CHAMOUSSE T EN LYON N AI S S A NTÉ Les Monts du Lyonnais souffrent d’un manque de médecins généralistes REPÈRES « Allo, Docteur, je voudrais un rendezvous demain, svp… » Un geste simple, mais pas pour les habitants du Chamousset, où le manque de généralistes se fait cruellement sentir. Qu’est-ce qu’une zone fragile ? Selon l’Agence régionale de santé (ARS), une zone fragile est un territoire où l’offre de soins doit être consolidée du fait d’une démographie des professionnels de santé défavorable ou en passe de le devenir. L’agence définit aussi des zones de vigilance, afin d’élargir certaines des mesures incitatives à d’autres territoires. Ces zones sont privilégiées dans la mise en place de structures de santé avec exercice regroupé : un mode d’exercice aujourd’hui largement plébiscité par les professionnels de santé, selon l’ARS, qui accompagne les porteurs de projets qui s’engagent sur cette voie. Le classement en zone fragile ouvre droit, pour les généralistes, à l’octroi d’aides à l’équipement ou fiscales. Z one fragile ou zone de vigilance, peu importe pour le patient, du moment qu’il peut se faire soigner. Le fait est qu’il n’y a pas pléthore de médecins généralistes dans le Chamousset. Des communes n’ont aucun cabinet et là où il y en a, les carnets de rendez-vous sont pleins. Le schéma régional d’organisation des soins a d’ailleurs classé les communes de Sainte-Foy-l’Argentière, Saint-Laurent-de-Chamousset et Haute-Rivoire dans la deuxième catégorie, c’est-à-dire des zones dont il faut regarder de près l’évolution du dossier. Définir un projet de santé de territoire Le constat n’a pas échappé aux élus : l’ancien président de la Communauté de communes Chamousset en Lyonnais (CCCL), Lucien Vial, avait déjà anticipé une réflexion sur le sujet. Une démarche poursuivie par l’actuelle équipe emmenée par Gérard Vulpas. « Nous avons réuni les professionnels de santé du canton et les élus au sein d’un comité de Dans les Monts du Lyonnais, les communes n’ont aucun cabinet et là où il y en a, les carnets de rendez-vous sont pleins. Photo DR pilotage pour réfléchir ensemble à des solutions, explique Marie-Luce Arnoux, vice-présidente déléguée aux solidarités actives. Notre première piste a été de nous équiper d’un outil numérique partagé. » Une étape, mais pas un aboutissement, qui a eu le mérite d’enclencher une dynamique : « Il fallait réfléchir à de nouvelles pratiques de soins, « C’est souvent que le repas de midi passe à l’as » Gilles Guyon, médecin généraliste à Montrottier depuis 1989 Docteur, y a-t-il un manque de médecins sur Chamousset en Lyonnais ? « Oui et cela a créé une tension importante au niveau du travail et des patients qui ne trouvent pas de médecins. Sur notre secteur, il faudrait deux ou trois médecins supplémentaires. Mes journées n’étant pas extensibles, il est difficile de prendre de nouveaux patients. Je fais entre 12 et 13 heures par jour entre consultations à mon cabinet et visites à domicile. Je ne peux pas faire plus que plus. » Comment voyez-vous votre métier en ce moment ? « Pour moi, et je parle en mon nom, la conjoncture fait que la médecine libérale est de moins en moins plaisante et attractive et de plus en plus contraignante. Je suis submergé par les certificats en tous genres et je n’ai pas fait ce métier, cette profession, pour cela. Si l’on pouvait y remédier, j’aurai plus de temps à consacrer aux patients. Heu- Le docteur Guyon, déplore le manque de médecins sur le secteur. Photo Jean-Michel MURAT reusement, j’ai la chance, pour certains actes administratifs, d’être secondé par mon épouse. » Racontez-nous votre journée de travail ? « Elle débute en général vers huit heures du matin pour se terminer entre 19 et 20 heures. Entre-temps, il y a eu les consultations, la lecture et l’interprétation des examens des patients et puis les impondérables de temps en temps. Ce qui fait, bien souvent, que le repas de midi passe à l’as. Il y a aussi une partie formation continue, puis d’autres dossiers qui m’attendent à la maison. Voilà, en résumé, une journée. Et je pense quelques fois à prendre des vacances et donc à trouver un remplaçant qui, bien souvent, doit avoir la même sensibilité et la même approche médicale que moi, si possible. » Que pensez-vous de l’actualité du moment qu’est le tiers payant ? « C’est une grosse bêtise. Pour les gens, c’est toujours agréable de ne pas payer, mais il faut se souvenir qu’il faudra payer la consultation d’une façon ou d’une autre. S’il y a une telle volonté de l’État à mettre en place ce système, c’est pour que l’on soit dépendant de lui. Ce sera l’organisme payeur qui décidera ce que l’on devra prescrire et comment le faire. Nous serons plus médecins mais commerciaux. On voit bien que ceci n’est pas sérieux ni acceptable. » Recueilli par notre correspondant local Jean-Michel Murat définir un projet de santé de territoire qui pourrait prendre la forme de la création d’un pôle de santé. » Une réflexion sur la création d’un pôle de santé Plus intéressant qu’une maison de santé, le pôle permet une mutualisation des moyens sans pour autant centraliser et donc sans perdre de la proximité avec les patients. « On en est là aujourd’hui, confirme l’élue. On sonde les opinions de tous les professionnels et on veut les faire s’engager sur un projet de santé commun. On avance doucement mais on ne veut laisser personne sur le bord du chemin. » Une intention louable qui trouve un écho auprès de Cyrille Cuny, pharmacien à Montrottier et président de l’association Caducée qui rassemble justement les professionnels de santé du canton et de Bessenay. « Les jeunes médecins, aujourd’hui, veulent travailler en équipe ou au moins en réseau, pour rompre l’isolement. Le pôle de santé est une solution, une base intéressante pour montrer à ces jeunes qu’ils ne seront pas seuls et qu’ils vont trouver un tutorat bienveillant. » D’après le pharmacien, il y aurait en tout cas une volonté d’avancer ensemble sur cette question. À SaintLaurent, le médecin, arrêté, a trouvé une solution temporaire pour son remplacement et un autre praticien envisagerait d’ouvrir un cabinet sur la commune. Pendant ce temps, Haute-Rivoire (1 500 habitants) est toujours sans solution. Frédéric Guillon JEUDI 18 FÉVRIER 2016