Saga Information – N° 286 – Avril 2009
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Le métamorphisme régional
du Bas Limousin
Il appartient au type très répandu de métamorphisme
de moyennes pressions et d’assez hautes tempé-
ratures. Ce métamorphisme des marges occidentales
du vieux massif hercynien résulte de l’enfouissement
d’écailles de la lithosphère continentale, lors de la
subduction puis de la collision entre deux plaques
tectoniques, responsables de la création de la chaîne
hercynienne du Dévonien au Carbonifère.
D’ouest en est, ce métamorphisme croît en intensité ;
on parle de gradient métamorphique, et dans notre
cas, de gradient prograde : c’est-à-dire que la tempé-
rature et la pression croissent simultanément, ce qui
n’est pas toujours le cas (figure 1).
Le métamorphisme se traduit aussi en termes de
zones, en ordre croissant de métamorphisme :
anchizone épizone mésozone catazone.
Sur le terrain, on observe, de l’épizone à la méso-
zone, la séquence minéralogique du gradient méta-
morphique croissant et, de la mésozone à la catazone,
des intrusions et un métamorphisme qui va conduire
les roches jusqu’à leur fusion.
Voici donc le programme qui nous a occupés les
deux premiers jours (figure 2) :
• 1. de l’épizone à la mésozone :
- les ardoisières de Travassac : quartzites et mica-
schistes à biotite,
- la vallée du Maumont Noir, Taupineries et Moulin
du Nègre : apparition de la chlorite, des biotites, des
grenats, et observation de l’isograde de la staurolite,
- la gare d’Aubazine : « gneiss gris du Bas Limou-
sin » ;
• 2. de la mésozone à la catazone :
- la carrière de Chambon, à Vergonzac,
- la carrière du tunnel de Bonnel,
- la carrière du tunnel de Cornil,
- la carrière du tunnel des Îles, près de Chameyrat.
De l’épizone à la mésozone
Les ardoisières de Travassac
(arrêt 1.1)
Dans la fraîcheur et le soleil matinal du Limousin,
nous visitons une carrière d’ardoise, très impres-
sionnante par son à-pic vertigineux. Les bancs d’ar-
doise alternent avec des bancs de quartzite en un pen-
dage vertical du plan de schistosité ; la carrière
montre d’immenses pans rocheux de quartzite dressés
qui correspondent à la roche stérile non extraite : les
« pans de Travassac » (figure 3).
Figure 3. Les impressionnants « pans de Travassac » sont des lames
de quartzite d’épaisseur plurimétrique qui se dressent jusqu’à des
dizaines de mètres au-dessus du plancher de la carrière, après
extraction des schistes ardoisiers. Les plans de schistosité des deux
roches ont été redressés verticalement par
les mouvements tectoniques hercyniens.
Ce sont des métasédiments (1) de la série de Don-
zenac, essentiellement des quartzites feldspathiques et
des micaschistes à biotite. À l’origine, il s’agit d’un
complexe volcano-détritique caractérisé par une
alternance de sédiments volcaniques acides, qui vont
donner des quartzites, et de sédiments argileux qui
donneront des argilites.
L’ardoise est une roche sombre à grains fins,
d’aspect satiné, de texture lépidoblastique (du gr.
lepidos : écailles, et blastos : bourgeon), avec des mi-
néraux brillants à peine visibles à l’œil nu dans les
plans de schistosité ; ce sont des micas blancs, comme
la séricite. Elle se débite en feuillets réguliers grâce
au clivage ardoisier parfait.
La carrière est toujours exploitée par la Société des
Ardoisières Bugeat. L’ardoise qui en est extraite,
exempte de pyrite, est une des plus résistante à
l’action du temps. Elle est toujours utilisée, en par-
ticulier dans le cadre de la restauration de monuments
historiques tels le Mont-Saint-Michel et la cathédrale
de Chartres.
Nous nous trouvons là à la limite anchizone-épizone
du métamorphisme du Bas Limousin, à la marge d’un
ancien bassin sédimentaire, et/ou d’effondrement,
continental. Les dépôts d’origine de projections vol-
caniques rhyodacitiques, alternées avec des dépôts de
sédiments terrigènes (surtout d’argile) ultérieurement
remaniés et mélangés, se sont mis en place entre –
470 et – 440 Ma (Ordovicien). Le processus mé-
tamorphique a commencé vers – 410 Ma (Dévonien,
début de l’orogenèse hercynienne). La schistosité est
datée d’environ – 400 Ma.