subalpin n'est-elle pas un indice troublant, quoique tout à fait insuffisant, en faveur de
l'interférence du climat ?
9 On doit reconnaître que les archéologues se sont trop longtemps focalisés sur les sites
qu'ils étudiaient ; ils se sont longtemps enfermés dans une problématique étriquée, sans
se donner davantage de recul dans le temps ou l'espace, ni s'intéresser au développement
d'autres recherches. Si la question des fluctuations lacustres au Néolithique et à l'âge du
Bronze a été reconnue dès les années 1920, les recherches restent cependant limitées
dans l'espace aux seuls sites préhistoriques, et dans le temps aux seules périodes
néolithiques et protohistoriques. Comme si l'on s'efforçait en vain de comprendre un
épisode sans vouloir prendre en considération toute l'histoire à laquelle il appartient, et
comme si les phénomènes en cause (à savoir les fluctuations des lacs subalpins pendant
l'Holocène) n'avaient jamais été perçus globalement ni définis en tant que tels.
10 L'archéologie lacustre s'est ainsi trouvée bloquée dans une sorte de ghetto. Tout s'est
passé comme si elle avait évolué jusque très récemment en vase clos, sans qu'aucun pont
ne soit jamais jeté entre elle et d'autres recherches avec lesquelles elle aurait pu
cependant avoir de fructueux échanges. En effet, en Scandinavie où se sont développées
la palynologie et l'étude paléoclimatique de l'Holocène, s'est amorcée dès les années 1930
avec T. Nilsson, puis à partir des années 1960 avec G. Digerfeldt, une recherche
systématique sur les fluctuations lacustres holocènes et leur signification climatique ;
dans les années 1980, cette recherche a ensuite connu un remarquable développement, en
particulier en Suisse (Lang 1985) et en Pologne (Ralska-Jasiewiczowa et al. 1987 a et b), par
la mise en oeuvre du prograntme IGCP 158 Β de l'UNESCO : « Palaeohydrological changes
in the temperate zone in the last 15,000 years » sous l'impulsion de Β.Ε. Berglund
(Berglund 1979, 1983). C'est dans ce cadre que les deux problématiques, archéologique et
naturaliste, se sont enfin rencontrées (Gaillard, 1985), tandis qu'en France, le programme
DGRST : « Paléoenvironnement holocène des Alpes françaises du Nord et de leur
Piémont » (Vivian 1991) et les fouilles archéologiques de Clairvaux-les-Lacs jouaient le
même rôle (Magny, Richard 1985).
11 Les illustrations (fig. 2, 3 et 4) rendent compte des résultats acquis dans le Jura et les
Alpes du Nord au terme de plus de 10 ans de recherches centrées sur une approche
sédimentologique du contexte climatique dans lequel se sont développés les habitats
lacustres préhistoriques.
12 La figure 2 illustre deux informations différentes :
A. Elle montre une courbe des fluctuations du niveau des lacs du Jura et des Alpes du Nord qui
couvre l'ensemble de l'Holocène. Cette courbe du fait que les variations des plans d'eau ne
sont pas limitées aux seules périodes du Néolithique et de l'âge du Bronze, mais qu'elles
caractérisent tout notre interglaciaire. Elle constitue une synthèse de données collectées
dans les remplissages sédimentaires de 24 lacs différents dont 4 seulement recelaient des
vestiges d'habitats lacustres. L'information présentée ici provient donc principalement de
séquences stratigraphiques étudiées hors de tout contexte archéologique.
B. Elle montre que les fluctuations holocènes des lacs jurassiens et subalpins apparaissent
globalement en phase avec les mouvements des glaciers et de la limite supérieure de la forêt
(ou timberline) dans les Alpes suisses et autrichiennes, et qu'elles peuvent donc être
rapportées à des oscillations du climat.
L'approche paléoclimatique des habitats lacustres Jura et Alpes du Nord
Dynamique du paysage
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