Mise en évidence, in vivo, du rôle des lymphocytes T cytotoxiques

Mise en évidence, in vivo, du rôle des lymphocytes T cytotoxiques dans l'infection VIH
Revue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites
n°75 - juin 1999
VIH - CTL
Mise en évidence, in vivo, du rôle des
lymphocytes T cytotoxiques dans l'infection
VIH
Yves Rivière
département des rétrovirus, Institut Pasteur (Paris)
Control of viremia
in Simian
Immunodeficiency
Virus infection by
CD8+
lymphocytes
Schmitz...
Science, 1999, 283,
857-860
In vivo
migration
and function
of
transferred
HIV-1
specific
cytotoxic T
cells
Brodie S.J.,
Lewinsohn
D.A.,
Patterson
B.K.,
Jiyamapa D.,
Krieger J.,
Corey L.,
Greenberg
P.D., Riddell
S.R.
Nature
Medicine,
1999, 5, 34-
41
Deux études, l'une basée sur l'adminisration par voie veineuse
de clones de lymphocytes autologues, l'autre s'intéressant aux
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effets de l'injection d'anticorps anti-CD8 sur la charge virale de
singes infectés par le SIV, apportent pour la première fois des
preuves directes de l'importance de la population de
lymphocytes T cytotoxiques (CTL) sur le contrôle in vivo de la
charge virale.
Dans la plupart des infections virales, les lymphocytes T
cytotoxiques (CTL) sont impliqués dans la clairance du virus
de l'organisme. In vitro, ces lymphocytes CD8 sont capables
de lyser des cellules appelées cellules cibles exprimant des
antigènes du virus. Dans l'infection humaine par le VIH-1,
outre leur fonction cytotoxique, les CTL inhibent la
réplication du virus, par l'intermédiaire d'un ou plusieurs
facteur(s) soluble(s).
La plupart des protéines virales du VIH-1 sont reconnues par
les CTL, et la question essentielle de leur rôle dans l'évolution
de la maladie a été appréhendée par des études de cohortes.
Plusieurs groupes ont montré l'importance des CTL dans les
premiers mois de l'infection aiguë par le VIH-1, et en
particulier avant la séroconversion, soulignant ainsi la
présence avant et au moment de la séroconversion de CTL
spécifiques du VIH et mettant l'accent sur le rôle potentiel des
CTL sur le contrôle précoce de la virémie lors de l'infection
primaire, car ceux-ci sont détectables avant les anticorps
neutralisants. Le rôle bénéfique des effecteurs cytotoxiques
spécifiques du virus sur la progression de l'infection a
également été rapporté par des études de sujets en phase
d'infection établie (1).
Cependant, toutes ces études n'apportent que des arguments
indirects et ne démontrent pas que les effecteurs cytotoxiques
spécifiques du VIH dont l'activité est mesurée par des tests in
vitro, éliminent les cellules infectées par le virus in vivo.
Le travail de Brodie et coll. est, nous semble-t-il, le premier à
apporter un élément de preuve plus direct du rôle in vivo des
lymphocytes CD8+ chez l'homme infecté par le VIH-1. Trois
sujets infectés par le VIH-1 ont été soumis à un protocole de
thérapie cellulaire consistant en l'administration par voie
veineuse de clones de CTL autologues spécifiques d'un
épitope de la protéine gag du virus. La présence et l'activité
de ces cellules a été caractérisée dans le sang ainsi que dans
des biopsies de ganglions respectivement un et quatre jours
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après la dernière injection de clones. Le couplage de
techniques d'immuno-histochimie et d'hybridation in situ
permet également de mettre en évidence dans les ganglions la
localisation des clones de CTL aux sites contenant les cellules
infectées par le VIH-1.
Par ailleurs, le suivi de la population de lymphocytes CD4
infectés par le virus par des techniques de cytométrie de flux
permet de montrer que l'infusion de ces clones de CTL
conduit à une diminution notable du pourcentage de cette
population de lymphocytes CD4 infectés passant de 1,6%
avant infusion à 0,3% deux jours après le traitement chez un
des trois patients étudiés, chez qui ces injections étaient bien
tolérées. Le niveau de la charge virale et le nombre total de
lymphocytes CD4 n'étaient pas affectés de façon significative
par le traitement, ce qui signifie vraisemblablement que les
clones de CTL ont une durée de vie limitée après transfert
et/ou que la spécificité unique des CTL injectés, issus d'une
population clonale de CTL reconnaissant un seul épitope du
virus, n'est pas suffisant pour un contrôle in vivo.
Cette étude est cependant à notre connaissance la première
démontrant le rôle direct des CTL in vivo sur les lymphocytes
CD4 infectés, tout en soulignant les limites de ces approches
thérapeutiques par injection de clones de CTL.
Au même moment, une autre étude, rapportée par Schmitz et
coll., apportait également une preuve directe de l'importance
de cette population de lymphocytes sur le contrôle de la
charge virale in vivo et sur l'évolution de la maladie du
macaque infecté par le virus de l'immunodéficience du singe
(SIV). Le modèle expérimental de l'infection du macaque par
le SIV est très proche de l'infection humaine par le VIH.
L'originalité de cette étude est apportée par la mise au point et
la préparation d'anticorps dirigés contre les lymphocytes CD8
permettant une déplétion efficace de cette population in vivo
chez l'animal. Chez les singes traités par trois injections
d'anticorps anti-CD8 et infectés par le SIV, la charge virale
est plus intense que chez ceux infectés mais recevant une
préparation d'anticorps témoins. L'intensité de la déplétion en
lymphocytes CD8 était contrôlée par cytométrie de flux, et
plus la déplétion était durable, plus la mortalité consécutive à
l'infection par le SIV était importante. Par ailleurs, la relation
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temporelle existant entre la diminution de la charge virale et
la présence de lymphocytes CD8 était démontrée par des
études de déplétion des lymphocytes CD8 chez des singes
infectés depuis plusieurs mois par le SIV. Il s'agit bien ici
d'une preuve de l'importance de la population des
lymphocytes CD8 sur la pathogénie de l'infection.
On pourra noter que la totalité des lymphocytes CD8, et non
pas seulement la sous-population de CTL spécifiques du
virus, étaient déplétés. En conséquence, ces résultats
démontrent l'importance des lymphocytes CD8 dans le
contrôle de la virémie mais ne permettent pas d'identifier
formellement la sous-population de CTL comme responsable
de ce contrôle. - Yves Rivière
1 - Rivière Y
" Les lymphocytes CD8+ et la dynamique virale au cours de la primo-
infection "
Transcriptase, 1998, 63, 4-5
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