K. Haddad Service de chirurgie viscérale et oncologique. Hôpital Bologhine. Bainem. Alger.
Contusions et Plaies de l’abdomen
Pr. K. Haddad
Service de chirurgie viscérale & oncologique. Hôpital Bologhine Ibn-Ziri. El Hammamet, Alger
1. Introduction
Les traumatismes abdominaux concernent 20 à 30 % des lésions observées en traumatologie (1). La
mortalité est élevée de l’ordre de 10 %. La présence d’un choc hémorragique majore le taux de
mortalité qui peut dépasser les 40 % (2). La prise en charge des traumatismes de l’abdomen s’est
modifiée à la faveur des traitements non chirurgicaux. Le développement des techniques d’imagerie
ont permis l’essor des traitements conservateurs. La prise en charge dépend de la présentation
clinique. L’existence d’un état de choc hémorragique et l’évaluation de sa gravité, vont guider la
stratégie thérapeutique.
Nous distinguons les traumatismes abdominaux fermés ou contusions et les traumatismes ouverts ou
plaies abdominales. Ils seront traités séparément
2. Définition et rappel anatomique
Le traumatisme abdominal se définit comme un traumatisme intéressant la région comprise entre
le diaphragme en haut et le plancher pelvien en bas, quel que soit le point d’impact.
La cavité abdomino-pelvienne est située au-dessous du thorax. Elle contient la plus grande partie
de l’appareil digestif et de l’appareil génito-urinaire.
Ses parois en grande partie musculaires sont fixées sur un squelette osseux représenté :
En haut par le rebord costal inférieur,
Plus bas par le segment lombaire de la colonne vertébrale, encore plus bas par la
ceinture pelvienne
Un ensemble de formations musculaires complète le cadre osseux et le transforme en une cavité
presque close :
En arrière ce sont les muscles spinaux, psoas et carré des lombes
Latéralement, les muscles larges de l’abdomen (grand oblique, petit oblique et
transverse)
En avant, les muscles grands droits, en haut le diaphragme
En bas, le plancher pelvien.
La division anatomique sépare l’abdomen en neuf régions permettant de suspecter l’atteinte de
certains organes selon l’examen clinique (Fig. 1).
K. Haddad Service de chirurgie viscérale et oncologique. Hôpital Bologhine. Bainem. Alger.
Figure 1 : division anatomique et clinique de la cavité abdominale
3. Le concept de « Trauma system » américain (3)
La prise en charge des traumatisés a été transformée à l’occasion de différents conflits armés
du XXeme siècle. La qualité des soins dispensés aux blessés civils dans les années 1960 était
inférieure à celle qui était reçue par les blessés des champs de bataille. Cette organisation
militaire a été alors transposée à la vie civile. Au Vietnam, le temps d’évacuation des blessés
n’excédait pas 35 minutes et l’environnement hostile des zones de combat rendait la
médicalisation précoce des victimes inadaptée. Le système civil mis en place aux États-Unis
reprend ce principe jugeant que le temps d’évacuation prime tout autre paramètre et que
l’accueil des blessés doit être réalisé dans un centre capable de traiter de façon définitive les
lésions.
En 1976, l’American College of Surgeon édite un référentiel comprenant les critères de
désignation des trauma centers, ainsi que son articulation au niveau régional avec la création
de réseaux de soins appelés « Trauma system ». Les blessés sont orientés dans le trauma
centers de différents niveaux en fonction d’une procédure de triage simple appliquée par un
personnel paramédical. Entre la fin des années 1970 et le début des années 2000, la mise en
place d’un « Trauma system » dans chaque état américain fut progressive. En 2002, 35 états
disposent d’une organisation formalisée avec 1154 trauma centers adultes.
L’évaluation de ce système montre une diminution de la mortalité. Sur une période de sept
ans, ils ont observé une réduction de la mortalité de 35 % chez les patients admis dans une
filière de soins reconnue comme « Trauma system».
4. Les contusions abdominales
Une contusion abdominale est définie comme un traumatisme fermé, sans solution de continuité de
la paroi abdominale.
Les principales causes des traumatismes abdominaux graves sont, dans la majorité des cas, les
accidents de la circulation, suivie par les chutes de grandes hauteurs, les accidents sportifs et les
accidents de travail.
K. Haddad Service de chirurgie viscérale et oncologique. Hôpital Bologhine. Bainem. Alger.
Les traumatismes dus aux accidents de la circulation constituent un problème de santé publique
mondiale majeur. On estime à près de 1,2 million le nombre de personnes qui meurent chaque année
dans des accidents de la circulation dans le monde (4). La vitesse est le principal déterminant de la
sévérité des lésions.
4.1. Mécanismes lésionnels
Les trois principaux mécanismes mis en causes sont :
Le choc direct
La décélération brutale
Le blast (ensemble des lésions organiques provoquées par l’onde de choc d’une
explosion).
Les chocs directs provoquent une contusion des organes en regard de la zone de contact. Les chocs
antéropostérieurs ou latéraux sont responsables de contusions des organes pleins (foie, rate, rein,
pancréas). Les organes creux sont plus sensibles à une compression entre la paroi musculaire
antérieure et la paroi postérieure (rachis).
La décélération brutale entraîne un mouvement asynchrone des organes pleins, lourds et pédiculés.
Les mouvements provoquent une traction sur les pédicules jusqu'à la rupture.
4.2. Diagnostic
4.2.1. Examen clinique
À l’accueil du traumatisé, l’interrogatoire s’attache à analyser le contexte et le mécanisme de
l’accident (ceinture, airbag, lieu d’impact, etc..). Ces éléments d’orientation sont à préciser si le
blessé est conscient. Si le blessé est inconscient, il faut interroger les témoins de l’accident ou le
personnel chargé de recueil du traumatisé (pompiers, SAMU, policier…).
L’existence de signes de choc hémorragique (pâleur cutanéo-muqueuse, pouls filant, froideur des
extrémités, tension artérielle basse, agitation) nécessite des mesures de réanimation urgentes.
On recherchera l’existence d’une ecchymose au point d’impact ou sur le trajet de la ceinture de
sécurité. La présence d’une distension abdominale est évocatrice d’une hémopéritoine ou d’un
pneumopéritoine. Un traumatisme du thorax avec fracture des côtes basses fera rechercher une
lésion hépatique ou splénique.
L’examen du périnée doit être réalisé. Une hématurie macroscopique fera évoquer une lésion de
l’arbre urinaire. Une urétrorragie associée à un globe vésical contre-indique un sondage uréthral. En
effet, une fracture du bassin s’associe à une rupture de l’urèthre membraneux dans 5 % des cas.
L’examen clinique permet de rassembler un certain nombre d’arguments en faveur de l’atteinte
péritonéale ou rétro péritonéale mais ne permet pas en général de poser un diagnostic.
K. Haddad Service de chirurgie viscérale et oncologique. Hôpital Bologhine. Bainem. Alger.
4.2.2. Examens d’imagerie
Le bilan morphologique est orienté en fonction de l’état hémodynamique du traumatisé. Le bilan
de première intention comprend : une radiographie du thorax, une échographie abdominale et une
radiographie du bassin.
4.2.2.1. Radiographies
La radiographie du thorax permet de mettre en évidence la présence d’un pneumothorax ou d’un
hémothorax compressif à drainer en urgence.
La radiographie du bassin a un intérêt qu’en cas de choc hémorragique. En effet, la mise en
évidence d’une fracture du bassin associée à un choc hémorragique permet d’évoquer l’existence
probable d’un hématome rétro péritonéal.
4.2.2.2. Échographie abdominale (FAST écho)
Décrite depuis les années 1970 pour l’évaluation des traumatismes abdominaux (5), l’échographie
abdominale de type FAST (focus assessment with sonographie for trauma) s’est largement imposée
comme outil de triage dans les centres de traumatologie en Europe et aux états unis (6). Elle est
décrite pour répondre à une question : hémopéritoine ? oui ou non. La FAST est pratiquée par des
non-radiologues après une courte formation. L’amélioration de la prise en charge des traumatisés en
pré hospitalier a permis à des unités mobiles de réanimation d’être équipées d’échographes portables
permettant parfois un diagnostic pré hospitalier.
En milieu hospitalier, l’échographie abdomino-pelvienne permet de :
Rechercher un épanchement intra péritonéal (hémorragique)
Détecter et de localiser les lésions parenchymateuses (foie, rate, rein…)
Rechercher des lésions vasculaires, lorsqu’elle est couplée au Doppler.
4.2.2.3. Tomodensitométrie (TDM)
La TDM abdomino-pelvienne est la méthode d’imagerie de choix dans l’exploration de l’abdomen
en urgence. La TDM corps entier est devenue l’examen de référence dans le bilan lésionnel des
traumatismes abdominaux et notamment chez le polytraumatisé. Elle est réalisée sans et avec
injection d’un produit de contraste (si pas d’insuffisance rénale). Il s’agit d’un examen moins
opérateur dépendant et peut-être interprété par d’autres médecins. En termes de performance, une
TDM normale constitue un argument en faveur de l’absence de lésions significatives.
Au plan abdominal, la TDM permet de :
Quantifier un hémopéritoine
Visualiser un pneumopéritoine
Caractériser la sévérité du traumatisme de chaque organe
Mettre en évidence des extravasations artérielles du produit de contraste, au temps
précoce.
Dans les centres disposant d’un service de radiologie interventionnelle, une proposition
d’embolisation est alors discutée, permettant l’arrêt du saignement.
K. Haddad Service de chirurgie viscérale et oncologique. Hôpital Bologhine. Bainem. Alger.
À partir des données de la TDM, la classification proposée par l’Américan Association for the
Surgery of Trauma (AAST) est largement utilisée par toutes les équipes prenant en charge des
traumatisés. L’Abbreviated injury scale (AIS) graduent de 1 (atteinte bénigne) à 5 (atteinte
maximale), voir à 6 (avulsion complète de l’organe) les lésions de chaque organe.
4.2.3. La ponction lavage du péritoine (PLP)
La PLP est un examen simple décrit par Root et al en 1965 (7). La PLP était pendant de
nombreuses années l’examen de référence dans le diagnostic des lésions intra-abdominales,
essentiellement l’hémopéritoine. Elle présente une sensibilité de 95 % et une spécificité de 99 %
dans le diagnostic des hémopéritoines. La technique comprend (Fig.2):
Courte incision médiane sous ombilicale sous A/L
Introduction cathéter intra péritonéal
Instillation de 500 à 1000 ml de sérum physiologique
Recueil du liquide par déclivité
En termes de performances, la pratique de la PLP est remise en cause par de nombreuses équipes
depuis l’avènement de l’échographie et de la TDM. En l’absence d’un plateau technique d’imagerie,
la PLP reste un moyen diagnostic performant.
Figure.2 : Technique de la PLP
L’interprétation des résultats est fonction de l’analyse du liquide (Tab.1).
Interprétation des résultats de la PLP
PLP positive
Aspiration d’au moins dix ml de sang
Spontanément ou à la simple pression de l’abdomen
PLP négative
Liquide parfaitement clair
Liquide rosé ou douteux
Faire un examen cytobactériologique du liquide:
- PLP positive si GR > 100 000 ml
Ou GB > 500 ml Ou amylase > 175 UI ml
Ou présence de bilirubine Ou présence de germes,
Ou particules alimentaires
Tableau.1 : interprétation des résultats de la PLP
1 / 16 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !