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notre temps, lentement à s'édifier, à se clarifier, à se spécifier, à s'identifier avec la connaissance de 
soi, avec la conscience psychologique. 
» 
 
De là nous comprenons mieux le glissement de la personne au genre comme sexe social. 
Si pour le chrétien, la notion de personne est une évidence indiscutable, elle ne va donc pas 
de soi. Et ce pour la simple raison qu’elle repose sur la transcendance divine et l’image de Dieu. Mais 
cette notion même de personne en relation à Dieu est contestée, puisque d’aucun mettent en avant 
que si cette notion est partagée avec Dieu, elle ne fait donc pas parti de ce qui est propre à l’homme. 
Or  c’est  bien  ce  qui  fonde  la  dignité  intrinsèque  de  la  personne  humaine.  Faire,  comme 
Locke,  de  l’union  personne/homme,  une  faute  morale  et  juridique,  c’est  la  conséquence  logique 
d’une  telle  dissociation.  Si  l’homme  est  personne  seulement  lorsqu’il  est  libre et  conscient  de  ses 
actes, lorsqu’il a conscience de lui-même, alors de fait, la personne humaine exclut les handicapés, 
les séniles, les embryons, les enfants en bas âges et même tout homme qui agit sans savoir. Dès lors, 
la notion de personne humaine ne peut plus être un critère moral et juridique et donc pas d’avantage 
un critère fondateur de vie en société. La personne humaine devient relative et discursive. 
La  difficulté  du  débat  sur  le  Gender  repose  au  fond,  sur  le  relativisme  de  la  personne 
humaine,  devenu,  conscience  de  soi.    Cette  hypertrophie  du  moi,  fait  déchoir  l’homme  de  la 
personne  à  l’individu,  c’est-à-dire,  la  plus  petite  réduction  possible  de  l’espèce  humaine,  sans lien 
intrinsèque  avec  l’autre,  puisque  la  conscience  de  soi  est  nécessairement  subjective.  La  vie  en 
société, fondée sur la dignité de la personne humaine, en théorie, repose en réalité sur la conscience 
que  l’individu  a  de  lui-même  et  de  ses  besoins.  Or  cette  conscience  n’est  pas  nécessairement 
conforme à la réalité. Ainsi, la réalité biologique du sexe, peut ne pas être conforme au sexe social 
qui est la conscience que l’individu a de sa sexualité. 
Ce  n’est  pas  un  hasard, si la  notion  de  personne  humaine est  née  dans  le contexte judéo-
chrétien.  Seule  l’image  de  Dieu  peut  garantir  la  dignité  intangible  et  intrinsèque  de  la  personne 
humaine, parce qu’il entre dans la notion de personne humaine, la participation (en ressemblance et 
en acte) à la personne divine. La notion de personne humaine, telle que l’entendent les chrétiens est 
bien métaphysique et transcendante, tandis que la notion moderne est juridique et psychologique. 
 
 
Conclusion 
 
Aussi,  en  dehors de  la  foi, il  semble  bien que  seule  l’intuition de  la  grandeur de  l’homme, 
peut constituer un rempart et un fondement pour comprendre et accepter que la personne humaine 
assume tout l’homme et tout homme à tout instant. C’est bien le drame de l’humanisme athée. En 
enfermant  l’homme  dans  ses  limites  matérielles,  il  le  condamne  à  s’abaisser,  en  lui  fermant  cette 
ouverture  vers  le  haut.  L’homme  est  infiniment  plus  que  ce  qu’il  donne  à  voir.  Et  c’est  dans  cet 
infiniment plus que s’exprime le mieux la personne, car l’homme est ontologiquement une personne 
qui  pose  des  actes.  Mais  ces  actes  sont  extrinsèques  à  l’homme  et  le  mettent  par  là-même  en 
relation à ce qui est déjà hors de lui-même, en faisant, à l’image de la Trinité, un être de relation, ce 
qui  est  constitutif  de  lui-même.  En  outre,  la  réalité  des  actes  extrinsèques  dépasse  leur  simple 
réalisation  matérielle,  puisque  l’homme  est  capable  de  les  interpréter  de  différentes  manières  ou 
d’appréhender le réel en fonction de phénomènes divers qui, même irréels, deviennent une réalité 
dans la mesure où ils entrent en considération dans la délibération ou le jugement. Ainsi plus large 
que l’homme de Locke, la personne comprend également cet aspect phénoménologique. 
 
 
 Marcel MAUSS, La notion de Personne, celle de "moi", in Sociologie et Anthropologie, P.U.F., pp. 351, 357, 359