Stratégies et plans d’action prioritaires spécifiques à la phase hospitalière pour améliorer l’offre de services en santé mentale des patients traumatisés crâniens québécois ELAINE DE GUISE Ph.D. UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL CONGRÈS CIT MONTRÉAL 2016 MONTRÉAL, 29 SEPTEMBRE 2016 DÉCLARATION DE CONFLITS D’INTÉRÊT RÉELS OU POTENTIELS _____________ Je n’ai aucun conflit d’intérêt réel ou potentiel en lien avec le contenu de cette présentation LES OBJECTIFS Identifier les troubles de santé mentale les plus fréquents en traumatologie; Identifier les priorités d’action pour améliorer l’offre de services en santé mentale suite à un TCC: Forum TCC et santé mentale Février 2014. LES TROUBLES DE SANTÉ MENTALE ET LA TRAUMATOLOGIE Les troubles anxieux • Trouble panique • Trouble d’anxiété sociale • Agoraphobie • Phobie spécifique • Trouble d’anxiété généralisée Les troubles liés à des traumatismes ou stresseurs - Le stress aigu - État de stress posttraumatique - Le trouble d’adaptation • Consommation excessive • Troubles de comportement • Les troubles dépressifs American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Persistance de 3 jours à 1 mois après l’exposition ÉTAT DE STRESS AIGU Exposition à la mort, à des blessures graves, ou à la violence sexuelle, effectives ou potentielles, d'une (ou plusieurs) des façons suivantes : Vivre directement l'événement traumatique. Être témoin, en personne, de l'événement vécu par d'autres. Apprendre que l'événement traumatique a été vécu par un membre de la famille proche ou un ami proche. Vivre une exposition répétée ou extrême aux détails pénibles de l'événement traumatique (par exemple, les premiers intervenants ou les policiers). American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Symptômes d'intrusion 9 symptômes ou plus 1. Souvenirs pénibles récurrents, involontaires, et envahissants de l'événement traumatique. 2. Rêves répétitifs pénibles dans lesquels le contenu et/ou l'affect sont liés à l'événement traumatique. 3. Réactions dissociatives (ex. flash-backs) dans lesquelles l'individu se sent ou agit comme si l'événement traumatique se reproduisait. 4. Détresse psychologique intense ou prolongée ou réactions physiologiques marquées en réponse à des indices internes ou externes symbolisant ou ressemblant à un aspect de l'événement traumatique. American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Humeur négative 5. Incapacité persistante de ressentir des émotions positives (par exemple, incapacité à éprouver du bonheur, de la satisfaction ou des sentiments affectueux). Symptômes dissociatifs 6. Altération du sens la réalité de son environnement ou de soi-même (par exemple, se voir à partir de la perspective de quelqu'un d'autre, être dans un état second, ralentissement du temps). 7. Incapacité de se rappeler un aspect important de l'événement traumatique (typiquement en raison d'une amnésie dissociative et non d'autres facteurs tels que blessure à la tête, alcool ou drogues). American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Symptômes d’évitement 8. Efforts pour éviter les souvenirs, les pensées ou les sentiments pénibles à propos de, ou étroitement associés à l'événement traumatique. 9. Efforts pour éviter les rappels externes (personnes, lieux, conversations, activités, objets, situations) qui éveillent des souvenirs, des pensées ou des sentiments pénibles à propos de, ou étroitement associés à l'événement traumatique. American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Symptômes d’activation 10. Perturbation du sommeil (par exemple, difficulté à s'endormir ou à rester endormi ou sommeil agité). 11. Comportement irritable et crises de colère (avec peu ou pas de provocation), généralement exprimés sous forme d'agression verbale ou physique envers des personnes ou des objets. 12. Hypervigilance. 13. Problèmes de concentration. 14. Réaction de sursaut exagérée. American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Symptômes persistants au-delà d’un mois après l’exposition ÉTAT DE STRESS POST-TRAUMATIQUE Exposition à la mort, à des blessures graves, ou à la violence sexuelle, effectives ou potentielles, d'une (ou plusieurs) des façons suivantes : Vivre directement l'événement traumatique. Être témoin, en personne, de l'événement vécu par d'autres. Apprendre que l'événement traumatique a été vécu par un membre de la famille proche ou un ami proche. Vivre une exposition répétée ou extrême aux détails pénibles de l'événement traumatique (par exemple, les premiers intervenants ou les policiers). American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Altérations négatives des cognitions et de l'humeur associées à l'événement traumatique, ayant débuté ou s'étant aggravées après ce dernier : 1. Croyances ou attentes négatives persistantes ou exagérées à propos de soimême, des autres, ou du monde (par exemple, « Je suis mauvais », « On ne peut faire confiance à personne », « Le monde est complètement dangereux », « Mon système nerveux entier est définitivement ruiné »). 2. Cognitions persistantes et déformées concernant la cause ou les conséquences de l'événement traumatique qui amènent l'individu à se blâmer ou à blâmer autrui. American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) 3. État émotionnel négatif persistant (par exemple, peur, horreur, colère, culpabilité ou honte). 4. Diminution marquée de l'intérêt ou de la participation à des activités significatives. 5. Sentiment de détachement ou d'éloignement des autres. 6. Incapacité persistante de ressentir des émotions positives (par exemple, incapacité à éprouver du bonheur, de la satisfaction ou des sentiments affectueux). American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) TROUBLE D’ADAPTATION • Lorsque la réponse à un événement traumatique ne rencontre pas tous les critères de l'état de stress aigu ; • ou lorsque l'exposition à un événement stressant ne correspond pas aux critères de l'exposition à un événement traumatique • Ces symptômes ou comportements sont cliniquement significatifs, comme en témoignent: 1. soit une souffrance marquée, plus importante qu'il n'était attendu en réaction à ce facteurs de stress 2. soit une altération significative du fonctionnement social ou professionnel (ou scolaire). American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) Trouble d’adaptation humeur dépressive: des pleurs, des sentiments de désespoir, etc. Aigu Humeur anxieuse: nervosité, inquiétude, agitation 6 mois Chronique American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Fifth ed.) ÉTUDE DE CAS: ALEXANDRE P. ÉVALUATION MÉDICALE Score à l’Échelle de Glasgow: 12 Fracture de C2 Fractures de la clavicule droite, des côtes et du sternum Contusion pulmonaire Intubation Hypertension intracrânienne Hématome sous-dural fronto-temporal Amnésie post-traumatique de 3 jours ÉVALUATION PSYCHOSOCIALE 24 ans Étudiant en droit Travail à temps partiel dans une épicerie Habite avec sa copine depuis 2 années Consommation régulière d’alcool de cannabis et parfois cocaïne ÉVALUATION COGNITIVE, COMPORTEMENTALE ET AFFECTIVE Capacité réduite à maintenir et diriger son attention Pensée désorganisée Perturbation des fonctions exécutives Colère explosive et comportements parfois agressifs Impulsivité Imprévisible Hyperactivité motrice Désinhibition Labilité Anxiété et dépression RÉINTÉGRATION SOCIO-VOCATIONNELLE ET COMMUNAUTAIRE Incapacité à réintégrer ses études en droit Perte d’emploi Retourne habiter chez ses parents Isolement social Sédentarité Augmentation de sa consommation Trouble dépressif majeur Attaques de paniques et agoraphobie Idées paranoïaques 2 années Centre tertiaire de traumatologie (Réadaptation précoce) Réadaptation intensive à l’interne Consortium de traumatologie Réseau de santé mentale Réadaptation externe (Réintégration communautaire) COMMENT AMÉLIORER L’OFFRE DE SERVICES DES PATIENTS TCC QUI SOUFFRENT DE TROUBLES DE SANTÉ MENTALE? Objectifs de ce forum: Déterminer les priorités d’action pour améliorer l’offre de services en santé mentale suite à un TCC. Identifier des solutions concrètes pour optimiser la prise en charge des troubles de santé mentale dont souffrent les patients ayant subi un TCC au Québec. CONTEXTE THÉORIQUE Limitations suite à un TCC Physiques et fonctionnelles Cognitives Émotionnelles Comportementales Plusieurs études ont démontré qu’en dépit d’améliorations sur le plan physique et fonctionnel, les patients éprouvent des problèmes d’ajustements cognitifs, comportementaux et psychosociaux. Dikmen SS. et al. 2003; Hoofien D,. Et al. 2001; Colantonio A,. et al. 2004; 4. Wood RL and Rutterford NA., 2006; de Guise E, et al. 2008 • Les troubles de santé mentale à la suite d’un TCC sont complexes à traiter car ils nécessitent une offre de services systémique, intégrant différents acteurs du réseau de la santé. • L’accès aux services spécialisés en santé mentale est difficile pour les patients ayant subi un TCC (Pichelsimer E. et al. 2007; Andelic et al., 2014). • Des études menées aux États-Unis et au Royaume-Uni ont démontré le manque de services de santé mentale et de soutien disponible pour les patients TCC et leur famille. Cette situation augmente le risque de dépression, de frustration, d’anxiété et de la charge pour les familles (Chronister J, Chan F. A, 2006; Degeneffe CE. et al. 2011). • Une étude récente menée au Québec a d’ailleurs souligné l’urgence de mettre en place des plans d’action pour implanter une meilleure offre de services en santé mentale pour les victimes de TCC (Swaine et al. 2013). GESTIONNAIRES DES ÉTABLISSEMENTS DU CONSORTIUM QUÉBÉCOIS (SWAINE ET AL. 2013) Environ 75 % des centres n'utilisent pas de procédure systématique de dépistage des troubles de santé mentale chez leur clientèle TCC (17/23). Environ la moitié (52 %) trouvent leurs programmes TCC bien ou relativement bien équipés pour diagnostiquer les problèmes de santé mentale tandis que 48 % pensent qu'ils sont mal équipés. GESTIONNAIRES DES ÉTABLISSEMENTS DU CONSORTIUM QUÉBÉCOIS (SWAINE ET AL. 2013) Tous les programmes font des références pour des troubles de santé mentale à l'extérieur de leur programme au besoin, mais seulement 30 % ont des partenariats ou des ententes officiels. 84 % des centres ne font pas de suivi systématique post congé auprès des patients aux prises avec des troubles de santé mentale. GESTIONNAIRES DES ÉTABLISSEMENTS DU CONSORTIUM (SWAINE ET AL. 2013) Inégalité d'accès et délais très longs de prise en charge par les médecins spécialistes (psychiatres, par exemple). Aucun mécanisme systématique de référence et sous- développement des partenariats et ententes avec les autres services en santé communautaire. INTERVENANTS DU CONSORTIUM (SWAINE ET AL. 2013) Gestionnaires de cas non présents dans tous les programmes. Besoin de formation en santé mentale et TCC. Participants 68 intervenants du consortium de traumatologie 7 décideurs 5 représentants de la communauté Participants Contenu des ateliers: Comment améliorer? Dépistage, évaluation et traitement Partenariats et ententes avec les milieux spécialisés Accessibilité aux soins psychiatriques Transfert de connaissances et formation Figure 1. Nombre d’énoncés produits par groupe et par thème et taux de participation pour l’évaluation des énoncés après l’atelier Priorité de l'ensemble des énoncés: L’urgence d’agir! Incontournable 15% Nécessaire 25% 60% Souhaitable Priorités thématiques 19,3 TRANSFERT DES CONNAISSANCES-FORMATION 28,3 52,4 10,2 PARTENARIAT-ENTENTE 30,5 59,3 10,2 ACCESSIBILITÉ 30,5 59,3 18,7 14,7 DÉPISTAGE-ÉVALUATION-TRAITEMENT 66,7 0 Souhaitable 10 20 Nécessaire 30 40 50 Incontournable 60 70 80 Dépistage-évaluation-traitement 1. Promouvoir l’utilisation d'un même outil de dépistage et d’évaluation dans tous les établissements par les professionnels concernés dans le consortium. 2. Établir une procédure de dépistage des troubles de santé mentale systématique dans tous les établissements. OUTILS DE DÉPISTAGE PC-PTSD (Prins et al. 1999) Patient Health Questionnaire 2” (PHQ-2) (Koenke et al. 2003) PHQ – 9 (Fann et al. 2005) Échelle d’anxiété de Hamilton (Hamilton, 1959) HADS-D (Zigmond A.S., Snaith R.P, 1983) Beck depression and anxiety inventories (Beck AT, Ward C, Mendelson M, 1961; Beck, A. T., & Steer, R. A.,1990) Avez eu des cauchemars du traumatisme où vous y avez pensé quand vous ne vouliez pas? Avez essayé fort de ne pas y penser ou vous avez fait tout votre possible pour éviter des situations qui vous rappelle le traumatisme? Étiez constamment sous vos gardes, attentif ou facilement surpris? Vous sentiez-vous tristes ou détachés des autres, activités ou alentours? Le Primary Care PTSD (PC-PTSD) ¾= PTSD •Prins, A. et al. (1999). The Primary Care PTSD Screen (PC-PTSD). Paper presented at the 15th annual meeting of the International Society for Traumatic Stress Studies, Miami, FL. •National Center for PTSD, http://www.ncptsd.va.gov/facts/disasters/fs_screen_disaster.html Cut-off=3 Kroenke K, Spitzer RL, Williams JB. The Patient Health Questionnaire-2: Validity of a Two-Item Depression Screener. Medical Care 2003, (41) 1284-1294. The PHQ-9 is adapted from PRIME MD TODAY®, developed by Drs. Robert L. Spitzer, Janet B.W. Williams, Kurt Kroenke , and colleagues with an educational grant from Pfizer Inc. HADS 14 items cotés de 0 à 3 Pour dépister des symptomatologies anxieuses et dépressives: 7 ou moins : absence de symptomatologie 8 à 10 : symptomatologie douteuse 11 et plus : symptomatologie certaine. Zigmond A.S., Snaith R.P. The Hospital Anxiety and Depression Scale. Acta Psy chiatr. Scand., 1983, 67, 361-370. Dépistage-évaluation-traitement 3. Mandater le psychologue ou neuropsychologue pour émettre les hypothèses diagnostiques de troubles mentaux de la personne ayant subi un TCC. 4. Amorcer le plus tôt possible, en prévention, les activités thérapeutiques. Reconnaître Dépister Référer Partenariat-Entente 1. Établir une entente formelle/alliance de prise en charge et des corridors de services entre les directeurs d'établissements et de santé mentale Partenariat-Entente 2. Signer des ententes de partenariats entre le consortium TCC, les associations, les établissements de santé mentale et de toxicomanie, les CSSS ainsi que les cliniques médicales afin de faciliter les références. Accessibilité 1. Présence systématique du service social ou de la psychologie dans les équipes. Avoir accès à des consultations psychiatriques auprès des équipes pour les guider dans leurs approches auprès du client (ex. viséo, conférence téléphonique, télémédecine etc….) Transfert des connaissances et formation en TCC et santé mentale Les intervenants des CSSS Futurs médecins et médecins de famille Nouveaux employés Tous les intervenants des établissements du consortium de traumatologie Figure 2. Répartition (en pourcentage), des agents de changement proposés par les participants et identifiés par les experts pour les quatre grands thèmes de discussion Suggestions spécifiques aux centres hospitaliers de traumatologie Créer des ententes particulières pour la clientèle TCC ayant des troubles de santé mentale dans les cliniques spécialisées de première ligne. Possibilité d'hospitalisation dans les hôpitaux ou programmes de psychiatrie en phase aiguë, pour un court délai. Aide d’une infirmière liaison en psychiatrie. de Le patient avec trouble de santé mentale devait être systématiquement transféré à la première ligne au congé de la réadaptation. CONCLUSIONS Cet atelier réflexif provincial a permis d’identifier les agents de changement clés à tous les niveaux pour améliorer l’offre de services en soins de santé mentale pour les patients ayant subi un TCC au Québec. Ces résultats favoriseront la mise en place d’un plan d’action intégratif et systémique au Québec. CONCLUSIONS Bien que les résultats soient basés sur la perception des participants et non sur l’observation directe ou l’analyse complète de la situation actuelle, la démarche rigoureuse de ce projet représente de solides assises vers la prise de décisions concrètes pour prioriser cette problématique. Les données recueillies permettront aux décideurs de connaître les propositions des différents acteurs sur les stratégies et plans d’action à adopter pour les patients victimes d’un TCC qui souffrent de troubles de santé mentale. MERCI! Équipe de recherche Monique Desjardins Marie-Christine Ouellet Frédéric Banville Simon Beaulieu-Bonneau Hélène Audrit Yvonne Richard Stéphane Gagnier Debbie Feldman Bonnie Swaine Participants du consortium de traumatologie