, bière, …) à
4 millions de m³ par an fournis à partir de 800 puits (OPS/OMS, 1996).
Production d’énergie
La production hydroélectrique a commencé en 1971. A ce jour, 7 installations de production
hydroélectrique utilisent l’eau des rivières. La capacité totale de production est de 55 MW, la
principale installation étant celle de Peligre sur la rivière de l’Artibonite qui produit 47,1 MW.
7 mini centrales situées en province génèrent des puissances variant entre 0,30 et 2,25 MW.
36
En 1973, l’énergie hydroélectrique représentait 94% de l’offre en énergie électrique du pays.
Actuellement, elle représente moins de 40% et la tendance à la baisse se poursuit (Saint Jean
W., 1997 cité par Emmanuel E. et Lindskog P., 2000). Le potentiel hydro-électrique
développé ne serait que de 20%. Au moins 20 autres projets d’exploitation ont été déjà
identifiés (OPS/OMS, 1996), le potentiel non développé étant estimé à 154 MW (OMS 2003).
Le principal problème pour maintenir durablement la production d’électricité est la
vulnérabilité des réservoirs atteint par l’envahissement de sédiments suite aux problèmes
d’érosion de sols et de déforestation.
Transport par voies navigables
La navigation commerciale fluviale est pratiquement inexistante. Seule l’Artibonite peut être
navigable dans son cours inférieur par de petites embarcations à fond plat qui servent au
transport et au commerce local. En matière de transport maritime, le Service Maritime et de
Navigation d’Haïti (SEMANAH) du MTPTC est sensé planifier et organiser ce secteur
(MTPTC, 1995, Livre blanc).
2.3.4. Autres usages
Nous n’avons pu obtenir que peu de données concernant les autres usages. Selon le MDE
(1998), les usages de l’eau pour couvrir des besoins d’élevage, de pisciculture, des mines et
des carrières, de l’industrie et du tourisme sont très faibles.
La pêche
On note des activités de pêche sur certains cours d’eau et plans d’eau intérieurs et en mer.
L’aquaculture est pratiqué au lac Peligre (4.000 ha) régulièrement ensemencé par le
MARNDR. Les prélèvements de poissons d’eau douce représenteraient en 1990 : 350 Tonnes,
en 2000 : 500 Tonnes (Earth Trends, 2003) pour un nombre de 16 espèces péchées. Les
chiffres en matière de production en aquaculture n’ont pu être disponibles.
Les loisirs
Outre les possibilités d’activités de loisirs et de tourisme offertes par le milieu marin
(baignade, plongée, …), concernant les eaux intérieures, notons la présence de sources
thermales, l’existence de parcs naturels et quelques centres de loisirs liés à l’eau (Rivière Islet,
La Perle, La Ravine du Sud avec la Prise, La rivière Gaillard, l’Estère, la petite rivière de
l’Artibonite, …) et des stations de baignade (Source Zabeth, source Elisabeth, Ganthier, …).
La dimension sacrée de l’eau : le Vaudou
Les religions considèrent en général l’eau en tant qu’élément de spiritualité. Le vaudou, très
répandu en Haïti, prône le respect de la nature avec le sacro-saint respect des sources, arbres,
étendues d’eau qui sont considérés comme le temple de leurs dieux qu’ils vénèrent et
protègent. A titre d’exemple, un arbre est planté à la naissance d’un enfant. Dans le domaine
de l’eau, notons que chaque année, la ville de Saut d’eau est le lieu de rendez-vous de
nombreux adeptes attirés par les chutes (voir figure 12).
37
Figure 12 : Saut d’eau et pèlerinage du 16 juillet chaque année (photo AlterPresse, 2005)
La présente étude n’a pu montrer les rapports entre religions et gestion de l’environnement
mais à l’instar du Bénin où les pratiques Vaudou sont mobilisées pour une meilleure
protection des ressources en eau (Amoussou, 2004), il serait utile de voir comment le Vaudou
en Haïti peut véhiculer un message environnemental, spécialement en ce qui concerne la
protection des ressources en eau.
Figure 13 : Bénin, Lac Aheme : espace sacré habité par le fétiche Avlékété et devenu zone de
frayère pour les poissons (photo F. Rosillon, janv. 2006)
38
2.4. Etat des ressources et des milieux
Alors que les tendances sont à la baisse sur le plan quantitatif (diminution des ressources et
augmentation des besoins), se posent divers problèmes en termes de qualité. Les aspects
quantitatifs et leur évolution ayant été pris en compte lors de la présentation du cycle de l’eau
en Haïti, seuls les aspects qualitatifs seront ici présentés.
2.4.1. Les ressources
Les eaux sont en général d’un pH alcalin au niveau des sources, acide dans les nappes
souterraines tandis que le degré de dureté reste dans les normes habituelles (Balthazar, 2005).
D’après un rapport de 1986 du SNRE21, les eaux captées par la CAMEP sont en général des
eaux d’une bonne potabilité chimique à l’exception de celles de Plaisance et de Cerisier qui
ont des teneurs en nitrates élevés (respectivement, 42 et 52 mg/L). Les sources captées dans le
massif de la Selle présentent un excès en bicarbonate de calcium provoquant une incrustation
rapide et progressive des canalisations (OPS/OMS, 1996). On peut enregistrer une perte de
50% du diamètre de certaines conduites du réseau de la CAMEP en l’espace de 10 ans
(OPS/OMS, 2003). A noter également, une turbidité élevée après de fortes pluies.
La qualité microbiologique
Une campagne menée à partir de l’échantillonnage de 30 systèmes de fourniture d’eau de
conception différente dans divers milieux, montre que l’eau fournie aux robinets, aux
kiosques payants, aux fontaines publiques n’est généralement pas potable (Balthazar, 2005).
En cause, une absence de périmètres de protection, une mauvaise conception technique des
systèmes sans réservoir de stockage, l’absence de désinfection des réservoirs, des fuites et des
rentrées d’eaux parasites dans les réseaux, une absence d’entretien des réseaux et des
installations. Lorsque la désinfection est pratiquée, la chloration reste le seul mode de
traitement appliqué à l’eau brute destinée à la consommation humaine, avec un risque de
formation de trihalométhanes, lorsque cette pratique n’est pas maîtrisée.
La plupart des sources captées dans la zone métropolitaine sont contaminées par une pollution
d’origine fécale. La situation n’est pas meilleure dans les zones secondaires où le SNEP a
réalisé en 1991 une étude montrant que tous les 19 systèmes d’eau potable étaient contaminés
par des coliformes fécaux entre 1 et 110 coliformes fécaux par 100 ml avec une moyenne de
20 CF/100 ml. La recherche de parasites est rarement effectuée. Cependant, Brasseur et al.
(2002) ont mené une étude relative à la circulation des oocystes de Cryptosporidium dans les
eaux de surface et de distribution par adduction publique à Port-au-Prince. Sur 27 échantillons
d’eau analysés, 19 contenaient des oocystes de Cryptosporidium (soit un taux de
contamination de 70,4%) et les quantités d’oocystes variaient de 4 à 1.274 pour 100 litres
d’eau.
Ces constats conduisent Balthazar (2005) à proposer la dénomination eau courante en lieu et
place de l’eau potable en termes d’approvisionnement en eau en Haïti. Il semblerait que 50%
de la population achèterait 1 gallon d’eau de boisson saine (eau potable ?) tous les 3 jours
(OPS/OMPS, 2005).
21
Débits et analyses chimiques de sources des bassins versants de la plaine du Cul-de-Sac et de la Rivière
Froide, Analyses effectuées au laboratoire du Service d’hydrogéologie (SHG).
39
Les métaux lourds
Une étude réalisée par Emmanuel et al. (2005) à Port-au-Prince, montre que l’eau destinée à
la consommation humaine contient des concentrations en Plomb de l’ordre de 40 à 90 g/L
supérieure à la valeur seuil de 10 g/L pour l’eau de boisson, une valeur de 260 g/L ayant
même été détectée dans un réservoir. On note aussi des teneurs en fer (0,3 mg/l à Tête de
l’Eau) dans les eaux de la partie Nord du Massif de la Selle
La salinisation des eaux douces
Parmi les aquifères menacés par la salinisation, nous retiendrons particulièrement l’aquifère
de la plaine de Cul-de-Sac qui alimente à plus de 50% la Région Métropolitaine. Des
campagnes de prélèvements et d’analyses physico-chimiques de 16 forages ont été réalisées
en septembre 2003 par Emmanuel et al. (2004). Les valeurs de conductivité ont atteint 1400
S/cm (environ 1 gr de sels par litre). La conductivité, de même que les teneurs en salinité les
plus élevées, ont été mesurées dans les forages les plus profonds, de 60 à 100m de profondeur
(salinité atteignant des teneurs de 0,5 g/L). D’autres forages et puits localisés à proximité du
littoral sont également touchés. C’est notamment le cas à l’Ile de la Gonâve, pour certains
puits le long de la côte.
2.4.2. Les milieux liés à l’eau
Les eaux de surface
La baie de Port-au-Prince constitue l’exutoire final des eaux de surface. En fonction des
pressions et des rejets, ces eaux présentent des charges polluantes variables. Une étude menée
sur les eaux d’un canal de drainage d’eaux de ruissellement à Port-au-Prince par Emmanuel E.
et al. en 2003 et 2004 a permis de confirmer une charge organique élevée22. Concernant les
valeurs de DCO, celles-ci sont jusqu’à 10 fois supérieures à la valeur seuil de 125mg/L fixée
par la directive 98/15/CEE de l’Union européenne concernant le rejet des eaux usées dans le
milieu naturel. Par contre, les concentrations en métaux lourds (As, Cd, Cr, Ni, Pb et Zn) sont
très faibles, voire parfois en dessous du seuil de détection et toutes inférieures aux valeurs
seuils.
Les plans d’eau sont malades de l’ensablement et du comblement progressif par des
sédiments. Ainsi le lac de Peligre, réservoir le plus important du pays, a perdu 30% de
capacité de stockage d’eau suite à une sédimentation du bassin, conséquence de la
déforestation.
Les bassins versants
Selon le livre blanc du MTPTC (1995), il subsisterait 60.000 ha de forêts tandis que 25
bassins versants sur 30 seraient considérés déboisés. A titre d’exemple, en 1983, la surface
boisée du bassin versant de la rivière Artibonite représentait encore 6.800 km², en 1995, les
forêts ne s’étendaient plus que sur 650 km², et depuis la situation n’a fait qu’empirer.
Ces dégradations touchent directement le cycle de l’eau avec une augmentation des
ruissellements sur un sol nu, le creusement de ravines qui accentuent encore l’érosion, une
diminution de l’infiltration de l’eau dans le sol, une recharge moindre des aquifères, une
augmentation de la salinité de l’eau, un comblement des réseaux d’assainissement, … (voir
plus haut).
Les écosystèmes terrestres
22
(DCO : de 883 à 1268 ml/L, Oxygène dissous : de 1,35 à 4,05 mgO2/L)
40
La déforestation et la destruction de la couverture végétale conduit à un appauvrissement des
écosystèmes terrestres avec un sol dégradé (et une perte de la couche supérieure la plus riche
qui abrite la faune du sol), une banalisation des habitats et une perte de biodiversité.
L’assèchement des zones humides est particulièrement préoccupant, la plupart des plans
d’eau sont en train de s’envaser (OPS/OMS, 2005).
Les écosystèmes marins
La déforestation provoque également des perturbations au niveau des écosystèmes côtiers et
marins. Des eaux de forte turbidité et à charge organique polluante élevée affectent les
mangroves, les herbiers de phanérogames et les récifs coralliens. Un déséquilibre de
fonctionnement de ces écosystèmes se manifeste par la prolifération d’espèces invasives
d’algues brunes caractérisées par des taux de croissance de 1cm par jour, leur permettant
d’envahir et d’étouffer les coraux qui ne croissent que d’1 cm par an, ces algues brunes
n’étant pas consommés par les poissons (Vermande et Raccurt, 2001 cité par Emmanuel E. et
al., 2005).
2.5. Les impacts sur la santé humaine
L’épidémie de choléra qui a affecté de nombreux pays de la région en 1991, même si Haïti a
été épargné, a suscité auprès des acteurs de l’eau, une prise de conscience à propos de
l’importance des maladies hydriques en lien avec des eaux de mauvaise qualité. Dans la partie
Nord de Port-au-Prince, on note régulièrement des épidémies de malaria, typhoïde, diarrhée
chronique. Face à ces maladies d’origine hydrique, les bébés sont les plus vulnérables, le
nombre de décès pouvant atteindre jusqu’à 1/3 de tous les enfants de moins de 5 ans
(Maternowska C., 1994 dans Knowles, 1999).
Les principales maladies hydro fécales rencontrées en Haïti sont mentionnées dans le rapport
OPS/OMS, 2003 :
- diarrhées : état quasi-endémique, une des deux principales causes de morbidité et
mortalité chez les enfants avec un taux de prévalence en 1995 : de 15 à 36% pour les
enfants de 6 mois à 5 ans (variable d’un département à l’autre) ;
- typhoïde endémique :
o en 1991 importante épidémie à Port-au-Prince ;
o en 1993 : 12,5% de cas sur 2.500 personnes consultées au centre de santé des
Cayes ;
o de juillet à décembre 95 : 5ème cause d’admission (6% des hospitalisations) au
service pédiatrique de l’HUEH (de janvier à septembre 97 : 675 cas) ;
- choléra :
o l’épidémie des Amériques en 1990-91 n’a pas frappé le pays ;
- parasitoses :
o problème avec notamment, Ascaris lumbricoïdes et Trichuris trichuria, Giardia
intestinalis et Entamaeba histolytica par le passé (mais pas de données
disponibles).
Outre ces maladies générées par une mauvaise qualité microbiologique de l’eau, on note
également d’autres problèmes liés à la qualité physico-chimique. Ainsi, des concentrations en
plomb telles que détectées par Emmanuel et al. (2005), ne sont pas sans effet sur la santé.
Avec un tel niveau de concentration, les concentrations sanguines en plomb atteignent un
41
niveau pathologique, le risque de perturbation du développement psychologique des enfants
exposés étant bien réel.
Par ailleurs, dans le Nord-Ouest aride, la consommation d’eau saumâtre conduit à des
problèmes d’hypertension chez ¾ de la population (Kinely D., 1986 dans Knowles, 1999).
2.6. Conclusions du chapitre 2
Ce chapitre 2 a permis de dresser un constat du secteur de l’eau en référence au triangle
Ressources – Besoins – Usages. Fidèle à la présentation des indicateurs de développement
durable selon le modèle DPSIR, nous avons complété l’analyse en abordant succinctement
l’état des ressources et des milieux et l’impact sur la santé humaine.
Tout en bénéficiant de réelles disponibilités en eau, la situation d’Haïti est assez comparable à
celles de nombreux pays en développement. Face à ce constat, l’important est maintenant
d’examiner quelles réponses en termes d’organisation du secteur ont été apportées.
42
3. Evaluation de l’organisation du secteur de l’eau
Le secteur de l’eau, avec toutes ses composantes, n’est pas inscrit dans un cadre global et
intégré qui définit l’organisation des réponses apportées par l’Etat à la population en vue de
satisfaire l’ensemble des besoins, tels que considérés dans les chapitres précédents. C’est en
priorité l’usage alimentation en eau potable (courante) qui mobilise la plupart des efforts
développés par les institutions. Nous avons tenté d’éviter une approche trop sectorielle en
présentant successivement, après la définition du cadre légal, les différents acteurs concernés
quelque soit leur domaine d’intervention. Mais on se rend compte qu’en dehors de l’usage
prioritaire de l’eau, les autres usages et fonctions (notamment la gestion des milieux liés à
l’eau) présentent peu d’intérêt. Le domaine de l’irrigation est aussi pris en compte.
Il nous paraissait opportun de nous arrêter sur trois sujets d’actualité, à savoir la formulation
de la politique de l’eau, la réforme du sous-secteur eau potable et assainissement et la
décentralisation. En effet comme de nombreux pays en voie de développement, Haïti
n’échappe pas à cette vague de décentralisation dans laquelle beaucoup d’espoirs sont placés
et qui bénéficie d’un a priori favorable de la part d’organismes internationaux, notamment de
la Banque Mondiale.
3.1. Le cadre légal
Jusqu’en 1998, on pouvait dénombrer, en matière d’environnement :
- 60 décrets ;
- 30 lois ;
- 7 décrets-lois ;
- 41 arrêtés présidentiels.
Tous ces textes, n’ayant en général pas fait l’objet de débats parlementaires, se trouvent
généralement confrontés à d’énormes difficultés d’application.
Dans le secteur de l’eau, on peut retenir les principaux anciens textes suivants :
- le décret du 20 mars 1943, en vue de la protection des sources de Thor ;
- les extraits du code rural de François Duvalier concernant les eaux de surface, le
drainage, les eaux souterraines et l’irrigation ;
- la loi du 12 juin 1974 réglementant l’usage des eaux souterraines profondes et
chargeant le département de l’agriculture des ressources naturelles et du
développement rural du contrôle de leur exploitation ;
- la Constitution de mars 1987 :
o les articles 253 à 258 sont consacrés à l’environnement ;
o les sources, rivières et autres cours d’eau font partie du domaine public de
l’Etat ;
- lois et décrets créant la CAMEP, le SNEP, les POCHEP, et organisant les Ministères
(MARNDR, MTPTC, MSPP, MDE) ;
- le Décret de 1982 sur les Communes ;
Parmi les législations en préparation, nous retiendrons particulièrement :
- le projet de décret sur la gestion de l’environnement ;
- le projet de loi-cadre sur l’eau ;
- le projet de loi-cadre sur la réforme du secteur eau potable et assainissement ;
- le projet de loi-cadre sur l’irrigation (1997) ;
43
-
le projet de loi sur la décentralisation ;
Seul le premier texte sera évoqué ci-après, les autres seront examinés par la suite lorsque nous
nous intéresserons à la réforme du secteur de l’eau et à la décentralisation.
Le projet de décret sur la gestion de l’environnement, dans sa version soumise au Conseil des
Ministres du 3 septembre 2005, consacre un volet important à la gestion de l’eau23.
Dans le Chapitre IV relatif aux eaux continentales, il est spécifié que celles-ci constituent une
ressource naturelle limitée, à usages multiples. L’Etat doit assurer une gestion intégrée
durable des ressources hydriques qui garantisse leur pérennité, leur qualité, l’accès de la
population à leurs bienfaits ainsi que la prévention des risques qui leur sont liés du fait de
phénomènes naturels ou d’activités anthropiques (article 109). Le domaine public hydraulique
naturel et artificiel est définit et sa gestion est confiée au MDE.
Nous avons également retenu quelques autres points forts qui s’inscrivent dans une approche
GIRE, notamment :
 le bassin versant est l’unité de planification pour la gestion intégrée des ressources
hydriques et leur protection ;
 il sera créé des mécanismes de concertation et de coordination en application du
principe de la gestion globale, durable, équilibrée de la ressource en eau prise de façon
unitaire et solidaire ;
 le projet de décret fixe la priorité des usages en cas de pénurie ou de conflits ;
 il reconnaît le rôle des forêts dans la gestion de l’eau ;
 il s’intéresse à la lutte contre la pollution en confiant au MDE l’établissement d’un
inventaire du degré de pollution. C’est aussi au MDE que revient la tâche d’établir des
normes de qualité pour les différents usages.
Nous verrons par la suite que ce projet de décret sur la gestion de l’environnement peut
constituer un point d’encrage pour l’organisation de la GIRE en Haïti.
3.2. Les Ministères concernés
(Sources : OPS/OMS, 2004 et Balthazar, 2005)
7 Ministères interviennent dans le secteur de l’eau, ainsi que 15 organismes et services
étatiques différents. On sent entre ses Ministères une certaine lutte d’influence par rapport au
secteur de l’eau. A titre d’exemple, lors de l’atelier de concertation ministérielle pour la
gestion des bassins versants (2000), une des questions posées aux participants consistait à
classer par ordre d’importance les ministères concernés par la gestion des bassins versants. Ce
genre de débat ne peut que susciter une certaine rivalité entre les institutions24.
Le projet de loi-cadre sur l’eau devrait permettre de clarifier la situation dès l’instant où cette
loi confiera au Ministère chargé de l’eau la mise en œuvre de la politique nationale de l’eau.
Il s’agirait en fait du Ministère de l’Environnement (MDE) qui deviendrait le Ministère de
l’Environnement et de l’Eau (MDEE).
23
Nous n’avons pu obtenir la version finale récemment adoptée en conseil des Ministres et qui doit faire l’objet
d’une publication dans le journal officiel.
24
Classement des ministères concernés par la gestion des bassins versants : au niveau de l’existant, c’est le
MARNDR qui arrive en tête, au niveau du souhaitable, le MPCE (Atelier gestion des Bassins versants, 2000).
44
Figure 14 : Champs d’intervention des Ministères dans le secteur de l’eau (Emmanuel, 2005)
MARNDR
Le Ministère de l’agriculture, des ressources naturelles et du Développement rural
(MARNDR), créé en 1843, est le Ministère de tutelle du SNRE et de divers organismes de
développement : ODVA(Vallée de l’Artibonite), ODN(Nord), ODPG (Plaine des Gonaïves),
ODNO(Nord Ouest), ODBFA(Bassin versant du Fleuve Artibonite).
Attributions du MARNDR :
- Contrôle et réglementation des ressources en eau ;
- Aménagement et exploitation des bassins versants ;
- Conception et application d’une politique nationale dans les domaines de l’agriculture,
l’élevage, des ressources naturelles et du développement rural.
Le SNRE a pour mission :
- l’établissement de bases de données concernant la gestion de la ressource en eau ;
- l’inventaire des ressources ;
- la gestion des eaux souterraines avec l’installation de piézomètres pour contrôler le
niveau des nappes ;
- la délivrance des permis de forage et d’exploitation des forages.
Lors de la rencontre de responsables de ce ministère, ceux-ci mettent en avant le suivi du
Ministère de l’Agriculture dans le développement d’une approche intégrée écosystémique, en
privilégiant une approche par bassin versant en s’appuyant sur les unités hydrographiques
constituées de 6 régions hydrographiques et 34 sous-bassins. Des informations relatives à la
gestion des milieux aquatiques et particulièrement des rivières sont diffusées par leurs
services25.
L’approche par bassin versant est préconisée. En théorie, ce ministère apparaît comme le
garant d’une politique intégrée en matière de gestion de l’eau mais en réalité, il est difficile
25
voir Connaître nos rivières pour mieux les protéger !, MARNDR, 2003
45
d’appréhender son rôle exact face aux deux usages forts que sont l’AEP et l’irrigation, même
si cette dernière dépend de ce même ministère.
Les objectifs du MARNDR en matière d’irrigation ont été défini dans un document datant de
2000. L’objectif consiste à augmenter la productivité et la production des aires irriguées et de
transférer la gestion aux usagers. Les responsabilités sont définies entre l’Etat et les Usagers.
Pour l’Etat, il s’agit d’intervenir sur les grosses réparations, construire de nouveaux
périmètres, transférer la gestion aux usagers en incitant les planteurs à s’organiser en
associations d’irrigants.
Pour les usagers, il s’agit d’assurer la gestion des périmètres (tâches courantes, budget et
entretien des infrastructures), veiller à une répartition équitable de l’eau en incluant les tâches
de police de l’eau (Politique du MARNDR pour l’irrigation, 2000).
Par ailleurs, en référence à l’adhésion d’Haïti au Programme hydrologique de l’UNESCO, le
MARNDR préconise la prise en compte des 4 priorités suivantes :
- le suivi et la gestion de la ressource ;
- la mobilisation de la ressource eau ;
- la protection de la ressource eau ;
- la culture de l’eau.
MTPTC
Le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communication (MTPTC) créé en 1943
(dernière loi organique du 18 octobre 1983) assure la tutelle de la CAMEP et du SNEP.
Attributions du MTPTC
1) Mise en place des politiques d’approvisionnement en eau et des services
d’assainissement et de coordination de l’établissement du financement et l’exécution
des investissements dans le secteur ;
2) L’étude et la planification, l’exécution, l’entretien, le contrôle, la supervision et
l’évaluation de toutes les infrastructures physiques relatives aux équipements urbains
et ruraux, aux routes et autoroutes.
MSPP
Le Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP) a été créé en septembre 1945
(dernière loi organique 28 novembre 1983).
Attributions du MSPP
1) Supervision du projet « Poste Communautaire d’Hygiène et d’Eau Potable
(POCHEP) » qui réalise des SAEP en milieu rural depuis sa création en mars 1981 ;
2) Mise en œuvre de l’assainissement de base, à travers sa direction de l’Hygiène
publique.
MPCE
Le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe (MPCE) a été créé en février
1989.
Attributions du MPCE
1) intégrer tous les programmes et projets dans une politique de planification globale à
l’échelle nationale ;
2) coordonner la coopération externe ;
46
3) intégrer l’eau, l’assainissement et la protection de l’environnement dans son
programme d’aménagement du territoire national.
MDE
Le Ministère de l’Environnement (MDE) créé en octobre 1991, existe effectivement et
légalement depuis janvier 1995.
Attributions du MDE
1) souci de préservation et de renouvellement des ressources en eau et de la protection de
l’environnement en général ;
2) élaboration d’un plan d’action pour l’environnement ;
3) actions ponctuelles de nature diverse : gestion et suivi des aires protégées et collecte
des déchets.
Le MDE est appelé à jouer un rôle important de régulateur dans la réforme de la politique de
l’eau .
Le Ministère de l’Economie et des Finances, assure la tutelle du FAES créé en 1990 pour
servir d’interface dans la gestion des prêts accordés par la BID et la Banque mondiale qui ont
beaucoup investi dans le domaine de l’eau.
MICT
Le Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT) est le Ministère de tutelle
des collectivités territoriales et de la Protection civile. Il est censé coordonner les activités des
ONG et abrite aussi l’Organisme de Surveillance et d’Aménagement du Morne de l’Hôpital
(OSAMH) et de la Direction de la Protection du Citoyen (DPC).
MENJS
Le Ministère de l’Education Nationale, Jeunesse et Sports peut aussi jouer un rôle important
en matière de GIRE.
3.3. Les opérateurs du sous-secteur « Eau et Assainissement »
3.3.1. Les Organismes Publics
Les services autonomes de l’Etat (depuis fin des années 60), suite à la séparation du service
hydraulique d’Haïti, sont constitués de deux services :
- La Centrale Autonome Métropolitaine d’Eau Potable (CAMEP) créée par le décret du
13 mai 1964. La CAMEP a pour principale mission l’alimentation en eau de la zone
métropolitaine de Port-au-Prince (Communes de Carrefour, Port-au-Prince, Delmas,
Pétion-ville). La CAMEP produit 40 millions de m³ d’eau par an pour une population
de plus de 2 millions d’habitants (soit 20 m³/hab/an).
- Le Service National d’Eau Potable (SNEP) créé par la loi du 20 août 1977 pour fournir
l’eau à 10 villes secondaires avec un financement de 13 millions de $ US provenant de
la BM et de KFW. En dehors de la juridiction couverte par la CAMEP, le SNEP est
censé exercer les missions suivantes :
o le contrôle et l’usage des eaux superficielles et souterraines ;
o l’adduction et la distribution de l’eau potable ;
o la gestion des services de l’eau potable.
47
Fonctionnement de ces deux organismes (OPS/OMS, 1996)
Critiques vis-à-vis de la CAMEP :
- mauvaise qualité de l’eau et quantité insuffisante ;
- exploitation commerciale déficitaire ;
- tarification inadéquate ;
- insuffisance de personnel et incompétences ;
- pas de gestion rationnelle ;
- manque d’organisation ;
- absence d’un système de contrôle de gestion ;
- …
Recommandations à la CAMEP :
- protection des périmètres des captages ;
- labo d’analyse à renforcer ;
- assistance technique dans la récupération des coûts ;
- lutter contre les prises clandestines ;
- organiser le personnel ;
- définir une politique de gestion rationnelle ;
- étudier l’approvisionnement à partir d’eaux de surface ;
- …
Critiques vis-à-vis du SNEP :
- coordination insuffisante entre directions et services ;
- supervision inefficace des travaux de construction ;
- absence de protection des captages ;
- manque de matériel et d’équipements ;
- gestion commerciale inefficace ;
- difficultés d’appliquer des sanctions ;
- inexistance de plan directeur d’urbanisation des villes secondaires ;
- absence de plan directeur en milieu rural ;
- qualité de l’eau à désirer (désinfection et contrôle bactériologique insuffisant) ;
- …
Recommandations au SNEP :
- former mieux le personnel ;
- utiliser des firmes privées de construction pour la supervision technique des travaux ;
- améliorer les connaissances sur l’AEP et les ressources en eau ;
- protéger les sources et captages ;
- élaborer un plan directeur de l’eau potable ;
- implanter un système de contrôle et réaliser un audit financier ;
- diminuer le ratio employés/branchement (20/100 en 1996) ;
- …
Autres organismes créés par la suite :
- Les Postes Communautaires d’Hygiène et d’Eau Potable (POCHEP) créés en 1981,
financé à 80% par la Banque Interaméricaine de Développement (6.850.000 $ US dès
sa création) a pour mission, la construction de petites adductions d’eau potable en
48
-
milieu rural où le SNEP n’intervient pas, mais, à partir de 1991, l’activité est ralentie
suite à un gel des investissements ;
Le Service National des Ressources en Eau (SNRE), créé en décembre 1980 avec
l’aide du PNUD qui apporte 8.100.000 $ US est chargé de l’inventaire de la ressource
en eau et de la régulation des eaux souterraines. Un excellent travail fut réalisé dans le
cadre de ce projet, mais les auteurs sont lucides et dans les conclusions du rapport
PNUD (1991), posent la question de savoir comment on pourra conserver les acquis
en assurant la continuité du système SNRE mis en place et son exploitation à des fins
pratiques. La réponse à cette question ne s’est pas fait attendre et rapidement avant que
l’encre du rapport ne soit sèche (à la fin du projet PNUD en 1990), le SNRE était
devenu quasi inexistant.
8 autres organismes publics interviennent aussi dans le secteur de l’eau : BME, DHP,
SMCRS, SEEUR, SGU, SPU, EDH, drainage des eaux pluviales de Port-au-Prince.
Opmerking [FR1]:
Figure 15 : Les principaux exploitants des ressources en eau (Emmanuel, 2005)
Quelques remarques relatives au fonctionnement de ces organismes publics :
1) Une grande instabilité des dirigeants ne permet pas une politique efficace. De 1986 à 2005
se sont succédés (Niyungeko, 2005) :
- 13 Présidents ;
- 24 Ministres du MTPTC ;
- 23 Ministres de la Santé ;
- 10 DG au CAMEP ;
- 9 DB à la SNEP ;
- 7 DG POCHEP.
Dans le même temps, on enregistre une déstabilisation des CAEP et un gel des
investissements issus de la coopération externe.
49
2) Les compétentes entre services se chevauchent parfois. Ainsi, SNRE et CAMEP (dans sa
zone d’intervention) sont compétents dans la gestion des eaux souterraines. La CAMEP, en
tant qu’utilisateur, peut-elle jouer le rôle de régulateur ? (Balthazar, 2005).
3) On constate un déséquilibre entre l’offre et la demande (Balthazar, 2005) :
- les systèmes de pompage et d’adduction d’eau datent de plus de 20 ans ;
- la capacité de production ne correspond plus aux besoins des populations suite à la
croissance démographique ;
- les réseaux d’adduction perdent de leur efficience en raison d’entartrage et de fuites ;
- les prises clandestines constituent des sources de contamination de l’eau et parfois, par
endroit, des prélèvements se font avant le réservoir de distribution ;
4) l’urbanisation n’est pas contrôlée et les zones de captage sont colonisées par l’habitat avec
le risque de contamination des puits et des nappes suite aux activités humaines et aux rejets
divers ;
5) Les organismes créés dépendent de financement externe ;
6) Le SNEP est responsable de la gestion des SAEP mais manque de ressources. En fait, ce
sont les CAEP qui sont les réels responsables mais avec une efficacité toute relative (sur 121
CAEP qui ont fait l’objet d’une évaluation, un seul était côté très bon, et 50 mauvais,
(Niyungeko, 2005).
7) Des schémas et des plans ont été programmés sans grand succès quant à leur élaboration et
à leur mise en œuvre effectives. En 1985, par exemple, la CAMEP s’engage dans un Schéma
Directeur d’Approvisionnement en Eau Potable de la communauté urbaine de Port-au-Prince,
plus récemment, la métropole hérite d’un Plan Directeur d’Assainissement.
8) Le personnel de ces institutions publiques est généralement sous payé et engagé sous un
statut contractuel précaire. On enregistre régulièrement un départ des compétences vers des
structures internationales ou ONG pour des postes mieux rétribués, d’où l’intérêt de stabiliser
le personnel à long terme.
3.3.2. Les Eglises et les ONG
Par le passé, ce sont essentiellement les Pères Missionnaires qui ont apporté leur contribution
au développement du pays et à la réduction de la pauvreté. Considérant la composante eau
comme facteur de développement en termes d’accès à la ressource, de nombreux ouvrages
furent installés par les églises présentes. Actuellement, celles-ci poursuivent leur œuvre et
assurent encore dans certaines régions un rôle moteur d’acteurs de développement (à la
Gonâve ou dans le bassin versant de la rivière Moustiques par exemple).
A cette contribution de la sphère religieuse, s’ajoute l’intervention des ONG. Rien que dans le
secteur de l’eau, leur nombre varie de 30 à 200 (selon les rapports) : 50 d’après le rapport de
suivi WASAMS, 2002 de l’OMS dans le secteur eau et assainissement. PROTOS est souvent
cité en tant qu’ONG particulièrement active et compétente.
Dans ce même rapport WASAMS 2002, Comité Protos Haïti(CPH) est repris dans les
principales ONG parmi les plus performantes, tandis que PROTOS n’est pas cité.
Voir aussi documents de la Plateforme des ONG en Eau Potable et Assainissement (PEPA).
Les ONG sont particulièrement actives en milieu rural avec des actions pas toujours
coordonnées, des investissements à court terme, sans un service de gestion et d’entretien à
long terme. Selon Emmanuel et Lindskog (2002), la mission déterminante des ONG serait
l’information, l’éducation et la communication.
50
Figure 16 : Les bases du premier moulin à vent pour le pompage de l’eau installé à la Gonâve
par SCH (photo F. Rosillon, nov. 2005)
Un projet souvent pris en référence …
Un des projets phare régulièrement cité est celui mis en œuvre par le GRET qui a pu
développer une construction négociée de mode de gestion en terme d’approvisionnement
en eau. Ce projet financé par l’Union européenne est considéré comme un des rares
exemples de véritable réhabilitation d’un service public. Initié à partir de 1995 dans 14
quartiers défavorisés de Port-au-Prince (200.000 habitants), le projet a été appliqué en
2001 à AQUIN et MIREBALAIS. Cette approche s’appuie sur deux principes :
- une analyse technique, sociale et politique ;
- une mobilisation des acteurs.
A Port-au-Prince, le GRET a pu mettre en place un système de distribution par bornesfontaines publiques payantes, gérées par des associations de quartier. La CAMEP fournit
l’eau à l’entrée du quartier et la facture à un prix de gros (8 gdes par m³), un vendeur
d’eau salarié distribue l’eau à chaque borne-fontaine au prix de 25 gdes par m³, un comité
récolte l’argent et paye les factures (CAMEP, rémunérations des vendeurs, réparations,
désinfection et petits investissements). 20 Km de réseau ont été construit et alimentent 60
bornes-fontaines.
Pour en savoir plus sur cette expérience : L’ingénierie sociale : Une approche nouvelle et performante pour
la participation communautaire dans les projets de développement. Installation d’un réseau d’eau potable
dans quelques quartiers de Port-au-Prince (Brailowsky A. , Petitpas F., 2002).
A Aquin et Mirebalais, le projet consiste en la réhabilitation technique et à l’extension des
réseaux et en la mise en œuvre d’un dispositif de gestion locale articulé avec le service
central du SNEP. A noter un réel partenariat entre le GRET et le SNEP.
51
Un cadre de cohérence pour les interventions des ONG peut être trouvé dans le PEPA et le
CCI. La mise en place de la plateforme des Organisations du Secteur Eau Potable et
Assainissement (PEPA) a pour objectif de coordonner les activités des ONG du secteur en
bénéficiant de l’appui technique de l’OPS/OMS et de l’URSEP.
Le CCI, pour ne pas créer plus de désordre …
Le Cadre de Coopération Intérimaire (CCI) mis en place en mars 2004 est coordonné par le
gouvernement avec l’appui de la communauté internationale. Le CCI est composé de
représentants de la CAMEP, SNEP, POCHEP et URSEP, de représentants d’ONG et de la
Banque Mondiale, UNICEF, BID et OPS/OMS.
Le CCI précise le cadre de référence pour toute assistance à Haïti et accompagne l’agenda
politique en concentrant ses activités en 4 axes dont la relance économique et l’accès aux
services de base. Le CCI dresse un état des lieux par secteur et redéfinit les stratégies et les
priorités pour la période de transition avec la budgétisation par thèmes et activités (voir le
rapport du 24/5/2004 du groupe thématique : eau potable et assainissement).
3.3.3. Les firmes privées
Plusieurs firmes de génie civil travaillent dans le domaine de l’eau (Balthazar, 2005) et
interviennent en milieu rural et urbain (GATAPHY, LGLSA, Haïti FORATECH, …). Ce
secteur peut avoir sa place dans la mise en œuvre de la GIRE pour autant que l’Etat assume
son rôle de régulation et de contrôle des activités déployées.
3.3.4. Les acteurs locaux
Inscrit dans la culture haïtienne, la participation communautaire est particulièrement active
dans le domaine de l’eau. Dans certaines communes, derrière chaque point d’eau se cache un
comité local de gestion dont l’efficacité est variable en fonction de la personnalité du(des)
responsable(s). Divers types de comités locaux ont été mis en place : CAEP, CAEPA,
COCEP, COCEPA, COSEP, … 10 ans après leur création en 1969, les CAEP étaient au
nombre de 400.
Par ailleurs, certains notables, organisations locales, religieux, représentants des collectivités
identifient des besoins et introduisent une demande vers les organismes d’aide. (Balthazar,
2005). Après la réalisation des projets, ces structures locales ne suivent pas toujours la
gestion des projets.
Dans le cadre de la politique de décentralisation, ces comités locaux, proches des Maîtres
d’ouvrages communaux, devraient être renforcés.
3.4. La réforme du secteur eau
15 institutions ou services nationaux, dépendant de 5 ministères différents, une cinquantaine
d’ONG et organisations caritatives interviennent dans le secteur de l’approvisionnement en
eau sans pratiquement aucune concertation avec un financement provenant de nombreux
bailleurs de fonds sans davantage de coordination. En milieu rural, des rivalités peuvent
parfois naître entre intervenants nationaux et étrangers.
Ce constat a conduit les autorités nationales à plusieurs tentatives depuis 1977 de créer un
organe national de coordination sectorielle :
-1977 : premier projet de création du Conseil National de l’Eau (CONAE) ;
52
- 1979 : CEE ;
- 1980, lors de la décennie de l’eau : création du Comité National d’Action pour la Décennie
Internationale de l’Eau Potable et de l’Assainissement (CONADEPA) pratiquement disparu
fin 1990 ;
- 1989 : CONADEA ;
- 1992 : Comité de Coordination des activités d’Eau Potable (CCEP) par le PNUD, l’UNICEF
et l’OPS/OMS ;
- 1995, dans le livre blanc de l’eau du MTPTC : projet de décret pour créer le Grand Conseil
de l’Eau (GCE) dont la mission serait de coordonner effectivement les actions menées par les
institutions spécialisées. Cette structure devra aussi aider à harmoniser les lois qui régissent
les activités de ces institutions.
En 2002, on évoque la création du Conseil National de l’Eau et de l’Assainissement (CNEA)
placé sous la responsabilité du premier Ministre et qui devrait assurer la coordination
institutionnelle.
Ce souci d’une meilleure coordination du secteur de l’eau apparaît dans les deux projets de loi
évoqués ci-après.
3.4.1. Un projet de loi-cadre sur l’eau
En février 1997, sur demande du MDE, un accord fut signé avec la BID pour un Programme
de Formulation d’une Politique de l’Eau (PFPE) dont les objectifs étaient :
- d’établir un bilan des ressources en eau grâce à un support SIG ;
- d’élaborer une loi-cadre de l’eau et un plan d’actions pour la gestion des ressources en
eau.
Sous l’égide du Ministère de l’Environnement, ce programme de formulation de la politique
de l’eau a donc été élaboré. Dans le rapport principal de 1999, après la présentation de la
problématique de l’eau en Haïti, sont explosés les principes retenus pour servir de base à la
politique de l’eau conduisant au projet de loi-cadre sur l’eau (3ème version, 1999).
Les objectifs principaux de la politique nationale de l’eau ont été définis, à savoir :
- assurer la sécurité quantitative et qualitative de l’approvisionnement en eau potable ;
- soutenir le processus de développement ;
- garantir la participation de tous les groupes impliqués ;
- assurer en permanence la conservation des ressources en eau ;
- protéger contre et/ou réduire la pollution ;
- favoriser une utilisation économe de l’eau.
Cette politique s’articulera autour de trois grands axes :
1- l’élaboration d’un cadre réglementaire cohérent ;
2- la mise d’une place d’une structure organisationnelle ;
3- le développement et la gestion rationnelle de l’eau.
Ce dernier axe se traduit par l’acquisition de connaissances avec l’élaboration de cadastres
hydrauliques, l’élaboration de schémas d’aménagement des ressources en eau et du plan
national des ressources en eau, la mobilisation du potentiel des ressources basée sur la
régularisation des eaux de ruissellement, le développement des eaux souterraines et de
transfert de bassin.
Trois échéanciers ont été proposés :
- à 5 ans : pour des actions à court terme devant permettre la finalisation et la
promulgation de la loi-cadre ainsi que la préparation d’un draft de code de l’eau, la
mise en place opérationnelle des institutions et l’élaboration des schémas et plan
national ;
53
à 15 ans : pour finaliser le code de l’eau, approfondir les connaissances sur les
ressources et les usages, entamer des actions de développement et de gestion des
eaux ;
- à 30 ans : pour poursuivre les actions de développement et de gestion des ressources
en eau.
Un budget estimé à 25 millions de $ US réparti en 5 millions pour le court terme, 8
millions pour le moyen terme et 12 millions pour le long terme est proposé.
-
Projet de loi-cadre sur l’eau (extraits)
Article 1
L’eau fait partie intégrante du patrimoine commun de la République. Sa protection, sa
mise ne valeur et le développement de la ressource utilisable constituent un devoir pour
tous les citoyens, y compris pour l’Etat et les établissements qui en dépendent ainsi que
pour les collectivités territoriales.
L’usage de l’eau s’exerce …. dans le cadre de la solidarité entre les utilisateurs.
Article 2 :
Les dispositions de la présente loi ont pour objet la gestion globale, durable et équilibrée
de la ressource en eau. (art. 5 : « … prise de façon unitaire et solidaire »)
Cette gestion vise à assurer :
- la préservation des écosystèmes aquatiques et marins ;
- la protection contre toute forme de pollution et la restauration de la qualité de l’eau
…;
- le développement et la protection de la ressource en eau ;
- la promotion de l’eau comme ressource économique, la lutte contre le gaspillage et la
surexploitation, la répartition de cette ressource, de manière à satisfaire ou à concilier,
lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences :
o de la santé publique et de la salubrité ainsi que de l’alimentation en eau potable
de la population ;
o de la conservation, du libre écoulement de l’eau et de la protection contre les
inondations ;
o de la lutte contre l’érosion des sols ;
o de l’agriculture, de la pisciculture, de la pêche maritime, de la production
d’énergie, du tourisme ainsi que de toutes autres activités humaines légalement
exercées.
Article 35 :
Il est interdit de jeter des cadavres humains ou d’animaux dans les eaux du domaine public
hydraulique, de les enfouir ou de les ensevelir aux abords des puits, fontaines, abreuvoirs
publics ou autre ouvrage de captage.
Article 53 : (cité en entier)
A l’initiative de l’administration chargée de l’eau, il peut être créé sur un bassin ou sur un
sous-bassin hydrographique ou sur un système aquifère désigné comme « pilote », une
commission de bassin ou d’aquifère associant à parts égales des représentants de l’Etat, des
représentants des collectivités territoriales et des représentants des diverses catégories
d’utilisateurs de la ressource en eau.
54
Elle est chargée d’émettre toute proposition de nature à permettre la résolution des conflits
d’usage.
Les conditions d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire.
Autres éléments pris en compte :
- des aspects fonciers avec la perception de redevances eaux usées et prélèvements ;
- des servitudes et domaine public ;
- des zones de sauvegarde de la ressource en eau ;
- l’assainissement du milieu naturel :
- la lutte contre l’érosion ;
- l’entretien des cours d’eau dans le respect des écosystèmes aquatiques ;
- la lutte contre les inondations ;
- la mise en place d’une police de l’eau ;
- la définition des unités hydrographiques.
Concernant ce dernier point, l’Etat est partagé en grandes unités hydrographiques naturelles
dénommées bassins ou sous bassins ou systèmes aquifères (dénomination et délimitation de
ces unités à fixer par voie réglementaire).
Enfin, en termes de planification, il est prévu l’élaboration d’un plan national accompagné de
plans locaux d’Aménagement et de Gestion pour chaque grande unité hydrographique. Mais
visiblement, cet excellent travail préparatoire à la formulation de la politique de l’eau n’a pas
été poursuivi. Abandonnant (temporairement) le secteur de l’eau dans son ensemble, c’est le
sous-secteur spécifique eau potable et assainissement qui fait maintenant l’objet d’une
réforme.
3.4.2. La réforme du sous-secteur eau potable et assainissement
Face à une cacophonie institutionnelle, le MTPTC a créé en 1996 une Unité de Réforme du
Secteur de l’Eau Potable (URSEP) dans le but de coordonner la mise en place de la réforme.
Il s’agissait dans un premier temps de préparer une loi-cadre du sous-secteur eau potable et
assainissement en redéfinissant l’organisation institutionnelle. Cette structure avait aussi pour
mission de gérer la phase de transition avant l’application de cette nouvelle loi-cadre.
La séparation des fonctions de planification et de régulation de celle de maîtrise d’ouvrage et
de fournitures de service était une priorité. Cet objectif a débouché vers la création du
CREPA, chargé de la réglementation des actions des intervenants (maîtres d’ouvrages et
exploitants des SAEP), de l’ONEPA qui résultera de la fusion du SNEP, de la CAMEP et du
POCHEP. L’ANGRE, sous la tutelle du Premier Ministre, intègre la SNRE dans des missions
d’évaluation, planification, gestion et protection.
Le MDEE devient un ministère transversal qui coordonne les activités de ministères verticaux
(Agriculture, Travaux Publics, Santé). L’URSEP favorisera l’élaboration d’un Schéma
Directeur de Développement et de Gestion des ressources en eau qui définira les grandes
lignes stratégiques et les échéanciers (OPS/OMS, 2005).
La loi-cadre du sous-secteur de l’eau potable et de l’assainissement définit quelques lignes
directrices :
- améliorer l’accès à l’eau et à l’assainissement ;
- promouvoir une gestion locale à travers une décentralisation des activités ;
- faire participer les populations et la société civile ;
- organiser la gestion de l’eau dans une perspective de développement durable ;
- mettre en place de nouvelles structures.
55
Figure 17 : Structure organisationnelle du secteur eau sous-secteur eau potable et
assainissement, draft, URSEP, novembre 2005
Quelques éléments et commentaires relatifs à la réorganisation institutionnelle :
De nombreux éléments de cette loi-cadre sont en fait un copier-coller de la politique française
de l’eau. Au-delà de la question d’un financement durable du sous-secteur, nous pouvons
mettre en exergue :
- la création d’une structure faîtière dont l’absence a très souvent été décriée par les
observateurs : le CONADE, dépendant du premier ministre (PRIMATURE) ;
- une séparation des deux missions : la maîtrise d’ouvrage et la fourniture de services et
la gestion et la régulation26 ;
- une répartition des compétences entre deux Ministères : le MTPTC et MDEE, avec
une possible lutte d’influence entre les deux ;
- le MARNDR, ministère de tutelle du SNRE, responsable de l’inventaire des
ressources en eau et de la gestion des eaux souterraines est évincé de la
réorganisation27 ;
- confier aux municipalités et aux collectivités territoriales la maîtrise des ouvrages avec
la possibilité de contrats de gestion ou d’affermage, de concessions avec d’autres
opérateurs (publics ou privés). Il est important de préparer les communes à assumer
leur rôle de Maîtrise d’ouvrage. Celles-ci seront-elles à la hauteur de leur tâche en
termes de compétences humaines et de moyens financiers ? Une phase de transition
s’avère indispensable avant de transférer les compétences tout en veillant à de bonnes
relations entre communes et CAEP (Comité d’Adduction d’Eau Potable) ;
- la promotion d’une approche par bassin ;
26
A tous les niveaux (Etat, Bassin, sous-bassin, communes) il conviendra de conserver la séparation des
missions de régulation et de maîtrise d’ouvrage (voir les recommandations de Balthazar, 2005, concernant le
niveau communal qui suggère une structure de contrôle social et une structure d’opération et de gestion).
27
Quel va être la réaction du MARNDR, le grand absent de la reformulation de l’organisation du sous-secteur
eau potable et assainissement ?
56
-
des structures de participation au niveau du bassin (CCB) et au niveau local (Comités
locaux).
Signalons enfin que cette réforme a inspiré PROTOS dans un projet développé à Camp Perin
avec un financement de l’Union européenne et aussi les projets du GRET à Mirebalais et
Aquin évoqués précédemment.
3.5. Les opérateurs concernant l’usage « irrigation »
La gestion de ce sous-secteur a subi trois évolutions (GRI, 2005) :
- calqué sur la période coloniale, les systèmes d’irrigation sont restés longtemps sous
l’autorité de grands planteurs ;
- la période 1953-1980 a consacré une reprise par l’Etat de la gestion ;
- depuis, une gestion collective au niveau local se développe timidement, celle-ci
devrait être amplifiée à l’avenir (voir aussi le projet de loi-cadre en préparation depuis
1997).
Autre second sous-secteur fort dans le domaine de l’eau, l’irrigation fait l’objet actuellement
de réflexions en vue de préparer le transfert de la gestion des systèmes irrigués vers des
associations d’irrigants. Il n’existe toujours pas de loi-cadre, seuls quelques articles du Code
rural de 1963.
C’est le MARNDR, via la Direction des Infrastructures Agricoles (DIA) qui possède la tutelle
du secteur irrigation - drainage. Des services déconcentrés de ce ministère existent au niveau
départemental avec les Directions Départementales Agricoles (DDA) et au niveau communal
avec les Bureaux Agricoles Communaux (BAC). Rappelons qu’actuellement 80.000 ha sont
irrigués gravitairement, le potentiel serait de 170.000 ha sachant qu’il pourrait y avoir des
possibilités jusqu’à 400.000 ha en mobilisant des techniques modernes (par aspersion, au
goutte à goutte) plus sophistiquées.
Les redevances sont difficiles à percevoir. A titre d’exemple, celles-ci sont fixées à 250
gourdes par carreau et par an au niveau du périmètre irrigué de 6.000 ha à l’Arcahaie.
La gestion des terres irriguées est organisée de trois manières (GRI, 2005):
- 30 périmètres ont déjà été transférés aux associations d’irrigants ;
- 150 sont gérés par des associations paysannes, des groupes plus ou moins organisés et
reconnus, des anciens syndics ;
- les grands systèmes comme la Vallée de l’Artibonite, malgré la présence de l’ODVA
sont en fait sous la loi des irrigants non encore organisés.
L’organisation du secteur fait l’objet de nombreuses critiques. Celui-ci donne une impression
de désordre :
- les données pédologiques et hydro-climatiques existantes ne permettent pas une prise
de décision technique rationnelle ;
- en termes de ressources humaines, le cadre du personnel se vide avec une fuite des
personnes compétentes vers le privé ;
- les systèmes fonctionnent avec un taux d’efficacité de l’ordre de 50% ;
- techniquement, ceux-ci présentent de nombreuses déficiences avec une sousvalorisation de l’eau et une utilisation non rationnelle. On note également une
57
-
-
inadéquation entre les débits disponibles et les surfaces à irrigués et les besoins des
plantes d’où un gaspillage important ;
des détournements de prises d’eau et des utilisations illégales des ressources ;
une mauvaise prise en compte des activités en période critique de sécheresse ;
des dégradations régulières des systèmes mis en place, suite à un vieillissement des
dispositifs et une absence d’entretien, au vandalisme ou à des conséquences de
catastrophes naturelles ;
une répartition de l’eau qui conduit à des conflits entre irrigants ;
les comités sont mal organisés avec un manque de compétences des responsables ;
des difficultés d’appliquer les règlements et de percevoir les redevances lorsqu’elles
ont été décidées (les agriculteurs refusent souvent de payer les redevances) ;
la création d’organisations parallèles aux comités principaux ce qui rend ce secteur
encore plus chaotique ;
manque de soutien de la part de l’Etat et du MARNDR aux autorités locales ;
le manque de coordination entre les DDA - BAC et le Service d’Irrigation et de Génie
Rural (SIGR), ainsi qu’avec les projets des ONG ;
le secteur subit également la conséquence de la dégradation des bassins versant, la
perte de débits des rivières, l’ensablement des canaux, l’augmentation des
ruissellements, …
La volonté de transfert vers les organisations d’irrigants a été encore réaffirmée lors du
colloque organisé par le GRI (Actes, janvier 2005). Se posait notamment la question
d’associations d’irrigants forcées ou libres avec adhésion volontaire des usagers. Ce transfert
devrait s’accompagner de l’application d’une série de recommandations afin de :
- améliorer les connaissances et favoriser une meilleure circulation de
l’information entre acteurs concernés ;
- renforcer les capacités de gestion au niveau local ;
- revoir l’encadrement du secteur par le MARNDR et le renforcement des BAC ;
- rendre les systèmes plus performants en vue d’une utilisation plus rationnelle de
l’eau ;
- prévoir une structure de médiation en cas de conflits et un service de contrôle ;
- promouvoir une gestion plus écosystèmique des bassins versants ;
- recourir à des techniques plus performantes ;
- conserver l’eau plus longtemps (création de lacs collinaires) ;
- mettre en place un meilleur système de perception des redevances et un contrôle des
pratiques ;
- assurer une meilleure coordination entre tous les intervenants (Etat, collectivités
locales, comités d’irrigants, ONG, bailleurs de fonds, …)
- recadrer l’organisation de ce secteur en cohérence avec la politique de la
décentralisation et de la déconcentration des services de l’Etat.
Le GRI a été créé par CICDA. Cette structure à vocation limitée, s’est convertie en
FONHADI. Il s’agit d’une Plate-forme d’échange entre acteurs (ONG, Privés, Associations
paysannes, les Ministères étant invités) afin de systématiser les expériences de transfert, de
vulgariser la politique du Ministère et d’appuyer les associations. FONHADI bénéficie d’un
financement du FIDA pour contribuer à la définition d’un cadre légal et est soutenu par VSFCICDA. Notons qu’une autre Plate-forme dénommée PAD (Plate-forme Agriculture Durable)
créée par le passé n’existe plus.
58
Remarque :
- La réhabilitation et le développement de petits périmètres irrigués avec une autogestion de
proximité n’est-elle pas une voie à explorer ? (un projet financé par le FIDA, le Fonds de
l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole et l’Agence Française de Développement,
1996-2003 a porté sur des périmètres de 30 à 500 ha. En juin 2002, 13 petits périmètres
étaient réhabilités, une surface de 1100 ha était effectivement irriguée28.
3.6. La gestion des cours d’eau et des bassins versants
Seul le MARNDR semble avoir le souci de la gestion des cours d’eau, à travers notamment
les organismes de développement cités précédemment (ODVA,…). Cette compétence
reviendra aux communes dans le cadre de la décentralisation et de la réforme du secteur.
La gestion des bassins versants est également une préoccupation du MARNDR mais pas
seulement de ce Ministère. En juillet 2000, 4 Ministères (MARNDR, MPCE, MICT, MDE)
s’associaient pour organiser un atelier de concertation ministérielle pour la gestion des bassins
versants. Les 10 recommandations ci-après, traduisent l’intérêt porté par ces institutions à la
gestion des bassins dans une approche intégrée :
- inscrire la gestion des bassins dans un contexte montagne-mer ;
- considérer la question foncière comme un passage obligé pour une gestion durable des
BV ;
- faire du concept de bassin versant une priorité stratégique et un outil de politique ;
- reconnaître l’importance du diagnostic local en tant qu’outil de gestion ;
- prendre en compte la composante population ;
- prendre en compte les modes d’occupation de l’espace ;
- prendre en compte les impacts environnementaux lors de la construction de routes en
montagne ;
- recommander des mesures additionnelles (en lien avec aménagement du territoire,
décentralisation, …) ;
- fixer un certain nombre d’attributions aux Ministères sectoriels ;
- mettre en place un mécanisme permanent de concertation multisectorielle en vue
d’une politique nationale de gestion des BV.
Le comité de suivi mis en place au lendemain de cet atelier ne s’est-il pas limité à la
publication des actes alors qu’il s’agissait aussi pour lui de contribuer à formuler la politique
nationale de gestion des bassins versants (voir dernière recommandation ci-dessus) ?
Par ailleurs, la PGBV (Plate-forme des institutions travaillant dans la Gestion des Bassins
Versants), active lors des tables-rondes organisées en 1998-2000 dans le cadre de la définition
de la politique de l’eau n’est plus fonctionnelle.
L’Artibonite, une rivière transfrontalière …
L’Artibonite, prenant sa source dans le pays voisin représente une rivière stratégique pour
Haïti. Elle arrose 40% des périmètres irrigués et permet de produire 95% de l’ensemble de la
production hydroélectrique de tout le pays et représente un patrimoine important(Haïtipress).
28
IFAD, 2002, Projet de Réhabilitation des petits périmètres irrigués (PPI), www.ifad.org, 11/01/2006.
59
Un accord international datant de 1920 existe avec la République Dominicaine. Celui-ci
devenu obsolète, porte sur une gestion commune de l’Artibonite et des rivières Massacre et
Pedernales. Il s’agit de veiller à la protection des rivières contre la pollution, et de réglementer
les aspects qualitatifs et quantitatifs. Mais le principal enjeu concerne les potentiels de
production hydroélectrique qui pourrait devenir dans le futur une pomme de discorde entre les
deux Etats.
Le projet conjoint du barrage international de “Dos Bocas” porte sur la construction d’une
centrale hydroélectrique de 90 Mw dans le but de fournir 225 Gwh d’électricité aux deux
nations sœurs sur une base égale et/ou égalitaire. On parle aussi d’un projet de construction de
trois barrages hydro-électriques qui auraient été proposés par une fondation américaine
(Vaughn, S.d.).
République Dominicaine
République d’Haïti
Irrigation, Ha
Actuel
1 200(1)
Futur
45 000
Actuel
40 000
Futur
50 000(2)
Hydroélectricité, Mw
-
ind.
45
229
Pêche, T.M.
-
-
91
240
Projets d’Eau Potable
en négociation
-
en négociation -
Produits Ecotouristiques
faibles
Domaine de mise en
valeur
faibles
moyens
élevés
Légende:
(1) Rivière Macasia et autres sources hors Artibonite
(2) Rivière principale et l’ensemble des vingt affluents en Haïti
Tableau 15 : Etapes de mise en valeur de la rivière Artibonite des deux côtés de la frontière
(Victor, 2002 ???)
3.7. La décentralisation
Les responsabilités du conseil municipal sont définies par la constitution de 1987 :
- article 74 : le conseil municipal est un gestionnaire privilégié des biens du domaine de
l’Etat dans sa commune (les systèmes d’adduction d’eau potable entrent dans cette
catégorie, Balthazar, 2005) ;
- article 71 : chaque conseil municipal est assisté à sa demande d’un conseil technique
fourni par l’Administration centrale.
Avant-projet de Décret définissant le cadre général de la Décentralisation, les principes de
fonctionnement et d’organisation des Collectivités Territoriales Haïtiennes29
29
(2ème version, corrigée à partir des suggestions reçues au 9 novembre 2005)
60
Le Lire III relatif aux compétences et aux moyens d’action des collectivités territoriales
méritent quelques attentions à travers les points forts suivants :
- article 60 : les collectivités territoriales participent à la mise en valeur des ressources
naturelles et à l’amélioration du cadre de vie de la population ;
- articles 67 à 69 : communes, sections communales et départements héritent
notamment de compétences en matière d’aménagement du territoire, gestion du
domaine foncier, aménagement urbain ;
- articles 70 à 72 :
o à la section communale, reviennent des compétences dans la lutte contre
l’érosion, la promotion de pratiques écologiques, la protection de sources et
cours d’eau ;
o la commune hérite de compétences en matière d’élaboration d’un Plan
Communal d’Action pour l’Environnement, de protection des ressources en
eaux de surface et souterraines, de l’assainissement ;
o le département quant à lui a en charge la vérification des études d’impact
relatives aux grands projets ;
- la section 4 « santé et hygiène » confie aux collectivités territoriales une série de
compétences relatives à la mise en place de structures de santé, à la réglementation
concernant l’hygiène, la salubrité et la prévention des maladies, à la participation à des
campagnes de sensibilisation, … autant de compétences pour lesquelles le secteur de
l’eau sera amené à jouer un rôle capital.
- la section 11 traite de l’eau et de l’électricité :
o la section communale reçoit la compétence suivante :
 construction et gestion de fontaines publiques ;
o la commune reçoit les compétences de :
 production et distribution de l’eau potable ;
 réalisation et gestion de puits, forages et de bornes-fontaines ;
 participation à l’élaboration et à la mise en œuvre du schéma communal
d’adduction d’eau ;
o le département participe à l’élaboration des normes nationales
d’approvisionnement en eau ainsi qu’à l’élaboration du schéma directeur
départemental d’adduction d’eau.
Remarques :
- Compétences figurant dans la version précédente de l’avant-projet de décret et retirées dans
la version de novembre 2005 :
- La section communale est amenée à participer à la protection et à l’entretien des
sources et à la conservation des cours d’eau ainsi qu’à la réalisation et à l’entretien des
retenues, des systèmes d’irrigation, des puits et forages ;
- La commune réalise et entretient des retenues, barrages, puits et forages d’envergure
communale.
- Afin de séparer les missions d’opération et de gestion (maîtrise d’ouvrages et mise en
œuvre), des missions de régulation et de contrôle social, il est question que l’alimentation en
eau soit organisée en s’appuyant sur deux structures communales (Balthazar, 2005) : une
structure de contrôle social (qui peut être constituée de bénévoles) en matière de tarification,
garantie de qualité, gestion et une structure d’opération et de gestion qui serait chargée du
fonctionnement, des réparations et du traitement de l’eau. Mais qui devrait assurer les
investissements ?
61
- On remarque que c’est essentiellement le secteur de l’approvisionnement en eau qui est pris
en compte, confirmant par là, à l’échelon local cet usage fort déjà prioritaire au niveau
national. L’approche GIRE est peu perceptible.
Les pièges de la décentralisation
La décentralisation consacre un transfert de responsabilités de l’Etat vers les communes dans
des matières où l’Etat a été incapable d’assumer pleinement ses responsabilités. Là où l’Etat
n’y est pas parvenu, comment les communes pourraient-elles y parvenir alors que même les
compétences et les moyens minimums pour assurer une gestion efficace sont loin d’être
garantis ?
Si la légitimité de l’Etat a été mise en doute pendant ces dernières années, qu’en est-il de la
légitimité des responsables locaux ? Une relation de proximité et de confiance plus forte entre
citoyens et mandataires locaux peut être un avantage mais cette situation ne posera-t-elle pas
un problème lorsqu’il s’agira de mettre en application des mesures coercitives de contrôle de
pratiques ? Par ailleurs, des rivalités locales entre personnalités influentes à l’échelon
communal ou de la section ne sont-elles pas à craindre ? Enfin, la gestion locale de l’argent,
en bon père de famille, doit reposer sur des règles strictes et transparentes qu’il conviendra de
définir démocratiquement.
La voie vers la décentralisation, souhaitée par Haïti, peut s’appuyer sur une coopération SudSud. L’exemple de décentralisation mise en place au Bénin et les expériences en matière de
gestion communautaire de l’eau peuvent inspirer les autorités haïtiennes30.
La décentralisation en marche …
Récemment (février 2005), le Gouvernement de Transition vient d’adopter 5 importants
décrets devant constituer la Charte des collectivités territoriales. Il s’agit:
1.
d’un décret définissant le cadre de la décentralisation, les principes de fonctionnement et
d’organisation des collectivités territoriales ;
2. d’un décret portant sur l’organisation et le fonctionnement de la Section communale ;
3. d’un décret portant sur l’organisation et le fonctionnement de la Commune ;
4. d’un décret portant sur l’organisation et le fonctionnement du Département ;
5. et d’un décret sur la fonction publique territoriale.
3.8. Le financement du secteur de l’eau
La croyance selon laquelle l’eau est un don de Dieu peut parfois représenter un frein au débat
sur le financement des services de l’eau, que ce soit en termes d’alimentation en eau courante
ou en irrigation.
Balthazar(2005) a identifié quatre tendances de tarification concernant le sous-secteur eau
potable :
1- le choix du tout payant : toute eau est payée quel que soit le système d’approvisionnement
(cas de la CAMEP avec une facture sur base forfaitaire pour les prises domiciliaires et une
facturation de la consommation réelle avec compteurs d’eau dans les quartiers défavorisés) ;
30
Voir Hydraulique villageoise et stratégies de développement endogène en milieu rural en Afrique: Un exemple
de gestion communautaire des points d’eau potable au Bénin, Georges ALE
62
2- un système mixte : branchements privés facturés et fontaines publiques gratuites (ou forfait
mensuel faible par famille) ;
3- paiement volontaire avec par exemple une contribution volontaire de 10 gourdes par mois
au niveau des POCHEP ;
4- le tout gratuit délivré par des autorités locales influentes.
Une étude sur la propension à payer a été développée par les mêmes auteurs. La propension
des consommateurs à payer ne dépend pas seulement de leurs conditions économiques. Elle
résulte de nombreux autres facteurs dont l’option institutionnelle choisie, l’acuité du besoin et
les sources alternatives d’approvisionnement, le choix technologique, l’historique de la zone
considérée dans le domaine de la fourniture de services publics, la crédibilité des instances de
gestion. En fait, on remarque que les différents opérateurs imposent des formules différentes
sans intégrer le contexte social. Par ailleurs, faire financer les investissements par les usagers,
est-ce encore pertinent dans le contexte actuel ? (HydroConseil, 2005)
Quelques chiffres en terme d’investissement en EP (OPS/OMS, 2005).
En 2003, le total des investissements était de 5.370.410 $ US mais d’autres chiffres répartis en
milieu urbain et rural sont supérieurs :
- pour la zone métropolitaine :
o la CAEP a investi pour 262.710 $ US pour désservir 150.000 habitants ;
o le secteur privé pour 863.600 $ US pour désservir 470 habitants ;
- pour les villes secondaires : 3.104.080 $ US dont AGCD-PROTOS pour 900.000 $ US
exécuté par le SNEP, les principaux bailleurs de fonds étant le gouvernement haïtien,
l’AGCD, FAES, BID, le secteur privé.
- En milieu rural :
o 16 bailleurs ont accordé 3.529.072 $ US dont FSE/AGCD pour PCH/PROTOS
pour un total de 450.000 + 620.000 $ US.
Coût de l’eau en zone métropolitaine désservie par la CAMEP :
- si raccordement à la maison :
- maison résidentielle :
1ère tranche de 0 à 15 m³ : 447,5 gourdes ;
au-delà : 245,5 gourdes par m³ supplémentaire
- bâtiment commercial et industriel : de 0 à 5000 m³ : 40 gourdes le m³
de 5001 à 15000 m³ : 32,5 gourdes le m³
à partir de 15001 m³ : 23,75 gourdes le m³.
Le coût de l’eau est très variable et varie en fonction du type de fournisseur, des périodes de
distribution et de la zone d’habitation.
Prix
CAMEP
Usagers
des
kiosques
Clients
Revendeur Revendeur
1
2
Revendeur
3
Quartier
8gdes/m3
Défavorisé
Comité d’eau
26,5gdes
53gdes/m³
265gdes/m³ 530gdes/m³
Cite militaire
32,5gdes
53gdes
Tableau 16 : Prix de l'eau (par m³) fournie par la CAMEP (Enquête réalisée par Balthazar, 2005)
63
La CAMEP fournit l’eau au comité de gestion des quartiers défavorisés à 8gdes/m³. Le comité
distribue l’eau des kiosques à 0,5gde / le seau de 5 gallons appelé bokit (soit 26,5gdes/m³).
Zone
Centre ville
Christ Roi
Lalue
Delmas
Musseau
Pétion Ville
Laboule
Thomassin
Fontamara
Camion en
gdes
1500
1500
1250
1500
1500
1750
2500
2500
2250
m3
Revendeur 1 /citernes
Revendeur 2/transporteurs
132,50
132,5
110,42
132,5
132,5
265gdes/m3
265gdes/m3
265gdes/m3
530/m3
530gdes/m3
220,85
220,85
Tableau 17 : Prix de l'eau dans la zone métropolitaine pratiqué par des fournisseurs privés
(Enquête réalisée par Balthazar, 2005)
Plus on s’éloigne du point de captage, plus le prix du camion augmente. Dans les villes de
province, le prix du camion varie de 1250 à 2000 gourdes.
Coût forfaitaire mensuel fixe par le SNEP
Mirebalais
Lascahobas
Aquin
Anse à Cayes
veau
110gdes
44gdes
110gdes
110gdes 110gdes
Tableau 18 : Coût de l'eau en milieu urbain
Zone
3
Coût/m
Diny
Ti-Bois
Coût/m3
Café-Lompré
13,25gdes
26,5gdes
25gdes
Coût forfaitaire mensuel par CAEP
Camp
Plaisance
Acul du Dondon
Perrin
nord
25gdes
25gdes
25gdes
25gdes
non métropolitain (Enquête réalisée par Balthazar, 2005)
Coût forfaitaire
Chatard
Montrouis
Marcelline
39,75gdes
BP : 25g/mois
BF: 15g/fam. six
mois
25g/mois
Et
10g/fam/mois
Laurie
Duvoisin
25g/mois
10g/fam/mois
Tableau 19 : Coût de l'eau en milieu rural (Enquête réalisée par Balthazar, 2005)
Souvent, les ONG pratiquent la gratuité de l’eau. Mais pour certains systèmes réhabilités par
leurs soins et non gérés par le SNEP, le prix de l’eau est de l’ordre de 25gourdes /mois pour
les raccordements privés et 10 gourdes par borne fontaine par famille, par mois. Au niveau
des systèmes gérés par les BDS (Bureau Déconcentré du SNEP) le prix varie de 44 gds à 110
gds pour les branchements privés et l’eau est en général gratuite aux bornes fontaines.
Au niveau des POCHEP, l’eau est semble-t-il gratuite. L’eau est gratuite aux fontaines
publiques ou alors vendue à un moindre coût de 0,25 à 0,75 $ US par mois. Le boukit en
milieu rural peut aussi être vendu 0,25 à 0,50 gds (ISF/CANADA cité par Niyungeko, 2005).
Quand les pauvres paient l’eau plus chère …
Les calculs effectués à partir d’informations recueillies auprès des consommateurs et des
services publics responsables de l’approvisionnement en eau potable montrent que le m3
d’eau coûte 13,75 gourdes pour les détenteurs de branchements particuliers et 29.05 gourdes
pour les ménages à faibles revenus s’approvisionnant à partir de fontaines publiques. Pour une
dotation minimale de 36,5m3/an, le prix pour l’approvisionnement en eau potable par
64
personne pour les familles pauvres serait de 1060,3 gourdes/an ce qui représenterait 28.38%
du PIB par habitant (Emmanuel, 1997).
Financement de l’assainissement de base en 2003 (OPS/OMS, 2005) pour un total de
6.527.887 $ US réparti entre :
- la zone métropolitaine : 3.168.882 $ US ;
- les villes secondaires : 2.889.718 $ S ;
- le milieu rural : 459.287 $ US.
Les investissements portaient sur la construction de latrines, le curage de fosses, l’évacuation
des excréta, la collecte des déchets solides, la protection de sources.
Financement du sous- secteur irrigation
Ce sous-secteur bénéficie des financements suivants :
- l’aide internationale à 80% ;
- l’aide de l’Etat : 20% ;
- par la perception de redevances (faible taux de recouvrement).
Pour les systèmes gravitaires, il semble que peu d’usagers interviennent dans le coût du
service. A titre d’exemple, dans la Plaine de l’Arcahaie, il est prévu que les usagers
interviennent pour 250 gourdes par an par carreau. Ces redevances, lorsqu’elles existent, sont
difficiles à percevoir.
Lorsque l’eau est fournie par pompage, ce qui est rarement utilisé en fonction des coûts
énergétiques élevés, les situations sont variables. A titre d’exemple, à Ti Carénage, le coût
horaire de l’eau pompée s’élève à 300 gourdes tandis que dans la Plaine de l’Arcahaie, les
exploitants ne sont pas d’accord pour payer 10 gourdes l’heure.
Les principaux bailleurs de fonds
Les bailleurs de fonds (au nombre de 38 identifiés dans le secteur de l’eau) interviennent à
deux niveaux (Balthazar , 2005) :
- par des financements réalisés dans le cadre des accords de prêts entre les banques
(BID, Banque Mondiale) et des structures autonomes de l’Etat (URSEP, FAES) ;
- sous forme de dons aux communautés bénéficiaires par l’intermédiaire d’ONG
locales.
Quelques bailleurs de fonds soutenant des actions dans le domaine de l’eau :
- Agence française de développement ;
- L’Union européenne, DGCD,
- BID ;
- Banque Mondiale ;
- ACDI,
- UNICEF ;
- FENU ;
- PNUD.
A cause de la crise politique, le gel des investissement touche de plein fouet le secteur :
- la BID a bloqué 55 millions de $ US ;
- les USA, 150 millions de $ US ;
- l’Union Européenne 45 millions de $ US (Sources nouvelles, 2006).
65
3.9. Le recours à l’expertise en matière d’acquisition de connaissances
Le recours à l’expertise est un des trois leviers de développement durable identifié dans le
domaine de l’eau par l’équipe de recherche du réseau EuroWater à partir de l’analyse de
divers systèmes de gestion de l’eau au sein des Etats membres (Moster, 1999).
En Haïti, une des principales problématiques déjà évoquée et à laquelle nous avons été
directement confrontés lors de cette étude, est un manque de données fiables et actualisées
concernant le domaine de l’eau. Avant la mise en œuvre de tout programme opérationnel, il
est indispensable d’avoir une bonne connaissance de la situation afin de pouvoir poser un
diagnostic valable. Aujourd’hui, ce n’est pas possible et de gros efforts devraient être
déployés pour une mise à niveau des connaissances. Déjà en 1971, un rapport des Nations
Unies insistait sur l’urgence de la collecte de données en Haïti.
La référence la plus significative déjà citée31, en termes de connaissances du secteur de l’eau,
remonte à 1a fin des années 80. Sous l’égide des Nations Unies, une vaste étude consacrée au
développement et à la gestion des ressources en eau en Haïti a été menée, en étudiant la
disponibilité en eau et l’adéquation aux besoins. Une cinquantaine de rapports ont été
produits, les données nationales étant déclinées à l’échelle régionale. Cette étude a aussi
conduit à préciser les missions du SNRE qui devait prendre le relais de cette initiative
onusienne.
Les importants moyens mis en œuvre ont permis de réaliser des inventaires à partir de 4.500
points d’eau, 17 stations limnimétriques, 55 forages, 63 sources contrôlées et 100 piézomètres
à relevé mensuel. Des banques de données ont été constituées et importées dans un atlas SIG :
HYGEOM (eaux souterraines), HYDROM (eaux superficielles) et CLICM (climatologie). 8
autres banques de données plus spécialisées ont été moins développées : ANACHIM, AEP,
BIBLIO, GEOPHYS, ACTIF (forage), MWELLS (bilan de nappe), MHYDRO(pompage
d’essai), PIEZO(fluctuation des niveaux piézomètriques). Bref, on peut dire qu’en 1990,
l’Etat disposait d’une bonne image de la situation dans le secteur de l’eau en Haïti, du moins
concernant le sous-secteur : disponibilités et besoins.
Aujourd’hui, que reste-t-il ? A part les rapports toujours disponibles (notamment auprès des
servies de la bibliothèque du PNUD à Port-au-Prince), le système d’acquisition et de gestion
des données mis en place n’a pas survécu et le SNRE est plutôt inexistant.
Que retenir de cette expérience ?
Le recours à l’expertise a bien fonctionné, les compétences locales et nationales qualifiées
existaient et les équipes ont réalisés un excellent travail, avec en complément le concours
d’experts internationaux de haut niveau.
Mais le projet a dû fonctionner comme une entité relativement autonome, sans intégration
véritable avec la structure administrative environnante, le MARNDR. C’est sans doute une
des raisons qui peut expliquer l’échec du SNRE. En termes de moyens humains, 5 Ingénieurs
avaient été recrutés mais finalement n’ont pu être intégrés dans les services du MARNDR par
manque de ressources financières. Sans eux, il était difficile d’envisager une préservation et
une consolidation des acquis du projet qui se voulait résolument évolutif pour permettre un
suivi actualisé.
Il s’agit aujourd’hui de reconstruire cette expertise et 15 ans après, toujours le PNUD, en
collaboration avec l’UTSIG (voir ci-après), mène une réflexion sur la mise en place d’un
31
(voir avant-propos)
66
observatoire national sur l’environnement et la vulnérabilité (ONEV) comprenant un soussecteur Eau. Cette étude, toujours en cours, envisage d’orienter les interventions de l’ONEV
dans les domaines suivants : la législation de l’eau, l’hydrométéorologie, la qualité de l’eau
destinée à la consommation humaine, la caractérisation des eaux usées, le suivi des eaux
souterraines, l’observation des bassins versants et les eaux transfrontalières (Emmanuel, mars
2005).
Entre-temps, à travers le projet « Système de suivi du secteur de l’eau potable et de
l’assainissement (WASAMS) », l’OPS/OMS a pu continuer à collecter des données
d’intervenants dans le secteur, à les centraliser et à les traiter. Celles-ci sont diffusées via les
rapports OPS/OMS produits.
Dans le domaine de l’irrigation, le Service d’Irrigation et de Génie Rural (SIGR) du
MARNDR devait fournir des données concernant les périmètres irrigués mais aujourd’hui,
dans ce domaine également, les informations font défaut.
Des données relatives à la caractérisation des unités hydrographiques représentées par les 34
sous-bassins, ont apparemment pu être numérisées dans le cadre du Programme de
Formulation de la Politique de l’Eau (PFPE) avec l’intervention du Service d’Aménagement
des Bassins Versants (SABV) du MARNDR.
Un autre acteur peut aussi être mobilisé à propos de la production et de la représentation
spatiale des données. Il s’agit de l’Unité de Télédétection et de Systèmes d’Information
Géographique (UTSIG) du Ministère de la Planification et de la Coopération Externe
(MPCE). Ce service qui dispose d’un matériel adéquat a pu produire à partir de traitement
d’images satellitaires, des orthoplans pour tout le pays. Leurs travaux portent essentiellement
sur une approche géographique, le SIG n’étant pas exploité vraiment. Leurs compétences
peuvent être sollicitées notamment par des ONG. Ainsi, PROTOS est actuellement en
négociation avec UTSIG pour développer dans ce cas un véritable SIG en appui au projet de
gestion intégrée du bassin versant de la rivière Moustiques. Notons qu’en termes de SIG, un
contact a également été pris par PROTOS avec le service géographique de la MINUSTAH qui
dispose également d’images satellitaires.
Par ailleurs, l’apport des universités haïtiennes et étrangères concernant la production de
connaissances relatives au domaine de l’eau est loin d’être négligeable et mériterait d’être
mieux valorisé et exploité. Emmanuel (mars 2005) met en exergue les travaux du Programme
de Maîtrise en Développement Urbain et Régional du Centre de Technique de Planification et
d’Economie Appliquée CTPEA, l’Unité de Recherche en Environnement (URE) de la Faculté
des Sciences de l’Université d’Etat et la Laboratoire de Qualité de l’Eau et de
l’Environnement de l’Université Quisqueya.
A nouveau, comme pour l’ensemble du domaine de l’eau, l’expertise en termes de production
de connaissances souffre d’un manque d’organisation, d’un manque d’implication des
institutions et de moyens humains et financiers insuffisants.
3.10. Haïti et la Communauté internationale
La Décennie internationale de l’Eau Potable et de l’Assainissement (DIEPA) lancée en
novembre 1980 par les Nations Unies a permis de mobiliser les forces vives haïtiennes dans le
domaine de l’eau. « De l’eau pour tous en l’an 2000 », tel était le slogan de la décennie de
l’eau qui a dynamisé l’Etat haïtien en vue d’améliorer l’accès à l’eau potable en zones rurales
et à déboucher vers la création des POCHEP. Au cours de cette décennie (1981-1989), le total
des investissements en vue d’améliorer l’accès à l’eau a atteint 72.613.231 $ US. Le taux de
67
couverture en alimentation en eau est passé de 18% en 1981 à 39% en 1989. Dans le même
temps, le taux de couverture concernant l’assainissement de base est passé de 17,5% à
23,5%32.
Mais en consultant les rapports évoquant cette période, on peut constater que beaucoup
d’espoir était mis dans ce défi qui consistait à satisfaire les besoins en eau potable et en
assainissement des populations des pays en développement. Mais rapidement, les déficiences
ont été imputées, non pas à un manque de ressources mais à un problème de gestion des
services collectifs urbains.
Les objectifs du millénaire (ODM) affichent quant à eux un programme moins ambitieux, à
savoir la réduction de moitié, à l’horizon 2015, du nombre de personnes n’ayant pas accès à
l’eau et à l’assainissement. Pour Haïti cela représente d’ici 2015, la fourniture d’eau à 25% de
la population haïtienne qui ne fait que croître, avec un taux de croissance de 2,3% par an
(population estimée en 2015 de l’ordre de 11 millions).
Selon le CCI, la couverture en alimentation en eau de 54,8% en 2002 devrait atteindre 75% en
2015 et l’assainissement de 31,1% en 2002 à 65% en 2015. On évoque un coût total annuel
d’investissement de 32 millions de $ US pour permettre à 142.000 personnes d’accéder
chaque année au service d’alimentation en eau et à 159.000 de profiter d’un assainissement
(HydroConseil, 2005). Selon ces mêmes sources, il serait préférable de respecter un calendrier
en deux phases :
- de 2005 à 2008 : la mise en œuvre d’une feuille de route (une étape intermédiaire qui
permette une « montée en puissance ») ;
- de 2008 à 2015 : un plan d’action pour atteindre en 2015 les ODM.
Encore faut-il que les moyens financiers et humains, en terme d’encadrement, soient à la
hauteur de ces ambitions.
La tâche est donc importante et on sent, à l’avance, un sentiment de résignation face à cet
objectif inaccessible. Si les haïtiens ont cru en la décennie internationale de l’eau,
aujourd’hui, dans le contexte socio-politique instable, ils n’y croient plus. Rappelons que c’est
notamment le cas de Chavannes(2005) qui pense que les ODM ne pourront pas être atteints.
Au contraire, selon le responsable du MPP, la situation en 2015 sera pire qu’en l’an 2000.
En terme d’engagement international nous devons aussi noter l’adhésion d’Haïti aux
résolutions prises (en octobre 2001) par les pays membres de l’Institut Interaméricain de
Coopération pour l’Agriculture (IICA) et aux lignes d’action définies par le bureau du conseil
intergouvernemental du programme hydrologique PHI de l’UNESCO qui sera lancé en 2008,
à savoir :
- améliorer et affiner la connaissance des ressources en eau pour mieux les gérer ;
- gérer les ressources hydriques de façon intégrée ;
- protéger la qualité de l’eau en luttant, entre autres, contre sa pollution ;
- promouvoir la formation dans les métiers de l’eau ;
- diffuser des informations sur les ressources hydriques et sur leur valeur économique
(note MARNDR, non datée).
L’Etat Haïtien pourra-t-il tenir ses engagements et rencontrer les préoccupations des Nations
Unies et de la communauté internationale en vue d’améliorer les services de l’eau ? Cet
encadrement international a la chance d’exister et peut constituer, comme dans d’autres pays,
32
(données valables pour l’ensemble du pays, HydroConseil, 2005)
68
un guide et une aide à la définition et à la justification d’une politique nationale en cohérence
avec les défis globaux planétaires.
Par ailleurs, le thème retenu par le 4ème Forum mondial de l’eau organisé en mars 2006 à
Mexico « Des actions locales pour un défi global » est une invitation de plus à mettre en
œuvre concrètement, dans les bassins versant, une approche GIRE au niveau local.
3.11. Conclusions du chapitre 3
Ce chapitre consacré à l’organisation de la gestion de l’eau apparaît quelque peu confus et
complexe, à l’instar de la situation haïtienne. Nous retiendrons une multitude d’intervenants
pas toujours animés d’un souci commun, une absence de structure coordinatrice et des lacunes
en termes de vision et de planification du secteur. Cette présentation démontre bien les
incapacités de l’Etat et de ses institutions à fournir des réponses satisfaisantes aux besoins des
populations. Mais parallèlement à la démarche institutionnelle, existent une série d’autres
acteurs qui portent aussi leur part de responsabilités.
Confronté à la gestion de l’urgence à laquelle certaines ONG ont l’habitude de répondre, on
peut cependant regretter un manque d’analyse critique et de vision à long terme pour un
développement durable dans le secteur de l’eau. Pourtant des pistes d’amélioration à travers
un nouveau cadre légal méritent d’être exploitées. Celles-ci, mises en exergue dans la chapitre
suivant, représentent autant de leviers en faveur de la GIRE.
69
4. Analyse de la GIRE au niveau MACRO
A la question de savoir si la GIRE est d’application en Haïti, on est tenté de répondre par la
négative. Le faible intérêt porté à la GIRE a pu être confirmé par la plupart des documents
consultés, ceux-ci ne faisant pratiquement pas référence à cette approche. Par ailleurs, au
niveau des personnes interrogées, celles-ci font référence à des notions relativement floues et
imprécises de ce qu’est la GIRE. Alors qu’à priori toutes les personnes rencontrées semblent
favorables à ce genre d’approche, celle-ci reste assez théorique et on ne peut pas dire que les
acteurs se soient appropriés le concept et tentent de l’appliquer concrètement dans leur secteur
d’activités.
Ce chapitre spécifiquement consacré à la GIRE en Haïti s’appuie sur les éléments rassemblés
et présentés précédemment. Ceux-ci feront l’objet d’une réorganisation en référence à la
méthode SEPO (Succès, Echecs, Potentialités et Obstacles). Dans un second temps, seront
proposées des pistes de réflexions en termes organisationnels, en vue de mieux faire rentrer
une approche GIRE dans la politique de l’eau en Haïti. Mais avant d’aborder ces aspects,
attardons-nous sur quatre apports en faveur de la GIRE.
4.1. Les rendez-vous « manqués » de la GIRE : quatre leviers à mieux exploiter
Quelques évènements ont marqués la réflexion GIRE au cours de ces dernières années. Ceuxci mettent en exergue ce mode de gestion de l’eau, à divers niveaux, que ce soit en matière de
réflexions conduisant à des reformulations de politiques ou à travers des rencontres
scientifiques ou ateliers de travail. Nous avons particulièrement retenus :
- le projet de décret sur la gestion de l’environnement ;
- les travaux de reformulation de la politique de l’eau et un projet de loi-cadre sur l’eau ;
- l’atelier de concertation interministérielle relatif à la gestion des bassins versants en
2000 ;
- le colloque GIRE de 2002.
4.1.1. Le décret sur la gestion de l’environnement
Le projet de décret sur la gestion de l’environnement consacre un volet important à la gestion
de l’eau. Celui-ci a fait l’objet d’une première présentation au début du chapitre 3. Rappelons
l’article 109 qui précise que « … L’Etat doit assurer une gestion intégrée durable des
ressources hydriques qui garantisse leur pérennité, leur qualité, l’accès de la population à leurs
bienfaits ainsi que la prévention des risques qui leur sont liés du fait de phénomènes naturels
ou d’activités anthropiques ». La volonté de l’Etat en faveur de la GIRE est donc clairement
exprimée.
4.1.2. La reformulation de la politique de l’eau et le projet de loi-cadre
Le projet s’inspire fortement de la nouvelle loi française de 1992. Il présente l’avantage de
définir un cadre sous la tutelle d’un ministère chargé de l’eau. De nombreux principes de
développement durable et de GIRE sont exprimés.
Cette politique se base sur l’importance de la protection de l’environnement, dont les
ressources en eau et les écosystèmes aquatiques tout en mobilisant des principes de
protection, de prévention, de précaution et la notion de patrimoine commun. Cette démarche
implique de prendre en compte les aspects techniques et administratifs (principes d’unité de la
70
ressource, de gestion intégrée, de gestion équilibrée, de participation des utilisateurs, et
d’indépendance des organes de régulation et d’exploitation) ainsi que des aspects
économiques et financiers (principe de la valeur économique de l’eau et de la récupération des
coûts afférents aux usagers).
On peut regretter qu’en matière de planification, seul des plans pour les grandes unités
hydrographiques sont prévus (à l’instar des SDAGE en France, seuls schémas rendus
obligatoires par la loi de 1992). La mise en place de commission de bassin est relativement
floue, tout en pouvant initier des expériences pilotes sur certains bassins ou aquifères.
De nombreuses autres mesures (redevances, assainissement, police de l’eau, …) méritent
également un apport de précisions qui peuvent se traduire via des textes d’application.
4.1.3. L’atelier relatif à la gestion des bassins versants
L’atelier de concertation interministérielle pour la gestion des Bassins versants permet à
certains égards servir également de levier en repositionnant à sa juste place l’importance du
territoire dans le cycle de l’eau. On ne peut en effet ignorer la dimension spatiale de la
problématique de l’eau (voir figure 18).
On peut cependant regretter que les discussions en groupes de travail ont notamment été
consacrées à classer prioritairement les ministères en fonction de leur implication dans la
gestion des bassins versants. Néanmoins les recommandations de cet atelier synthétisées
précédemment33 méritent d’être mieux valorisées.
4.1.4. Le Colloque relatif à la GIRE en Haït (juin 2002)
Un Colloque International relatif à la Gestion Intégrée de l’eau en Haïti a été organisé à Portau-Prince du 26 au 28 juin 2002, sous la direction d’Evens Emmanuel et de Paul Vermande.
C’était l’occasion, entre scientifiques d’horizons différents de mieux documenter la démarche
GIRE, tout en accordant une part importante à la situation en Haïti.
Nous reprendrons ci-dessous les objectifs de ce colloque et une partie des conclusions pour la
gestion durable des systèmes hydriques.
Les objectifs principaux du colloque étaient les suivants:
 Développer une réflexion sur la gestion intégrée de l’eau en prenant en considération
les exigences du milieu récepteur ainsi que le devenir des polluants dans les
écosystèmes aquatiques, particulièrement ceux d’Haïti et de la région Caraïbe ;
 Faire échanger des scientifiques, partager leurs expériences sur les méthodes et sur les
outils de la gestion des ressources hydriques ;
 Elaborer des propositions pour Haïti et pour la région métropolitaine de Port-auPrince.
33
Voir chapitre 3 : 3.6. La gestion des cours d’eau et des bassins versants
71
PLUIE
Evapotranspiration
Actions préventives
d’aménagement
à effet qualitatif
et quantitatif
sur les ressources en eau
TERRITOIRE
Constamment occupé et aménagé
Ruissellement
Infiltration
Percolation
Stockage dans les réservoirs continentaux
Eaux Sout.
Eaux de Surface
(cours d’eau, lacs, zones humides)
Actions
Curatives
Usages et Fonctions à garantir
Besoins à satisfaire
Figure 18 : Le territoire, interface entre l’eau atmosphérique et les ressources territoriales
72
En synthèse du colloque GIRE, pour que la gestion durable des systèmes hydriques soit
effective, il est noté de porter un effort particulier sur les aspects suivants :
 la mise en place d’un cadre institutionnel prenant en compte la diversité des acteurs en
présence tout en évitant la confusion des rôles ;
 le renforcement du pouvoir et des capacités d’action des collectivités locales ;
 la mise en place de normes réalistes compatibles avec le niveau socio-économique du
pays ;
 la recherche scientifique permettant d’avoir des éléments de compréhension et de
visibilité des différents processus en cours et de pouvoir anticiper les événements à
venir ;
 le financement des actions liées à l’environnement, de manière à les accroître au profit
des municipalités, la professionnalisation des acteurs locaux pourrait y contribuer ;
 la culture de la maintenance, du suivi de la qualité de l’eau devrait être renforcée à
travers les actions de formation et des démarches transdisciplinaires.
De plus, il est ressorti de ce colloque que la gestion durable de l’eau doit pouvoir s’appuyer
sur les démarches suivantes qui constituent autant de conditions nécessaires :
 Analyser systématiquement les conséquences des activités anthropiques sur la
modification du cycle de l’eau et procéder à des études d’impact sur l’environnement ;
 Revisiter le concept de pollueur- payeur en prenant en compte l’importance du secteur
informel dans lequel se déroule plus de la moitié des activités génératrices de
pollution ;
 Intégrer les usagers dans la définition des mesures de protection des systèmes
hydriques et assurer aux plus démunis une augmentation de leurs revenus avec pour
contrepartie l’abandon des pratiques non respectueuses de l’environnement ;
 Renforcer les capacités des collectivités locales de manière à ce qu’elles puissent
assurer le suivi de la qualité des eaux et mettre en œuvre les dispositions
réglementaires ;
 Former davantage de techniciens de l’eau capable de créer des unités privées pour le
suivi de la qualité de l’eau et de l’ensemble du système hydrique ;
 Etablir des plans d’action prenant en compte la sensibilisation, la formation et la
diversité des pratiques et des acteurs ;
 Définir des programmes de Recherche-action ou de Recherche-développement, en
adéquation avec les priorités de développement et avec la gestion durable des
systèmes hydriques ;
 Promouvoir les approches de gestion participative des systèmes d’approvisionnement
et d’assainissement en incluant les élus locaux.
Mais au final de ce colloque, c’est l’ancien Premier Ministre haïtien, Monsieur Jacques
Edouard Alexis qui conclut en déclarant que « L’important, ce sera le suivi du colloque ».
Ce suivi peut ce faire à trois niveaux :
- l’Information qui a été donné aux étudiants pourra permettre d’initier des vocations
professionnelles et peut-être des vocations de chercheurs ;
- Pour les universitaires, certains exposés ont démontré que des actions de recherche
pourraient être entreprises, poursuivies et améliorées en Haïti si quelques équipes
pluridisciplinaires se constituent et se dotent d’un minimum de matériels scientifiques. Une
partie de leur financement est à rechercher dans des projets ou des programmes de rechercheaction, dans des consultations pour divers organismes et pour les pouvoirs publics, dans des
actions de coopération et de partenariats avec des collègues étrangers ;
73
- Pour les gestionnaires de l’eau, c‘est dans chaque pays et spécialement en Haïti qu’il faut
utiliser les échanges qui ont eu lieu dans le colloque.
Une fois de plus, indépendamment des présentations générales, le secteur de
l’approvisionnement en eau a mobilisé la plupart des participants. La gestion des écosystèmes
et des milieux aquatiques, la prise en compte d’autres usages et fonction de l’eau méritaient
une part plus importante.
Si cette rencontre reste un moment important dans la réflexion menée à propos de la GIRE, on
peut se demander ce qu’il reste aujourd’hui de ce colloque. Quel suivi effectif a-t-il été
accordé ? Les Universités ne se sont-elles pas retrouvées isolées pour valoriser au mieux les
perspectives développées en 2002. La production principale de ce colloque, selon Emmanuel,
a été la création d’un Master en Gestion de l’environnement, mais dont le programme, jusqu’à
présent ne contient aucun module consacré à l’approche GIRE.
4.2. Haïti, en dehors de la mouvance planétaire …
Ces points forts peuvent constituer des leviers en faveur de la GIRE et méritent d’être
capitalisés dans ce sens, mais concrètement, la réflexion en Haïti ne semble pas avoir
progressé, alors qu’à travers le monde, la GIRE devient de plus en plus une approche
référentielle. Suite au gros investissement d’Haïti lors de la Décennie Internationale de l’Eau
et les espoirs mis dans le défi à relever « De l’eau pour tous en 2000 », la situation chaotique
du pays ne semblait pas favorable pour suivre l’évolution de la réflexion de la communauté
internationale médiatisée lors des grands rendez-vous onusiens (Lahaye, 2000, Johannesburg,
2002, Kyoto, 2003, …).
Le langage simpliste et utopique du slogan « De l’eau pour tous en 2000 », s’est rapidement
trouvé confronté à des difficultés d’application. Alors, on a abordé le problème de l’eau en
terme de Vision mondiale (voir Lahaye, 2000) avant de s’intéresser aux ODM (Joannesburg,
2003) pour mettre en évidence l’intérêt d’actions locales pour un défi global (Mexico, 2006).
Parallèlement, l’approche par bassin versant, l’intégration des différentes composantes du
secteur de l’eau, la participation des acteurs étaient développées. A l’inverse de l’Afrique de
l’Ouest par exemple, qui s’est engouffrée dans la GIRE, du moins au niveau de la définition
de nouvelles politiques de l’eau34, Haïti ne semble pas avoir tenter de prendre le train de la
GIRE en restant le nez face à une situation d’urgence interpellante, à savoir qu’aujourd’hui
environ 50% de la population n’a pas accès à l’eau. Face à cette préoccupation de premier
ordre, il n’est pas surprenant de constater que la politique de l’eau en Haïti soit restée très
sectorielle. Aussi, c’est logiquement que l’alimentation en eau potable mobilise la plupart des
acteurs. Mais il ne suffit pas d’avoir accès à l’eau, encore faut-il apporter à la population une
réponse satisfaisante aux besoins alimentaires. Un deuxième secteur considéré sera donc
l’agriculture et particulièrement le secteur de l’irrigation, grande consommatrice des
ressources en eau (80%).
Les autres fonctions et usages ne sont guère pris en compte et on ne peut pas dire qu’une
gestion intégrée se développe, à travers une intégration des savoirs, des politiques, des
acteurs, …
Il semble aussi que l’on n’ose pas poser la question en termes de développement durable,
peut être en ayant peur de la réponse. Cette notion est absente des réflexions en cours.
34
Encore faut-il être plus modeste et moins optimiste en termes d’application sur le terrain.
74
4. 3. Analyse de la GIRE à travers la méthode SEPO
L’exercice est d’autant plus difficile que nous ne pouvons mener cette réflexion à partir d’un
état initial (virginal) mais qu’il est indispensable de prendre en compte tout ce qui existe à ce
jour dans le domaine de l’eau. Les changements en douceur sont à privilégier par rapport aux
changements radicaux. Vouloir effacer tout ce qui s’est fait jusqu’à présent serait une erreur.
Il faut donc laisser le temps de la réflexion et de l’appropriation de la GIRE par les acteurs et
la société civile.
Il est aussi évident que la situation chaotique actuelle ne permet pas d’être en possession de
tous les éléments internes qui devraient servir à mieux documenter la situation réelle (même si
les informations véhiculées sur le Web à propos de la problématique de l’eau en Haïti sont
abondantes). Le contexte actuel ne constitue certes pas un champ d’investigation favorable
pour mener calmement une analyse objective et harmonieuse en vue d’un développement
durable. On peut aussi se demander si le moment est bien choisi pour développer une telle
réflexion, la préoccupation GIRE étant aux antipodes des défis urgents que doit relever le
pays si celui-ci veut vraiment rester debout. N’est-ce pas un luxe ou un exercice académique
que peuvent se permettre des intervenants extérieurs étrangers à la situation vécue au
quotidien dans ce pays ?
D’aucuns avancent qu’il n’existe pas de véritables « bons moments » pour mener ce genre
d’investigation et que les situations de tensions peuvent aussi générer des énergies et devenir
le creuset de leviers de mobilisation pour améliorer une situation qui peut prendre des allures
d’injustice. Quoiqu’il en soit, cette analyse contextuelle de la GIRE en Haïti, réalisée dans des
conditions difficiles et qui ne peut être que partielle et incomplète, devrait être réexaminée à
la faveur d’un contexte plus paisible.
Même si cette dimension GIRE n’apparaît pas au quotidien, nous avons malgré tout tenter
l’exercice de dégager des éléments, ensuite des tendances, positives ou négatives en faveur de
la GIRE sur base d’expériences acquises et en termes de prospectives. Nous nous sommes
appuyé sur la méthode SEPO pour synthétiser cette analyse critique35. Il s’agit bien sûr de
listes non exhaustives que des acteurs impliqués dans la gestion de l’eau en Haïti pourront
compléter. L’atelier de restitution en fin de seconde mission a été l’occasion de recueillir une
première fois les réactions et les apports des participants. Parmi les principaux éléments en
caractères gras, les plus significatifs seront synthétisés dans la figure 19 décrivant les
principales tendances en faveur ou non de la GIRE.
LES SUCCES
Quelques éléments de succès qui pourraient être capitalisés en vue de développer la GIRE en
Haïti :
- l’eau est un bien appartenant à l’Etat, notion de patrimoine commun à tous les
haïtiens ;
- la situation hydrographique du pays avec le découpage du pays en 6 grandes unités
hydrographiques et une trentaine de sous-bassin qui peuvent constituer des espaces
de gestion de l’eau ;
35
La méthode SEPO (Succès – Echecs – Potentialités - Obstacles) est une méthode participative qui consiste à
analyser un projet, un programme d’actions ou une situation, en mettant en exergue des tendances passées et
futures, positives et négatives qui influence l’objet de l’analyse.
75
-
la forte mobilisation autour de la Décennie Internationale de l’Eau ;
une forte participation communautaire inscrite dans la culture haïtienne et l’intérêt à
vouloir contribuer à la prise de décision à différents niveaux ;
des rencontres, ateliers, colloques, séminaires en vue d’alimenter la réflexion sur
l’amélioration de la situation ;
un appui financier important de la part des bailleurs de fonds et des organismes
internationaux ;
une forte implication d’ONG et de structures religieuses qui ont développé une
expertise dans le domaine ;
des réalisations locales concluantes qui ont conduit à la satisfaction des besoins des
populations (expl : projet GRET, un modèle de gestion locale à Port-au-Prince)
d’autres projets d’ONG qui ont connu un succès en termes de réalisations et de
gestion ;
…
LES ECHECS
Les Eches qui ont retardé cette tendance vers la GIRE, mais qui peuvent être exploités en
termes de leçons à tirer pour l’avenir :
- un passé historico-politique mouvementé sur lequel il n’est pas possible de
construire des modèles efficaces d’organisation du pays ;
- la pauvreté chronique et l’ignorance ;
- un manque de culture de l’eau et de conscience nationale dans ce domaine ;
- l’Echec de la Décennie internationale de l’Eau, un espoir déçu pour les haïtiens et
l’échec de n’avoir pu satisfaire les besoins en eau ;
- le souci de conserver ses prérogatives et une difficulté de remise en question ;
- des lacunes concernant les connaissances du secteur (absence de réseaux de mesures
et de banques de données);
- un manque de compétences de la part des acteurs, à tous les niveaux ;
- des technologies mal maîtrisées et une utilisation non rationnelle des ressources ;
- des conflits entre Ministères et services institutionnels (MTPTC / MARNDR /
MDE) ;
- une multitude d’intervenants et des incohérences à différents niveaux (entre
politiques, entre programmes, …)
- l’absence d’une structure faîtière de coordination ;
- une situation chaotique générale dans un Etat qui a perdu sa légitimité et incapable
d’apporter des réponses aux besoins des populations ;
- les métiers de la fonction publique mal rémunérés et sans garantie de stabilité
professionnelle entraînant un désengagement des agents vers le secteur privé mieux
considéré ;
- un cadre législatif incomplet et sectoriel ;
- un discours officiel différent des pratiques ;
- la difficulté d’un financement durable du secteur (les pauvres paient l’eau plus cher
que les autres usagers) et une difficulté du recouvrement des coûts ;
- une situation dégradée en termes d’hygiène et de santé publique ;
- un environnement soumis à d’énormes pressions et fortement dégradé ;
- la non prise en compte des milieux et des bassins versants ;
- une urbanisation anarchique et un exode rural massif ;
- la faiblesse et le mauvais entretien des infrastructures ;
76
-
-
les trop nombreux projets qui se sont terminés sur des échecs (dégradation des
installations mises en place, vandalisme, incapacité de gestion, manque de pérennité
du projet, …) ;
une gestion non durable des besoins énergétiques et de l’occupation de l’espace ;
la vulnérabilité des installations face aux catastrophes naturelles régulières ;
le manque de coordination des projets d’ONG36 et des financements extérieurs,
l’éparpillement des actions de développement ;
un manque de volonté de l’Etat en faveur d’une gestion performante du secteur ;
une mauvaise gestion des fonds octroyés ;
…
LES POTENTIALITES
Malgré ce passé où les échecs pèsent plus que les succès, nous allons tenter de dégager pour
l’avenir quelques potentialités sur lesquelles il devrait être possible de s’appuyer pour
construire la GIRE :
- malgré les difficultés actuelles, ne faiblit pas l’élan naturel de la part des haïtiens à
vouloir participer à la prise de décision à différents niveaux
- des potentialités en termes de ressources en eau disponibles (seulement 10% des
ressources renouvelables sont utilisés), en termes de production hydroélectrique et en
termes de nouvelles terres irrigables ;
- l’eau peut être un levier de cohésion sociale pour aider à la reconstruction du pays ;
- la valorisation de l’expertise importée en lien avec les programmes de financement ;
- le souhait de poursuivre l’aide au développement dans le chef des ONG et l’appui
financier extérieur, avec un déblocage et une augmentation des fonds octroyés ;
- une expertise scientifique nationale (universités, bureaux d’études) en demande de
collaboration ;
- des mouvements de femmes en devenir ;
- le souci de vouloir réformer le secteur de l’eau et de repositionner l’Etat en termes
de légitimité ;
- des expérimentations de la future loi-cadre sur l’eau (expl : le projet COCEPA de
PROTOS à Camp Perrin) ;
- une volonté de décentralisation ;
- le souci d’une approche par bassin et du respect des écosystèmes de la part du
MARNDR en vue d’une gestion patrimoniale ;
- un souci de développer une expertise d’ingénierie sociale en complément d’expertise
technique ;
- la volonté de participation des acteurs locaux ;
- l’implication possible du secteur privé ;
- …
LES OBSTACLES
L’espoir que pourrait susciter les potentialités décrites ci-dessus risque de se heurter à une
série d’obstacles qu’il sera bon d’identifier et tenter de les contourner ou de les supprimer :
- l’avenir politique incertain et une stabilité à retrouver ;
- la faiblesse chronique des institutions ;
36
Souvent , le SNEP ne se sent pas concerné par les projets des ONG.
77
-
-
-
un manque de confiance de la part des populations dans l’Etat et dans les
institutions ;
des cadres de personnel vides suite au départ des compétences vers des organismes
offrant de meilleures conditions de travail (organismes internationaux, secteur privé,
ONG) ;
un frein aux changements de mentalités des dirigeants et cadres, jaloux de
conserver leurs prérogatives et peu enclin à une remise en cause de leur
fonctionnement avec le souci de maintenir une hégémonie très sectorielle ;
les exigences de l’aide internationale et le poids des bailleurs de fonds ;
une pauvreté qui subsiste et l’ignorance des populations qui persiste ;
les catastrophes naturelles à venir et les changements climatiques ;
des ressources en eau limitées dans un pays où l’eau douce est très vite perdue dans
la mer ;
une tendance à la diminution des ressources (diminution des débits en eaux de surface,
et du niveau des nappes) ;
la gestion des eaux transfrontalières et la pression énergétique ;
un espace et des ressources naturelles limités pour répondre à une croissance
démographique en pleine expansion ;
des moyens insuffisants pour réussir la décentralisation ;
la dette extérieure du pays ;
le manque de connaissances et de compétences des nouveaux responsables au sein
des communes ;
un financement durable qui est loin d’être acquis et un refus de participer aux
recouvrements des coûts des services de l’eau ;
la multiplicité d’ONG et de projets menés sans coordination ;
les limites du bénévolat en termes de participation citoyenne ;
…
+
78
-
l’eau : un bien d’Etat
6 unités hydrographiques
participation communautaire
forte implication d’ONG
réalisations locales concluantes
appui financier externe important
-
potentialités en ressources en eau
l’eau, un levier de cohésion sociale
valorisation de l’expertise
poursuite de l’aide au développement
augmentation des fonds
mouvements de femmes
volonté de décentralisation
participation des acteurs locaux
approche par bassin
implication du secteur privé
Passé
-
Avenir
passé politique mouvementé
pauvreté chronique et ignorance
manque de connaissances et de
compétences
absence d’une structure de
coordination
cadre législatif incomplet et
sectoriel
non prise en compte des milieux et
BV
manque de coordination de projets
difficulté d’un financement durable
-
avenir politique incertain
faiblesse chronique des institutions
freins au changement
gestion des eaux transfrontalières
pauvreté et ignorance persistantes
difficultés de financement et de
recouvrement des coûts
décentralisation en manque de moyens
limites du bénévolat
Figure 20 : Tendances vers la GIRE à partir d’une analyse selon le modèle SEPO
4.4. Pour que la GIRE devienne effective
79
La GIRE n’est pas seulement un problème technique. D’abord, une des premières conditions
est une acceptation de l’approche. Il s’agit de créer un esprit favorable en admettant, dans le
chef de chacun des acteurs, de s’engager dans une démarche de participation, ce qui peut
impliquer une remise en question des habitudes précédée par un changement des mentalités.
Cela peut signifier l’abandon de certaines prérogatives, développer des rapports institutionnels
différents, accepter l’arrivée de nouveaux acteurs dans la participation aux processus de
décision, …
Investir dans l’ingénierie sociale implique de développer une culture de l’eau, de rendre le
domaine transparent, de veiller à une politique de communication performante, tout en ayant
une bonne connaissance des acteurs concernés et en créant des espaces de participation.
Enfin, on pourra s’intéresser à l’intégration à travers une démarche transversale et
interdisciplinaire :
- intégration des connaissances, des savoirs ;
- intégration des politiques et remise en cause de l’arsenal législatif ;
- intégration de différentes composantes environnementales ;
- intégration de l’ensemble des fonctions et usages de l’eau (des besoins physiologiques
de base aux besoins moraux et à la fonction sacrée de l’eau) ;
- choisir un espace de gestion adéquat ;
- développer l’expertise nationale et locale, en collaboration avec l’expertise externe ;
- prévoir des structures de coordination.
Mais la GIRE, c’est aussi prendre en compte :
- des éléments internes au pays :
o la démographie et les difficultés d’un développement humain harmonieux ;
o les capacités organisationnelles du pays ;
o le cycle naturel et le cycle anthropique de l’eau ;
o la satisfaction des besoins énergétiques (problème du charbon de bois) ;
o l’occupation de l’espace et les pratiques d’aménagement du territoire ;
o la protection des écosystèmes et la biodiversité ;
o les activités liés à l’eau : agriculture, industrie, loisirs, … ;
- des éléments externes au pays :
o les eaux transfrontalières ;
o les changements climatiques ;
o la gestion des risques naturels.
Pour que tout cela fonctionne, il est indispensable de pouvoir compter sur des structures de
participation mises en place au niveau adéquat. Il ne suffit pas de créer des structures
supplémentaires, encore faut-il assurer leur bon fonctionnement.
Remarque : Une structure de coordination
Très souvent, c’est la première condition citée pour parvenir à la GIRE en Haïti. Mais il ne
suffit pas de créer une structure de plus, encore faut-il assurer son bon fonctionnement.
Rappelons-nous qu’il existe depuis 1996, une structure interministérielle en matière de
sécurité alimentaire. Il s’agit de la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA).
Le bon fonctionnement de cette structure s’est trouvée confrontée à une absence de priorité
politique, une vision restée sectorielle au niveau de l’appareil politico-administratif de l’Etat,
une mise sous tutelle approximative et un manque de légitimité politique et administrative (la
80
CNSA étant mieux connue dans les instances internationales qu’au sein même de l’appareil
administratif national).
Selon Pascal Pecos Lundy (2006), aujourd’hui, la CNSA s’apparente à un instrument chétif,
institutionnellement mal placé, négligé et marginalisé, jouissant de peu de légitimité politique,
en manque de moyens et sans approche transversale. Espérons qu’il n’en sera pas de même
pour la structure eau mise en place dans le cadre de la réforme.
4.5. Une proposition organisationnelle de renforcement de la GIRE en 5 étapes, au
niveau MACRO
La philosophie du projet développé ci-dessous s’appuie sur les quatre principes suivants :
- inscrire l’organisation du secteur de l’eau dans un souci permanent de développement
durable pour Haïti ;
- mener une réflexion la plus large possible en faisant entrer la problématique de l’eau dans
tous les domaines du développement humain ;
- privilégier la construction de la GIRE à partir de l’échelon local pour ensuite recomposer des
structures organisationnelles nationales ;
- se servir de l’eau comme une des clés de reconstruction du pays.
La GIRE peut se concevoir en plusieurs étapes, certaines pouvant être menées en parallèle,
tout en faisant appel à des modes d’organisation différents et en passant par différents stades.
Il s’agira notamment :
- de dresser un état des lieux de la situation du secteur de l’eau ;
- de (re)trouver une culture de l’eau par une mobilisation citoyenne nationale ;
- d’adopter un cadre légal adéquat conférant à la GIRE une reconnaissance institutionnelle ;
- de se doter d’outils d’organisation, de gestion et de participation adaptés aux différents
niveaux ;
- de mobiliser les moyens humains et financiers en vue de mettre en œuvre efficacement une
politique GIRE et faire fonctionner les outils de gestion (renforcement des capacités,
développement des métiers de l’eau, amélioration des connaissances, mise en place de
structures de contrôle et de police, …).
La GIRE dans un contexte spatio-temporel
Des espaces de GIRE adaptés
Tout au long du processus décrit ci-après, il sera bon de garder en mémoire les références
spatiales au sein desquelles l’approche GIRE devrait être développée.
Il est évident que c’est le territoire national qui est à prendre en compte mais la GIRE pour
Haïti ne peut se concevoir sans intégrer l’interrelation avec le pays voisin et sans négliger des
phénomènes extérieurs qui peuvent influencer positivement ou négativement toute initiative
de GIRE.
Au sein de cet espace national, le territoire de référence pour la gestion de l’eau est tout
naturellement le bassin versant. Aussi, nous nous appuyons sur les 6 grandes unités
hydrographiques et les 34 sous-bassins décrits depuis longtemps en Haïti.
Enfin, afin d’être en cohérence avec le mouvement de décentralisation, il nous paraît opportun
de décliner l’approche GIRE au niveau local, à l’échelle des communes, voire des sections
communales.
81
Le temps de la réflexion
Il serait aussi bon d’inscrire cette réflexion dans le temps afin d’éviter des découragements et
des désillusions, des frustrations et de phaser la mise en œuvre de la démarche en se fixant des
échéances réalistes (on se souvient de la décennie de l’eau qui fixait à 2000, la résolution des
problèmes d’accès à l’eau pour tous !). Les objectifs du millénaire (ODM) sont moins
ambitieux mais il ne reste « que » moins de 10 ans avant la nouvelle échéance de 2015.
Pourquoi ne pas conserver cette date mythique pour la GIRE en Haïti ?
Etape 1 : Un projet de livre blanc pour la GIRE en Haïti, support pour une mobilisation
Selon HydroConseil (2005), la priorité absolue est de disposer d’un premier état des lieux
crédible pour 2006 (un état zéro) dans le cadre d’une réflexion sur la mise en œuvre des
ODM. C’est dans ce sens que nous souhaitions proposer de dresser un état des lieux dans un
contexte GIRE, pas uniquement pour le secteur eau potable et assainissement.
Dans ce document qui devrait faire l’objet d’une version grand public (en créole) seraient
rassemblées toutes les informations disponibles en vue de caractériser le secteur de l’eau au
sens large et ses liens avec les autres politiques (environnement, aménagement du territoire,
énergie, santé, …). Il s’agit de dresser simplement des constats et de poser un premier
diagnostic.
Le document pourrait s’articuler en deux volets. Un premier, à l’échelle nationale présenterait
une vue d’ensemble des caractéristiques des ressources, des milieux aquatiques, des besoins,
des fonctions et usages, des modèles d’organisation existants, du financement du secteur, …
tout en mettant en exergue les spécificités d’Haïti. Un second volet pourrait décliner ces
informations à l’échelle des 6 unités hydrographiques.
Cet exercice pourrait être réalisé par la plate-forme d’expertise scientifique pour la GIRE telle
que décrite ci-dessous.
Etape 2 : (Re)trouver une culture de l’eau à partir d’une mobilisation citoyenne
Visiblement la Décennie internationale de l’eau avait suscité à l’époque la mobilisation des
acteurs de l’eau ; c’était au début des années 80. 10 ans plus tard, avec l’appui de la
coopération française, une table-ronde a été organisée dans chaque département en vue
d’aider à la définition de la politique de l’eau en Haïti, à l’instar des assises de l’eau qui ont
conduit en France à la nouvelle loi sur l’eau de 1992.
Ne serait-il pas possible de s’appuyer sur ces efforts collectifs pour réinitier à nouveau
pareille démarche ? Par ailleurs, dans le cas d’une démarche participative, il est intéressant de
débuter la participation le plus en amont possible en ayant le souci d’une appropriation de la
démarche par chaque acteur.
L’objectif de cette phase de consultation serait double :
82


développer une culture de l’eau en sensibilisant et en faisant prendre conscience aux
acteurs de l’eau et aux populations de l’intérêt de l’approche GIRE en montrant que
l’avenir de l’eau est intimement lié à une série d’autres préoccupations et que chacun a un
rôle à jouer (faire entrer une culture de l’eau dans chacun des domaines d’activités
humaines) ;
rassembler les avis sur la question en vue d’aider à la définition d’un cadre légal et à
l’organisation concrète de la GIRE.
Cette mobilisation citoyenne pourrait prendre la forme d’organisation d’Etats généraux de
l’eau ou d’Assises de l’eau (voir les Assises de l’eau en France, en préparation à la nouvelle
loi sur l’eau de 1992) ou s’inspirer de la consultation citoyenne organisée au Québec par le
BAPE, 2000-2003, (Bureau d’Audience Public en Environnement).
Il serait fait appel à une participation la plus large possible en réaction au projet de livre blanc
pour la GIRE en Haïti. Après une phase d’information relative à la présentation du projet de
livre blanc pour la GIRE, une phase de consultation devrait permettre de recueillir les
remarques et amendements concernant la gestion de l’eau, les enjeux et les problématiques.
Cette campagne peut être organisée à deux niveaux :
 pour les acteurs de l’eau (services institutionnels, collectivités locales, ONG, secteur
privé, bailleurs de fonds, …) qui pourraient être rassemblés en groupes de travail
thématiques ;
 pour les représentants de la société civile tout en permettant également à tout citoyen de
s’exprimer par le biais de rencontres et de consultations publiques organisées à l’échelon
communal, en identifiant les représentants potentiels aux Comités Communaux de l’Eau
(CCE).
Il est aussi important que la réflexion soit menée à l’échelle des sous-bassins et bassins
hydrographiques en s’appuyant sur les partenaires potentiels susceptibles d’être représentés au
niveau des comités de gestion (comité de sous-bassin, comité de bassin).
Des assises nationales de l’eau pourraient clôturer cette phase de consultation. A cette
occasion serait présenté, le livre blanc pour la GIRE en Haïti (projet de l’étape 1 + résultats de
la consultation).
Etape 3 : Un nouveau cadre législatif : un code GIRE
A partir des textes existants et des lois en préparation dans le cadre de la réforme du secteur
eau potable et assainissement, on remarque que subsiste une approche sectorielle peu
favorable à la mise en œuvre de la GIRE. Les autres politiques mériteraient d’être associées
(environnement, aménagement du territoire, énergie, santé, éducation, …), sans oublier la
mise en cohérence avec la nouvelle politique de décentralisation et de déconcentration des
services de l’Etat. Il est important à ce stade que tous les Ministères concernés, de prêt ou de
loin par l’eau soit consultés et impliqués dans l’élaboration de ce code. Rappelons que la
réforme du secteur eau et assainissement ignore le MARNDR.
83
Par contre, le projet de décret sur la gestion de l’environnement préconise clairement une
approche GIRE en matière de gestion des eaux continentales. N’est-ce pas l’occasion de bâtir
un code de l’eau en s’appuyant sur ce projet de décret ?
Mais plutôt que de ressortir de nouvelles lois sectorielles, les éléments du cadre légal GIRE
pourraient être constitués sous forme d’un code37 d’ailleurs évoqué dans le projet de loi-cadre
sur l’eau.
Les informations contenues dans le livre blanc pour la GIRE comprenant les avis collectés
lors de l’étape 2, pourraient alimenter les débats en préparation à ce code de l’eau. Une fois de
plus, le législateur pourrait s’appuyer sur la plate-forme d’expertise scientifique Eau pour la
rédaction de ce code.
Projet de décret sur la gestion de l’environnement
(un code de l’environnement)
Le code de l’eau
(un des livres du code de l’environnement)
Des lois sectorielles
dont la loi sur le secteur eau potable et assainissement
et la réforme de ce secteur
Des textes d’application
En parallèle, la loi relative à la décentralisation
Figure 20 : Le code de l’eau au sein de l’arsenal législatif existant ou en projet
Ce code devrait préciser le cadre pour une approche GIRE en Haïti, tout en s’inscrivant dans
les engagements de la communauté internationale (développement durable, objectifs du
millénaire par exemple). Ce code serait ainsi constitué de principes de gestion, d’objectifs à
atteindre, d’outils, de compétences, de moyens, de contrôles, … Il devrait être accompagné
d’arrêtés d’application afin de préciser les modalités pratiques de mise en œuvre.
La structure garante de l’application de ce code GIRE serait une structure faîtière étatique
(Comité national GIRE) dépendant directement du gouvernement, et constituer de
représentants des différents ministères concernés, à l’image d’une mission interministérielle
de l’eau. En dernier ressort, cette structure serait l’instance de recours pour arbitrer des
situations conflictuelles éventuelles.
37
- Voir , à titre d’exemple et dans le cadre d’une coopération sud-sud, le Plan d’Action National pour la
Gestion Intégrée des Ressources en Eau, PAGIRE, au Burkina Faso ;
- Voir aussi la Directive Cadre pour une gestion communautaire de l’eau au sein de la Communauté européenne.
84
Etape 4 : Des outils de planification et de gestion
Des outils hiérarchisés de planification et de gestion sont à appliquer à différents niveaux.
Chacun de ces outils est dans les mains d’une structure de participation qui a pour mission
l’élaboration des plans et le suivi de leur mise en œuvre.
Niveau
Outil de planification et de Structure de participation
d’organisation
gestion
Etat
Plan d’Action National GIRE
Comité national GIRE
Bassin (ou région) Plan de bassin pour la GIRE
Comité de bassin
hydrographique (x 6)
Sous-bassin (x 34)
Plan de sous-bassin pour la Comité de sous-bassin
GIRE
Communes (x 134 ) Plan Communal GIRE
Comité Communal de l’Eau
Tableau 20 : Outils de mise en œuvre de la GIRE
L’échelle de sous-bassin nous semble être la plus adéquate pour développer la GIRE. Ce
périmètre de gestion respecte l’approche par bassin versant tout en offrant un espace à
dimension humaine dont les limites peuvent être appréhendées par les habitants.
Composition du Comité de sous-bassin
Financement :
Financement :
Redevances
Aide internationale, Etat
Figure
: Composition du comité de sous-bassin
Entretien
Maîtrise
d’ouvrage
Gestion
Les Plans communaux de l’eau doivent être mis en cohérence pour constituer le plan de sousbassin et les plans de sous-bassin rassemblés dans
le plan de bassin. Cet emboîtement
Usagers
hiérarchisé doit cependant Communes
tenir compte du principe
de subsidiarité
qui consiste à gérer les
Comites
locaux
problèmes d’eau au niveau qui convient le mieux. Ainsi, certains problèmes et certaines
mesures et actions devront être déclinés directement au niveau du sous-bassin, voire au niveau
Appui
du bassin ou de l’Etat. Mais pour ce qui est des programmes opérationnels
d’actions de
usagers
terrain, c’est le niveau communal qui sera privilégié.Opérateurs
Services de l’Etat
ONG
(Privés)
La méthodologie d’élaboration du plan de sous-bassin
et du plan communal de l’Eau pourra
s’inspirer
de la méthode GIPARE (Rosillon, 2005) qui a été conçu à partir de diverses
Régulateur
Maîtres d’œuvre
expériences
de gestion de l’eau au niveau local (voir figure).
Contrôle
Gestion déléguée
Police
Pour compte des
Communes
Figure 21 : Composition et missions du comité de sous-bassin
85
Le comité de sous-bassin pourrait être constitué d’une assemblé de 60 à 80 personnes,
composée de 4 collèges de représentants :
- le collège des communes ;
- le collège de services de l’Etat ;
- le collège des usagers et des représentants des comités locaux ;
- le collège des opérateurs et des ONG ;
La mission principale de ce comité est l’élaboration et le suivi de la mise en œuvre du plan de
sous-bassin de manière équilibrée et selon une approche participative consensuelle.
Les missions spécifiques à chacun des collèges peuvent être définies de la façon suivante :
1)
pour les communes
A travers leurs responsabilités liées à la maîtrise d’ouvrage, les communes assurent la mise en
ouvre du programme d’actions du plan de sous-bassin. Le coût des investissements est
supporté par l’aide internationale ou par l’Etat.
2)
pour les services de l’Etat
Afin de respecter la séparation des rôles, la mission de régulateur, de contrôle et de police sera
confiée aux services de l’Etat issus des Ministères concernés par le plan de sous-bassin.
3)
pour les usagers et les représentants des comités locaux
En dehors de la maîtrise d’ouvrage, les usagers et les comités locaux pourront participer à des
actions relatives à la gestion et à l’entretien d’installations. Ils pourront aussi s’investir dans
des domaines autres que l’alimentation en eau potable et l’assainissement, en lien avec la
gestion des milieux aquatiques par exemple.
Concernant le financement du fonctionnement de systèmes mis en place, c’est aux comités
locaux que reviendrait la mission de perception des redevances et la gestion des coûts
d’entretien.
4)
pour les opérateurs et les ONG
Ceux-ci pourront, pour compte des communes, mettre en œuvre les actions inscrites dans le
plan. Comme par le passé, les ONG pourront apporter leur soutien aux comités d’usagers. Les
opérateurs privés éventuels ne peuvent être membres effectifs du comité de sous-bassin mais
invités lorsqu’ils sont concernés.
Il est important de renforcer les capacités en termes de compétences locales, assurer la
formation et la formation continuée des agents, offrir un plan de carrière pour les stabiliser
dans leur fonction. Pour assurer un bon fonctionnement de cette structure, il est nécessaire que
le travail du comité soit encadré par un secrétariat permanent ou une cellule d’animation et de
coordination qui assure la gestion administrative, l’information et la sensibilisation des
acteurs et des populations, l’organisation de l’élaboration du plan et l’encadrement dans sa
mise en œuvre (voir figure 22). Cette cellule pourra aussi participer à la collecte des données
sur le territoire concerné et au suivi des réalisations. Elle sera chargée de préparer des rapports
annuels d’évaluation de la mise en œuvre du plan en vue de les soumettre à l’approbation du
comité38.
38
(voir le fonctionnement des cellules de coordination des contrats de rivière en Région wallonne de Belgique et
en France)
86
Animation
Expertise
Coordination
(Technique)
Sensibilisation
Usagers
Comites locaux
Communes
Opérateurs
ONG
(Privés)
Services de l’Etat
Suivi
Evaluation du prog.
d’actions
Figure 22 : Encadrement du comité de sous-bassin
Outre l’échelle du sous-bassin qui est privilégiée, à chaque niveau d’organisation, les plans
veilleront à respecter l’approche GIRE à savoir :
- une bonne intégration des savoirs, des compétences, des politiques, des composantes du
domaine de l’eau ;
- une approche participative ;
- des réponses (actions et mesures) en vue de satisfaire les besoins des usagers et de la
population ;
- un financement durable des services de l’eau.
Etape 5 : Des structures d’accompagnement
Si la mise en œuvre de la GIRE s’appuie prioritairement sur l’application des outils de gestion
décrits à l’étape 4, il est utile de mettre en place des structures d’accompagnement qui
pourraient apporter leur contribution à l’élaboration et à la mise en oeuvre des plans.
Nous avons retenu quatre domaines d’intervention pour lesquels des lacunes ont été mises en
évidence dans les chapitres précédents : l’amélioration des connaissances, la formation et le
renforcement des capacités, le financement et le contrôle.
L’amélioration des connaissances par la création d’un observatoire national de l’eau
Cet observatoire national de l’eau s’inscrit dans le souci du PNUD qui mène un projet
d’assistance environnementale en vue d’identifier les mécanismes de mise en place d’un
87
observatoire national sur l’environnement et la vulnérabilité (ONEV) comprenant un soussecteur Eau.
Dans notre proposition, nous suggérons de recentrer les activités prioritaires de cet
observatoire en termes d’acquisition de données et de suivi d’indicateurs.
Cet observatoire peut être décliné aux différents échelons d’organisation de la GIRE.
L’objectif principal serait de suivre des indicateurs permettant à tout moment d’avoir une
bonne connaissance du secteur de l’eau. Cet observatoire pourrait aussi avoir comme
mission :
 la restauration (ou la création) de réseaux d’acquisition de données concernant :
 les
aspects
environnementaux
(réseaux
pluviométriques,
limnimétriques, piézométriques, de mesures de paramètres de qualité
des ressources et des milieux, indicateurs de performance des
installations et des services rendus, indicateurs en terme d’occupation
spatiale, propriétés foncières, …) ;
 les aspects socio-culturels (bonne connaissance des acteurs) ;
 les aspects économiques (indicateurs financiers) ;
 faire effectuer les analyses de ces données (et leur interprétation) par des laboratoires
ou des consultants ;
 éditer un rapport annuel de l’observatoire de l’eau ;
 une section pédagogique pourrait mettre à disposition du public et des écoles les
informations collectées sous forme vulgarisée et aider à l’organisation de campagnes
de sensibilisation au niveau local.
A partir des paramètres analysés, les données peuvent être organisées sous forme d’indices
intégrateurs et ensuite d’indicateurs regroupés par grappe pour pouvoir être introduit dans un
système DPSIR. Cet observatoire devrait pouvoir au final suivre l’évolution d’un indice de
développement durable dans le domaine de l’eau.
On peut concevoir que des sections de cet observatoire national de l’eau se retrouvent à
l’échelle des 6 régions hydrographiques et des 34 sous-bassins. Dans ce cas, l’observatoire
national pourrait être structuré en 6 observatoires de bassins hydrographiques et 34
observatoires de sous-bassin. De même, il est utile que les structures communales puissent à
la fois participer à l’acquisition de données à travers une expertise locale, et profiter de ces
connaissances en permanence dans leur travail quotidien.
Nous insistons cependant sur l’importance d’un observatoire national qui permet de
centraliser l’information et d’assurer les relations avec la communauté internationale, de
standardiser les modes d’acquisition et de gestion des données qui doivent être les mêmes
dans tout le pays, de pouvoir réaliser des économies d’échelle dans la mise en place des
réseaux de mesures et dans l’analyse des données, d’alimenter la réflexion et de participer
éventuellement à l’élaboration des textes de loi, des réglementations et des normes , …
Cet observatoire de l’eau devrait dépendre directement d’une structure faîtière étatique de
coordination et s’appuyer sur une plate-forme d’expertise scientifique dont les membres
seraient amenés à apporter leur contribution à l’acquisition et à l’analyse des données.
Cette plate-forme d’expertise scientifique pourrait être en lien avec le Comité National du
PHI, créé en 1998. Ce comité est un espace privilégié pour conduire des projets de recherche
scientifique de base ou appliquée à la problématique de la gestion de l’eau. La 5ème phase du
88
PHI « Hydrologie et mise en valeur des ressources en eau dans un environnement
vulnérable » est soutenu par l’UNESCO et le MENJS (Ministère de l’Education Nationale).
Quelques éléments d’expertise qui paraissent utiles à développer (à l’attention des Universités
ou bureaux d’expertise) :
1. en termes d’amélioration des connaissances
- mieux connaître les bassins versants et constituer une banque de données cartographiques
(SIG) sur divers thèmes : occupation du sol, hydrogéologie, population et habitat, activités
économiques, nature, réseau hydrographique, installations de mesures, ouvrages,
périmètres irrigués, données qualitatives et quantitatives, …
- élaborer une méthodologie pour la mise en place de réseaux permanents de mesures de la
qualité des eaux de surface et des eaux souterraines (réseau physico-chimique et réseau
microbiologique) et tester cette méthode sur quelques bassins versants
- élaborer une méthodologie pour la mise en place d’un réseau limnimétrique (et un réseau
de pluviomètre) et tester cette méthodologie sur quelques bassins versants
- mener des études sur la problématique de la salinisation des nappes, comprendre le
phénomène et tenter d’apporter des solutions
- mener des études sur les risques de contamination microbienne des points d’eau et des
nappes (identification des origines des pollutions, proposition de mesures de protection,
…)
- mener des enquêtes épidémiologiques afin de documenter les risques et effets des
maladies hydriques sur la santé des populations
- ces études pourraient contribuer à la mise en place effective d’un observatoire de bassin
(sous bassin) en valorisant d’abord toutes les données déjà existantes et la bibliographie
2. en termes de recherche (ou de mise au point) technologiques
- analyse et développement de techniques de désinfection des eaux (l’eau potable à la
maison)
- développement de techniques d’assainissement adaptées au contexte haïtien
(assainissement individuel, épuration collective)
- analyse et développement de méthodes « simples » de désalinisation
- analyse et développement de techniques de retenues d’eau (barrages souterrains) et de
techniques d’irrigation dans le cadre d’un usage optimal des ressources
- …
3. en termes d’évaluation
- dresser l’état des lieux et évaluer scientifiquement (sur le plan technique) les réalisations
existantes dans le domaine de l’eau (équipements, installations, mode de fonctionnement
et de gestion, entretien, problèmes, …)
- évaluer les démarches d’ordre sociologique sur les modes d’organisation et de gestion
- évaluer les outils de gestion et de participation mis en place dans le cadre de la réforme
- …
Ces propositions de thèmes de recherche devraient s’appuyer sur des études de cas à l’échelle
d’un sous bassin, à partir d’un territoire limité, cohérent et connu par les acteurs plutôt qu’en
référence à un grand bassin fluvial aux multiples réalités (voir les 3 cas étudiés : Gonâve, Saut
d’Eau, Moustiques).
89
Le renforcement des capacités grâce à un centre de compétences GIRE
Les missions de ce centre seraient les suivantes :
- former des animateurs GIRE dans l’accompagnement de l’élaboration et de la mise en
œuvre des plans, sur la façon d’assurer la coordination ;
- organiser des formations GIRE à l’intention des acteurs locaux dans les communes et des
personnes amenées à s’engager dans les comités ;
- organiser des formations aux métiers de l’eau (techniques de réalisation d’ouvrages, gestion
de points d’eau, de périmètres irrigués, de dispositifs d’assainissement, préservation de
milieux aquatiques, entretien des cours d’eau, gestion des retenues d’eau, …).
Une structure de financement des services de l’eau et de la GIRE et des Agences de
bassin et sous-bassin
A tous les niveaux, le souci d’assurer un financement durable du secteur doit être pris en
compte. Ce comité de contrôle pourra accompagner les structures locales dans la gestion
financière des plans en combinant les trois sources de financement possibles :
- l’appui financier des bailleurs de fonds et organismes internationaux, sous forme de
programme de coopération, de prêts en matière d’investissement, … ;
- les aides budgétaires institutionnelles (venant des aides pouvant être octroyées par les
Ministères ou des budgets des collectivités locales) ;
- les redevances payées par les bénéficiaires des services selon le principe utilisateur-payeur
(redevance eau de consommation, redevance irrigation, …).
Il paraît important de pouvoir harmoniser les coûts tout en permettant une certaine autonomie
communale et en veillant à ce que les plus pauvres ne paient pas l’eau plus chère. La mise en
place d’un fonds social d’aide aux personnes les plus défavorisées peut également se
concevoir.
Une police de l’eau
Dès l’instant où un certain nombre de règles sont établies, il est du devoir de l’Etat de veiller à
leur application. Un service efficace de contrôle, jusqu’au niveau communal devrait être
opérationnel et intervenir notamment en cas de non paiement des redevances, dégradations
d’ouvrages, non respect de l’environnement, ...
4.6. Conclusions du chapitre 4
Au début de ce chapitre 4, en présentant quatre leviers en faveur de la GIRE, nous avons
paraphrasé le sujet en notant qu’il s’agissait de rendez-vous manqués. A part le projet de
décret sur la gestion de l’environnement qui semble se concrétiser, du moins dans les textes,
les autres évènements ne semblent pas avoir été exploités à leur juste valeur. Les graines de la
GIRE ont pourtant été semées lors de ces rencontres et travaux. Encore fallait-il assurer leur
développement, ce dernier étant contrarié par les retards de croissance malheureusement
réguliers en Haïti. La difficulté réside notamment à quitter les cénacles des colloques et les
séances de travaux préparatoires aux nouvelles lois pour concrétiser sur le terrain toutes ces
bonnes intentions.
90
Le recours à la méthode d’analyse SEPO nous a permis de dégager les tendances en faveur et
en défaveur de la GIRE, tout en inscrivant la démarche sur une échelle de temps. Au final, si
les échecs et obstacles sont supérieurs aux succès et aux potentialités, il paraît néanmoins
possible de construire à partir des éléments positifs, en valorisant de façon optimale tous les
signes favorables à la GIRE, même si ceux-ci sont limités. Dès l’instant où les motivations
sur une volonté d’aboutir et le dynamisme sont présents à tous les niveaux, l’espoir peut
renaître, encore faut-il que la démarche puisse s’inscrire dans un cadre organisationnel
performant.
Au-delà d’une simple analyse, nous avons pris le risque d’émettre quelques propositions
d’organisation en vue de renforcer la GIRE. A travers les 5 étapes évoquées, nous avons
voulu transmettre le message de la mise en œuvre d’une approche transversale : d’abord une
mobilisation autour de l’eau pour (re)trouver une culture de l’eau, un code pour clarifier le
cadre législatif, des outils de planification et de gestion à l’échelle des bassins versants et
enfin des structures d’accompagnement indispensables pour intégrer les multiples
composantes de l’eau.
Dans ce schéma organisationnel pour la GIRE en Haïti, examinons au chapitre suivant quel
pourrait être le rôle des ONG et particulièrement de PROTOS.
91
5. Rôle des ONG et de PROTOS en particulier en matière de GIRE
(au niveau MACRO)
ou comment les ONG et particulièrement PROTOS peuvent collaborer à la GIRE en
Haïti ?
Les propositions de missions à l’intention des ONG et de PROTOS en particulier sont
présentées à deux niveaux :
- en référence au schéma organisationnel de mise en œuvre de la GIRE, nous verrons à
quel niveau les ONG peuvent apporter leur contribution ;
- sans attendre le développement complet d’une nouvelle politique de l’eau, ce qui
prendra un certain temps, il serait judicieux de tenter des premières expériences GIRE
au niveau local, celles-ci seront contextualisées à partir de trois cas où PROTOS
intervient déjà ou souhaiterait intervenir : Saut d’eau, L’Ile de la Gonâve et Les
Moustiques (voir présentation détaillée au chapitre 6).
5.1. Contributions possibles des ONG pour la GIRE
Assurément, les compétences des ONG ont essentiellement été développées en milieu rural où
celles-ci apportent leur contribution au développement d’installations d’alimentation en eau
ou à la mise en place de périmètres irrigués. Certaines ONG interviennent également au
niveau de quartiers urbains défavorisés où elles tentent d’apporter des réponses aux besoins
des populations. Dans tous les cas, il s’agit d’interventions au niveau local essentiellement
sectorielles, même si les programmes sont parfois ambitieux et le support financier important.
Nous remarquons également que ces ONG ont souvent pu combler les lacunes
institutionnelles en matière de gestion de l’eau et que leur travail est généralement apprécié
par les bénéficiaires. Elles ont aussi pu accumuler une série d’expériences pour certaines
pendant de nombreuses années de présence en Haïti et acquérir une expertise technique
reconnue.
Dans ce sens, les ONG sont des acteurs incontournables dans la mise en œuvre de la GIRE.
Mais, il s’agit de replacer leurs multiples projets et activités dans un cadre organisationnel au
niveau national mais aussi au niveau local communal pour mieux coordonner toutes les
interventions.
Leur contribution peut se faire à plusieurs niveaux :
- en termes d’expertise technique : les ONG peuvent être des partenaires en tant que
maître d’œuvre et fournisseur de services de l’eau à la demande des communes ou de
comités locaux de gestion de l’eau. Dans ce cas, les ONG concernées sont
représentées au comité de gestion et poursuivent leur action de coopération au
développement mais tous les projets devraient s’inscrire dans les plans définis aux
différents niveaux et celles-ci devraient accepter de rendre compte de leurs activités au
comité de sous-bassin ;
- en termes de sensibilisation : celles-ci peuvent intervenir dans l’organisation de
campagnes d’information et de sensibilisation, de programmes d’éducation dans les
écoles ou d’éducation à la santé,… ;
92
-
-
-
en termes de formation : les ONG peuvent s’appuyer sur leurs expériences et expertise
pour apporter leur contribution aux travaux du centre de compétence de l’eau
(formation aux métiers de l’eau, à la GIRE, …) ;
en termes d’ingénierie sociale : certaines ONG ayant l’expérience en termes de gestion
de la composante sociale dans l’animation de structures de participation, pourraient
être appelées à fournir l’encadrement nécessaire aux communes pour les accompagner
dans la mise en œuvre des plans GIRE. Dans ce cas, il conviendra d’éviter qu’une
même ONG soit à la fois responsable de l’animation et intervienne en tant que maître
d’œuvre dans le programme d’actions ;
en termes d’acquisition de connaissances : les ONG (en particulier les ONG liés aux
institutions académiques) qui ont développé des compétences en matière d’acquisition
et de gestion de données (réseaux de mesures, données de terrain, analyses, SIG, …)
pourraient épauler l’expertise scientifique nationale et aussi mobiliser et organiser une
expertise locale.
5.2. PROTOS et ses partenaires
Selon les possibilités d’intervention évoquées ci-dessus, il peut être envisagé de recentrer les
activités de PROTOS et de ses partenaires en séparant les missions d’encadrement et de
coordination39 des missions techniques de mise en œuvre sur le terrain (à l’instar de la
régulation et de la maîtrise d’ouvrages dont la séparation est prévue par la réforme).
Protos pourrait se charger de la coordination, l’accompagnement des acteurs locaux, la
formation, la communication, la participation à l’acquisition de données.
Les partenaires actuels de PROTOS seraient confortés dans leurs missions d’expertise
technique en tant que maîtres d’œuvre au service des institutions et organismes possédant la
maîtrise d’ouvrages.
Notons par ailleurs, qu’à travers quelques projets (comme le projet COCEPA à Camp Perrin)
PROTOS expérimente certains aspects organisationnels des législations en préparation.
5.2.1. Propositions à l’intention de PROTOS
Mission 1 : Renforcer le rôle déterminant de PROTOS au sein des plates-formes d’ONG
Nous avons pu constater que PROTOS était considéré comme un partenaire sérieux,
expérimenté, écouté par d’autres ONG et par les services institutionnels. L’équipe permanente
est d’ailleurs déjà impliquée dans les travaux de diverses structures de coordination et
participe régulièrement à des séminaires et ateliers de réflexion dans le secteur de l’eau.
A partir de ces plates-formes d’ONG, PROTOS pourrait notamment contribuer à
l’amélioration des relations entre la sphère ONG et la sphère institutionnelle en mettant en
évidence les possibilités de collaborations, de rencontres, d’échanges d’informations, de mise
en cohérence des interventions et en participant à l’organisation des contacts à divers niveaux.
Il s’agit aussi pour PROTOS de profiter au maximum des structures de participation mise en
place dans le cadre de la réforme. Il ne s’agit cependant pas de vouloir être présent partout
mais de bien choisir les plates formes au sein desquelles PROTOS pourra développer
efficacement son expertise.
39
Une évolution du rôle des ONG en vue d’assurer des fonctions de facilitation plutôt que des fonctions
opérationnelles a été soulignée lors de l’atelier national pour l’élaboration d’une stratégie eau potable et
assainisseemnt en milieu rual (SNEP,2005).
93
Mission 2 : La coordination et l’encadrement de plans de gestion
A l’instar des contrats de rivière en Région wallonne ou de tout autre démarche participative,
il est indispensable d’encadrer les travaux des structures mises en place à travers la création
d’une cellule d’animation (un secrétariat permanent). Celle-ci constitué d’une équipe
pluridisciplinaire (par exemple : un Ingénieur, un sociologue, une personne responsable de la
communication) serait amenée à prendre en charge la gestion administrative des comités, le
secrétariat de l’élaboration des programmes d’actions, l’organisation des réunions et les
rapports d’évaluation, la communication, l’organisation d’une expertise locale, la concertation
entre usagers et la gestion de conflits éventuels, … Il est opportun que l’équipe en place
puisse maîtriser les diverses composantes de la GIRE, pas seulement dans le sous-secteur de
l’alimentation en eau et de l’assainissement, même si celui-ci est souvent prioritaire.
Cette mission peut se décliner à deux niveaux :
- au niveau communal et dans ce cas, il s’agit d’encadrer un plan communal de l’eau en
lien avec le plan GIRE de sous-bassin ;
- au niveau d’un sous-bassin avec l’encadrement d’un plan de sous-bassin.
Les possibilités de financement pour ce genre de mission sont offertes dans les programmes
des bailleurs de fonds et d’organismes financiers internationaux. De plus en plus, l’accent est
mis sur la GIRE, tout en sachant qu’une démarche GIRE non encadrée est vouée à l’échec. De
plus, ce financement par la coopération internationale dans le fonctionnement des cellules de
coordination permet de soulager les efforts à consentir par les partenaires locaux dans le
financement des actions de terrain. Si à l’heure actuelle, des moyens financiers font défaut au
niveau des réalisations, la coopération internationale est sans doute la mieux placée pour
apporter un appui à la coordination.
Mission 3 : Un acteur au sein du centre de compétences de l’eau
Le besoin de formation a souvent été mis en évidence dans cette analyse. Dans le cadre de la
décentralisation, les communes seront amenées à assumer de nouvelles responsabilités. Un
renforcement des capacités de services communaux est dès lors indispensable. PROTOS
pourrait participer à l’organisation de formation de base et de formations continuées à
l’intention des agents communaux. Outre des formations relatives à une prise de connaissance
de ce qu’est la GIRE par tous les acteurs concernés, d’autres programmes de formation
pourraient être organisés en fonction des besoins (exemples : formation technique dans la
réalisation et la gestion d’ouvrages, formation en gestion comptable du secteur de l’eau,
formation en techniques de reforestation de bassins versants, …).
Mission 4 : Information – sensibilisation des usagers et des populations
La GIRE s’accompagne tout naturellement d’un volet communication. Si on veut développer
une culture de l’eau, il est en effet indispensable de mener en permanence des campagnes
d’information et de sensibilisation auprès d’une population qui parfois par ignorance génère
par ses activités un impact négatif sur les ressources en eau et sur l’environnement. Des
activités pédagogiques avec les écoles et les jeunes méritent aussi d’être proposées.
Ce volet communication pourra être pris en charge par les cellules de coordination des plans
de sous-bassin (des plans communaux de l’eau). Dans ce sens, PROTOS pourrait s’investir
dans ce domaine en capitalisant son expérience en Haïti et dans les autres pays où l’ONG est
engagée, notamment par l’adaptation de campagnes organisées dans les pays du Nord.
Mission 5 : Participation à l’acquisition de connaissances
PROTOS pourrait soit en interne, soit par appel à des experts consultants, soit dans
l’organisation d’une expertise locale en lien avec les réalités de terrain, participer à
94
l’acquisition de données et aux travaux de l’observatoire national de l’eau et à ses sections
décentralisées. La coordination d’une expertise locale de la part des collectivités pourrait aussi
être confiée à l’ONG.
Mission 6 : Encadrement et supervision des activités des partenaires
PROTOS pourrait comme à présent, assurer les liens entre les activités de terrain mises en
œuvre par ses partenaires et les programmes de coopération et les bailleurs de fonds. Elle
pourrait aussi développer un système qualité (label de qualité) pour évaluer les interventions
dans le secteur de l’eau. Elle devrait aussi s’assurer des compétences nécessaires des
partenaires pour mener à bien les activités et éventuellement renforcer ces compétences par
des formations ciblées (voir ci-dessous).
5.2.2. Propositions à l’intention des partenaires de PROTOS actuels et futurs
-
Partenaires actuels : CPH, UEBH-ODRINO, MPP, GTIH,
Partenaires futurs : CONCERN, les Communes ?
Ces partenaires seraient amenés à poursuivre leurs activités dans leurs secteurs de
compétences : alimentation en eau, assainissement, irrigation, valorisation agricole.
En tant qu’opérateurs (en termes d’installations à créer ou dans la gestion des installations et
fourniture de services), ils pourraient à travers des contrats de gestion répondre aux
sollicitations des partenaires ayant la maîtrise d’ouvrage et/ou accompagner les comités
locaux de l’eau et les comités d’irrigants. Dans le cadre de la décentralisation, ces ONG
verraient leurs interventions renforcées.
PROTOS serait amené à superviser les travaux réalisés et les services rendus par leurs
partenaires selon les modalités d’un contrôle qualité et d’une évaluation des actions. Des
formations continuées spécifiquement à l’intention de ces partenaires (expl : mise en œuvre
d’une technique particulière mal connue, gestion de chantiers de génie civil, …) pourraient
être organisés.
A l’occasion de cette étude, il a été possible d’approcher deux des quatre partenaires de
PROTOS : CPH et UEBH-ODRINO. C’est essentiellement au niveau de ces deux partenaires
que nous nous risquons d’émettre ci-après quelques réflexions.
CPH
Jusqu’en 2000, CPH et PROTOS constituaient la même organisation. Actuellement CPH est
complètement autonome et n’est plus le partenaire privilégier de PROTROS. CPH est une
ONG nationale qui intervient dans les secteurs de l’alimentation en eau potable et de
l’assainissement et dans des projets d’agriculture durable (valorisation de l’eau à usage
agricole, filière café, cultures maraîchères) où elle développe une expertise technique. Selon
A. Coutteel, cette ONG manque parfois d’organisation.
Hydroconseil qualifie CPH d’ONG d’intermédiation au service des collectivités locales et des
structures communautaires et attribue à CPH les trois missions suivantes :
- un assistanat à la maîtrise d’ouvrage à travers un contrat d’assistance ;
- un rôle de maître d’œuvre, responsable de la réalisation des ouvrages ;
- un fournisseur de prestation complète qui offre la solution au maître d’ouvrage.
Dans le contexte de la décentralisation, quelque soit la forme d’intervention, il me paraît
opportun de suggérer que CPH intervienne en appui technique à l’intention des communes en
développant avec celles-ci un partenariat solide à travers une contractualisation. Il s’agira de
95
veiller à entretenir des relations de confiance et de proximité avec les autorités communales
en les impliquant explicitement dans les projets et de bien communiquer avec les structures de
l’Etat. Par ailleurs, CPH pourrait poursuivre son appui aux comités locaux, tant dans le
domaine de l’alimentation en eau que dans celui de l’irrigation. CPH devrait aussi veiller au
transfert de gestion vers ces comités locaux afin de responsabiliser et de rendre autonomes ces
structures locales. Le souci d’une autonomie financière de gestion sur base d’un recouvrement
des coûts auprès des bénéficiaires devrait être pris en compte dans les projets développés par
CPH.
UEBH-ODRINO
ODRINO est une structure locale de l’UEBH à vocation missionnaire. Outre les activités
déployées par UEBH dans la construction d’églises et d’écoles et son implication dans le
secteur de la santé, ODRINO est particulièrement actif dans le secteur du génie civil appliqué
au domaine de l’eau. Les chantiers réalisés dans le bassin des Moustiques sont
particulièrement impressionnants40. Il s’agit d’ouvrages constitués de béton et d’acier voulant
être à l’abri de l’épreuve du temps et des catastrophes naturelles et dont la conception est
défendue par l’Ingénieur responsable, véritable leader charismatique jouissant d’une influence
forte auprès des acteurs locaux du bassin de la rivière Moustiques41. A l’instar de l’étude
menée par Tractebel, on peut se poser la question de la rentabilité de ces gros investissements
où la technique domine en priorité.
S’il me paraît intéressant de valoriser au mieux cette expertise technique dans le chef
d’ODRINO, il est cependant opportun, dans le cadre d’une approche GIRE, de compléter
cette dimension technique par la prise en compte d’aspects socio-économiques et culturels.
Tout comme CPH, ODRINO pourrait poursuivre ces missions techniques mais en étant
encadré par PROTOS qui pourrait assurer une coordination et une bonne intégration des
diverses composantes.
MPP
Ce partenaire, apparemment bien ancré dans les réalités locales paysannes, pourrait
accompagner les comités locaux du secteur agricole et les aider à devenir de véritables acteurs
GIRE.
GTIH
A l’instar du MPP, GTH pourrait aussi exprimer toute son expertise en tant que partenaire
GIRE. Un projet GIRE au Cap haïtien ne peut-il pas être envisagé ?
CONCERN
Apparemment CONCERN développe à travers les projets dans lesquels cette ONG est
impliquée une très bonne logistique, tout en veillant à s’impliquer par une présence
permanente sur le terrain, alors que PROTOS fonctionne à partir de la cellule basée à Port-auPrince.
Soucieuse d’ingénierie sociale et capable d’assurer des missions de coordination et
d’animation, CONCERN peut jouer un rôle important dans la mise en œuvre de la GIRE pour
autant qu’elle complète ses connaissances en la matière. Une complémentarité entre
40
Ces ouvrages en béton lissé, bourrés de barres d’acier, à côté de canaux en terre, apparaissent comme issus
d’un autre monde dans une région désservie par de simples pistes de terre et de pierres.
41
Face à ces infrastructures lourdes en rupture avec les compétences locales, ne faudrait-il pas privilégier des
modes de gestion de l’eau moins coûteux, en adéquation avec les réalités socio-culturelles, tout en veillant à une
responsabilisation des bénéficiaires en termes de gestion quotidienne ?
96
PROTOS et CONCERN mériteraient d’être développée. L’opportunité est donnée à travers
les projets GIRE à l’Ile de la Gonâve et à Saut d’eau d’expérimenter cette collaboration.
LES COMMUNES
PROTOS devrait à l’avenir intensifier ses relations avec les communes amenées à jouer un
rôle important dans la mise en œuvre de la GIRE. Les propositions d’une plus grande
implication de PROTOS en matière de renforcement des capacités locales s’inscrivent dans
cette collaboration.
5.3.Conclusions du chapitre 5
Au stade actuel, Haïti ne peut se passer du concours des ONG pour mettre en œuvre avec
succès une approche GIRE. PROTOS et ses partenaires ont depuis de nombreuses années
acquis un savoir-faire qu’il serait dommage de ne pas valoriser.
Les propositions émises dans ce chapitre avaient pour objectif de tenter de recentrer leurs
activités au profit de la GIRE. Celles-ci pourront être illustrées plus concrètement à partir de
l’examen des trois études de cas au niveau MESO.
97
6. Analyse de la GIRE au niveau MESO à travers trois études de cas et
Contributions de PROTOS et de ses partenaires
6. 1. L’Ile de la Gonâve : pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan GIRE
insulaire
6.1.1. Le contexte
Carte d’identité de l‘Ile de la Gonâve42
Superficie : 685 km²
Population : 105.000 habitants
Département de l’Ouest
Arrondissement de la Gonâve
Deux communes :
Anse-à-Galets (55.000 hab. dont 12.000 pour le centre)
Pointe-à-Raquettes (50.000 hab.)
11 sections communales : AàG (1,2,3,4,10 et 11)
PàR (5,6,7,8 et 9)
Une zone migratoire (pauvres venus de PaP lors de la visite du pape en 83)
Géologie :
Formations sédimentaires calcaires fortement karstifiées à calcaires cristallins et coralliens
Activités :
Agriculture (maïs, millet, pois congo, patate, …)
Elevage (bovins, chèvres, volailles)
Production de charbon de bois
Pêche en mer
21 ports ou mouillages
Petits commerces (9 marchés)
Tourisme : pas développé mais potentialités avec 8 km de plage et cadre naturel
Pluviométrie : 800 mm à Pointe-à-Raquettes
900 à 1200 à Anse-à-Galets
Absence de cours d’eau permanents
5 aquifères (carbonate fissuré et poreux) + sources (23)
Organisation du secteur de l’eau
Les acteurs concernés :
- les services de l’Etat : SNEP pas présent, représentation de l’Etat au niveau de
l’arrondissement avec le vice délégué de l’arrondissement qui assure la présidence de
la plate-forme Eau, présence du BAC du MARNDR dont le responsable est également
engagé dans le SCH ( + MARNDR-CODIC) ;
42
Pour en savoir plus sur l’île de la Gonâve : voir le livre blanc du MPCE(2000) dont les objectifs étaient de :
- établir la problématique de l’île ;
- élaborer une esquisse d’aménagement ;
- dégager les perspectives de développement.
98
-
-
les Communes : peu actives, face à un manque de moyens humains et financiers ;
les Eglises et les ONG, notamment SCH, Mission Méthodiste, Eglise épiscopale,
CONCERN, World Vision, Mission Wesléenne, Croix Rouge, Hands to Hands
Nombreux comités (pratiquement au niveau de chaque point d’eau dont l’ARGEB
(Association pour la Réhabilitation de la Gestion de l’Eau de NanBaré) à Anse-àGalets ;
AAPLAG (Association des Animateurs et Paysans de la Gonâve) organisé en 6 zones ;
…
L’alimentation en eau se fait à partir de sources captées, de forages et de pompes de
relèvement. Les services d’Eglises et ONG ont effectué de nombreuses réalisations : captages
de sources, forages, citernes familiales, impluviums, motopompes, …
Anse-à-Galets : captage de 2 sources (débit de l’ordre de 6 litres/s)
 1ère intervention de Weslyan-WISH (système d’eau pour la mission + voisinage)
 SNEP : aménagement de la source Nan Bare (Tête Source), repris par ARGEB
 une autre source pour la Pointe des Etroits
Pointe-à-Raquettes :
 forage avec électropompe (débit : 4 litres/s)
 Nbrx puits naturels (avec eau saumâtre)
 Eau douce à La Source et Grand Vide
 Une source à Gros Maman
Expérience de désalinisation par les Méthodistes à Source Philippe (La Source)
Nombreuses installations en panne (les 42 forages réalisés en 1980 sont presque tous en panne
et abandonnés)43.
Qualité de l’eau :
Eau de source :
légèrement alcaline
parfois turbidité élevée
Forages en plaine : eau saumâtre
Conductivité au niveau d’une fontaine publique à Anse-à-Galets : 660 S/cm (F. Rosillon,
23/02/06)
Contaminations fécales.
Desserte journalière en eau :
Anse-à-Galets : 11,5 L par personne
Pointe-à-Raquettes : 16,2 L par personne
L’île de la Gonâve est un concentré des problèmes vécus à l’échelle du pays, à part le
problème d’insécurité qui semble-t-il ne se pose pas.
Dans le domaine de l’eau, on rencontre les problématiques suivantes :
- des ressources limitées avec de faibles capacités de rétention d’eau douce avant son
rejet vers la mer ;
- des sections communales qui souffrent de sécheresse à certaines périodes de l’année
(en 2004 : une pluviométrie de 320 mm dans la 5ème section de Pointe-à-Raquettes) ;
- des inondations à Les Etroits (3ème agglomération importante) ;
- une déforestation importante des bassins versants ;
43
Voir en complément PV de la rencontre avec la Plate-forme Eau, Anse-à-Galets, 8 novemre 2005(Coutteel,
A.).
99
-
une zone montagneuse présentant peu d’émergences de sources et de réserves d’eaux
souterraines ;
des activités agricoles et la production de charbon de bois qui contribuent à la
dégradation de l’environnement ;
une dégradation des écosystèmes terrestres et marins (au niveau des récifs coralliens) ;
la difficulté de fournir de l’eau à la population, la vétusté des installations et leur
mauvaise gestion ;
des problèmes de contamination des ressources tant au niveau de la qualité
bactériologique qu’à propos des risques de salinisation ;
de nombreux intervenants, notamment des ONG et des services d’églises à côté de
structures communales peu actives ;
l’assainissement de base peu développé (en absence de latrines, les ravines reçoivent
tout type de déchets);
…
6.1.2. Analyse de la GIRE à l’île de la Gonâve (application de la méthode SEPO)
Les succès
- toutes les actions développées dans le secteur de l’eau par de nombreuses ONG et
services d’Eglises et les bénéficiaires de ses projets (+ leçons à tirer ) ;
- existence d’un noyau de structure de participation ;
- nombreuses organisations de base (dont AAPLAG : Association des Animateurs et
Paysans de l’Ile de la Gonâve) ;
- existence d’un livre blanc de la Gonâve (MPCE) ;
- …
Les échecs
- projets peu soutenables présentant des défaillances techniques ;
- ingénierie sociale pas toujours prise en compte ;
- mauvaise gestion des installations ;
- peu de prise en compte des bassins versants ;
- puits localisés dans des situations inadéquates ;
- protection des sources et des captages peu efficace ;
- qualité de l’eau douteuse et problème de salinisation ;
- reforestation timide ;
- peu d’implication communale ;
- …
Les potentialités
La situation :
- un contexte insulaire avec un sentiment d’appartenance à un terroir (la petite terre la
Gonâve, face à la grande terre Haïti) ;
- un espace bien défini, à échelle humaine, aux limites bien appréhendées par les
habitants ;
- une notion de bassin versant évidente ;
- un territoire adéquat pour développer un programme GIRE ;
Une approche transversale :
- la taille de l’île et la proximité des différentes composantes GIRE invitent à une
approche transversale. En permanence, les relations entre alimentation en eau,
100
aménagement du territoire, gestion de l’environnement, … sont plus évidentes à
établir que dans un vaste territoire ;
De nouvelles possibilités de développement :
- existence du livre blanc ;
- projet de plan de développement de la Gonâve (à développer par la Plate forme Eau) ;
- valorisation touristique possible de l’île ? (à étudier) ;
- une agriculture durable (expl : maraîchage avec techniques d’irrigation modernes et
une utilisation rationnelle de l’eau) ;
- …
Les forces vives :
- l’existence d’une plate-forme Eau mise en place suite à la situation problématique de
2004 sur laquelle on pourrait bâtir une structure durable de participation ;
- divers acteurs (surtout ONG et Eglises) actifs depuis plusieurs années dans le soussecteur eau potable et assainissement avec de nombreuses réalisations qui ont connu
des succès divers, mais avec des expériences à capitaliser et des leçons à tirer ;
- présence du secteur « Education » au niveau de la Plate Forme et intérêt pour la
GIRE ;
- deux communes (en devenir) appelées à prendre leur part de responsabilités dans le
cadre de la décentralisation et de la réforme du sous-secteur « eau potable et
assainissement » ;
Des connaissances :
- alors qu’à première vue, il semble exister peu de données sur l’île, une recherche plus
fouillée met en évidence diverses études en matière de connaissances des bassins
versants et des ressources44 (la difficulté réside plutôt dans l’accès à ces études et
rapports) ;
- Dans les travaux du PHI, est notamment prévu l’évaluation des principales sources de
contamination de la zone côtière de l’île de la Gonâve ;
- …
Des moyens financiers :
- la BID (et peut être d’autres bailleurs) serait disposée à consacrer des moyens
financiers à la gestion de l’eau sur la Gonâve ;
Les obstacles
- quid de l’implication communale à l’avenir ;
- les moyens humains et financiers seront-il suffisants pour la mise en place de la
GIRE ;
- quelle reconnaissance et quelle légitimité des acteurs moteurs de la GIRE ? ;
- poursuite de la déforestation ;
- chute continue du débit des sources ;
- population en croissance et besoins en eau en augmentation ;
- quelles relations avec les services de l’Etat ? ;
- le phénomène de salinité se développe ;
- …
6.1.3. Propositions pour l’élaboration d’un plan GIRE de l’île de la Gonâve
En écho à ces potentialités, il nous paraît intéressant de pouvoir expérimenter sur l’île de la
Gonâve l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan de gestion en matière d’eau qui pourrait
44
voir livre blanc du MPCE, 2000
101
constituer une partie du Plan de Développement de l’Ile. La méthodologie à développer peut
s’appuyer sur la méthode GIPARE déjà citée.
Ce projet doit pouvoir s’appuyer sur une structure de participation créée à partir de la plateforme eau élargie, chargée de l’élaboration du plan de bassin et du suivi quant à sa mise en
œuvre. Cette structure en tant que telle ne possède pas la maîtrise d’ouvrages, celle-ci est
spécifiquement entre les mains des partenaires concernés (dont les deux communes), par
ailleurs membres de la structure de participation. Ces structures pourraient être animées par
PROTOS (ou en tandem CONCERN – PROTOS ?).
Sur le plan technique,
On a pu se rendre compte à travers les réalisations d’ouvrages des lacunes et des erreurs de
réalisation, de la vulnérabilité des installations, d’un manque de suivi et d’une gestion mal
organisée. Les compétences techniques de PROTOS et de ses partenaires méritent d’être
valorisées.
Points particuliers à prendre en compte :
- inventaire des ouvrages existants et relevé des problèmes ;
- techniques de pompage à développer (bélier hydraulique ?) ;
- performance des impluviums et leur gestion ;
- construction de barrages (lacs collinaires) ;
- techniques de désinfection ;
- installation et maintenance de réseau d’adduction d’eau ;
- mesures préventives de protection de sources et des zones de captage ;
- techniques de reforestation ;
- nouvelles pratiques agricoles, usages rationnels et protection des eaux ;
- …
Sur le plan des connaissances,
- À partir des données existantes, compléter les informations (problématique de la
salinisation) et rassembler toutes les données (base de données + SIG) dans un
observatoire « Ile de la Gonâve » ;
- Mobiliser l’expertise scientifique active au plan national (voir analyse au niveau
Macro) et dynamiser une expertise locale ;
- Impliquer le secteur « Education » dans la démarche ;
Sur le plan financier,
- Concevoir un modèle de tarification valable sur toute l’île mais qui tienne compte des
réalités différentes et de la qualité des services.
102
6.2. Saut d’Eau : pour un plan communal GIRE
6.2.1. Le contexte
Carte d’identité de la Commune de Saut d’Eau
Superficie : 179 km²
Population : 42.000 habitants
90% en zone rurale
4 sections : Rivière Canot, La Selle, Coupe Mardi Gras et Montagne Terrible
Localisation : à 3 heures de route (de piste !) de Port-au-Prince
Difficultés de déplacement (piste dégradée, assiette emportée lors des inondations)
Ressources en eau :
Apparemment abondantes (en novembre l’eau coule de partout) dans les ¾ du territoire avec
au moins 6 rivières dont l’Artibonite, de nombreuses sources
Pluviométrie :
88 sources, 3 SAEP dans les sections communales de Rivière Canot et Coupe mardi Gras
eau plus rare pour ¼ du territoire communal en altitude (section de Montagne Terrible et
Masicot)
Activités :
- agriculture
- un lieu de pèlerinage (chaque année au 16 juillet, 20.000 visiteurs)
- tourisme (attraction : les chutes d’eau)
Nombreux comités (points d’eau, irrigants)
Organisation du secteur de l’eau
Nombreuses structures de gestion :
- comités d’adduction d’eau potable (CAEP) ;
- comité d’irrigants ;
- CASEC ;
- organisations de base ;
- ONG :
o CONCERN (priorité à la santé) ;
o CPH (encadrement technique) ;
o PROTOS ;
o …
- SNEP ;
- DDA ;
- BAC ;
- …
Usages de l’eau :
 Alimentation en eau par anciens postes POCHEP, captages de sources, bornes
fontaines, avec un taux de couverture variable ;
 Eau utilisée pour l’irrigation (périmètres plus ou moins aménagés, captage de
sources) ;
103
 Aménagements réalisés par CONCERN : 14 sources captées, 12 fontaines, 4 lavoirs,
…;
 L’eau est payée (forfaitairement) en juillet de chaque année.
Quelques problèmes :
- problèmes techniques et organisationnels des systèmes d’eau potable existants ;
- qualité de l’eau douteuse (au niveau des sources captées) ;
- périmètres irrigués mais avec infrastructures archaïques ne permettant pas de valoriser
le potentiel irrigable ;
- utilisation de l’eau de sources pour irrigation mais problème de régularité ;
- problème d’approvisionnement dans la section de Montagne Terrible et à Masicot :
long déplacement des populations pour trouver une eau de mauvaise qualité ;
- ailleurs, nombreuses sources mais non aménagées, mauvaises pratiques et problèmes
d’hygiène et de santé ;
- manque de techniciens qualifiés ;
- …
Dlo se lavi
un projet mené par PROTOS et CONCERN Worldwide Irlande
Financement : Communauté européenne (74,9%)
Durée : 4 ans (démarrage : 1er février 2004)
Objectif global :
Contribuer à la valorisation durable et équitable des ressources en eau dans la commune de
Saut d’Eau en favorisant une utilisation des eaux de pluies, rivières et sources pour satisfaire
les besoins en terme d’accès en eau potable et pour la production agricole, tout en respectant
la nature et l’écologie de la commune.
Objectifs spécifiques :
1) renforcer les capacités d’organisation et de gestion des acteurs locaux ;
2) améliorer de façon durable et équitable l’accès à l’eau potable ;
3) améliorer de façon durable et équitable l’accès à l’eau d’irrigation et la mise en valeur des
terres irrigables.
Quelques réalisations par rapport aux objectifs spécifiques45
Objectif 1 :
- atelier d’ouverture en décembre 2004 ;
- mise sur pied des structures représentatives ;
- …
Objectif 2 :
- inventaire des sources ;
- réalisation d’ouvrages (5 ouvrages de captage construits, 3 en cours de construction) ;
- contrôle de la qualité des eaux avec le kit DelAgua ;
- étude technique concernant le stockage en citerne à Coiscou ;
- …
Objectif 3 :
- voir CPH46
45
46
rencontre avec Arsène LUCIEN, Ing. de CONCERN, Saut d’Eau, nov. 2005.
Nous n’avons pu rencontrer les responsables de CPH lors de la première mission.
104
Réflexions relatives à ce projet :
- importance de l’Ingénierie sociale menée par CONCERN et présence de nombreuses
organisations de base ;
- un processus démocratique de constitution et de participation des acteurs locaux ;
- un manque d’implication des communes (avec présence de 3 représentants de Saut
d’Eau mais pas de la Mairie) et des services de l’Etat ;
- la GIRE : CONCERN est favorable mais notion mal connue ;
- des déficiences techniques dans la construction de certains ouvrages d’alimentation en
eau ;
- mais une satisfaction des bénéficiaires ;
- la prise en compte insuffisante des bassins versants et de la protection des captages ;
- irrigation : voir CPH
- …
6.2.2. Analyse de la GIRE à Saut d’Eau (application de la méthode SEPO)
Les succès
-
une structure de participation existante (avec une implication de la population)
constituée par des organisations de base ;
une expérience de démocratie de l’eau ;
des organisations de base actives ;
une bonne communication au sein des comités ;
l’approche genre prise en compte ;
eau abondante sur une grande partie du territoire ;
des réalisations d’ouvrages d’accès à l’eau ;
un partenariat d’ONG (CONCERN impliqué en Ingénierie sociale) ;
le projet Dlo se lavi : un levier pour la GIRE ;
…
Les échecs
-
performance technique de certains ouvrages à améliorer ;
faible implication communale47 ;
manque de connaissances ;
prise en compte insuffisante des bassins versants ;
abandon des POCHEP par le Ministère ;
le SNEP n’a pas pris la relève ;
pas de BAC ;
problèmes d’hygiène persistants ;
…
Les potentialités
47
des ressources disponibles ;
un partenariat déjà existant et sur lequel on peut bâtir la GIRE ;
La Commune de Saut d’Eau est qualifiée de « politique et opportuniste » par G. Desloovere, (2006).
105
-
des éléments pour développer une culture de l’eau (aspect sacré à valoriser) ;
des possibilités de développement (tourisme, maraîchage, …) ;
un état des lieux hydrologique (réalisé par CPH) ;
CPH va former des techniciens de l’eau ;
…
Les obstacles
-
moyens humains et financiers des communes ? ;
fable rôle de la mairie dans les comités ;
quelle tarification pour l’eau ;
limites communales différentes d’un BV ;
limites des divers sous-bassins difficiles à appréhender ;
faible présence des services de l’Etat ;
méconnaissances de la GIRE ;
…
6.2.3. Pour renforcer la GIRE à Saut d’Eau
Il conviendrait d’élargir la structure de participation existante afin d’y associer les autres
acteurs de l’eau et pouvoir intégrer l’ensemble des usages et fonctions de l’eau. Cette
structure serait amenée à développer le plan directeur prévu par le projet « Dlo se lavi » et en
faire un plan GIRE complet. Une des difficultés réside dans le fait que les limites communales
ne sont pas adaptées pour un plan GIRE. Aussi, il serait utile de susciter des plans dans
d’autres communes voisines avec lesquelles un même BV est partagé et mettre ces plans
communaux en cohérence avec un plan de sous-bassin.
Aspects à valoriser :
- importance des besoins d’ordre « sacré » (le Vaudou, un appui à une gestion durable
de l’eau) ;
- volet santé (important pour CONCERN) ;
- impliquer les comités dans la collecte de données.
106
6.3. Les Moustiques : pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan GIRE pour le
sous-bassin de la rivière Moustiques
6.3.1. Le contexte
Carte d’identité du bassin versant des Moustiques
Superficie : 975 carreaux de 1,3 ha
Population : 35.000 habitants + 1.200 agriculteurs non résidents
Parties des Communes de Port-de-Paix et Bassin bleu
Département du Nord - Ouest
Arrondissement de Port-de-Paix
Agriculture : Bananes, Maïs, …
Elevage : Bovins, Moutons, Chèvres
Charbon de bois
Petits commerces
Pluviométrie : 300 à 400 mm pluies irrégulières
La période habituelle de pluie d’octobre à décembre n’est plus respectée
Sols fertile : argilo-limoneux
6 sources non captées sur la même ligne ? et ravines nombreuses
44 canaux d’irrigation dont 15 concernés par le projet PROTOS/ODRINO
Absence de cours d’eau permanents
Activités :
Organisation du secteur de l’eau
Quelques acteurs dans le secteur de l’eau :
- ONG :
ODRINO ;
CARE (activités dans le reboisement) ;
…
- DDA (réparation de canaux) ;
- Comités d’irrigants (1 comité par canal) ;
- 3 comités d’irrigation : Foison, Poste Métier, Passe Catabois ;
- Comités d’eau potable (Poste Métier, Passe Catabois, …).
ODRINO travaille avec des structures locales érigées par et pour les projets : comités d’eau
potable et comité d’irrigants. Selon les responsables, l’approche développée a permis à la
population de gérer le projet en collaboration avec les autorités décentralisées, avec les 3
CASEC qui dépendent de la mairie de Port de Paix.
Quelques caractéristiques du bassin versant de la rivière Moustiques :
- La rivière Moustiques possède 2 sources : Anne –Marie et Trois Sources ;
- Canaux d’irrigation en terre battue à 100% vulnérable ;
- Pas de routes goudronnées ;
- Débit en diminution ;
- Milieu dégradé ;
- Manque de maîtrise de l’eau ;
- Manque d’expertise ;
107
- Problème de drainage ;
- Salinisation du sol.
Projet PROTOS – UEBH/ODRINO
Irrigation sur la rivière Moustiques dans une perspective de Gestion Intégrée des Ressources
en Eau Contrat FOOD/2004/085-566
Objectifs globaux :
- amélioration des conditions de vie des gens travaillant la terre dans le BV
Moustiques ;
- valorisation optimale des ressources naturelles, tout en préservant l’écosystème et les
intérêts des générations futures ;
- renforcement des acteurs locaux de développement ;
Objectif spécifique :
- sécuriser la production alimentaire dans le BV à travers une valorisation optimale de
l’eau ;
3 catégories d’activités :
- les activités de renforcement et d’intégration des acteurs clés pour une concertation entre les
différents acteurs dans le cadre d’une approche intégrée (les planteurs, les comités de canaux :
2-3 personnes par canal, l’association d’irrigants : 20 personnes séparée en trois groupes, les
services étatiques (DDA-NO), les autorités locales). Après la réalisation des premiers canaux,
la compréhension et la motivation des usagers est améliorée.
- les activités techniques en matière d’eau :
- protection des ressources hydriques (diagnostic végétation, plantations,
identification de sources) ;
- barrage souterrain (expérience pilote) ;
- réhabilitation de 15 périmètres (restauration prises d’eau, traversées de route,
suivi des jardins) ;
- étude de drainage (et possibilité de mettre en culture la partie basse du BV) ;
- les activités en relation avec la banane plantain, la principale culture de la zone
- autres activités :
- CICDA a analysé le fonctionnement des comités de canaux et de l’association
d’irrigants ;
- Un expert en GIRE et modélisation a effectué une mission en octobre 2005, en vue
d’une amélioration des connaissances pour une gestion de l’eau par temps de crue et
par temps sec, la possibilité d’études hydrologiques avec placements de nombreux
pluviomètres et limnimétres et réalisation d’un plan synoptique SIG (réseau
hydrologique rivières ravines sources, périmètres, ouvrages, …) ;
- Visite SNRE afin d’évaluer l’ancienne station limnimétrique et identification des
sites de mesure du débit.
Réflexions relatives à ce projet
- ODRINO, sous la direction de l’Ingénieur Bruce Robinson, figure charismatique, est
bien implanté dans le BV. Cette ONG est sur tous les fronts en maniant à la fois le
béton et le génie civil et les actions d’animation et de sensibilisation ;
- le volet eau potable n’a pas été pris en compte au départ de ce projet mais fait partie
des activités d’ODRINO ;
108
-
-
réalisations techniques de génie civil importantes et coûteuses : les ouvrages en béton
armé sont impressionnants et très résistants, robustes et durables mais de tels
investissements pourront-ils être rentabilisés ? Une évaluation de ce projet pose
d’ailleurs la question suivante : Faut-il construire pour durer ou entretenir pour
renouveler ? et Comment maximiser la part des installations qui peut être facilement
renouvelée par un entretien continu, et minimiser le risque pris par le comité de
gestion sur des ouvrages dont il ne peut maîtriser le renouvellement ?(HydroConseil) ;
présence de nombreux comités (en eau potable, en irrigation) ;
Etant donné la variabilité du régime des eaux avec des débits torrentiels de courte
durée48, ODRINO vise plus grand et plus haut pour tenter de retenir cette eau douce
qui présente de très courts temps de séjour avant son rejet en mer. Aussi, des projets
ambitieux sont envisagés par ODRINO. Parmi ceux-ci, l’installation de grands
barrages (10m de haut) pour créer des réservoirs d’eau, le transfert d’eau du bassin de
Trois Rivières vers les Moustiques, la construction d’un pont sur Trois Rivières à Portde-Paix. Mais il convient avant tout de bien analyser la situation et l’impact des
incidences de ces installations dans un contexte d’approche globale. Actuellement, on
manque encore de connaissances à ce propos. Ainsi, les réservoirs créés par les
barrages ne risquent-ils pas de subir le phénomène de sédimentation ?
6.3.2. Analyse de la GIRE dans le bassin versant des Moustiques (application de la méthode
SEPO)
Les succès
- participation communautaire ;
- commune intéressée et participante (selon G. Desloovere, 2006) ;
- fourniture d’eau potable par tuyau à Poste Métier, Passe Catabois (réalisations
concluantes) ;
- canal Passe Catabois, reboisement, protection des sources ;
- bcp d’arbres fruitiers (avocats, oranges, citrons, …) déjà plantés ;
- nombreux comités d’association ;
- …
Les Echecs
- manque de pluie et apports variables ;
- eau salée et manque de puits ;
- plusieurs canaux ne fonctionnent pas ;
- manque de participation dans les organisations ;
- diminution de production agricole à 80% ;
- décapitalisation économique des familles ;
- le cyclone Jeanne (2004 ?) « a pris tout ce que nous avions » ;
- perte de bétail ;
- érosion plus importante ;
- pas de barrages de capacité suffisante pour conserver l’eau ;
- rivière mal drainée et beaucoup de terre dévastée ;
- pas d’usines pour la transformation des produits ;
- pas de bonnes routes pour transporter les récoltes ;
- …
48
Face à une eau en furie, les murs de terre des canaux ne suffisent pas (B. Robinson) !
109
Les Potentialités
- les sources et plus spécialement Trois Sources, pourraient donner plus d’eau ;
- présence des ONG ;
- conservation de la rivière ;
- participation dans les comités et culture de concertation ;
- la proximité de Trois Rivière à dévier vers le BV des Moustiques ;
- un (des) projet(s) de grands barrages (Haut : 10 m) et de grands réservoirs ;
- un projet de pont sur Trois Rivières ;
- entretien des routes ;
- conservation de l’eau ;
- reboisement ;
- encadrement possible par de nombreuses ONG : ODRINO, PROTOS, CARE, et
DDA ;
- potentialités en terres disponibles, qui peuvent être arrosées en vue d’une production
agricole ;
- un début de SIG PROTOS UTSIG et un projet de modélisation numérique du BV ;
- un projet de plan global de renforcement de la sécurité alimentaire dans le Nord-Ouest
(DDANO) ;
- …
Les obstacles
- manque de données ;
- manque de participation par les bénéficiaires ;
- manque d’argent ;
- manque de techniciens ;
- manque d’encadrement ;
- manque d’appui et d’encadrement par l’Etat ;
- rareté de la pluie ;
- cyclones, tremblements de terre ;
- manque de semences et matériel agricole
- développement de la maladie SIGATOKA ;
- manque de moyens d’éducation ;
- la faim en absence de pluie (et le départ de nombreux habitants) ;
- manque d’hôpital et infrastructures ;
- pas d’autres sources d’énergie que le bois ;
- poursuite du phénomène de salinisation ;
- …
6.3.3. Propositions pour renforcer la GIRE dans le BV des Moustiques
Objectif :
Elaboration et exécution d’un plan GIRE pour le sous-bassin de la rivière Moustiques
Programme d’activités proposé :
1) Mettre en place un secrétariat permanent ou une cellule d’animation et de coordination
(différente d’ODRINO ? PROTOS ne pourrait-elle pas jouer ce rôle ?) ;
2) Mise en place d’un comité de sous-bassin GIRE (à partir de représentants des comités
existants mais en veillant à un équilibre entre usagers / collectivités locales / services
de l’Etat / Opérateurs) ;
110
3) Développer un observatoire du BV Moustiques et des indicateurs vérifiables :
expertises externes, expertise locale à valoriser, SIG qui prend en compte toutes les
fonctions et usages de l’eau, qui dresse l’inventaire des réalisations, ... ;
4) Par la concertation, le comité définit des objectifs et un programme d’actions
concrètes ;
5) Mise en œuvre des actions par les membres du comité ;
6) Suivi et évaluation du programme d’actions par la cellule de coordination ;
7) Communication, sensibilisation et programmes d’éducation à développer par la cellule
de coordination.
Une visibilité de la démarche GIRE à travers des réalisations concrètes est absolument
indispensable. Ce point de vue est également partagé par l’Ingénieur d’ODRINO pour qui la
GIRE est une démarche à long terme mais s’il n’y a pas de résultats visibles, c’est difficile de
« vendre » la démarche auprès des acteurs locaux.
On peut prévoir une période de trois années pour permettre une élaboration du plan GIRE.
Pendant cette période, les activités continuent mais tout en essayant d’intégrer les principes de
la GIRE et en faisant régulièrement référence au comité de sous-bassin.
Ce plan GIRE Moustiques peut constituer une expérience pilote telle que suggérée par le
projet de loi-cadre eau, d’où l’importance d’impliquer les services de l’Etat et les communes.
Remarques :
- Etant donné l’importance de la rivière des Moustiques, on pourrait aussi introduire
dans ce projet la notion de contrat de rivière ;
- Intérêt de renforcer les communes en leur donnant des responsabilités de maître
d’ouvrage ;
- Ce plan GIRE est à mettre en relation avec le projet de plan global de renforcement de
la sécurité alimentaire dans le Nord-Ouest (DDANO) et particulièrement avec le sousprogramme « Maîtrise de l’eau » dans lequel est notamment prévu la construction de
citernes et impluviums, bassins de rétention, lacs collinaires, aménagements de
ravines, barrages, … ;
6.4. Conclusions du chapitre 6
Sans attendre la définition d’un cadre GIRE à l’échelle MACRO, à travers ces trois études
de cas, nous proposons que PROTOS et ses partenaires mènent des expériences pilotes de
GIRE, une à une échelle insulaire, une au niveau d’un sous-bassin versant, une autre à
l’échelon communal.
Ces expériences pourraient constituer autant de tests grandeur nature de ce que pourrait
être la GIRE en Haïti et inspirer les institutions dans l’établissement d’un cadre
organisationnel GIRE définissant les conditions et modalités d’élaboration et d’application
de plans GIRE. Ces propositions veulent être pragmatiques en mettant tout en œuvre pour
assurer une visibilité de la GIRE sur le terrain.
Chaque cas étudié présente des spécificités propres, tant au point de vue des réalités
environnementales qu’au niveau du contexte socio-culturel. Dans deux des trois cas,
PROTOS et ses partenaires sont déjà engagés dans des projets de développement. Il
s’agira de capitaliser au mieux ces projets existants, tout en réorientant et en développant
certains aspects. Dans le troisième cas, les bonnes relations entre CONCERN et PROTOS
sont prometteuses pour faire de l’île de la Gonâve une référence GIRE, tant sur le plan
national qu’international.
111
7. Conclusions et recommandations
Au terme de cette analyse, nous nous trouvons face à un inquiétant dilemme :
- un pays au bord d’un désastre écologique et humain qui a déjà atteint le point de nonretour et pour lequel des ONG comme PROTOS ne pourront que s’épuiser face à des
institutions incapables d’assurer un cadre opérationnel et un minimum de sécurité pour
des actions efficaces ;
- malgré toutes les difficultés, un pays où il n’est pas exclu que la GIRE devienne réalité
et que PROTOS et ses partenaires puissent jouer un rôle moteur dans cette voie.
Nous avons résolument opté pour la seconde possibilité, non sans hésitations. Le retrait des
ONG ne ferait que précipiter plus rapidement le pays dans une situation chaotique
irréversible.
A travers les informations fournies par l’équipe d’encadrement PROTOS en Haïti, les
documents consultés (voir biblio) et les rencontres d’acteurs lors des deux missions en
novembre 2005 et février-mars 2006, le principal constat peut se décliner en trois éléments :
- un Etat haïtien dans l’incapacité d’apporter des réponses satisfaisantes aux besoins d’une
population en pleine croissance ;
- une situation d’urgence à gérer avec en priorité l’accès à l’eau ;
- l’absence de structure(s) de coordination du secteur.
C’est essentiellement cette dernière problématique qui a été soulevée par la plupart des
personnes rencontrées et qui régulièrement est affichée dans les différents rapports d’analyse
du secteur de l’eau en Haïti. La présente étude constitue-t-elle un rapport de plus qui renforce
cette constatation ?
Même si cet élément demeure un point essentiel pour la mise en place d’une politique de l’eau
efficace, dès l’instant où on envisage l’analyse sous l’angle de la GIRE, la problématique se
généralise à l’ensemble des domaines et composantes de l’eau à travers les dimensions du
développement durable (aspects environnementaux, techniques, socio-culturels,
économiques).
C’est dans ce sens, qu’au terme de cette analyse, nous souhaitons mettre en exergue les
principaux éléments caractérisant la problématique de l’eau en Haïti et rappeler les principales
recommandations évoquées dans ce rapport.
La République d’Haïti est un petit pays qui cumule de nombreux handicaps : un passé
douloureux, une croissance démographique importante, de fortes pressions sur le sol et sur les
ressources naturelles, des difficultés d’organisation, une situation chaotique et une insécurité
chronique, … Cette situation place le pays dans une position dramatique en rupture avec un
développement durable. Une absence de vision et une difficulté de construire à long terme un
modèle de développement caractérisent la situation d’Haïti où de nombreuses initiatives
revêtent un caractère intérimaire.
Dans le domaine de l’eau, bien que bénéficiant à priori de potentialités (pluviométrie annuelle
de 1.400 mm), les besoins sont loin d’être satisfaits. D’une part, cette eau douce venant du
ciel transite trop rapidement dans les bassins versants avant de se perdre en mer. D’autre part,
la mauvaise organisation des usages accentue les difficultés de satisfaire les besoins des
populations dans un contexte de développement durable.
L’analyse de l’organisation du secteur de l’eau a pu montrer les difficultés institutionnelles
mais tout en dégageant cependant quatre leviers en faveur de la GIRE en Haïti qu’il
112
conviendrait de valoriser : les travaux relatifs à la préparation du décret sur la gestion de
l’environnement et la reformulation de la politique de l’eau et le projet de loi-cadre, ainsi que
deux rencontres scientifiques l’une consacrée explicitement à la GIRE, l’autre à la gestion des
bassins versants. Par ailleurs, Haïti ne pourra faire l’impasse sur la préoccupante question
relative à l’accroissement démographique de sa population au sein d’un espace proche de
limites de saturation.
Une analyse de la GIRE au niveau MACRO, traduite par l’usage de la méthode SEPO a
permis de mettre en exergue les éléments positifs et négatifs, passés et futurs, en faveur ou
non de la GIRE en Haïti. Même si les échecs et obstacles relevés sont supérieurs aux succès et
potentialités, nous pensons qu’il est toujours possible de mettre en chantier un processus
GIRE, notamment à travers les 5 étapes qui ont été proposées :
- Un libre blanc pour la GIRE en Haïti ;
- Une culture de l’eau à partir d’une mobilisation citoyenne ;
- Un nouveau cadre législatif : un code GIRE ;
- Des outils de planification et de gestion ;
- Des structures d’accompagnement (un observatoire national, un centre de
compétences, des structures de financement, une police de l’eau).
Cette approche au niveau MACRO est sensée s’appuyer sur des institutions fortes capables de
développer un cadre organisationnel performant et de se doter des moyens humains et
financiers nécessaires à la mise en œuvre d’une politique de l’eau. Dans ce sens, la situation
est dans les mains des dirigeants de ce pays, accompagnés par la communauté internationale,
et les ONG sont relativement démunies face à l’inertie étatique.
Aussi, sans attendre l’installation d’un climat favorable à la GIRE, au niveau national, à partir
de trois études de cas, nous avons montré qu’il était possible de tenter des expériences GIRE
en lien avec les réalités de terrain et dans lesquelles, les ONG et PROTOS en l’occurrence
peuvent s’investir. Des démonstrations grandeur nature de ce que pourrait être la GIRE en
Haïti ne sont-elles pas finalement les meilleurs arguments pour en faire une préoccupation
nationale ?
En termes de recommandations, nous voulons rappeler ci-dessous les principaux éléments à
prendre en compte en vue d’un renforcement de la GIRE.
Concernant la gestion des ressources en eau et des milieux :
- mener une politique de rétention d’eau en améliorant le stockage dans des réservoirs
naturels ou en créant des réservoirs artificiels (impluviums) particulièrement dans les
zones de montagnes. Ce genre d’actions devrait être réalisé dès les têtes de bassin, en
profitant de l’altitude et des pentes pour développer une distribution en gravitaire vers
l’aval ;
- utiliser des techniques modernes concernant les usages d’irrigation en vue d’une
utilisation rationnelle de l’eau ;
- prendre en compte les besoins énergétiques du pays en diversifiant les sources tout en
étant moins dépendant de la fourniture de bois de feu et de charbon de bois ;
- élaborer et mettre en œuvre un plan d’occupation des sols et des plans d’urbanisme,
particulièrement dans les villes les plus importantes, en tenant compte de l’accès à
l’eau ;
- développer une politique de protection des bassins versants à travers une gestion
intégrée des milieux ;
113
Concernant l’organisation du secteur :
- mettre en adéquation les services offerts en réponse aux demandes et aux besoins ;
- élaborer un code de l’eau et veiller au renforcement des institutions ;
- définir une structure organisationnelle et lui donner les moyens de fonctionnement ;
- veiller à une intégration des politiques (aménagement du territoire, urbanisme,
environnement, conservation de la nature, démographie, santé, éducation, …) ;
- favoriser la coopération Sud-Sud, en complément de l’aide internationale Nord-Sud.
Concernant la mise en œuvre de la GIRE :
- privilégier des initiatives en faveur d’expériences de terrain à un niveau local (sousbassin) et assurer une visibilité de la démarche à travers la réalisation d’actions
concrètes ;
- veiller à l’encadrement de ces expériences par une structure permanente de
participation et une cellule d’ingénierie sociale spécifiquement chargée de l’animation
et de la coordination des projets.
Concernant le rôle de PROTOS et de ses partenaires :
- différencier les missions de coordination des mission techniques d’appui à la maîtrise
d’ouvrage, à la gestion des infrastructures ou à l’accompagnement direct dans le
fonctionnement des comités d’usagers ;
- les missions de coordination pourraient être assurées par PROTOS, les ONG
partenaires pouvant poursuivre leurs actions ponctuelles, tout en veillant à une
évaluation régulière de celles-ci ;
- dans le cadre de la décentralisation, renforcer les collaborations avec les communes.
Au final, malgré les contraintes et la situation préoccupante d’Haïti, le défi de rendre la GIRE
effective dans ce pays mérite d’être relevé en privilégiant des actions locales dans lesquelles
les ONG pourraient continuer d’apporter leur contribution. Parmi celles-ci, PROTOS et ses
partenaires possèdent un savoir-faire qui mérite d’être valorisé.
114
Abréviations et Acronymes
AEPA
BAC
BID
BM
CAEP
CAEPA
CAMEP
CAMO
CARE
CAR Haïti
CASEC
COCEP
COCEPA
CONADEA
COSEP
CORDAID
: Approvisionnement en Eau Potable et Assainissement
: Bureau Agricole Communal
: Banque Interaméricaine de Développement
: Banque Mondiale
: Comite d’Adduction d’Eau Potable
: Comite d’Adduction d’Eau Potable et Assainissement
: Centre Autonome Métropolitain d’Eau Potable
: Comite d’appui a la Maîtrise d’Ouvrage
: Cooperation for American Relief Everywhere
: Cellule d’appui régionale Haïti
: Conseil d’administration De Section Communale
: Comité Communal d’Eau Potable
: Comité Communal d’Eau Potable et d’Assainissement
: Conseil National de l’Eau et de l’Assainissement
: Comité de Soutien (et d’encadrement) pour l’Eau Potable
: Catholic Organisation for Relief and Development AID
CPH
CREPA
CCI
CECI
CPH
CREPA
DDA
DIA
DIEPA
DPSIR
EPPLS
GIRE
GTIH
GRET
GTZ
ICC
MINUSTAH
MPP
MTPTC
ODRINO
OMS/OPS
ONEPA
ONEV
PEPA
PFPE
POCHEP
PROTOS
SEMANAH
SIGR
: Comité Protos Haïti
: Conseil de Régulation de l’Eau Potable et de l'Assainissement
: Cadre de Coopération Intérimaire
: Centre Canadien de Coopération International
: Comité Protos Haïti
: Conseil Régulation de l’Eau Potable
: Direction Départementale Agricole
: Direction des Infrastructures Agricoles
: Décennie Internationale de l’Eau Potable et d’Assainissement
: Driving Forces, Pressures, States, Impacts, Responses
: Entreprise Publique de Promotion de Logements Sociaux
: Gestion Intégrée des Ressources en Eau
: Groupe Technologie Intermédiaire d’Haïti
: Groupe de recherche et d'échanges technologiques
: Gesellschaft fur Technische Zusammenarbeit
: International Child Care
: Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti
: Mouvement Paysan de Papaye
: Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications
: Organisation du Développement Rural Intégré du Nord Ouest
: Organisation Mondiale/ Panaméricaine de la Santé
: Office Nationale d’Eau Potable et d’Assainissement
: Observatoire National sur l’Environnement et la Vulnérabilité
: Plateforme des organisations du secteur eau potable et assainissement
: Programme de Formulation d’une Politique de l’Eau
: Poste Communautaire d’Hygiène et d’Eau Potable
: Projectgroep voor Technische OntwikkelingsSamenwerking
: Service Maritime et de Navigation d’Haïti
: Service d’Irrigation et de Génie Rural
115
SNEP
SWOT
TPTC
UEBH
UE
UNICEF
URSEP
USAID
UTSIG
WASAMS
ACDI
AEP
AFD
ASSODLO
BDS
BNC
BNRH
ED’H
FAES
FENU
FOKAL
FSE
GTIH
GRET
IHSI
LGL.SA
MSPP
OMS
ONEPA
OTM
PNUD
POCHEP
SAEP
SNEP
SNRE
TPTC
: Service National d’Eau Potable
: Strenghts Weaknesses Opportunities Treaths
: Travaux Publiques Transport et Communication
: Union Évangélique Baptiste d’Haïti
: Union Européenne
: Fonds des Nations Unies pour l'Enfance
: Unité Reforme du Secteur Eau Potable
: United States Agency of International Development
: Unité de Télédétection et de Systèmes d’Information Géographique
: Système de Suivi du Secteur de l’Eau Potable et de
l’Assainissement Water and Sanitation Monitoring
System (OMS)
: Agence Canadienne de Développement International
: Adduction en Eau Potable
: Agence Française de Développement
: Association Haïtienne pour la Maîtrise des Eaux et des
Sols
: Bureau Déconcentré du SNEP
: Banque Nationale Crédit
: Banque Nationale de la République d’Haïti
: Electricité d’Haïti
: Fonds d’Assistance Économique et Social
: Fonds des Nations Unies pour l’Équipement
: Fondation Connaissance et Liberté
: Fonds Santé et Éducation
: Groupe de Technologie Intermédiaire d’Haïti
: Groupe de Recherche et Technologie
: Institut Haïtien de Statistiques et d’informatique
: Lalonde, Girouard, Letendre & Associes
: Ministère de la Santé Publique et de la Population
: Organisation Mondiale de la Santé
: Office National d’Eau Potable et d’assainissement
: Organisation Tiers Monde
: Programme des Nations Unies pour le Développement
: Poste Communautaire d’Hygiène et d’Eau potable
: Système d’Alimentation Eau Potable
: Service National d’Eau Potable
: Service National des Ressources en Eau
: Travaux Publics Transport et Communication
116
LISTE DES PERSONNES RENCONTREES
Première mission du 2 au 11 novembre 2005
Encadrement de la mission :
Anne COUTTEEL
PROTOS
Tom D’HAYER
PROTOS
[email protected]
[email protected]
À Port-au-Prince
Evens EMMANUEL
Université QUISQUEYA
Labo. Environnement
[email protected]
[email protected]
Eric BALTHAZAR
Consultant
Pierre Philippe JEAN
DG SNEP
Sara MATHIEUSSENT
Consultante CCI
Kary JEAN JEUNE
Pierre OGE
Yvelt CHERY
MARNDR-DIA-SNRE
Gerrit DESLOOVERE
Vice-Consul Belgique
Carine ROENEN
Directeur Général CONCERN
Cécile BERUT
FONHADI
CICDA
Astrel JOSEPH
MDE
Yolande POULTRE
URSEP
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
Bibliothèque PNUD
A Saut d’Eau
Arsène LUCIEN
CONCERN (Saut d’Eau)
A La Gonâve
Equipe CONCERN
Plate-forme EAU
117
Seconde mission du 22 février au 4 mars 2006-02-25
Encadrement de la mission :
Anne COUTTEEL
PROTOS
Tom D’HAYER
PROTOS
Martine HAENTJENS
PROTOS
[email protected]
[email protected]
À Port-au-Prince
Evens EMMANUEL
Université QUISQUEYA
Labo. Environnement
[email protected]
[email protected]
À La Gonâve
Laurie RICHARDSON
Denise CONFIDENT
Assistante Direction Responsable Programmes CONCERN
Equipe CONCERN
Plate-forme EAU
CONCERN (Renforcement structure locale à La Gonâve et Saut
d’eau) – pas rencontrée
A Saut d’Eau
Arsène LUCIEN
CONCERN (Saut d’Eau)
Comité Dlo se lavi
A Moustiques
Bruce ROBINSON
Ingénieur responsable ODRINO
Equipe ODRINO
Comités d’irrigants
Comités d’eau potable
118
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Textes législatifs
Avant-projet de Décret définissant le cadre général de la Décentralisation, les principes de
fonctionnement et d’organisation des Collectivités Territoriales Haïtiennes (2005)
Projet de décret sur la gestion de l’environnement, version soumise au Conseil des Ministres
du 3 septembre 2005, 38p.
MTPTC (2005), Projet de décret-loi cadre du secteur de l’eau potable et de l’assainissement,
version du 11 mai 2005, 23p.
Actes de colloques et séminaires
Colloque International : Gestion Intégrée de l’eau en Haïti (2002)
ACTES
Evens Emmanuel et Paul Vermande (sous la Direction de ), 2002, Gestion Intégrée de l’eau
en Haïti, Actes du Colloque International, Port-au-Prince les 26,27,28 juin 2002, 312 pages
COMMUNICATIONS SPECIFIQUES
Prévision des impacts potentiels des changements climatiques sur les ressources en eau de la
République d’HaïtiLuc BRETOUS, Yvelt CHÉRY, Eduardo PLANOS
Conférence introductive du thème : La gestion durable des système hydriques dans un pays en
développement Professeur Emile TANAWA
L’ingénierie sociale : Une approche nouvelle et performante pour la participation
communautaire dans les projets de développement. Installation d’un réseau d’eau potable
dans quelques quartiers de Port-au-Prince.Dr. Alexandre BRAILOWSKY, Fredy PETITPAS
Le Bélier Hydraulique, une alternative pour l'approvisionnement en eau dans les zones
montagneuses d'Haïti. Patrick VILAIRE Responsable Technique GATAPHY
Regards sur la situation des ressources en eau de la République d’Haïti Evens EMMANUEL
et Per LINDSKOG
Synthèse du Colloque Professeur Emérite Paul VERMANDE
Actes de l’atelier de concertation interministérielle pour la gestion des bassins versants,
Port-au-Prince, juillet 2000, 110p.
MTPTC (SNEP), 2005, Relever le défi des Objectifs du millénaire : Atelier national pour
l’élaboration d’une stratégie eau potable et assainissement en milieu rural, Compterendu, 17p.
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Rapports et publications
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