Le commerce équitable, une alternative au capitalisme ?

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SEMINAIRE DE L’IHC
Groupe de travail : Mouvement ouvrier
et mouvements sociaux
Le commerce équitable,
une alternative au capitalisme ?
RÉSUMÉS DES INTERVENTIONS
Le mouvement coopératif et l’économie libérale en France
d’hier à aujourd’hui (fin du XIXe siècle et entre-deux-guerres)
Annie Bleton-Ruget
Université de Bourgogne
Le mouvement coopératif en France se développe au cours des années 1880-1890, sous la
forme de coopératives de consommation qui sont les premières à être mises en place. Durant
le temps qui a été celui de leur expérimentation, de leur essor et de leur renforcement, leur
existence a accompagné l’essor de l’économie libérale et a offert à ceux qui condamnaient les
effets sociaux de cette dernière une sorte de contrepoint, voire d’alternative.
Il s’agira de montrer ici les raisons de leur développement, celles aussi de leur dépérissement
progressif, et de rappeler que ces coopératives de consommation s’inscrivent dans un
mouvement plus large (coopératives de production ; coopératives de crédit mutuel agricole ou
mutuelles) qui n’a cessé d’accompagner les développements de la concurrence capitaliste.
Si aujourd’hui la place des coopératives de consommation est fort restreinte dans les
économies occidentales, la conjoncture contemporaine de crise économique et de
bouleversements sociaux contribue à leur redonner une certaine place dans les
expérimentations de nouvelles modalités d’organisation des liens sociaux.
Un commerce équitable à grande échelle est-il possible ?
Ronan Le Velly
Université de Nantes
La communication présente les changements dans la nature de la relation marchande qu’induit
le développement des ventes du commerce équitable. Il montre que l’accroissement des
débouchés se traduit par la remise en cause du travail avec les « petits producteurs », par le
paiement d’un « prix juste » pas totalement déconnecté des forces du marché et par
l’impersonnalisation croissante de la relation entre producteurs et consommateurs. Plusieurs
commerces équitables à plusieurs échelles sont possibles. Le passage de la filière directe à la
filière intégrée, puis de la filière intégrée à la filière labellisée permet une augmentation de
l’efficacité commerciale, mais s’accompagne d’une moindre opposition aux caractéristiques
attribuées au marché conventionnel.
Construction idéologique et effets du commerce équitable
dans les organisations paysannes andines : une question de justice
Virginie Diaz
Université Paris V
Cette communication sur le commerce équitable, fruit d’un travail de doctorat sur le sujet,
s’articulera autour de la notion de justice. Dans un premier temps, nous étudierons la
construction idéologique du commerce équitable en revenant sur l’histoire du mouvement et
de ses acteurs. Nous verrons en quoi l’action des pionniers du commerce équitable est
motivée par le désir de justice. Dans un deuxième temps, nous présenterons les effets du
commerce équitable sur le terrain, en prenant pour exemple les organisations de caféiculteurs
du monde andin. Nous analyserons ces effets à la lumière des conceptions de la justice de
l’ensemble des partenaires de l’échange et poserons les questionnements au fondement de la
pratique d’un « juste commerce », national et international.
Le tourisme solidaire et équitable :
entre esthétique militante et critique marchande
Céline Cravatte
Université de Rouen
Cette communication explore la tension entre le pôle tiers-mondiste et le pôle marchand de la
nébuleuse du tourisme solidaire et équitable telle qu’elle s’est développée actuellement en
France. Elle s’appuie sur un travail d’enquête par entretiens et observations réalisé depuis
décembre 2002 sur les associations se réclamant du tourisme solidaire et responsable. Cette
tension existe dans le mouvement du commerce équitable, mais l’étude du tourisme permet
d’y jeter un nouvel éclairage. En effet, la différence de la prestation repose non seulement sur
des critères sociaux et environnementaux, mais aussi sur une différence même dans le contenu
de la prestation : ce qui est vendu est un tourisme de rencontre avec la population locale, hors
des sentiers battus. Alors que ces deux dimensions sont présentées par beaucoup d’acteurs
comme étroitement liées, tous ne leur accordent pas la même importance. Pour certains, c’est
la mise en avant d’un regard touristique militant qui importe avant tout : il s’agit d’imposer un
regard touristique comme plus légitime que les autres, mais il peut alors être réduit à une
esthétique spécifique dans un marché touristique en segmentation constante. Pour d’autres,
c’est la mise en avant d’un regard consumériste critique sur les modes de production de la
prestation et les rémunérations qui est essentielle, qui pourrait même, dans l’idéal, être
déconnectée du contenu de la prestation. Dans cette tension se joue un conflit sur la forme de
rapport légitime avec l’autre du Sud.
La consommation équitable :
une requalification du citoyen en consommateur
Gabriela Parodi
Université de Nantes
La mise en avant de certaines valeurs morales, politiques et sociales, associées à l’achat
équitable, permet de donner une reconnaissance à une forme de consommation alternative,
nommée responsable. Le « consommateur citoyen » apparaît comme l’acteur spécifique de
cette démarche de consommation réflexive.
Devenir un consom’acteur dans nos sociétés suppose de s’inscrire dans cette démarche
d’achat responsable en écho avec une logique commerciale dont les prérogatives sont
l’éthique et l’équitable. Les consommateurs qui s’identifient à ces valeurs, en achetant
équitable, sont reconnus comme des citoyens à part entière. C’est ce constat, omniprésent
dans les discours des promoteurs du commerce équitable, qui nous invite à problématiser cette
requalification du citoyen en consommateur.
Le commerce équitable :
l’efficacité économique de la solidarité
Thomas Coutrot
Membre du comité scientifique d’ATTAC
Selon la doctrine du libéralisme économique, la concurrence est toujours et partout plus
efficace économiquement que la solidarité ou la démocratie. L’économie solidaire serait par
nature inefficace. Deux arguments sont couramment avancés pour justifier ce point de vue.
Au niveau local, l’appât du gain serait la meilleure incitation à l’efficacité maximale. Au
niveau social, la logique de la maximisation du profit garantirait seule l’orientation des
investissements vers les secteurs où ils sont le plus nécessaires. Mais cette conception
dominante de l’efficacité économique peut être fortement contestée. L’exemple du commerce
équitable permet d’introduire cette critique.
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