Le tourisme solidaire et équitable :
entre esthétique militante et critique marchande
Céline Cravatte
Université de Rouen
Cette communication explore la tension entre le pôle tiers-mondiste et le pôle marchand de la
nébuleuse du tourisme solidaire et équitable telle qu’elle s’est développée actuellement en
France. Elle s’appuie sur un travail d’enquête par entretiens et observations réalisé depuis
décembre 2002 sur les associations se réclamant du tourisme solidaire et responsable. Cette
tension existe dans le mouvement du commerce équitable, mais l’étude du tourisme permet
d’y jeter un nouvel éclairage. En effet, la différence de la prestation repose non seulement sur
des critères sociaux et environnementaux, mais aussi sur une différence même dans le contenu
de la prestation : ce qui est vendu est un tourisme de rencontre avec la population locale, hors
des sentiers battus. Alors que ces deux dimensions sont présentées par beaucoup d’acteurs
comme étroitement liées, tous ne leur accordent pas la même importance. Pour certains, c’est
la mise en avant d’un regard touristique militant qui importe avant tout : il s’agit d’imposer un
regard touristique comme plus légitime que les autres, mais il peut alors être réduit à une
esthétique spécifique dans un marché touristique en segmentation constante. Pour d’autres,
c’est la mise en avant d’un regard consumériste critique sur les modes de production de la
prestation et les rémunérations qui est essentielle, qui pourrait même, dans l’idéal, être
déconnectée du contenu de la prestation. Dans cette tension se joue un conflit sur la forme de
rapport légitime avec l’autre du Sud.
La consommation équitable :
une requalification du citoyen en consommateur
Gabriela Parodi
Université de Nantes
La mise en avant de certaines valeurs morales, politiques et sociales, associées à l’achat
équitable, permet de donner une reconnaissance à une forme de consommation alternative,
nommée responsable. Le « consommateur citoyen » apparaît comme l’acteur spécifique de
cette démarche de consommation réflexive.
Devenir un consom’acteur dans nos sociétés suppose de s’inscrire dans cette démarche
d’achat responsable en écho avec une logique commerciale dont les prérogatives sont
l’éthique et l’équitable. Les consommateurs qui s’identifient à ces valeurs, en achetant
équitable, sont reconnus comme des citoyens à part entière. C’est ce constat, omniprésent
dans les discours des promoteurs du commerce équitable, qui nous invite à problématiser cette
requalification du citoyen en consommateur.