CES – ETUC Confédération Européenne des Syndicats « Pour une implication pleine et entière des salariés dans la Société Coopérative Européenne » Synthèse préparatoire à la Conférence de Bruxelles1 15 et 16 Juin 2006 CECOP Confédération Européenne des Coopératives de Travail Associé, des Coopératives Sociales et des Entreprises Sociales et Participatives Réseau « Projectives » www.reseau-projectives.org Avec le soutien de la Commission Européenne 1 Document réalisé par le réseau « Projectives », en collaboration avec la CES et la CECOP SOMMAIRE Matière Pages Introduction 3 1. Le dialogue social dans les coopératives 7 1.1. La coopération en Europe 7 1.2. La participation dans les coopératives 8 2. Etat des lieux dans les sept pays étudiés 11 2.1. Allemagne 11 2.2. Espagne 12 2.3. France 14 2.4. Italie 15 2.5. Pologne 17 2.6. République Tchèque 20 2.7. Suède 21 3. Pistes de réflexion et recommandations 24 3.1. Les problématiques soulevées par l’étude 24 3.2. Des pistes pour la création de SCE 26 Conclusion 27 2 Introduction « La Commission estime que le potentiel des coopératives n’est pas exploité autant qu’il pourrait l’être et que leur image doit être améliorée aux niveaux national et européen. Dans ce contexte, elle expose des mesures susceptibles d’encourager un recours plus vaste aux coopératives en Europe. Ces mesures mettent l’accent sur la visibilité accrue et la qualité renforcée des lois nationales sur les coopératives ainsi que sur une contribution étendue des coopératives aux politiques communautaires. Les axes principaux de la communication sont les suivants : - La promotion d’un recours accru aux coopératives partout en Europe par l’amélioration de la visibilité, des caractéristiques et de la compréhension du secteur ; - La poursuite de l’amélioration de la législation régissant les coopératives en Europe ; - Le maintien et l’amélioration de la prise en compte des coopératives dans les objectifs communautaires ainsi que leur contribution à ces objectifs. » Extrait de la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 23 février 2004, sur la promotion des sociétés coopératives en Europe. Depuis leur création, les coopératives portent des valeurs universellement reconnues : « l’équité, la justice sociale, la solidarité, l’absence de discrimination, la non lucrativité, la participation effective et l’émancipation des populations concernées, la responsabilité et la gestion transparente et démocratique. » (Extrait du Consensus de Genève signé par l’Alliance Coopérative Internationale le 7 septembre 2005 dans le cadre de l’Alliance Internationale pour l’Extension de la Protection Sociale). Les coopératives, en tant qu’organisation particulière de l’économie sociale, incarnent cet idéal démocratique. C’est d’ailleurs ce que lui reconnaissent plusieurs législations nationales en leur accordant quelques mesures de compensation fiscales. Si ces entreprises existent en Europe depuis le XIXème siècle, si elles constituent depuis longtemps une part non négligeable de l’activité économique dans 3 chacun des pays de l’Union Européenne, elles ont été reconnues tardivement au niveau communautaire. Après 10 ans de négociation (et 30 ans de lobbying des organisations coopératives), le Conseil des Ministres Européen adopte la directive 2003/72/EC, le 22 juillet 2003, relatif à l’implication des travailleurs dans la Société Coopérative Européenne. Cette Directive complète le Règlement n°1435/2003 relatif au statut de la Société Coopérative Européenne en ce qu’elle « régit les implications des travailleurs dans les affaires des sociétés coopératives européennes ». La Directive ne trouve son application que dans le cadre du Règlement, et celui-ci est indissociable de celle-là. Ainsi, aucune SEC (ou SCE) n’est valablement constituée si les dispositions de la Directive n’ont pas été appliquées (Art 1 et Article 11§2 du Règlement qui prévoit qu’une SEC ne peut être immatriculée si elle ne justifie pas avoir pris les mesures prescrites dans la Directive : et c’est par son immatriculation obligatoire que la Sec acquiert la personnalité juridique). Cette condition, imposée pour la première fois par le Règlement sur la Société Européenne (SE) et reprise ici, est nouvelle en droit des sociétés. A cet égard, on remarquera que les textes de la Directive complétant le Règlement de la SE et de la Directive complétant le Règlement de la SEC sont identiques quant au fond. Un ajout intéressant toutefois en ce qui concerne la SEC : Article 3 2 b) 1er § in fine - les méthodes utilisées pour la nomination, la désignation ou l'élection des représentants des travailleurs devraient viser à promouvoir l'équilibre entre les hommes et les femmes. Le contenu de la Directive repose sur deux principes majeurs : Faire en sorte que la forme européenne ne devienne pas un moyen d’échapper à des règles nationales trop contraignantes tout en apportant des éléments de souplesse dans la création des SCE. Ne pas contraindre les Etats membres en leur imposant des règles entrant en contradiction avec leur système de relations sociales. Il s’agit notamment de respecter les spécificités nationales de chacun des pays membres dans la mesure où chacune des législations nationales est le résultat d’un long processus historique. 4 Par « implication des travailleurs », on entend « l’information, la consultation, la participation et tout autre mécanisme par lequel les représentants des travailleurs peuvent exercer une influence sur les décisions à prendre au sein d’une entreprise ». Mais, derrière ces termes, les définitions peuvent différer d’un pays à l’autre. La directive doit donc faire l’objet d’une adaptation nationale par le ministère compétent dans chaque pays et doit être transposée dans chacun des 25 pays de l’UE pour le 18 août 2006. Il semble d’ores et déjà que certains pays dépasseront cette date. Le réexamen de la directive par la Commission est fixé au 18 août 2009. Il sera temps alors de procéder à un bilan exhaustif. La présente synthèse s’inscrit dans le cadre du processus de transposition de la directive. Elle aborde des questions liées à l’implication des travailleurs. Néanmoins, il ne lui appartient pas de traiter des enjeux juridiques que posent les deux textes2, ni même des ambiguïtés que leur confrontation génère3. Leur interprétation fait l’objet de débats et de négociations tant au niveau européen qu’au niveau national. « Mieux comprendre les problématiques des sociétés coopératives afin de favoriser l’implication des salariés et, ainsi, favoriser les actions communes » : tel est l’enjeu principal du projet, en lien avec l’application de la directive. Si le statut de la SCE s’applique à l’ensemble des coopératives (agricole, de crédit, de travail, de consommateurs), le champ de l’étude a été circonscrit aux structures dans lesquelles le travailleur devient un participant particulièrement actif dans la prise de décision : « les coopératives de travail ». Quatre objectifs ont été assignés à la mission : 1 – Synthétiser : réaliser un état des lieux des pratiques coopératives en matière de participation des salariés. 2 – Comprendre : mieux apprécier la place des Instances Représentatives du Personnel au sein des sociétés coopératives. 3 – Dialoguer : favoriser l'échange d'expériences par le biais de rencontres dans les différents pays et d'un colloque. 4 – Agir : aboutir à des choix d'actions communes. 2 Sur l’opportunité d’adoption du système dualiste ou du système moniste ou encore sur le risque de « dumping fiscal » par exemple. 3 Par exemple, dans la version française de la directive, la Société Coopérative Européenne est désignée par l’acronyme SCE alors que dans le règlement, c’est l’acronyme SEC qui est utilisé. 5 Dans un premier temps, la synthèse traite du mouvement coopératif en Europe et de ses problématiques spécifiques en matière de participation des salariés (qu’ils soient associés ou non). Au-delà de ce tableau d’ensemble, chacun des pays de l’Union a développé sa propre législation en matière de coopération, dans le cadre fixé par la Déclaration sur l’identité coopérative (cf. infra). Les pratiques coopératives diffèrent donc largement d’un pays à l’autre. C’est l’objet de la deuxième partie de cette synthèse que de rendre compte des résultats de notre étude dans les sept pays concernés (Allemagne, Espagne, Italie, France, Pologne, République Tchèque, Suède). Nous ne revenons cependant pas, dans le détail, sur les spécificités juridiques nationales. La troisième partie propose un certain nombre de problématiques et de recommandations que les acteurs concernés par ce projet doivent, selon nous, s’approprier. Au final, il nous semble que cette étude arrive à point nommé, c’est-àdire à une période historique où, dans de nombreux pays, le mouvement syndical et le mouvement coopératif, qui se sont longtemps opposés historiquement, trouvent dans la réforme européenne une occasion de renouer le dialogue. 6 1. Le dialogue social dans les coopératives 1.1. La coopération en Europe Les données chiffrées portant sur les coopératives en Europe font l’objet de débats liés notamment à des questions méthodologiques. Nous rappellerons donc, de façon très générale, que l’Union Européenne (25 pays) compte environ 1 million de salariés occupés dans les coopératives de travail pour environ 60 000 structures. C’est en Espagne et l’Italie que les coopératives de travail sont les plus nombreuses. Les principes de fonctionnement de la coopération ont été édictés par la « déclaration sur l’identité coopérative » (approuvée par l’assemblée générale de l’ACI - Association Coopérative Internationale- lors du congrès de Manchester en septembre 1995). Cette déclaration met en valeur sept principes constitutifs de la coopération : 1. Adhésion volontaire et ouverte à tous 2. Pouvoir démocratique exercé par les membres 3. Participation économique des membres 4. Autonomie et indépendance 5. Education, formation et information 6. Coopération entre les coopératives 7. Engagement envers la communauté Chacune des organisations représentant le mouvement coopératif adhère à ces principes de fonctionnement et, malgré les disparités entre pays, le principe « une personne = une voix » constitue le dénominateur commun à l’ensemble du mouvement. Au niveau mondial, la Déclaration Mondiale sur le Travail Associé Coopératif de 2003 (dont on peut relever le caractère historique) définit plus spécifiquement les caractères de base et les modes de fonctionnement spécifiques aux coopératives de travail associé : « elles visent à la création et au maintien d’emplois viables et à la création de richesse, dans le but d’améliorer la qualité de vie des travailleurs 7 associés, de conférer de la dignité au travail humain, de permettre l’autogestion démocratique des travailleurs, et de promouvoir le développement des collectivités locales. » 1.2. La participation dans les coopératives Nous avons vu précédemment que la coopération incarnait un idéal démocratique. Quels sont les problèmes spécifiques à ce type d’organisation en matière de participation des travailleurs ? En la matière, l’autocritique n’est pas une qualité qui fait défaut aux coopérateurs : les plus ardents défenseurs de la coopération en sont aussi les juges les plus implacables. C’est probablement un état d’esprit assez caractéristique de la coopération que d’adopter une attitude alliant conviction militante (la face des valeurs partagées) et jugement pragmatique (la face réaliste). Cette section synthétise donc un grand nombre de résultats d’études menées par des chercheurs spécialistes des coopératives et publiés dans des revues scientifiques. - Une gestion de la diversité Les études montrent qu’il existe une grande diversité de types d’employés dans les coopératives. On y trouve à la fois de simples travailleurs, des travailleurs-associés (travailleurs qui détiennent une ou plusieurs parts de capital dans la coopérative) mais aussi des travailleurs extérieurs occasionnels (travail intérimaire par exemple). Cette situation crée des tensions entre les différents groupes dans la mesure où leurs intérêts ne sont pas les mêmes. - L’importance des leaders et la concentration des pouvoirs Les coopératives sont souvent confrontées au problème de la concentration du pouvoir entre les mains d’une minorité plus active. La majorité des membres se contente alors de suivre les orientations données par les leaders. Par ailleurs, la dispersion des parts sociales pourrait favoriser la formation de groupes autour d’élites managériales (donc la concentration du pouvoir) qui, dans des cas extrêmes, 8 pourraient avoir plus de pouvoir que dans les entreprises conventionnelles. Les coalitions de détenteurs de parts sociales sont en effet plus difficiles à mettre en œuvre que dans les entreprises classiques. L’émergence d’un contre-pouvoir est donc problématique et rejoint un paradoxe démocratique : la recherche du consensus rend difficile l’émergence d’une opposition structurée. - La faible participation Des études espagnoles montrent que les coopératives sont confrontées à un problème de participation à la prise de décision. Plus la coopérative est petite, plus la participation est importante. La participation des travailleurs diminue avec l’accroissement de l’âge et de la taille de la structure. Les hommes sont plus représentés que les femmes dans les organes de direction. Dans certaines études, ces dernières disent ressentir des formes de discrimination. - La place des syndicats Globalement, les syndicats sont peu présents dans les coopératives. L’existence d’un syndicat apparaît souvent contradictoire avec le statut coopératif. Une coopérative a-t-elle besoin d’un syndicat puisque les travailleurs sont leurs « propres patrons » ? Ne sont-ils pas en mesure de défendre leurs propres intérêts puisqu’ils détiennent le pouvoir ? - Tensions entre les représentants élus et les experts chargés de la performance Il s’agit d’une tension majeure dans les coopératives de travail : entre les travailleurs associés et les membres du Conseil d’Administration Autrement dit entre les « citoyens » actifs dans la prise de décision et les « experts » légitimés par leurs compétences. Cette problématique est d’autant plus prégnante que la coopérative est ancienne. Lors de la phase de création d’une coopérative, on constate que la participation s’effectue de façon directe. Ce sont les élus qui possèdent le pouvoir. Petit à petit ils délèguent leurs pouvoirs à des experts (marketing, finance etc.) reconnus pour leur compétence technique. A la logique de fonctionnement 9 démocratique se substitue donc progressivement une logique gestionnaire qui fait de la performance économique une priorité. - La double qualité du coopérateur : travailleur salarié et associé Il s’agit là du cœur de la problématique concernant les coopératives de travail. La double qualité du coopérateur introduit des différences de statut dans l’entreprise. Cela implique, la plupart du temps, des différences en matière de droit du travail mais aussi des conflits de rôle. 10 2. Etat des lieux dans les sept pays étudiés 2.1. Allemagne Le texte qui suit provient de réponses du seul mouvement coopératif (PVDP), et devrait être utilement complété lors du séminaire. Le mouvement coopératif Le mouvement coopératif allemand est particulièrement important au niveau national. Les coopératives de travailleurs sont cependant moins nombreuses que les autres types de coopératives et leur situation n’est pas complètement stabilisée. Le statut de travailleur salarié-associé par exemple (absence d’un réel contrat de travail dans la partie Est du pays notamment) fait aujourd’hui l’objet de réflexions afin de limiter les risques de dérives en matière de protection du travailleur. Mais des conceptions différentes s’opposent sur cette question, qui n’est pas encore tranchée. La situation, notamment au niveau du droit du travail, n’est pas très claire (les décisions des tribunaux sont contradictoires). L’application du statut de co-employeur peut permettre de sortir de cette impasse. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif D’une manière générale, les syndicats allemands n’ont pas de relations officielles avec le mouvement coopératif. La spécificité allemande en matière de coopération fait cependant apparaître deux réalités : pour la partie Ouest, les relations entre organisations syndicales et mouvement coopératif sont quasi-nulles alors que pour la partie Est, on constate un certain nombre de relations qui se situent au niveau local. Mais cela dépend d’abord de la personnalité et des volontés exprimées localement. Sur le plan institutionnel, la confédération coopérative a fait part de son souhait de développer les interactions avec les syndicats dans la mesure où les objectifs politiques sont proches, même si les moyens diffèrent. Il y a nécessité de trouver un modèle original de dialogue social entre les deux mouvements. 11 La directive SCE Les débats sont en cours à Berlin concernant la transposition de la directive. Pour les régions de l’ex-Allemagne de l’Est, la SCE constitue aussi une chance de renforcer le mouvement coopératif là où la coopérative restait un des symboles de l’ancien régime. La perspective de coopérations transfrontalières laisse penser que le statut de la SCE donnera de réelles opportunités aux coopératives allemandes. La création d’une SCE est notamment envisagée à la frontière Tchèque, dans le domaine de la coopération agricole. 2.2. Espagne Le mouvement coopératif Le mouvement coopératif espagnol est un des plus importants d’Europe par le nombre de structure et le nombre d’employés. On y compte 18 000 coopératives de travail pour plus de 220 000 travailleurs. Sur le plan universitaire, ce sont au moins 240 professeurs qui orientent leurs recherches sur les coopératives. La force du mouvement coopératif espagnol réside aussi dans sa structuration régionale et nationale mais qui va de pair avec une complexité législative considérable : il existe 13 lois différentes régissant l’activité des coopératives : une par région autonome (c’est pour cette raison que certains parlent plutôt de faiblesse). Le groupe des coopératives de Mondragon, au Pays Basque, est souvent cité comme exemple d’un développement international des coopératives. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif Les organisations représentatives du mouvement coopératif (il s’agit, dans le cadre de l’étude de COCETA, tandis que l’autre organisation rencontrée, CONFESAL, représente plus spécifiquement les sociétés anonymes de travailleurs qui sont de petites entreprises) ne sont pas officiellement reconnues comme des partenaires sociaux. Elles sont présentes néanmoins dans le Conseil économique et social. Elles 12 sont bien souvent proches du mouvement syndical (qui porte leur voix) et il semble que ce soient les organisations patronales qui bloquent leur reconnaissance comme partenaire social. CONFESAL a la spécificité d’avoir signé des accords de partenariat avec les deux principales confédérations syndicales espagnoles ; UGT et CCOO. Globalement, les relations entre mouvement coopératif et syndicat sont bonnes et marquées par une certaine confiance. Les points de convergence portent notamment sur la promotion des sociétés coopératives (notamment en matière de reprise d’entreprise par les salariés), sur la prévention des risques d’accident au travail ou encore sur la formation continue. Le principal point de divergence tourne autour du statut de travailleur associé. Le coopérateur est à la fois travailleur et associé. Le statut d’associé peut amener un certain nombre de dérives par rapport au droit du travail. Ainsi les syndicats considèrent que les coopératives ne constituent pas toujours un employeur idéal. La représentation syndicale peut aider à une meilleure application des principes coopératifs. Mais, du point de vue du mouvement coopératif, le rôle syndical « classique » de revendication n’est pas nécessaire dans une coopérative dans la mesure où elle fonctionne de façon démocratique et défend du même coup les intérêts des travailleurs. Cette situation devrait amener une réflexion sur une nouvelle façon de mener l’action syndicale. Néanmoins, sur beaucoup d’autres points, il y a convergence de points de vue : la démocratie au travail, des emplois de qualité, des conditions de travail correctes... Les syndicats reconnaissent l’importance de l’économie sociale en général pour montrer qu’il existe d’autres manières de faire. Ils sont donc largement favorables au développement des coopératives. La directive SCE Sur la question de la directive, COCETA et CONFESAL ont adopté une position conjointe et sont favorables à la SCE mais les négociations entre partenaires débutent à peine. Peut-être ce statut permettra-t-il d’apporter un élément de réponse à la diversité des lois portant sur les coopératives en Espagne. 13 2.3. France Le mouvement coopératif La Confédération Générale des Sociétés Coopératives Ouvrières de Production (CGSCOP) constitue l’organe officiel de représentation des coopératives de travail en France. Qu’est-ce que la participation dans une coopérative de travail française ? Concrètement, les SCOP reversent 48% de leur résultat aux salariés et « associent près de 60% d’entre eux au capital ». Les chiffres qui suivent proviennent de la Centrale des bilans de la Confédération Générale des SCOP pour l’année 2004 : 35 353 salariés pour 1 597 SCOP et 3,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires 54,1 % des SCOP comptent moins de 10 salariés (10,9 % des emplois) 54,1 % des emplois se concentrent dans les SCOP de plus de 50 salariés Taille moyenne des SCOP affiliées à la CGSCOP : 22 personnes Les relations entre syndicats et mouvement coopératif Historiquement, les relations entre mouvement coopératif et mouvement syndical sont marquées par une forme de méfiance réciproque, avec une alternance de rapprochements et de périodes d’antagonismes. Aujourd’hui, un certain nombre de projets communs émergent entre syndicats et mouvement coopératif. Certains qualifient cette nouvelle période historique de « réchauffement » : • La sensibilisation de salariés au statut coopératif avec les syndicats. Il s’agit d’une partie des programmes de formation avec plusieurs organisations syndicales. L’objectif est de montrer que la coopération constitue une alternative crédible aux autres formes d’entrepreneuriat. • La revendication d’une convention collective spécifique aux coopératives afin de « montrer l’exemple ». • Les enjeux de la transmission d’entreprise (papy-boom) peuvent favoriser le rapprochement entre syndicats et mouvement coopératif. La CGSCOP n’est cependant pas encore reconnue comme un « partenaire social » à part entière. Elle s’installe progressivement comme un interlocuteur réel des 14 syndicats, en attendant de devenir partenaire patronal officiel (une liste du patronat de l’économie sociale a été créée en France et a connu un score tout à faire intéressant aux dernières élections prud’homales). Les syndicats se montrent d’ailleurs favorables à avoir la CGSCOP comme interlocuteur patronal. La CGSCOP a créé un lieu d'échange informel sur ces questions (le Comité de Conseil de Concertation et de Conciliation). La directive SCE Du point de vue du mouvement coopératif, l'implication des salariés dans les SCOP est définie de manière plus précise que dans la Directive. La SCE porte sur un domaine plus large que les simples SCOP. D'autres structures sont donc aussi concernées. Il reste cependant à donner une définition européenne de la coopération. Le règlement laisse craindre une dilution de la spécificité du statut coopératif notamment sur la question des réserves. Cette crainte est partagée à la fois par les syndicats et le mouvement coopératif. Le Groupe Spécial de Négociation n’est pas encore mis en place en France au moment de l’étude. Il est donc probable que la transposition de la directive fasse l’objet d’un report. 2.4. Italie Le mouvement coopératif La constitution italienne de 1947 reconnaît la fonction sociale des coopératives. Article 45 de la Constitution Italienne : « la République reconnaît la fonction sociale de la coopération à caractère de mutualité et ne visant pas à la spéculation privée. La loi aide et favorise son développement par les moyens les plus appropriés et en assure le caractère et les finalités par des contrôles adéquats. » Les coopératives représentent 7 % du PIB. On compte 1 million d’employés dans plus de 70 000 sociétés différentes. 1,5 % de la population active est employé dans une coopérative de travail. C’est le pourcentage le plus important d’Europe. 15 L’Italie a ceci de particulier que le mouvement des coopératives est porté par trois organisations : Confcooperative, Legacoop et AGCI. Ces organisations sont par ailleurs officiellement reconnues comme des partenaires sociaux capables d’engager des négociations avec les syndicats pouvant déboucher sur des accords officiels. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif Beaucoup de syndicats ont été, par le passé, traditionnellement opposés à la coopération. Les positions ont évolué progressivement pour aboutir à des prises de position plus mesurées. Il convient tout de même de noter de fortes différences de position selon les syndicats. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif sont relativement importantes et prennent forme notamment autour de la gestion des fonds de pension ou d’un fonds pour la formation continue. Les syndicats estiment que les coopératives ont bien souvent été à l’avant-garde des avancées sociales. La représentation syndicale dans les sociétés coopératives est d’ailleurs relativement importante. Mais les syndicats ne représentent que les travailleurs salariés non associés. Les membres associés ne font pas l’objet d’une représentation. C’est, pour les syndicats, une situation inacceptable dans la mesure où elle autorise de nombreuses dérives à l’encontre du membre associé, qui est moins protégé qu’un salarié « classique » (notamment dans les coopératives de services). Il s’agit aujourd’hui d’un point de discussion majeur entre mouvement coopératif et syndicats, même si le mouvement coopératif souligne que dans la coopération associée, il est difficile de trouver de telles situations « border line ». La directive SCE Des réflexions et des travaux ont déjà été menés sur la question et ont fait l’objet d’une publication de l’UIL sous la forme d’un ouvrage écrit en italien et en anglais4. 4 Coordonné par Maria Sacchettoni, Italy and European Cooperative Society : Reality and Expectations, UIL 16 Les syndicats sont convaincus que la directive est facteur de progrès au regard de la situation actuelle italienne notamment au regard de la situation spécifique du membre associé (avec la loi 142 de 2001, modifiée en 2003). L’enjeu de la négociation est donc très important. Le mouvement coopératif semble plus circonspect à cet égard. Certains points de la directive constituent selon lui un recul par rapport à la législation nationale en faisant preuve d’une trop grande rigidité. Les différentes organisations font part de leur attachement au dialogue social débouchant sur des accords collectifs et de leur méfiance à l’égard d’un interventionnisme législatif trop fort. L’incorporation de nouvelles normes juridiques européennes pourrait déstabiliser le modèle de négociation collective italien. 2.5. Pologne Le mouvement coopératif En Pologne, le secteur coopératif représente 12 à 15 millions de salariés pour 14 000 structures réparties dans 13 secteurs d’activité. Sur le plan historique, l’expérience polonaise est naturellement marquée par la période communiste. Dans ce cadre, la coopération a occupé une place assez particulière : sous le régime communiste, beaucoup de coopératives étaient des sous-traitants de l’Etat polonais ou servaient à combler un certain nombre de ses défaillances. L’année 1990 a marqué un changement décisif dans la mesure où les unions coopératives sont passées sous la tutelle de l’Etat et ont fait l’objet de mesures visant à réduire leur influence. Les coopératives se sont toujours situées dans un « entre-deux » : elles étaient perçues comme capitalistes dans l’ancien système communiste alors qu’aujourd’hui elles sont perçues comme des survivances de ce système dans une économie devenue libérale. On retrouve dans l’expérience polonaise des spécificités assez originales. Il s’agit par exemple des coopératives pour handicapés ou des coopératives d’élèves. 17 La coopération de travail représente 25% de l’Assemblée Générale des coopératives. En matière fiscale, les coopératives semblent bénéficier de conditions moins avantageuses que les grands groupes internationaux par exemple, qui sont exonérés de taxes locales. Globalement, le poids des coopératives de travail tend à diminuer du fait de l’émergence de l’économie de marché et de la concurrence internationale. Si l’on comptait 2000 coopératives de travail en 1990, il n’en reste plus que 984 aujourd’hui. Une nouvelle forme de coopérative a émergé récemment : la coopérative sociale. Il s’agit de coopératives de services dont le capital initial est financé par l’Etat. Elles constituent un instrument de lutte contre le chômage. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif Les syndicats sont désormais confrontés à un dilemme : ils se sont battus pour un changement politique fort en Pologne (en particulier Solidarnosc). Dans ce cadre, les coopératives incarnaient des survivances de l’ancien régime qu’il fallait combattre. Aujourd’hui, face à l’importance du chômage (20%), les syndicats doivent se battre pour l’emploi. Or ils estiment que les coopératives offrent de meilleures conditions de travail que les entreprises classiques. Ils luttent donc désormais pour la protection des coopératives et affirment que dans celles où existe un dialogue social, les résultats économiques sont meilleurs. Le problème est que les gouvernements libéraux perçoivent encore les coopératives comme des structures de type communiste. Contrairement à bon nombre de pays d’Europe de l’Ouest, les relations actuelles entre syndicats et mouvement coopératif en Pologne restent problématiques. Cette situation est le fruit d’un processus historique où les syndicats, à commencer par Solidarnosc, ont été les porte-drapeaux d’un changement de système. Dans ce cadre, les coopératives représentent le passé. Dans les coopératives, la notion de syndicat n’existe pas. L’article 3 de la loi sur la coopération stipule que le capital est la propriété de ses membres. A quoi donc servirait un syndicat dans ce cadre ? Les syndicats n’apparaissent que dans les 18 coopératives où il y a des employés non associés au capital, dans les coopératives d’habitation par exemple. Dans le cadre des instances de négociation nationales, les commissions tripartites (gouvernement, syndicats, employeurs), la Fédération des coopératives détient une place d’observateur pas, et ne possède pas de droit de vote. Les représentants du mouvement coopératif considèrent cette situation comme avantageuse dans la mesure où ils ne se considèrent ni comme des patrons ni comme des organisations syndicales. Au niveau local, il existe une grande diversité dans les relations entre les syndicats et les responsables des coopératives. Cela dépend essentiellement des personnalités au pouvoir localement. Dans les coopératives où le dialogue social est inexistant, les managers prennent de plus en plus d’importance et finissent par racheter la société pour en faire une entreprise classique. La directive SCE Le statut de la SCE est accueilli de manière très positive dans la mesure où il fournit enfin un cadre juridique à l’exercice de la coopération. Il semble cependant que la législation polonaise soit plus exigeante en matière d’exercice de la démocratie dans les coopératives. D’une manière générale, le mouvement coopératif, comme les syndicats se sont montrés très ouverts et intéressés au développement de structures coopératives transnationales. Les syndicats ont enfin émis l’idée d’une grande conférence en Pologne qui présenterait de façon complète le statut de la SCE. L’information fait encore défaut en la matière. 19 2.6. République Tchèque Le mouvement coopératif Comme pour la Pologne, le mouvement coopératif a traversé les systèmes politiques. De la collectivisation forcée de 1948 à la révolution de 1989, ces coopératives ont exercé des activités de sous-traitance pour l’Etat Tchécoslovaque mais ont aussi servi à combler un certain nombre de ses défaillances. Cette situation a abouti à une confusion entre le système communiste et les coopératives. La première difficulté du mouvement coopératif est donc de dépasser cet l’amalgame. Aujourd’hui, les coopératives de travailleurs représentent 24 800 salariés dont 11 900 associés, soit 303 sociétés affiliées à SCMVD ; pour un chiffre d’affaires global de 22 milliards de couronnes (730 millions d’euros). En règle générale le statut de membre est différent de celui de salarié. Mais les statuts de la coopérative peuvent permettre de devenir associé sans être travailleur. Il ne s’agit pas d’une obligation légale, mais la recommandation de l’Union tchèque et morave des coopératives de production (SCMVD) est de faire coïncider le statut d’associé avec celui de travailleur. Au-delà de la coopération de travail, la République Tchèque a vécu deux situations originales : d’une part, des problèmes spécifiques avec les coopératives de crédit à partir de 1989, qu’une loi de 2000 essaie de régler et, d’autre part, des problèmes spécifiques aux coopératives de logement avec individualisation croissance de la propriété au détriment des logements coopératifs. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif La principale confédération syndicale tchèque est largement favorable à l’instauration d’un dialogue social régulier avec le mouvement coopératif. Il existe un « conseil d’entente », c'est-à-dire une sorte de « gentleman agreement », entre les deux mouvements au sein duquel se déroulent des négociations officieuses. 20 Au sein des coopératives, les syndicats sont peu représentés, surtout chez les jeunes salariés. Il existe néanmoins des commissions qui ont pour objectif de représenter les membres. Mais globalement, lorsque le salarié est associé, il n’y a pas de présence syndicale. Cela dit, le problème de la représentation syndicale est perceptible dans toutes les petites et moyennes entreprises, ce n’est pas une spécificité des coopératives. La directive SCE Au niveau de la transposition de la directive, les négociations ont été initiées par le mouvement coopératif et le travail législatif permettra une application dans les délais prévus par l’UE. Les travaux ont été particulièrement poussés avec, notamment, une publication sur le sujet. Le règlement et la directive sont donc perçus comme un signal positif de la part de l’Union Européenne dans la légitimation de la forme coopérative. 2.7. Suède Le texte qui suit provient de réponses du seul mouvement coopératif, et devrait être utilement complété lors du séminaire. Le mouvement coopératif L’organisation du mouvement reprend un ensemble très diversifié, comme dans l’ensemble des autres pays interrogés. Comme dans d’autres pays de l’Europe du Nord la coopération de travail est peu développée. Une particularité est toutefois à souligner, en ce qui concerne le secteur des coopératives. Presque toutes les entreprises coopératives (à l’exception du secteur agro alimentaire) sont, rattachées à une association patronale (KFO). 21 La Suède fait partie des rares Etats à avoir développé des structures transnationales (consommation et agro alimentaire dans les pays scandinaves) sans que cette réalité soit une conséquence de la Directive. L’émergence est plus en phase avec une concentration en grands groupes pour faire face à la concurrence sur le marché. En matière de pratiques, des dérives conceptuelles peuvent être soulignées, et en particulier l’orientation vers une banalisation que prennent plusieurs coopératives, aux dépens des valeurs historiques. Il s’agit ici d’un véritable enjeu, pour lequel le représentant du mouvement propose un benchmarking afin que la Suède s’enrichisse des expériences les plus intéressantes, qui lui permettent de redonner un sens aux valeurs traditionnelles. Les relations entre syndicats et mouvement coopératif Il existe des relations structurées formelles et des échanges informels entre le mouvement coopératif et les organisations syndicales suédoises. Dans le cadre du dialogue social, la KFO négocie des conventions collectives avec les organisations syndicales qui couvrent presque l’ensemble des travailleurs, dans la mesure où l’affiliation syndicale est très élevée. Il existe par ailleurs des liens historiques entre le mouvement coopératif et le mouvement syndical ; certains grands groupes coopératifs restent proches des syndicats. Les syndicats sont membres de certaines associations dont le but est de promouvoir le développement coopératif. Leur rôle dans le développement régional est reconnu par les confédérations syndicales. Pour autant, selon le représentant du mouvement, un développement encore plus important de ces échanges est souhaitable dans la mesure où de nombreux points pourraient être abordés, à l’instar de la directive sur la SCE, pour laquelle les discussions ont été peu fréquentes. En réalité, les discussions, sur ce point, ne revêtent aucun caractère officiel, actuellement. Parmi les sujets d’intérêt à développer au sein du dialogue social : le secteur des coopératives sociales d’insertion au travail pour affronter le chômage des groupes défavorisés. 22 La directive SCE Préalablement à la transposition de la directive et l’entrée en fonction du Règlement, le gouvernement a saisi les partenaires sociaux et le mouvement coopératif pour commenter les propositions de loi. Le principe de la transposition de la Directive sur la participation des travailleurs a été acquis sans grande difficulté parce que le mouvement coopératif y était favorable et que l’organisation patronale des coopératives avait déjà formulé une position favorable à la société anonyme européenne. La loi suédoise était en effet basée sur les acquis historiques du dialogue et législation social. En revanche, en ce qui concerne les règles sur les statuts de la coopérative européenne, plusieurs observations ont été soulevées. 23 3. Pistes de réflexion et recommandations Globalement, l’adaptation de la directive aux contextes nationaux se révèle difficile. Si certains pays considèrent ce texte comme une avancée en matière de participation, d’autres le perçoivent comme un recul. Cette synthèse ne s’attarde pas sur les questions juridiques qu’il convient à chacun des pays membres de traiter. Nous traitons ici des questions de participation. Autrement dit, comment favoriser une implication pleine et entière des salariés dans la Société Coopérative Européenne ? 3.1. Les problématiques soulevées par l’étude Comment rendre la participation plus concrète ? Les pratiques de participation soulèvent un certain nombre de problématiques concrètes, dont les plus importantes sont : • liées à la prise de parole : qui peut participer ? Quel est le rôle des organisations syndicales, entre revendication et négociation ? • liées à l'engagement : jusqu'où aller dans la participation ? • liées aux jeux de pouvoir : quelle est la place de chaque participant au processus de prise de décision ? Comment contrôler l’activité managériale ? L’activité managériale est exercée par des experts dont l’objectif est l’efficacité économique. Comment cette efficacité économique est-elle définie, négociée collectivement ? L’application des principes coopératifs peut entrer en contradiction avec l’impératif d’efficacité économique. Existe-t-il aujourd’hui une profession de « manager coopératif » qui soit différente d’un « business manager » classique ? Certaines expériences nationales sont probablement à valoriser. 24 Quelle est la spécificité de la coopérative de travail en Europe ? Il s’agit du problème de la spécificité du statut de coopérative de travail en Europe. Le règlement et la directive ne résolvent pas la question. Qu’en est-il d’une définition européenne de la coopération ? Dans quelle mesure se démarque-t-elle du monde patronal habituel ? Notamment sur les questions de l'emploi, des innovations en matière de gestion des ressources humaines (GRH), d’échange d'information et de transparence, etc. Comment gérer les possibilités de comportements opportunistes ? Il s’agit du problème des délocalisations. Le statut SCE peut offrir des opportunités de délocalisation. La SCE pourra choisir d’implanter son siège social dans le pays le plus avantageux en matière fiscale et implanter ses unités de production dans un pays où le coût de la main-d’œuvre est moins élevé. Qu’en est-il également de la répartition des bénéfices et des réserves ? Quelle place pour quelle action syndicale ? Cette situation devrait amener une réflexion sur une nouvelle façon de mener l’action syndicale. La question porte notamment sur un équilibre entre la revendication et la capacité de participer à la gestion d’une entreprise respectant un certain nombre de principes démocratiques. A cet égard, une étude canadienne montre à quel point la logique syndicale peut entrer en contradiction avec les démarches participatives5. Mais elle montre aussi comment les syndicats sortent renforcés d'une participation active. Comment gérer la double qualité du travailleur-associé ? Il s’agit là du cœur de la problématique qui est posée aux coopératives de travail. La tension capital / travail ? Or force est de constater que sur cette question, la directive 5 Lapointe P.-A. (2000), « Participation et démocratie au travail », XII professionnelles, Tokyo 25 ème Congrès de l’Association internationale des relations n’apporte aucune réponse. La directive parle des salariés mais ne traite pas du problème des travailleurs-associés. 3.2. Des pistes pour la création de SCE Cette étude a permis de révéler, au-delà des volontés de la Commission européenne, la façon dont le mouvement coopératif pouvait s’approprier le nouveau statut. En voici un résumé. Le point de vue de l’Union Européenne Nouvelles opportunités de marché : la SCE doit permettre 1) de développer l’entrepreneuriat 2) la mise en commun de moyens afin de favoriser la commercialisation des produits issus de coopératives de même que l’entrepreneuriat en général. Lutte contre le chômage : l’Union Européenne a souvent relevé que les sociétés coopératives pouvaient constituer une grande source de création d’emplois. Développer ces entreprises signifie aussi proposer des solutions crédibles au traitement du chômage. Le point de vue des acteurs L’image : l’adoption du statut de SCE peut constituer, pour une coopérative, un avantage stratégique en terme d’image. L’incarnation d’une identité supranationale et européenne peut donner plus de crédibilité au projet coopératif. Réguler la mondialisation : la SCE peut permettre d’accorder un processus de mondialisation qui touche de nombreuses coopératives occidentales) avec des principes coopératifs parfois oubliés. 26 (notamment Les salariés transfrontaliers : la SCE constitue un levier pour les coopérations transfrontalières. Benchmarking : développer les coopérations transnationales c’est aussi favoriser l’échange de « bonnes pratiques » alliant recherche d’efficacité économique et respect des principes démocratiques. Conclusion Apparemment il n’existe pas encore de projet de création de SCE dans le secteur des coopératives de travailleurs. Néanmoins, une réelle dynamique de dialogue social s’est développée autour du processus de transposition de la directive. Les différents acteurs concernés se sont appropriés le texte pour lui donner un sens dans les législations et dans les pratiques nationales. Toutefois, il reste de nombreuses problématiques à traiter pour rendre effectif le dialogue et pour faire en sorte qu’il débouche sur des pratiques partagées au sein de l’Union Européenne. La Société Coopérative Européenne est, pour l’Union Européenne, un instrument de développement et de promotion du marché intérieur mais c’est aussi un outil de l’intégration européenne. Dans le dialogue qui s’installe entre mouvement coopératif et mouvement syndical sur le sujet, il y a aussi une véritable opportunité historique de reconstruire les conditions d’un dialogue entre deux branches historiques du mouvement ouvrier. 27