1 Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale

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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Thys F, Delvau N, Templier F, Detaille T, Verschuren F
Correspondance :
Professeur Thys Frédéric
Service des Urgences ( Pr M. Reynaert), Cliniques Universitaires Saint-Luc,
10, avenue Hippocrate ; 1200 Bruxelles. Courriel : [email protected]
OXYGENOTHERAPIE
Introduction
La dyspnée est "la sensation subjective de gêne respiratoire. Elle peut être
l'expression d'une insuffisance ventilatoire patente ou apparaissant à l'effort". Elle est
le plus souvent le symptôme des maladies respiratoires, cardiaques, et voire d'une
maladie métabolique, plus rarement le reflet d'une pathologie névrotique. L'altération
du contrôle de la ventilation, de la pompe ventilatoire ou des échanges gazeux peut
entraîner cette sensation de respiration inconfortable. Au cours de l'insuffisance
respiratoire aiguë, elle s'accompagne d'une hypoxémie avec soit une hypocapnie,
soit une hypercapnie témoignant d'une hypoventilation alvéolaire globale1.
Oxygène et hypoxémie
Une valeur de pression artérielle en oxygène (PaO2) inférieure à 60 mmHg, voire
inférieure à 50 mmHg a été proposée pour définir l'hypoxémie. C'est surtout les
antécédents du patient et l'histoire clinique qui doivent être analysés.
Cette hypoxémie peut avoir plusieurs causes principales pouvant s'associer entreelles2:
- Anomalies de diffusion et shunt vrai : associés à une hypocapnie sauf en cas
d'épuisement respiratoire du patient. L'oxygénothérapie permet en général de
restaurer une PaO2 suffisante. En cas de shunt important, cet objectif est parfois plus
difficile à atteindre, une part non négligeable de sang non oxygéné (shunt) venant se
mélanger au sang oxygéné.
- Inégalités des rapports ventilation-perfusion : entraînant une capnie variable
- Hypoventilation alvéolaire par altération de la "pompe ventilatoire" : associant
hypoxémie plus ou moins profonde et hypercapnie constante. Cette dernière
situation pourra nécessiter le recours à un support ventilatoire pour augmenter la
ventilation alvéolaire du patient.
L'oxygénothérapie permet de faire inhaler à un patient en ventilation spontanée un
mélange enrichi en oxygène. Elle n'a pas d'action directe sur le travail ventilatoire du
patient, mais améliore les "conditions de fonctionnement" musculaire. Les rares
indications de l'oxygénothérapie hyperbare en médecine d'urgence ont comme
principal objectif l'amélioration de symptômes neurologiques (intoxication au CO,
embolie gazeuse, accident de décompression).
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Effets de l'inhalation d'oxygène
L'inhalation d'oxygène permet d'améliorer la PaO2 par augmentation de la FIO2 (
Fraction Inspirée en oxygène).
Trois limites essentielles sont à considérer, en dehors des incidents pouvant être liés
aux matériels :
- Absence d'effet sur la ventilation alvéolaire : Dans ce cas, l'application de
FIO2 élevées peut améliorer la PAO2 et donc la PaO2, mais sans effet sur l'élimination
du CO2. L'amélioration de la SaO2 peut alors être faussement rassurante avec en fait
une majoration de la capnie.
- Toxicité de l'oxygène : L'hyperoxie, définie par une PaO2 supérieure à 100
mmHg, peut être responsable d'une toxicité cellulaire par production de radicaux
libres responsables de destructions cellulaires3. Le poumon semble être l'organe le
plus sensible à l'hyperoxie en normobarie4. En urgence, même si l'oxygène doit être
administré à dose optimisée, l'hypoxémie reste plus dangereuse que l'hyperoxie.
Chez le nouveau-né, la toxicité de l'oxygène est plus importante, notamment au
niveau oculaire avec risque de fibroplastie rétrolentale.
- Cas particulier de l'insuffisant respiratoire chronique avec hypercapnie
chronique :
Chez ces patients, l'hypoxémie est principalement liée à des anomalies des rapports
ventilation-perfusion. Aucune étude n'a validé l'idée souvent avancée d'une
diminution de la sensibilité des centres respiratoires de ces patients au CO2.
L'hypercapnie induite par l'inhalation d'oxygène est sans doute principalement due à
une modification délétère des rapports ventilation/perfusion par levée de la
vasoconstriction hypoxique de territoires mal ventilés5.
Matériel d’oxygénothérapie
Sources d'oxygène
L'oxygène médical utilisé en thérapeutique est un médicament.
Il peut être stocké :
- Sous forme liquide : Réservé pour les grandes quantités (centre hospitalier),
il est ramené en phase gazeuse et alimente des prises de distributions normalisées
sous 3,5 bars de pression.
- Sous forme gazeuse : Il est comprimé à une pression initiale de 200 bars
dans une bouteille cylindro-conique de couleur blanche, en acier ou en alliage léger.
Le volume disponible est calculé en multipliant la pression résiduelle par le volume
interne de la bouteille (Pression x Volume = Constante). Les bouteilles de 5 litres de
volume interne et d'un poids modéré sont utilisées lors du déplacement des patients,
les bouteilles plus volumineuses étant le plus souvent à poste fixe. L'utilisation de
bouteilles dites "intégrées", c'est-à-dire intégrant manomètre et débitmètre est
recommandée.
- Par extraction de l'air : Les extracteurs d'oxygène concentrent l'oxygène de
l'air ambiant et nécessitent une source électrique (Courant domestique ± batterie de
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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secours). Le débit maximum est faible (4 à 6 Litres/min). Ils sont réservés aux
patients à domicile sous oxygénothérapie chronique.
Le manomètre indique la pression résiduelle dans la bouteille et permet le calcul de
l'autonomie.
L'oxygène médical est un gaz sec exposant à un assèchement des voies aériennes.
L'interposition entre le débitmètre et le matériel d'inhalation d'un humidificateur à eau
stérile et à usage unique est recommandé en cas d'administration prolongée.
Les différents matériels d'inhalation se raccordant au débitmètre se distinguent par
les niveaux de FIO2 qu'ils peuvent délivrer, leur effet sur la ré-inhalation (rebreathing)
du CO2 et leur tolérance. Hormis le matériel choisi, le niveau exact de FIO2 délivré
est soumis à de nombreux facteurs liés au patient : fréquence ventilatoire, ventilation
minute, débit d'inspiration.
Matériels délivrant une FIO2 faible : lunettes à oxygène
La FIO2 délivrée est faible (< 30 %) et peut être diminuée par la ventilation bouche
ouverte ou la présence de sécrétions nasales épaisses. Ils n'entraînent pas de
rebreathing. Les lunettes à oxygène sont très faciles à poser et bien tolérées.
Matériels délivrant une FIO2 modérée : Masque simple
C'est un petit masque souple translucide couvrant la bouche et le nez, muni d'une
simple connexion avec le débitmètre et maintenu sans étanchéité absolue sur le
visage par un élastique. Deux ouvertures latérales permettent l'expiration et
l'inspiration d'air en complément du débit d'oxygène. La FIO2 délivrée est fonction du
débit d'oxygène et du débit inspiratoire du patient. Plus ce débit inspiratoire est élevé,
plus il y a d'air en complément du débit d'oxygène. La FIO2 maximale ne dépasse
guère les 50%. L'autre limite, commune à tous les masques, est la ré inhalation au
début de chaque inspiration des gaz expirés contenus dans l'espace mort du masque
et chargés en gaz carboniques (rebreathing). Ce phénomène peut majorer la capnie
jusqu'à 5%.
Matériels délivrant une FIO2 élevée : Masque à haute concentration
Il permet d'atteindre des niveaux de FIO2 élevés proches de 100% grâce d'une part à
une poche souple alimentée en oxygène lors de la phase expiratoire du patient et
servant de réserve à l'inspiration et d'autre part à 2 clapets anti-retour sur les orifices
latéraux empêchant l'entrée d'air à l'inspiration mais permettant l'expiration. Ce type
de masque fonctionne "tout ou rien" pour la FIO2 et doit être alimenté à 15 L/min. A
l'inspiration, l'apport d'oxygène pur au patient est assuré par le débit instantané
venant de la bouteille, complété par la réserve. Tant que la ventilation minute du
patient est inférieure au débit de la bouteille, le système est efficace. Si la ventilation
minute est supérieure, la réserve se vide (pas toujours de façon visible) et le patient
risque d'étouffer. Dans ce cas, il est nécessaire d'enlever un ou deux clapets latéraux
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pour permettre une admission d'air, la FIO2 diminuant alors. Le seul intérêt de
diminuer le débit de la bouteille est d'augmenter son autonomie. Cela n'aura pas
d'effet sur la FIO2 délivrée mais apportera le risque de passer sous le seuil du débit
inspiratoire du patient. Ces masques présentent aussi un effet de rebreathing.
Règles d'utilisation des matériels d'oxygénothérapie et calcul d'autonomie des bouteilles
Elles doivent être strictement respectées : Pas de sources de chaleur ; Aucun corps
gras en contact avec le matériel ; Fixation des bouteilles portables, à défaut les
allonger ; Pas de bricolage ou de démontage par des personnes non qualifiées. Leur
non respect expose au risque rare mais gravissime d'explosion de la bouteille.
La surveillance régulière de l'autonomie de la bouteille est indispensable. Le calcul
repose sur la formule P x V= Constante, en retranchant les 20 à 30 derniers bars et
en appliquant une marge de sécurité de consommation d'environ + 20%. La
consommation des ventilateurs doit prendre en compte le volume minute délivré au
patient en fonction de la FIO2 et la consommation propre du ventilateur, notamment
en cas de flow-by. L'oxygène en bouteille a un coût non négligeable, justifiant
d'optimiser les consommations.
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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SATUROMETRE6
Introduction
Le saturomètre, également appelé oxymètre de pouls, permet la mesure de la
saturation artérielle en oxygène par voie transcutanée (SpO2). Ce dispositif est
très fréquemment utilisé en pratique hospitalière pour surveiller les patients qui
présentent une détresse respiratoire ou qui sont sous supports ventilatoires invasifs
ou non invasifs. L’oxymétrie de pouls a été inventée au début de années septante
par Takuo Aoyagi, un bio-ingénieur japonais et c’est au début des années quatrevingt que cette technologie a été introduite dans les salles d’opération américaines7,8.
Son usage va rapidement s’étendre en unités de soins intensifs et au sein des
services d’urgence. Actuellement, l’industrie met à disposition du corps médical des
dispositifs de plus en plus compacts et portables à performances égales.
Il est donc légitime d’explorer les indications potentielles de ce dispositif dans la
pratique de la médecine générale. Par ailleurs, il est important comme préalable de
connaître le principe de fonctionnement et les limites de ces dispositifs afin d’éviter
les pièges liés à leur utilisation9,10.
Principes de fonctionnement
L’oxymétrie de pouls repose sur l’association de deux techniques à savoir :
- la spectrophotométrie d’absorption
- la photopléthysmographie
La combinaison de ces deux techniques permet la mesure de l’oxymétrie et la
détection du pouls.
L’oxyhémoglobine (HbO2) et l’hémoglobine réduite (Hb) ont des spectres
d’absorption lumineuse différents, surtout en lumière rouge (660 nm) et en infrarouge
(940 nm). La saturation artérielle en oxygène par voie transcutanée (SpO2) est
obtenue à partir du rapport des absorptions lumineuses dans le sang artériel en
rouge et infrarouge. La spectrophotométrie d’absorption repose sur l’équation de
Beer-Lambert qui définit la concentration d’un soluté par l’intensité de la lumière
transmise à travers une solution et la SpO2 est établie grâce à un algorithme établi
de manière empirique chez des volontaires sains. Il ne s’agit donc pas d’une
valeur directement mesurée ! Pour ce faire, le capteur du saturomètre est constitué
d’une source émettrice de rayons en rouge et infrarouge et d’un photo-récepteur
situé de l’autre côté du tégument analysé qui enregistre l’amplitude lumineuse
perçue. L’intensité de la lumière captée dépend de plusieurs facteurs tels que
l’intensité de la lumière émise, la distance parcourue, la concentration en soluté ( Hb)
et un coefficient d’extinction11.
Afin de faire la distinction de la composante pulsatile (sang artériel) de l’absorption
par rapport à l’absorption non pulsatile secondaire aux tissus et au sang veineux, il
est nécessaire de recourir à la photopléthysmographie.
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Caractéristiques techniques
La plupart des appareils commercialisés utilisent les mêmes principes de
fonctionnement. Toutefois, leur fiabilité peut varier suite à des différences entre les
références ou suivant les algorithmes utilisés.
Globalement, lorsque la saturation artérielle en oxygène (SaO2) est supérieure à 90
%, la fiabilité est excellente et la marge d’erreur ( biais) de la SpO2 par rapport à la
SaO2 est inférieure à 2 % et la précision de la mesure est d’environ 3%. Par contre, il
est capital de savoir que pour des saturation basse (inférieures à 80 %), la marge
d’erreur est beaucoup plus conséquente et varie entre – 15 à + 13 % et la
précision varie de 1 à 16 % 12. Théoriquement, il peut s’agir d’une surestimation ou
d’une sous-estimation de la SaO2. Toutefois, une méta-analyse récente démontre
une sous-évaluation systématique13.
Par ailleurs, la fiabilité et le délai de réponse dépendent des appareils utilisés mais
aussi de l’endroit où la sonde est positionnée pour réaliser la mesure. Il existe
plusieurs types de capteurs. Les plus couramment utilisés se placent au niveau des
doigts. Les autres sont soit auriculaires, soit nasaux, soit frontaux. En pratique, les
capteurs au niveau des doigts donnent de meilleurs résultats (sauf en cas
d’hypoperfusion périphérique) que les autres localisations même si le délai de
réponse s’avère légèrement plus long. Le temps de réponse in vivo des saturomètres
est mal évalué. Chez les sujets normaux, le passage de la normoxie à
l’hypoxémie est détecté dans un délai allant de 10 à 50 secondes.
Limites d’utilisation
La mesure de la SpO2 connaît quelques limites, liées soit à la technologie utilisée,
soit au patient et à sa condition clinique.
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Bruit de fond trop important : le signal peut être perturbé par un bruit de fond
généré par exemple par les mouvements du patient et cela risque d’entraîner
des alarmes intempestives. Pour remédier à ce problème, la technologie
d’extraction du signal (Signal Extraction Technology [SET]) semble
intéressante14.
Shunt optique : lorsque la photodiode (récepteur) reçoit de la lumière qui n’est
pas passée par les tissus, la SpO2 affichée est de 85 % (cette valeur
correspond au rapport rouge/infrarouge = 1)15. Attention, lors de la mesure de
la SpO2 près de sources lumineuses (scialytiques, forte lumière solaire).
Signal trop faible : Le principe de mesure nécessitant la détection de l’onde de
pouls, le saturomètre peut être mis en défaut dans toutes les situations faisant
diminuer l’onde systolique : petit débit cardiaque, chocs, hypothermie,
vasoconstriction réactionnelle ou médicamenteuse, compression artérielle
d’un membre (prise de la tension artérielle !). Généralement, la plupart des
appareils ont la capacité de capter un signal pléthysmographique égal ou
supérieur à 30 mmHg. Toutefois, ils affichent parfois de faux résultats. La
visualisation de la courbe permet d’apprécier la qualité du signal !16,17
Dans le contexte de choc, en pratique hospitalière, l’utilisation de capteur
nasal donne la réponse la plus persistante, la vascularisation se faisant par la
branche de la carotide interne dont l’irrigation est conservée après collapsus
périphérique.
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
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Modification de l’absorption : certains facteurs sont susceptibles de modifier
l’absorption du signal. Ainsi la pigmentation cutanée est susceptible de
modifier la mesure pour deux raisons distinctes à savoir que la pigmentation
peut modifier l’absorption et que les algorithmes ont été établis chez des
sujets non pigmentés. La présence de certains vernis à ongle influence la
mesure. L’anémie sévère semble modifier l’absorption, même si en l’absence
d’hypoxémie, la mesure de la SpO2 reste fiable. Par contre,
l’hyperbilirubinémie ne semble pas poser de problème de mesure avec les
oxymètres classiques18.
Intoxication au monoxyde de carbone (CO) : La carboxyhémoglobine
(possède un spectre d’absorption égal à l’HBO2) est confondue avec
l’oxyhémoglobine. La valeur de la SpO2 est alors faussement normale
(surestimation) alors qu’il existe une diminution importante du transport en
oxygène, en rapport avec la concentration en monoxyde de carbone). Il en est
de même pour les très gros fumeurs.
En cas de méthémoglobinémie : la SpO2 surestime la SaO2 de manière
proportionnelle au contenu en méthémoglobine initial puis se stabilise à 85 %
car la méthémoglobine a un rapport d’absorption rouge/infrarouge égal à 1.
Relation PaO2/SaO2 : Différents facteurs influencent la courbe de dissociation
de l’hémoglobine tels que la température, le pH, la paCO2 et le type
d’hémoglobine. Ils devraient logiquement influencer la valeur de la SpO2.
toutefois, dans ces situations, c’est la relation PaO2/SaO2 qui est modifiée et
la mesure de la SpO2 est corrélée à la SaO2 mais ne peut donc
qu’imparfaitement apprécier dans ces conditions le contenu en oxygène du
sang artériel.
SaO2
100%
97%
90%
80%
75%
50%
PaO2
> 150 mmHg
100 mmHg
60 mmHg
48 mmHg
40 mmHg
27 mmHg
Table 1 : Relation PaO2/SaO2
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Applications en médecine générale
Actuellement, certains dispositifs portables peuvent être utilisés en médecine
générale (il ne faut pas espérer trouver un matériel performant à moins de 700 euros
sur le marché). Il existe des dispositifs extrêmement simples avec sonde et affichage
intégré ou des matériels portables avec sondes disposables. Si la première
alternative est séduisante, elle comporte quelques inconvénients (sensible aux
artéfacts, fragile, pas d’affichage de la courbe et peut poser des problèmes d’hygiène
et de maintenance).
Indications chez l’adulte :
Elles sont larges, compte tenu du caractère non-invasif de la mesure, il n’existe pas
actuellement d’autre méthode simple de détecter l’hypoxémie d’un patient en
médecine générale où la mesure des gaz du sang n’est pas de pratique courante.
L’oxymétrie devra s’intégrer dans le reste des paramètres que le médecin généraliste
utilise pour estimer la gravité d’une insuffisance respiratoire.
Ainsi, on peut proposer son usage dans toutes les situations suivantes :
Evaluation de la gravité d’une dyspnée secondaire à une pneumonie, une embolie
pulmonaire, un pneumothorax ou à une crise d’asthme.
Dans ce contexte, on sera attentif à une saturation inférieure à 95 % car en dessous
de cette valeur, de faibles variations de la SpO2 peuvent signifier d’importantes
modifications de la PaO2. Une saturation inférieure à 92 % est un critère de gravité
absolu justifiant une hospitalisation. Dans le cadre de la crise d’asthme, on pourra
associer à l’évaluation de la gravité, la mesure du débit de pointe (ou peakflow).
Attention, la SpO2 est un très mauvais reflet de la ventilation alvéolaire et les
saturomètres ne peuvent en aucun cas renseigner sur la capnie ! Son usage
chez les BPCO peut être délétère si l’on ignore cela car une correction de la
saturation en oxygène n’améliorera pas la capnie voir aggravera celle-ci !
Diagnostic différentiel entre une crise d’hyperventilation psychogène et une
pathologie hypoxémiante.
Une saturation mesurée à 100 % permet de confirmer le diagnostic clinique.
Détection des patients BPCO à domicile qui nécessiteraient une oxygénation au long
cours19. Dans ce contexte, tout patient qui présente au repos une saturation à 92 %
devrait être référé à un pneumologue pour évaluation du bien-fondé d’une
prescription au long cours d’oxygène.
Evaluation du débit sanguin local : Le médecin généraliste peut par ce moyen simple
évaluer ce débit dans les différentes situations reprises si dessus. On peut aussi
détecter de manière plus aisée le pouls paradoxal ( surtout si on dispose de la
courbe).
Suivi de l’efficacité du traitement médicamenteux d’un œdème pulmonaire d’origine
cardiogénique ou d’une crise d’asthme que le médecin généraliste juge pouvoir
juguler à domicile.
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Détection des patients en soins palliatifs qui nécessiteraient une oxygénation
Indications chez l’enfant20 :
L’intérêt de la mesure de la SPO2 est encore plus important chez l’enfant. En effet,
un enfant n’apparaît cyanosé cliniquement qu’à partir d’une SaO2 inférieure à 75 %.
De plus, on réalise très peu de gazométries artérielles chez l’enfant. Il est donc
capital de pouvoir apprécié un degré d’hypoxémie débutant plus précocement. Une
SpO2 « normale » pour un enfant correspond à une valeur supérieure à 95 %. La
mesure de SpO2 peut être considérée comme le cinquième paramètre vital à
prendre chez l’enfant21.
Ainsi, on peut proposer son usage dans toutes les situations suivantes :
Evaluation de la gravité d’une pathologie respiratoire par exemple une bronchiolite,
une pneumonie, une crise d’asthme.
L'oxymétrie de pouls est un élément d'évaluation de la gravité de la bronchiolite du
nourrisson. Une saturation inférieure à 94 % est un des indicateurs de gravité. On
retiendra que dans la plupart des situations cliniques, une valeur inférieure à 94 %
est un signe de gravité chez l’enfant et donc une indication d’hospitaliser l’enfant.
Evaluation de l’efficacité d’un aérosol
Appréciation de l’hémodynamique. On peut ainsi réaliser un test à l’oxygène chez un
nouveau né cyanosé pour objectiver une réponse ou une non-réponse en terme de
SpO2 pour détecter une éventuelle cardiopathie.
En conclusion :
Le saturomètre en médecine générale trouve sa place pour obtenir de manière non
invasive un cinquième paramètre vital qu’est la SpO2. Comme l’examen clinique,
cette mesure possède ces limites et c’est l’intégration de sa mesure au reste du
raisonnement qui sera le plus utile. On retiendra également que le saturomètre ne
peut en aucun cas remplacer la surveillance clinique mais en détectant précocément
l’hypoxémie, il améliore la qualité de celle-ci.
A l’avenir, certains appareils permettront la mesure transcutanée de la PaO2 et
PaCO2. Les mêmes précautions d’usage seront d’application.
Thys F – ECU-UCL – 29 avril 2007
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Oxygénothérapie et utilité du saturomètre en médecine générale
Références
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