G. Bateson & J. Ruesch - Communication et Société - Préfaces
Control and Communication in the Animal and the Machine (1948), et celui de Shannon et Weaver, The
Mathematical Theory of Communication (1949), marquent le commencement de la nouvelle ère. Tandis
que la communauté scientifique essayait d'assimiler les nouvelles façons de penser que les
ingénieurs de la communication avaient introduites, la structure sociale des universités subissait
des transformations marquantes. Des spécialistes de formations différentes commencèrent à
coopérer et à travailler en équipe. La séparation traditionnelle entre les départements universitaires
commençait à s'estomper, et de nouvelles recherches, plus ambitieuses, étaient entreprises par des
équipes de travail interdisciplinaires.
A peu près à la même époque, de nouvelles orientations faisaient leur apparition dans le domaine
de la santé mentale. Avant l'avènement des tranquillisants, le psychiatre cherchait surtout à traiter
et soigner les principales psychoses, et il avait principalement recours aux thérapies utilisant
l'insuline et les électrochocs. Quand éclata la Seconde Guerre mondiale, les psychiatres durent tout
à coup prendre en charge et soigner des milliers de blessés qui souffraient de stress d'origine
psychologique ou sociale, sous une forme ou une autre. Dans ces conditions, la psychopathologie
classique se révéla de peu d'utilité pour comprendre les troubles de la personnalité,
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les
psychonévroses et les problèmes psychosomatiques. En revanche, les hypothèses de la
psychiatrie dynamique, qui mettent l'accent sur les processus intrapsychiques, commençaient
à devenir beaucoup plus connues. Mais les méthodes de traitement psychanalytique se révélaient
être trop longues et les officiers d'infanterie, les chirurgiens de l'armée de l'air, les chefs d'équipage
et les psychiatres étaient soumis à de très fortes pressions pour renvoyer les hommes au service
actif. Il fallait développer de nouvelles méthodes, et l'on s'intéressa particulièrement au fait que le
groupe pouvait grandement aider à la réadaptation des malades neuropsychiatriques. Les
techniques de thérapie de groupe commencèrent à faire partie des moyens utilisés par les
psychiatres.
A l'époque où ce livre fut écrit, il devenait parfaitement clair que l'ère de l'individu avait pris fin. En
dépit de l'épanouissement temporaire de la psychanalyse, les problèmes privés des gens n'étaient
plus au centre des préoccupations. La menace de la destruction nucléaire, les poussées
démographiques, l'horrible spectre des futures famines, la pollution progressive de l'air et de l'eau,
et la lente dégradation des centres urbains, tous ces facteurs montraient que les anciennes façons
d'affronter les problèmes humains étaient inefficaces. L'homme psychologique était mort et
l'homme social avait pris sa place. Cependant, à l'époque, on ne disposait d'aucune théorie générale
ou unifiée qui pût convenablement représenter et englober l'individu, le groupe et la société dans
un même système. Certes, il y avait des théories qui s'appliquaient d'un côté à de petits groupes et
de l'autre à l'ordre social; mais il manquait un maillon à la chaîne, qui aurait permis de relier
l'individu à l'individu, l'individu au groupe et le groupe à l'ordre social plus vaste.
Cette étape franchie, les développements théoriques dans le domaine de la cybernétique et des
techniques de la communication parvinrent à assurer le rapprochement. En centrant l'analyse non
plus sur la personne ou sur le groupe, mais sur les messages et les circuits de communication, on
réussit à relier différentes entités. Les circuits de communication qui doivent être étudiés incluent
d'habitude, surtout dans les systèmes humains, au moins deux personnes. En effet, il faut souvent
retrouver l'origine du message, et suivre son trajet: il passe d'une personne à une autre, transite par
des groupes et des
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machines, subit des transformations jusqu'à ce qu'il atteigne finalement sa
destination prévue, où ses effets en général rétroa-eissent sur la source originelle. Au départ,