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Mécanique et lumière, corpuscules et ondes répondent désormais de théories
complètement séparées, les premiers évoluant dans le vide
1
, les seconds dans l’éther.
Théorie corpusculaire et théorie ondulatoire
― Dans une théorie corpusculaire, la lumière est composée de particules qui se meuvent
dans le vide indépendamment les unes des autres. Elles possèdent leur mouvement
propre. Les théories corpusculaires comme celles d’Alhazen (entre 1015 et 1021), de
Descartes (1637), du moins pour ce qui est de la réflexion et de la réfraction, de Boyle
(1627-1691), puis de Newton (1687 et 1721) sont appelées théories d’émission.
― Dans une théorie ondulatoire, la lumière se propage dans un milieu au sein duquel des
vibrations induisent sa propagation. L’eau et l’air ont la faculté de transmettre le
mouvement ou plus précisément la quantité de mouvement. Contrairement à ce qu’on
peut observer dans une théorie corpusculaire, il n’y a pas de transport de matière dans
une théorie ondulatoire : il n’y a que transmission d’énergie. Les théories ondulatoires
ont été développées par Grossetête (1168 ? 1175-1253)
2
, Roger Bacon (1214-1292)
3
,
Thomas Hobbes (1588-1679), Francesco Maria Grimaldi (1618-1663) dans son traité
Physico mathesis de Lumine publié en 1665, Robert Hooke (1635-1703) dans
Micrographia de 1665, Isaac Barrow (1630-1677), par Pardies (1636-1674) dans un
manuscrit perdu écrit vers 1670
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, enfin par Huygens (1629-1695) dans son Traité de la
lumière (présenté en 1678 et publié en 1690). Ces théories sont appelées théories des
milieux. Plus tardivement, Euler (1707-1783) fut un fervent défenseur de la théorie
ondulatoire. Enfin, plus d’un siècle plus tard après Huygens, Young (1773-1829) publia
deux notes en 1802 et 1804 dans la revue Philosophical Transactions traitant de
phénomènes caractéristiques de la théorie ondulatoire comme la diffraction et les
interférences
5
. Puis Fresnel (1788-1827) présenta sa théorie ondulatoire de la lumière en
1818, théorie fondatrice de l’optique ondulatoire moderne.
1
Le vide sera au XIX
e
siècle aussi un élément essentiel de l’hypothèse atomiste nécessaire à la théorie cinétique
des gaz établie par Boltzmann. Les atomes (le plein) évoluent dans l’espace (le vide). Leurs trajectoires ne sont
pas encore observées, mais au début du XX
e
siècle, le modèle des gaz inspirera Einstein dans l’interprétation du
mouvement brownien. En 1906, Perrin observa l’absence d’échelle dans la géométrie des trajectoires des
particules browniennes et l’impossibilité de dessiner une courbe sur de telles trajectoires. Ces idées ne furent
reprises qu’en 1960 par Mandelbrot qui développa une nouvelle géométrie : la géométrie fractale. Celle-ci
semble donc aussi s’appuyer sur l’opposition entre le vide et le plein.
2
Une histoire de la lumière, B. Maitte, Editions du Seuil (2015) p. 44.
3
Op. cit., p.55.
4
A History of Optics, from Greek Antiquity to the Nineteenth Century, O. Darrigol, Oxford UP (2012), p. 60.
5
Histoire de la lumière, V. Ronchi, Éditions Jacques Gabay, 1956, p. 239.