Pour un physicien des hautes énergies, le problème de la gravitation quantique se ramène au problème de
la compréhension du fait suivant :
Quelle est cette théorie non perturbative mystérieuse qui donne en approximation « perturbative » la
théorie des cordes. Et comment peut-on en extraire l’information de la physique à l’échelle de Planck.
2-2 Le point de vue d’un relativiste
Pour un relativiste, penser la gravitation en termes d’excitations physique d’objets dans un espace de fond
ne paraît pas être la bonne approche. Le credo des relativistes est qu’il n’y a pas d’espace métrique de
fond, dans lequel la physique se déroule (sauf dans les approximations). Le monde est plus compliqué que
cela.
En fait, pour un relativiste, la Relativité Générale est bien plus que la théorie d’un champ d’une certaine
force. C’est plutôt le fait que certaines notions classiques d’espace et de temps sont inadéquates au niveau
fondamental : Elles exigent des modifications qui sont peut-être aussi radicales que celles que la
mécanique quantique a introduit.
Une de ces notions inadéquates est en particulier la notion d’espace métrique de fond (plat ou courbe), qui
sert de cadre à la physique. Ce changement conceptuel profond, a conduit à la compréhension de la
gravitation relativiste, à la découverte des trous noirs, à l’astrophysique relativiste et à la cosmologie
moderne.
De Newton au début du vingtième siècle, la physique semblait solidement fondée sur un nombre réduit de
notions clés, comme le temps, l’espace, la causalité, la matière. Malgré une évolution significative, ces
notions restaient plutôt stables et cohérentes. Dans le premier quart du vingtième siècle, la Mécanique
Quantique et la Relativité, ont fait voler en éclats ces conceptions.
Ces deux nouvelles théories ont connu de nombreuses confirmations expérimentales et se sont largement
développées et nous pouvons les considérer aujourd’hui comme une base solide de connaissance de la
physique. Chacune de ces théories, modifie notre conception classique de la physique de manière (plus ou
moins) cohérente, mais nous n’avons pas de fondements conceptuels capables de s’accommoder des deux
théories ensembles.
C’est pourquoi nous n’avons actuellement pas de théorie capable de prédire ce qui se passe dans des
situations où les deux théories s’appliquent simultanément, en particulier à l’échelle de Planck.
La Relativité Générale nous a appris que non seulement l’espace et le temps partagent avec le reste des
autres entités physique le fait d’être des structures dynamiques, mais aussi et de façon plus cruciale,
qu’une localisation dans l’espace-temps ne peut être que relationnelle.
La Mécanique Quantique nous a appris que toute entité dynamique est soumise à la relation d’incertitude
d’Heisenberg, à petite échelle. Donc nous avons besoin d’une notion relationnelle d’espace-temps
quantique pour comprendre la physique à l’échelle de Planck.
Alors pour un relativiste, le problème de la gravitation quantique va le conduire à révolutionner nos
concepts encore plus en profondeur, comme la mécanique quantique et la relativité générale ont
commencé à le faire, pour aboutir à une nouvelle synthèse.
Dans cette synthèse les notions de d’espace et de temps auront besoin d’être sérieusement remodelées
pour prendre en compte les acquis de nos deux théories fondamentales actuelles.
A la différence de la théorie des cordes, dans ses versions perturbatives ou non, la gravitation quantique à
boucles est formulée sans espace de fond qui servirait de cadre. La gravitation quantique a boucles est une
authentique tentative de saisir ce que l’espace-temps quantique est, au niveau fondamental.