Après le cadre politique dans lequel doit se mouvoir l’économie du pays, le thème principal a été la poursuite de
la mise en place des 313 Lineamientos définis en 2011, pour assurer le développement économique du pays et
l’élevation du niveau de vie de la population. Seulement 21% de ceux-ci ont été mené à bien au cours des 5
dernières années, ce qui est assez peu. A ce titre, l’annonce d’un ajustement pour la période 2016-2021 est
apparue naturelle. Ce remaniement devrait être en profondeur, à notre avis, compte tenu des chiffres annoncés :
sur les 241 lineamientos qu’il reste à implanter (66 l’ont déjà été et 6 ont vraisemblablement été abandonnés), 31
seront conservés à l’identique tandis que 193 autres seront modifiés et 44 seront ajoutés (a priori 17 seront
complètement revus et 27 lineamientos seront véritablement nouveaux).
De fortes critiques ont été adressées à certains cadres et autres responsables politiques en charge de l’application
de ces directives pour expliquer la situation présente, tels la mentalité obsolète, l‘envoi de circulaires sans suivi, la
réticences à la modernisation, l’absence de vision globale des répercussions (integralidad), la faible séparation des
fonctions politiques et opérationnelles,…
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de ces remontrances assez sévères. D’une part une certaine
exaspération du président face à une situation qui a peu évolué en 5 ans, alors qu’un programme majeur de
changement avait été lancé par lui-même. Egalement une volonté d’avancer plus vite pour un changement
économique perceptible dans les toutes prochaines années (rappelons que Raul Castro quitera la présidence en
2018 en conservant toutefois un rôle majeur au sein du Part Communiste pendant quelques années encore). Enfin,
manifestement, le sentiment que la qualité de vie des Cubains ne s’est pas améliorée et qu’un fossé est en train de
se creuser entre les personnes du système CUC (cuenta propistas surtout) et le reste de la population en CUP
(d’ailleurs, depuis le Congrès, quelques mesures en leur faveur viennent d’être prises, dont une baisse des prix des
principaux produits alimentaires de base).
Dans ce contexte, les références du président cubain à la situation satisfaisante du rééchelonnement de la dette
publique et du rapprochement avec l’Union Européenne et ses membres peuvent être prises comme des signes
encourageants d’une volonté présidentielle d’accélérer le recours aux investissements étrangers. L’avenir nous le
dira.
Le thème de l’unification monétaire et cambiaire (à noter que ce second adjectif avait disparu il y a quelques
années des discours) a été présenté comme une réforme majeure à entreprendre pour le développement de
l’économie. Pour le président, le taux de change pratiqué pour les entreprises cubaines (1CUC = 1 Pesos) nuit à
leur productivité qui, à son tour, empêche l’augmentation du salaire des employés, et se répercute inévitablement,
entre autres, sur leur motivation. Alors que les auto-entrepreneurs, qui travaillent avec un taux de 1 CUC= 25
Pesos, dégagent de fortes marges et créent aussi une pression à la hausse sur les prix.
Cette volonté d’accélerer l’unification monétaire est vraisemblablement freinée à la fois par des fondamentaux
économiques peu solides en termes de croissance et de devises, mais également par la peur d’une perte de
confiance dans la monnaie et d’une reprise de l’inflation, qui pourrait affecter la population. C’est le dilemme
auquel sont confrontés les responsables économiques.
III) Domaines économiques mentionnés
Au cours des différentes interventions, des précisions ont été apportées :
Croissance : La croissance économique s’est établie à 2,8% en moyenne sur les 5 dernières années, « insuffisante
pour assurer le développement et améliorer la consommation de la population », alors que les importations, qui
ont crû de 4,7% en moyenne sur la même période, n’ont pas joué leur rôle d’entrainement économique.
Salaires : Augmentation du salaire moyen de 40% sur 5 ans, de 20 à 28 US $ (dont la majeure partie au cours des
deux dernières années). Les sportifs, professionnels de santé et employés des entreprises mixtes en auraient été les
principaux bénéficiaires.
Cuentapropismo : Le travail à compte propre ne saurait faire l’objet d’aucune discrimination, car il génère des
services « tout à fait nécessaires » et permet à l’Etat de concentrer ses ressources sur les secteurs d’importance
stratégique. Toutefois, des abus (déclarations fiscales minorées, exercice illégal d’activités…) rendent nécessaire
un contrôle de ces professions. De plus, il n’y aurait pas de raison de développer outre mesure cette forme de
gestion car l’innovation et la création de richesse demeurent essentiellement le fait des entreprises d’Etat, qui
garantissent par la suite des bénéfices équitablement répartis dans la société.