THÈSE PRESENTEE PAR Nicolas PAOUR POUR OBTENIR LE TITRE DE DOCTEUR DE L'UNIVERSITE JOSEPH FOURIER - GRENOBLE I (Arrêtés ministériels du 5 juillet 1984 et du 30 mars 1992) (SPECIALITE PHYSIQUE) ETUDE DE LA DIFFUSION INTERVENANT DANS LA RESOLUTION EN PROFONDEUR EN ANALYSE SIMS : APPLICATION A L'AlGaAs Date de soutenance : 30 janvier 1997 Composition du Jury : Président : F. MERCHEZ Rapporteur : A. BENYAGOUB Rapporteur : B. LEGRAND J.R. REGNARD J.C. PFISTER B. BLANCHARD Thèse préparée au sein du LETI-CEA Technologie Avancées, Département d'Optronique, CEA - Grenoble REMERCIEMENTS Cette étude a été menée au Laboratoire d'Electronique de Technologie et d'Instrumentation (LETI) du CEA Grenoble (Commissariat à l'Energie Atomique). Mes premiers remerciements vont à M. DUPUY qui m'a accueilli au sein du groupe de Caractérisation Physique des Matériaux. Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à Monsieur B. BLANCHARD, spécialiste de la Spectrométrie de Masse en Ions Secondaire (SIMS). Il a su me faire bénéficier de son expérience et de sa compétence. Je le remercie pour la confiance qu'il m'a toujours témoignée en m'accordant une grande autonomie. Je remercie tout particulièrement Monsieur le Professeur J.R. REGNARD qui a accepté de me diriger dans ce travail. J'exprime ma plus profonde gratitude à Monsieur F. MERCHEZ qui me fait l'honneur de présider la commission d'examen. Je ne saurais oublier de remercier Monsieur A. BENYAGOUB qui a accepté avec enthousiasme de juger ce travail et pour les discussions fructueuses que nous avons eues. Que B. LEGRAND, ingénieur de recherche du CEA de Saclay reçoive mes plus profonds remerciements pour l'aide qu'il m'a apportée sur les effets d'irradiation et pour avoir accepté d'être rapporteur de cette thèse. Bien entendu, je n'oublie pas J.C. PFISTER qui a bien voulu examiner ce travail et pour sa présence dans le jury. Les discussions enrichissantes que nous avons eues témoignent de son intérêt pour ces travaux. 2 Les échantillons de multicouches niobium/aluminium ont été réalisés par R. CHICAULT et J.C. VILLEGIER. Je les remercie vivement pour le soin désintéressé qu'ils ont apporté à cette réalisation. Merci à S. POUJOL de m'avoir aidé dans la conception d'une régulation en température. Que F. PIERRE et C. VANNUFFEL reçoivent ma sincère amitié ainsi que mes vifs remerciements pour leur collaboration et leur grande humanité. J'ai apprécié l'aide que m'ont apporté F. BERTIN, H. JAFFRESICK et B. ROUX sur mes problèmes en informatique. Je les remercie aussi pour le soutien et la sympathie qu'ils m'ont manifesté. Mes remerciement ne sauraient oublier D. HERVE et E. MOLVA qui ont bien voulu sacrifier leurs échantillons laser en me les confiant et en m'autorisant à publier les résultats obtenus. Merci à M. et D. GRUNWALD, D. MUYARD, V. ROY de m'avoir assisté lors de ma rédaction et à toutes les personnes de CPM, qui d'une manière ou d'une autre, m'ont aidé à passer trois années bien sympathiques. Enfin, j'ai une pensée toute particulière pour mon épouse Soraya, dont le soutien ne m'a jamais fait défaut et à mes deux p'tits gars, Martin et Florent. Ils ont su contribuer à leur façon à l'aboutissement de ce travail que je leur dédie aujourd'hui. 3 Résumé Ce travail propose, dans le cadre de l'étude d'interfaces en analyse SIMS (Secondary Ions Mass Spectrometry), une approche basée sur l'étude de la diffusion assistée par l'irradiation du faisceau d'ions primaires. Le SIMS utilisé est un IMS300 fonctionnant avec un duoplasmatron à cathode chaude et un faisceau d'ions primaires (ou de neutres) xénon. Au cours de cette étude, une régulation en température a été mise au point. Elle permet de contrôler la température de l'échantillon lors des analyses, sur une plage comprise entre -196°C et +500°C. L'étude de multicouches de niobium/aluminium et de structures laser d'AlGaAs, à basse température, a permis d'observer une nette amélioration de la résolution en profondeur. Une comparaison systématique des vitesses de pulvérisation a fait apparaître que le facteur responsable de cette amélioration était le temps d'analyse, mettant ainsi en évidence les phénomènes de diffusion assistée par l'irradiation. Un modèle a donc été développé autour de cette hypothèse pour rendre compte de la diffusion et a abouti à la simulation d'analyses SIMS pour des composés d'AlGaAs. La simulation donne des résultats, directement comparables à ceux de l'analyse. Elle a permis de montrer, par comparaison de profils simulés et expérimentaux, que le phénomène prépondérant, responsable de la dégradation de profils sous faisceaux de faible énergie, est bien la diffusion assistée par l'irradiation. La simulation a pour autre avantage, de retourner les dimensions exactes de la structure de l'échantillon telles qu'elles étaient avant l'irradiation. 4 Abstract This work suggests, within the interface study in SIMS analysis (Secondary Ions Mass Spectrometry), an approach based on the observation of diffusion under irradiation of primary ion beam. The SIMS system used is an IMS300 working with a duoplasmatron with a hot cathode and a primary ion beam (or neutrals) xenon. During this study, a regulation in temperature has been carried out. It allows the control of the temperature of the sample, during some analyses, on a range between -196°C and +500°C. The study of niobium/aluminium multilayers and laser structures of AlGaAs, at low temperature, allows us to observe a clear improvement of the depth resolution. A complete comparison of the pulverisation speeds reveals that the factor responsible for this improvement is the time analysis, highlighting the phenomena of the diffusion under irradiation. A model has been developed around this hypothesis to summarize the diffusion under irradiation and this led to a SIMS analyses simulation of AlGaAs compounds. The results provided by the simulation are comparable to those of the analysis. By comparing simulated and experimental profiles, it is evident that the leading phenomenon, responsible for the degradation of profiles under low energy beams, is indeed diffusion under irradiation. The other advantage of the simulation is that the exact dimensions of the sample structure as they were given initially before irradiation can be retrieved. 5 TABLE DES MATIERES I. INTRODUCTION GENERALE .................................................................................................................9 II. DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES..................12 II.1. THEORIE ...........................................................................................................................................12 II.1.1. MECANISME DE LA PULVERISATION COLLISIONNELLE ............................................13 II.1.2. LES DIFFERENTS TYPES D'IONISATION ...........................................................................21 II.1.3. SOUFFLAGE D'UN GAZ REACTIF........................................................................................24 II.2. APPAREILLAGE...............................................................................................................................26 II.2.1. LES SOURCES D'IONS ............................................................................................................28 II.2.2. LE PORTE-ECHANTILLON ....................................................................................................30 II.2.3. LE SPECTROMETRE DE MASSE ET LE MICROSCOPE IONIQUE...................................35 II.2.4. LES DETECTEURS ..................................................................................................................40 II.2.5. ANALYSES QUANTITATIVES ..............................................................................................46 II.3. DESCRIPTION DES MODIFICATIONS..........................................................................................49 II.3.1. DUOPLASMATRON A CATHODE CHAUDE ET ENCEINTE D'ANALYSE .....................50 II.3.2. REGULATION EN TEMPERATURE ......................................................................................52 II.4. CONCLUSION...................................................................................................................................58 II.5. REFERENCES ...................................................................................................................................59 III. LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION.........................62 III.1. DESCRIPTION DE RESULTATS PRELIMINAIRES ....................................................................62 III.2. LA DIFFUSION LACUNAIRE ........................................................................................................66 III.3. STRUCTURE CRISTALLINE DES COMPOSES DE TYPE III-V ................................................69 III.4. DESCRIPTION DE L'INTERDIFUSION SOUS IRRADIATION DANS LE SOUS RESEAU D'ALGA.......................................................................................................................................................70 III.5. ETUDE DES PERTES ENERGETIQUES DES IONS INCIDENTS ..............................................73 III.5.1. PERTES D'ENERGIE INELASTIQUES .................................................................................74 III.5.2. PERTES D'ENERGIE ELASTIQUES .....................................................................................75 III.5.3. CONTRIBUTION DES DEUX PERTES D'ENERGIE ...........................................................76 III.6. LES LOGICIELS EXISTANTS........................................................................................................79 III.6.1. LE PROGRAMME TRIM ........................................................................................................79 III.6.2. DETAIL DE TRIM...................................................................................................................81 III.7. CONCLUSION .................................................................................................................................88 III.8. REFERENCES ..................................................................................................................................89 IV. MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS .......................................................................................92 IV.1. RAPPEL SUR LE TRAITEMENT DE SIGNAL .............................................................................92 IV.2. AVANT PROPOS.............................................................................................................................98 IV.3. LE PROGRAMME SIMSDIFF ......................................................................................................101 6 IV.3.1. PRESENTATION DE TRYMDYN .......................................................................................102 IV.3.2. LES COMPLEMENTS DE SIMSDIFF .................................................................................104 IV.4. DESCRIPTION DE L'ECHANTILLON ........................................................................................105 IV.5. LA PROCEDURE DIFFUSION .....................................................................................................106 IV.6. LA PROCEDURE ABRASION......................................................................................................107 IV.7. LA PROCEDURE METHODE EXPLICITE .................................................................................109 IV.8. LA PROCEDURE DENSITE .........................................................................................................112 IV.9. LE SIMPLEX ..................................................................................................................................113 IV.10. CONCLUSION .............................................................................................................................114 IV.11. REFERENCES ..............................................................................................................................115 V. ANALYSES ET RESULTATS...............................................................................................................117 V.1. ETUDE D'UN LASER A CAVITE VERTICALE...........................................................................117 V.1.1. ANALYSE A TEMPERATURE AMBIANTE .......................................................................118 V.1.2. ANALYSES A BASSE TEMPERATURE..............................................................................120 V.2. ETUDE DE MULTICOUCHES DE NIOBIUM/ALUMINIUM .....................................................123 V.3. INTERPRETATIONS ......................................................................................................................127 V.4. PROFILS ET SIMULATIONS D'UN ECHANTILLON D'ALGAAS ..............................................129 V.4.1. DENOMINATION DES PROFILS DU PG159 ......................................................................131 V.4.2. SIMULATION DE L'ANALYSE DU PG159 .........................................................................133 V.4.3. ANALYSE PAR LA MICROSCOPIE A TRANSMISSION (MET)......................................137 V.4.4. EFFET DE LA VITESSE DE PULVERISATION SUR LA RESOLUTION EN PROFONDEUR ..................................................................................................................................138 V.4.5. EFFET DE L'ENERGIE PRIMAIRE SUR LA RESOLUTION EN PROFONDEUR............141 V.5. CONCLUSION.................................................................................................................................143 V.6. REFERENCES .................................................................................................................................145 VI. CONCLUSION GENERALE ...............................................................................................................147 7 Chapitre I INTRODUCTION GENERALE CHAPITRE I INTRODUCTION GENERALE 8 Chapitre I INTRODUCTION GENERALE I. INTRODUCTION GENERALE La réduction des dimensions en micro-électronique impose une amélioration sans cesse croissante des performances des techniques d'analyse. La technologie de la micro-électronique du silicium est repérée par une valeur représentant la largeur des règles de dessin (par exemple dimension latérale pour les transistors à effet de champ). Cette valeur est passée, depuis ces dernières années de 1 à 0,35 micron en production et on cherche déjà à produire des grilles de 0,25 µm et 0,18 µm. Pour cette dernière technologie, l'épaisseur de l'oxyde de grille passe de 1000 Å à moins de 100 Å. Dans le même ordre d'idée, l'épaisseur des bases de transistor est actuellement de 100 Å. La largeur des puits quantiques de GaAs, CdTe et CdZnTe pour la conception des lasers descend même en dessous de cette valeur. Ces nouvelles dimensions obligent les chercheurs à avoir recours à des moyens de caractérisation dont les résolutions latérales et en profondeur sont adaptées. La sonde ionique SIMS, qui est l'acronyme anglais de la Spectrométrie de Masses des Ions Secondaires, est l'un des outils capables de répondre à ces besoins. Cet appareillage réalise des profils de concentration en fonction de la profondeur dans le matériau. Sa résolution en profondeur peut atteindre 10 Å mais la taille latérale minimale du faisceau (10 µm²) empêche toutefois l'analyse de la plupart des circuits intégrés actuels. L'une des exigences de la micro-électronique est d'atteindre un faible taux d'impuretés dans les circuits. Le SIMS, de par sa très grande sensibilité, est capable de détecter un atome sur 1010, soit 1012 at/cm3 ; la densité moyenne d'un solide est de 1022 at/cm3. C'est à ce jour la seule méthode d'analyse capable de détecter des taux d'impuretés aussi faibles. L'étude des phénomènes physiques intervenant lors d'une analyse ionique devient alors primordiale. Les travaux de recherche préalables réalisés au LETI sur des systèmes multicouches de Nb/Al (couches de 60 Å d'épaisseur) et d'AlGaAs ont révélé une corrélation entre la résolution en profondeur et la température de 9 Chapitre I INTRODUCTION GENERALE l'échantillon. Dans le but d'approfondir ce point, une nouvelle régulation en température a été mise au point et permet entre autres d'atteindre -196°C. Elle sera décrite dans le chapitre II où l'on rappellera également le fonctionnement de l'appareillage ainsi que les diverses modifications qu'il a subies pour atteindre les performances dont il a la réputation (résolution de quelques Å). La dépendance, entre la vitesse d'abrasion et la résolution en profondeur, nous a amenés à considérer la diffusion assistée par l'irradiation du faisceau d'ions comme un phénomène prépondérant en analyse SIMS. Ce point sera abordé dans le troisième chapitre. Après un bref rappel sur la diffusion lacunaire induite par l'excitation thermique des atomes, nous présentons la diffusion assistée par l'irradiation ainsi que son application à un composé de type III-V. Nous rappelons ensuite les diverses contributions aux pertes d'énergies subies par les ions lors de leur parcours à travers le solide. Enfin, nous présentons la théorie de l'interaction ion-matière à travers la description d'un logiciel existant : TRIM (Transport of Ions in Matter). Dans le chapitre IV, nous présenterons une modélisation qui prend en compte tous ces effets. Le but est de pouvoir extraire d'un profil SIMS le profil réel de l'échantillon, sachant que les phénomènes de diffusion dégradent considérablement la résolution en profondeur. Les résultats obtenus sur les systèmes Nb/Al et AlGaAs seront décrits et discutés dans le chapitre V. Nous mettrons en évidence, à l'aide de la modélisation, la dépendance qui peut exister entre la vitesse d'abrasion et la résolution en profondeur. Nous présenterons également d'autres résultats d'analyse, qui n'ont pas été modélisés, mais qui font apparaître la dépendance entre la résolution et l'énergie d'impact. 10 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES CHAPITRE II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES 11 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES II. DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Il est intéressant, avant de commencer ce chapitre, de replacer le SIMS dans le contexte actuel des techniques d'analyse de matériaux et tout particulièrement des semi-conducteurs qui font l'objet de nombreuses études au LETI (Laboratoire d'Electronique de Technologie et d'Instrumentation). Ainsi, notre laboratoire dispose, pour les analyses de surfaces, d'un ESCA (Electron-Spectroscopy for Chemical Analysis) ; d'un spectromètre AES (Auger Electron Spectroscopy) ; de la RBS (Rutherford Backscattering Spectrometry) et bien entendu du SIMS (Secondary Ions Mass Spectrometry). De toutes ces méthodes, certaines comme l'ESCA, l'AES et le SIMS permettent d'obtenir facilement des profils de concentration en fonction de la profondeur. L'ESCA et l'AES sont des techniques d'analyse de surface qui permettent d'avoir, en plus de la composition de l'échantillon, des informations sur les liaisons chimiques. Elles sont couplées à une érosion ionique pour avoir des données en profondeur (≤ 1 µm). Le SIMS analyse directement les ions produits par l'érosion. Cette méthode est 100 à 10000 fois plus sensible que les autres et ne nécessite pas d'excitation additionnelle puisque l'émission ionique secondaire résulte de la pulvérisation de l'échantillon. Cependant, un atome ne peut être "interrogé" qu'une seule fois ! C'est une méthode destructive à la différence de certaines autres où l'on peut exciter et désexciter plusieurs fois un atome. II.1. THEORIE Les premières observations de la pulvérisation remontent au milieu du siècle dernier. En 1858, J. PLÜCKER [1] remarque que dans un tube à vide où deux électrodes sont introduites, le passage de la décharge électrique s'accompagne d'une perte de poids de la cathode. La matière arrachée à la cathode se condense sur les surfaces voisines et peut même se redéposer en partie sur cette électrode. Ce 12 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES phénomène a été appelé "pulvérisation cathodique". Ce n'est qu'en 1906 que V. KOHLSCHUTTER [2] explique cette perte de matière comme une conséquence du choc produit par l'impact des ions positifs du gaz ionisé ou plasma. Pendant les années qui suivent, peu d'expériences intéressantes sont à noter en raison de la nonreproductibilité des résultats. Ce n'est qu'après 1950, alors que les sources d'ions deviennent performantes, que R.C. BRADLEY [3], F. KEYWELL [4], W.J. MOORE [5] donnent les premiers résultats significatifs et ouvrent des voies nouvelles dans ce domaine. Les applications actuelles de la pulvérisation sont : • la gravure, avec en particulier la gravure locale par FIB (Focused Ion Beam), • le dépôt par pulvérisation cathodique, • le nettoyage de couches minces déposées sur un substrat, • la réalisation de profils par l'AES, l'ESCA et le SIMS. Les mécanismes à l'origine de la pulvérisation en SIMS ne sont pas simples à modéliser. Un modèle basé sur le transfert de moment cinétique a été proposé par G.K. WEHNER [6]. Il est présenté dans le paragraphe suivant sous le nom de régime de cascades linéaires. II.1.1. MECANISME DE LA PULVERISATION COLLISIONNELLE D'un point de vue purement qualitatif, on peut distinguer trois régimes de pulvérisation [7] : 1. le régime des collisions simples (figure II.1.a). Dans ce régime, l'énergie des projectiles est de quelques centaines d'eV. L'atome cible est directement heurté par l'ion et acquiert suffisamment 13 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES d'énergie pour parvenir jusqu'à la surface, et être extrait, mais pas assez pour induire des sous-cascades de collisions. 2. le régime de cascades linéaires (figure II.1.b). Dans ce régime, quelques keV, les atomes cibles ont acquis suffisamment d'énergie pour engendrer des sous-cascades avec les autres atomes du matériau ; c'est le cas général de la pulvérisation en SIMS qui utilise cette gamme d'énergie pour les ions incidents. 3. le régime de pointes thermiques ou "spike" (figure II.1.c). Pour des énergies très supérieures au MeV, la densité des atomes mis en mouvement dans un même volume est grande. Si ce volume est proche de la surface, il y a évaporation des atomes qu'il contient. a) b) c) figure II.1. a-c : les différents régimes de la pulvérisation [7]. a) collisions simples : l'ion, lors de son déplacement dans le solide, finit par extraire un atome par un choc direct ion/atome, b) cascades linéaires : l'ion incident crée des sous-cascades de collisions qui vont extraire un atome par un choc atome/atome, c) pointes thermiques : il y a évaporation des atomes. 14 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES D'un point de vue quantitatif, les limites énergétiques sont difficiles à fournir pour les différents régimes car elles dépendent non seulement de l'énergie des ions incidents mais aussi du rapport des masses Matomes du matériau/Mion incident. Les valeurs indiquées plus haut permettent d'avoir une idée approximative des plages d'énergies. Au cours d'une analyse SIMS, l'échantillon est bombardé par un faisceau d'ions ou de neutres, dit faisceau primaire. Ce faisceau est habituellement de faible énergie (< 10 keV). On peut penser, à la vue des énergies mises en jeu, qu'une analyse SIMS se situe dans le deuxième régime. Les particules incidentes heurtent les atomes de la cible et leur communiquent une partie de leur énergie. Si cette énergie est suffisamment forte, l'atome heurté quitte son site et il s'ensuit une série de chocs. Au terme de ces collisions, un certain nombre de particules peut être éjecté hors de la cible. Si le bombardement est maintenu, la surface de l'échantillon va s'éroder. C'est ce que l'on appelle la pulvérisation. La figure II.2 représente le régime de cascades de collisions linéaires et fait apparaître les différentes particules émises en SIMS. ± Ions primaires Atomes pulvérisés Ions secondaires Atomes neutres Photons Rétrodiffusés Ions implantés figure II.2 : régime de cascades de collisions linéaires en SIMS. 15 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Les particules émises sont notamment : • des atomes neutres : phénomène de pulvérisation cathodique (sputtering), • des photons : phénomène d’ionoluminescence, • des ions : phénomène d’émission ionique secondaire, • des neutres et des ions primaires : rétrodiffusion. On peut définir le taux de pulvérisation "Sp" (Sputtering) par : Sp = nombre d' atomes éjectés nombre de particules incidentes Ce coefficient va dépendre de nombreux paramètres [6,8,9] comme : • l'énergie de l'ion primaire [10] (figure II.3), son angle d'incidence [11] [12](figure II.4) et sa masse [10] (figure II.5), • l'état chimique de la cible, sa température [13] (figure II.6) ainsi que sa nature cristallographique (cristallisée ou amorphe) qui peut engendrer des phénomènes de canalisation [14]. • le numéro atomique de l'atome cible [15,16] (figure II.7). La plupart de ces paramètres sont difficiles à appréhender, ce qui empêche une formalisation analytique globale du taux de pulvérisation. Cependant, pour la plupart des solides amorphes ou poly-cristallins bombardés par des ions de quelques keV, Sp peut être prédit de façon satisfaisante par le modèle de cascades de collisions linéaires. Ce modèle sera décrit dans le chapitre V. 16 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.3: variation du taux de pulvérisation en fonction de l'énergie de l'ion primaire [8]. Un seuil de pulvérisation est atteint au-dessus de 10 keV car les chocs s'effectuent plus profondément. degres figure II.4 : variation du taux de pulvérisation en fonction de l'angle d'incidence de différents ions primaires à 1,05 keV sur une cible de cuivre [12]. Un maximum est atteint pour un angle de 60°. 17 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.5 : variation du taux de pulvérisation en fonction de la masse des ions incidents à 45 keV sur du cuivre, de l'argent et du tantale [8]. figure II.6 : variation du taux de pulvérisation en fonction de la température de quelques métaux bombardés par du Xe+ à 45 keV [13]. 18 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.7 : variation du taux de pulvérisation en fonction du numéro atomique de l'atome cible pour des gaz rares et le mercure [8]. 19 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Les particules éjectées dans le vide ont une énergie cinétique trop faible (< 20 eV) [17] pour atteindre le détecteur (figure II.8). Il est donc nécessaire de les accélérer. Or, seules des particules chargées peuvent être accélérées par une différence de potentiel puis triées par un spectromètre de masse. L'un des principes fondamentaux d'une analyse SIMS est d'obtenir un nombre élevé de particules secondaires ionisées. figure II.8 : distribution énergétique du cuivre et du platine pulvérisés sous bombardement Ar+ 3 keV à 45° d'incidence [17]. Leur énergie moyenne se situe en dessous de 20 eV. Le taux d'ionisation Y représentant le nombre de particules ionisées par rapport au nombre d'atomes éjectés est défini par : (1) Y= nombre d' ions éjectés nombre d' atomes éjectés 20 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Il apparaît évident que le taux Y va jouer un rôle prépondérant puisque seuls les ions, qui sont représentatifs de la composition de l'échantillon en analyse SIMS, sont analysés. Pour une cible binaire AB, le rendement en ions secondaires γA/AB de l'espèce A de concentration CA/AB est alors défini par : γA/AB = Sp . YA/AB . CA/AB (2) Le problème qui se pose est d'avoir le meilleur taux d'ionisation Y et surtout qu'il reste stable pour éviter des fluctuations sur le signal de sortie. II.1.2. LES DIFFERENTS TYPES D'IONISATION Ce taux dépend de la nature de la cible, des éléments qui la constituent ainsi que de son état chimique. On distingue plusieurs processus pour la formation des ions : - l’émission chimique ou directe, - l’émission cinétique interne, - l’émission cinétique externe. Ces phénomènes peuvent se produire simultanément. L’émission chimique ou directe : elle a lieu dans les cristaux ioniques NaCl, KCl, oxyde, chlorure etc.. Dans ces cristaux, le bombardement ionique donne naissance à des ions parce que la cible est elle-même constituée d'ions (figure II.9) et qu’il n’existe pas d’électrons libres pour les neutraliser lors de leur éjection du cristal [18]. Ce mode d'émission conduit à des taux d’ionisation importants (Y ≈ 93 % pour K dans KCl, Y ≈ 50 % pour Al dans Al2O3). Il est donc intéressant d’arriver à la favoriser. 21 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Na+ Cl- Na+ Cl- Na+ Cl- Na+ Na+ Cl- Na+ Cl- Cl- Solide Vide figure II.9 : l'émission directe a lieu dans les cristaux ioniques car les particules éjectées préexistaient déjà à l'état d'ions dans la cible L’émission cinétique interne : Dans le cas d’un métal ou d’un semiconducteur, qui ne sont pas des cristaux ioniques, l’émission ionique directe est peu probable. Les particules primaires mettent en mouvement des atomes du cristal entre lesquels il peut se produire des chocs inélastiques [19]. Une partie de l’énergie est transférée sous forme d’énergie cinétique et sert à éjecter l’atome hors de la cible. L’énergie restante, sous forme d’énergie potentielle, peut servir à modifier la structure électronique de l’atome. Si un électron d’une couche superficielle est éjecté, le trou formé est aussitôt comblé par un électron de la bande de conduction et l’atome redevient neutre. Mais si un électron d’une couche interne est arraché, par exemple sur une couche 2p dans le cas de l'aluminium, on a formation d’un ion. Cet ion est immédiatement neutralisé par un électron de la bande de conduction qui vient sur la couche électronique externe. L’atome est neutre mais a une structure électronique perturbée. Cet atome excité, d’une durée de vie d'environ -14 10 s, peut sortir du cristal. Il faut que la durée de vie de cet atome excité soit plus -15 grande que le temps qu’il met pour sortir du solide, à savoir 10 s. Il peut alors se désexciter dans le vide (figure II.10). 22 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Electron de la bande de conduction Electron éjecté Atome neutre excité Solide <10-15s Vide Désexcitation Ion Electron AUGER figure II.10 : formation d'un ion dans le cas d'une émission cinétique interne. L'atome excité se désexcite dans le vide. Par effet AUGER, il y a création d'un ion. L’énergie libérée peut être suffisante pour éjecter un ou plusieurs électrons. On a alors création, par effet AUGER, d’ions une ou plusieurs fois chargés. Le taux d’ionisation est faible, il est de l’ordre de 1 %. L’émission cinétique externe : La formation d'Al+ doit s'expliquer par un autre mécanisme. En effet, pour une énergie inférieure à 2 keV, les chocs ne sont plus assez violents pour créer un trou dans la couche 2p de l'aluminium [20]. Or, il y a création d'ions Al+ avec des faisceaux d'ions primaires d'énergie inférieure à 2 keV. C'est lors de l'éjection de l'atome du solide qu'est créé l'état excité autoionisant. 23 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES L'atome a dans le cristal une certaine configuration énergétique. A la sortie, il retombe à son niveau énergétique fondamental, libérant une énergie suffisante pour permettre l'excitation des électrons et créer des états auto-ionisants. Les taux d'ionisation produits par ce type de mécanisme sont faibles, de l'ordre de 1/1000 à 1/10000. L’analyse ionique requiert un taux d’émission stable et élevé. Il y a donc toujours intérêt à se ramener à une émission chimique. Pour cela, il faut que ni le bombardement, ni la contamination de surface produite par les gaz résiduels ne modifient la nature de l'espèce éjectée. Cela implique l'emploi de gaz rares (Ar, Ne, Xe, ...), et la nécessité d'un ultravide couplé à une densité de courant élevée pour éviter le phénomène d'adsorption. 21,22,23 II.1.3. SOUFFLAGE D'UN GAZ REACTIF Pour augmenter et rendre constant le taux d’ionisation des métaux et des semi-conducteurs, on souffle sur l’échantillon, pendant la durée de l’analyse, un gaz réactif comme O2 ou Cl2 afin de former un oxyde ou un chlorure [21-23]. Ceci apporte deux effets bénéfiques : 1. le premier est lié à la structure cristallographique du matériau à étudier. Si la direction du faisceau est à peu près parallèle aux plans denses du réseau, il y a canalisation [24]. Les ions canalisés pénètrent plus profondément dans le cristal. Les chocs, ainsi produits loin de la surface, ont peu de chance de contribuer à l’éjection d’atomes. Le taux de pulvérisation décroît fortement. De plus, dans les poly-cristallins, le réseau de chaque cristal est orienté différemment. La vitesse de pulvérisation va donc varier et donner lieu à des fluctuations sur le signal de sortie comme l'illustre la figure II.11. L'oxydation a pour effet de modifier la structure polycristalline en la rendant amorphe. Il n'y a quasiment plus d'effet de canalisation, 24 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES donc la vitesse de pulvérisation reste constante quelle que soit l'orientation cristalline initiale. Incidence des ions 1er Réseau 2eme Réseau 3eme Réseau Atome Taux de pulvérisation x Effet de canalisation : vitesse de pulvérisation diminuée Cps/s s Profil SIMS figure II.11 : schéma des fluctuations du signal de sortie en fonction de l'orientation du réseau cristallin. Suivant l'orientation du réseau, il y a canalisation. Le signal de sortie diminue ainsi que la vitesse de pulvérisation. 2. D'autre part le taux d’ionisation, dans les métaux et les semi-conducteurs, n’est pas très élevé et dépend de leur état d'oxydation ou de chloration car il favorise une ionisation des atomes [20]. La figure II.12 met bien en évidence ce phénomène. On se trouve alors en présence d'une émission chimique qui régularise le taux de pulvérisation. 25 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES 100 Intensité ionique (arbitraire) Fe Ni Cr 50 Cr Fe Ni 10 5 1 10-6 10-5 10-4 P(O2) en Torr figure II.12 : évolution des courants Cr+, Fe+ et Ni+ en fonction de la pression d’oxygène. La détection du Cr, du Ni et du Fe atteint un maximum pour une pression de 5.10-5 Torr [20]. II.2. APPAREILLAGE Le laboratoire est équipé actuellement de deux SIMS. Un IMS300 Cameca qui a été très largement modifié, comme nous le verrons plus loin, et un IMS5F Cameca. Ces deux appareils fonctionnent de façon totalement différente. L'IMS5F a son faisceau primaire focalisé sur un diamètre 1 à 10 µm. Ce faisceau balaye la partie de l'échantillon à analyser sur des surfaces de 10 x 10 µm² à 500 x500 µm², ce qui lui permet d'avoir une résolution latérale de quelques µm². Sa densité ionique instantanée est élevée. L'IMS300 fonctionne sous faisceau défocalisé. Ce faisceau reste fixe par rapport à la zone de l'échantillon à analyser. La surface des cratères est de l'ordre du mm² mais, comme sa densité ionique reste faible, sa résolution en profondeur 26 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES peut être inférieure à 10 Å, sous certaines conditions. Cet appareil sera préféré a l'IMS5F pour les analyses de couches minces qui nécessitent une meilleure résolution en profondeur. La figure II.13 montre le schéma de principe d'un SIMS en général. ce ur So Filtre en énergie Filtre en masse ns io d’ Spectre de masses Echantillon Détecteurs Profil en profondeur Image figure II.13 : schéma de principe du SIMS. La source d'ions crée le faisceau d'ions primaires qui bombarde l'échantillon. Les ions secondaires émis sont triés par les filtres. Le système de détection autorise plusieurs fonctionnement : spectre de masses, profil en profondeur et imagerie. Le SIMS se compose de 4 éléments principaux : 1- une source d'ions, qui permet de générer le faisceau primaire qui va pulvériser l'échantillon, 2- le porte-échantillon qui est par ailleurs régulé en température, 27 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES 3- le spectromètre de masses pour filtrer en masse et en énergie les ions secondaires, 4- les détecteurs qui permettent, le comptage des ions ainsi que leur localisation. Le traitement de cette dernière information permet de réaliser des profils de concentration en fonction de la profondeur, des spectres de masses et de faire de l'imagerie. II.2.1. LES SOURCES D'IONS Les sources césium et duoplasmatron sont les plus utilisées. • La source césium fonctionne de la façon suivante : un réservoir, élevé à une température de 400°C, vaporise une pastille de chromate de césium (Cs2CrO4). Les atomes de césium s'ionisent en traversant un fritté de tungstène (l'ioniseur), qui est chauffé à une température de 1100°C. Un champ électrique, appliqué entre cette plaque de tungstène et une électrode, extrait et accélère les ions Cs+ qui forment le faisceau primaire (figure II.14). Les avantages de cette source sont d'offrir un taux d'ionisation du Cs proche de 100 %, de permettre l'analyse d'éléments électronégatifs comme les halogènes, le phosphore, le sélénium, le tellure, le carbone, l'oxygène et d'avoir peu d'aberrations sphériques compte tenu du faible diamètre de la sonde. 28 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES 1. Haute tension (10 keV) 5. Fritté de tungstène 2. Chromate de césium 6. Filament de réservoir 3. Réservoir 7. Filament de l'ioniseur 4. Ioniseur 8. Electrode d'extraction 6 1 7 8 Cs+ Cs 2 3 4 5 figure II.14 : détail d'une source césium. • Le duoplasmatron fonctionne comme suit (figure II.15) : un gaz est introduit à basse pression dans une cathode creuse à travers une fuite ajustable. Un plasma est produit par un arc électrique établi entre la cathode creuse et l'anode. La tension de l'anode est de plusieurs centaines de volts et la décharge est maintenue autour de l'axe par une électrode intermédiaire conique laissée à un potentiel flottant. Un champ magnétique confine le plasma vers le trou d'extraction de l'anode (400 mm de diamètre). Les ions positifs occupent le centre du plasma, les négatifs, la périphérie. Le plasma passe à travers le diaphragme de l'anode et se détend dans la cuvette d'expansion en raison de la différence de pression existant entre le duoplasmatron (≈ 5.10-2 Torr) et la colonne primaire (≈ 10-7 Torr). 29 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES 1. Introduction du gaz 4. Solénoïde 2. Cathode 5. Anode 3. Electrode intermédiaire ions 1 2 3 4 5 figure II.15 : schéma d'un duoplasmatron à cathode froide. Les ions sont ensuite extraits par un champ créé par la lentille d'extraction, autrement appelée lentille à immersion. Suivant la polarité de cette lentille, le duoplasmatron peut fournir des ions positifs ou négatifs. Les gaz utilisés avec un duoplasmatron sont généralement l'argon, l'oxygène ou le xénon. II.2.2. LE PORTE-ECHANTILLON Le porte-échantillon est porté à ± 4500 V pour créer un champ électrique entre la lentille à immersion (à la masse) et l'échantillon. Ce champ a pour but d'extraire les ions secondaires mais a également une influence sur la trajectoire des ions incidents (vitesse et direction). 30 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Les effets sur la vitesse des ions primaires, accélération ou décélération par le champ d'extraction, suivant leur polarité et celle des ions secondaires à étudier, sont résumés dans le tableau II.1. Polarité des ions secondaires Polarité des ions primaires IS+ IS- IP+ IP ralentis IP accélérés IP- IP accélérés IP ralentis tableau II.1 : effet de la polarité des ions secondaires sur le mouvement des ions primaires. IS+ et IS- représentent les Ions Secondaires respectivement positifs et négatifs. Même remarque pour IP (Ions Primaires). La déviation est fonction de l'énergie du faisceau primaire et de son angle d'incidence. Considérons, par exemple, un faisceau d'ions primaires positifs et une analyse en ions secondaires positifs. La figure II.16 représente la trajectoire des ions ρ primaires déviés par le champ d'extraction E ext . La conservation de la composante parallèle à la direction -x- de la vitesse de l'ion incident (il n'est soumis à aucune force suivant -x-), impose : (3) V0 . sinθ0 = V1 . sinθ1 V0 représente la norme de la vitesse initiale de l'ion incident, V1 sa norme lors de l'impact sur l'échantillon. θ0 est l'angle que fait la colonne primaire avec la normale de l'échantillon et θ1 l'angle d'impact. 31 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.16 : trajectoire des ions déviés dans la zone de champ d'extraction dans le cas de l'analyse d'ions secondaires positifs avec des ions primaires positifs. Soit E0 l'énergie d'accélération des ions et E1 l'énergie d'impact, c'est-à-dire l'énergie cinétique lors du contact avec l'échantillon. Pour un champ supposé uniforme entre l'échantillon et la lentille à immersion, on peut écrire : E1 − E 0 = − q. Vech (4) "q" représente la charge des ions et Vech le potentiel de l'échantillon auquel est associé le champ d'extraction Eext des ions secondaires. Les équations (3) et (4) permettent d'exprimer le sinus de l'angle d'impact en fonction de l'angle de la colonne primaire (θ0) et de l'énergie d'impact ou de l'énergie d'accélération des ions secondaires : (5) sin θ 1 = E1 + q. Vech .sin θ = 0 E1 E0 .sin θ 0 E 0 − q. Vech 32 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES La figure II.17 résume les différents cas de figure suivant le signe des ions primaires et celui des ions secondaires à analyser pour un angle θ0 de 30° (IMS5F) et un potentiel d'échantillon de 4500 eV (ions secondaires positifs) ou de -4500 eV (ions secondaires négatifs). Energie primaire (eV) 1500 0 4500 90 6000 7500 9000 10500 Angle d'impact θ1 80 3000 4500 6000 12000 13500 15000 IP+,IS+ ou IP-,IS- 70 IP+,IS- ou IP-,IS+ 60 50 40 30 20 10 0 0 1500 3000 4500 6000 7500 9000 10500 Energie d'impact (eV) figure II.17 : détermination de l'angle d'impact θ1 et de l'énergie d'impact pour une colonne primaire à 30° (IMS5F) et une tension objet (échantillon) de 4,5 keV. A partir de l'énergie primaire des ions (échelles ∆ et ✧ du haut), on en déduit leur énergie d'impact (échelle -x- du bas) ainsi que leur angle d'impact (échelle -y-). Cette figure comprend trois échelles en -x-. Cela permet, avec la connaissance de l'énergie des ions primaires (échelles "x" du haut), de connaître directement l'énergie d'impact de l'ion sur l'échantillon par lecture de l'échelle "x" du bas ainsi que leur angle d'impact θ1. La déviation des ions pour les couples {ions primaires positifs (IP+), ions secondaires positifs (IS+)} et {(IP-),(IS-)} est la même. Elle est représentée par la courbe losange. De même, la déviation des ions primaires pour les couples {(IP+),(IS-)} et {(IP-),(IS+)} est identique et est représentée par la courbe triangle. La figure II.18 représente la dépendance de l'angle d'impact avec l'énergie des ions primaires (échelle "x" du haut) dans le cas de l'IMS300, dont la position de 33 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES la colonne primaire fixe l'angle des ions incidents à 45°. Ce graphique permet aussi de connaître l'énergie d'impact des ions sur l'échantillon (échelle "x" du bas). Energie primaire (eV) 1500 0 4500 90 6000 7500 3000 4500 6000 9000 10500 12000 13500 15000 4500 6000 7500 9000 10500 Angle d'impact θ1 80 70 60 50 IP+,IS+ ou IP-,IS- 40 IP+,IS- ou IP-,IS+ 30 20 10 0 0 1500 3000 Energie d'impact (eV) figure II.18 : angle d'impact θ1 (ou énergie d'impact) en fonction de l'énergie incidente pour une colonne primaire à 45° et une tension objet de 4,5 keV. Cas de l'IMS300. L'analyse en ions primaires d'énergies inférieures à 9 keV est impossible avec ce système contrairement à l'IMS5F qui peut effectuer des analyses à 6 keV. En dessous de cette limite, les ions primaires ne peuvent plus atteindre l'échantillon : il faut utiliser un faisceau de neutres qui ne sont pas déviés par le champ d'extraction. Pour obtenir un bon taux de pulvérisation, l'angle d'incidence doit être proche de 60° [11,12] (voir figure II.4). Il est donc préférable d'analyser les ions positifs avec un faisceau primaire positif et inversement pour les ions négatifs. Mais cette déviation provoque des aberrations sur la focalisation du faisceau primaire. C'est pour cela que, bien souvent, les analyses s'effectuent à 10 keV, ce qui correspond à une énergie d'impact de 5,5 keV. 34 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES II.2.3. LE SPECTROMETRE DE MASSE ET LE MICROSCOPE IONIQUE Nous avons vu comment les ions primaires sont créés ainsi que l'incidence et l'énergie avec lesquelles ils attaquent l'échantillon. Après pulvérisation, les ions secondaires sont émis avec une dispersion d'angle et d'énergie. Il convient maintenant de savoir comment cette information est traitée. Devant le porte-échantillon se trouve la lentille à immersion reliée à la masse. C'est le porte-échantillon, comme nous l'avons vu au paragraphe précédent, qui est porté à un certain potentiel pour accélérer les ions secondaires. Ces ions traversent la lentille à immersion et sont dirigés dans un spectromètre qui les trie en masse et corrige également les dispersions angulaire et énergétique. Ce spectromètre se compose essentiellement d'un secteur électrostatique, d'un secteur magnétique et de différentes lentilles, diaphragmes et déflecteurs qui vont permettre de réaliser ces deux corrections. Les descriptions qui suivent sont appliquées à l'IMS5F. • La correction de la dispersion en énergie est représentée dans la figure II.19. Les ions de faible énergie se situent en bas (en rouge), et ceux de forte énergie en haut du dessin (en bleu). Les ions de faible énergie seront plus déviés dans le secteur électrostatique. ρ Les ions d'énergie croissante le seront de moins en moins. En effet, le champ E est radial. Les seules forces qui s'appliquent sur la particule de masse "m" et de charge "q" et de vitesse "V" sont donc radiales. On peut écrire : ρ ρ m . γ = q. E (6) V2 m. = q. E r 35 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES En exprimant "m . V 2 " en fonction de l'énergie de la particule Ec, on aboutit à une relation de proportionnalité entre le rayon de courbure de la particule et son énergie cinétique : r= (7) 2. Ec q. E La lentille du spectromètre focalise ces ions autour de la trajectoire centrale appelée "trajectoire achromatique". figure II.19 dispersion en énergie : les ions de forte énergie (ligne du haut) sont moins déviés par le secteur électromagnétique et convergent au même point que les ions de faible énergie (ligne du bas). 36 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Les ions passent ensuite dans le secteur magnétique. Le rayon de courbure est : r= (8) m. V q. B B est la norme du champ magnétique et V représente la vitesse des ions dans le secteur électromagnétique qui, d'après l'équation (7), est proportionnelle à l'énergie "E". Les ions de faible énergie sont donc davantage déviés que ceux d'énergie élevée, car le rayon de courbure de la trajectoire est plus petit. Tous les ions sont focalisés en un même faisceau. Il faut remarquer que les particules de plus forte énergie, donc de plus grande vitesse, parcourent une distance plus longue dans le secteur magnétique. Cela leur permet d'arriver, en sortie du spectromètre, en un même temps et un même point que les particules d'énergie plus faible. C'est en ce point que la fente de sortie est placée. • Les ions émis par l'échantillon partent dans toutes les directions. Ceux collectés par la lentille à immersion sont focalisés au niveau de la fente d'entrée mais ont des directions différentes. C'est la dispersion angulaire. Pour une même énergie, la trajectoire des ions peut être différente (figure II.20). Ces trajectoires, provenant d'un même point objet pour le secteur électrostatique, sont focalisées en un point image réel au niveau du diaphragme de sélection en énergie. Il devient alors un point objet pour la lentille du spectromètre qui le focalise en une image virtuelle. Cette image est un objet pour le secteur magnétique qui va être focalisé en une image réelle au niveau de la fente de sélection. Le point de focalisation est différent suivant la masse des ions, ce qui permet de les séparer (figure II.20). 37 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.20 : la dispersion angulaire des ions secondaires pulvérisés dans toutes les directions est corrigée par la lentille du spectromètre. • La combinaison des deux principes donne une focalisation en énergie et angulaire (figure II.21). Les ions représentés en trait plein n'ont pas de dispersion angulaire. En rouge sont représentés ceux de faible énergie et en bleu ceux de forte déviation énergétique. Les deux extrêmes sont limités par la fente de sélection en énergie. Les dispersions énergétiques pour les deux déviations angulaires (traits discontinus), ne sont pas représentés dans le secteur électrostatique, par souci de clarté. Le spectromètre ne pouvant détecter qu'une seule masse à la fois, il ne reste plus ensuite qu'à faire varier le champ magnétique pour choisir les masses et détecter celles souhaitées à tour de rôle. 38 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.21 : application des deux principes de correction (énergétique et angulaire). Les pointillés représentent la dispersion angulaire, les couleurs la dispersion énergétique. Cet appareil fonctionne selon différents modes. Un spectre de toutes les espèces présentes dans un échantillon donné peut être enregistré ; il est alors appelé spectre de masses. Quelques masses caractéristiques peuvent également être suivies lors de l'érosion pour obtenir finalement un profil de concentration en fonction de la profondeur. Enfin, des images en 3D peuvent être obtenues sur l'appareil IMS5F. En mode imagerie, les images peuvent être réalisées par balayage, ce qui nécessite un faible diamètre du faisceau primaire, ou par stigmatisme. Dans ce second mode de fonctionnement, la sonde ionique agit comme un microscope optique, c'est-à-dire que les ions émis d'un même point sont focalisés, à la sortie de l'appareil, en un point identique. Tout les points de l'image sont acquis au même instant. 39 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES II.2.4. LES DETECTEURS Le plus répandu de ces détecteurs est le multiplicateur d'électrons. Les ions récupérés au niveau de la fente de sortie sont défléchis de 90° et dirigés vers le multiplicateur d'électrons. Celui-ci permet de compter les ions secondaires. Chaque ion provenant de l'analyseur heurte la première dynode. Celle-ci émet des électrons secondaires qui sont multipliés en cascades par les autres dynodes. Le signal d'électrons est "mis en forme" pour être compté électroniquement. On peut compter entre un et 107 coups par seconde. Au-dessus de cette valeur, une erreur systématique importante se produit. De plus, la mise en forme donne des impulsions ayant une largeur de quelques nanosecondes. Plus il y a de coups et plus la probabilité de recouvrement des impulsions augmente, entraînant une diminution du signal. Pour 109 Cps/s, un seul ion serait détecté ! La représentation de l'erreur systématique se fait en écrivant la fonction : Is = Imes + Inonmes (9) où : Is = nombre d'impulsions par unité de temps provenant de l'électroaimant, ou courant ionique secondaire, Imes = nombre d'impulsions mesurées par unité de temps, Inonmes = nombre d'impulsions non mesurées par unité de temps, avec : (10) Inonmes = Imes (Is / Isat) Isat représente le courant de saturation du multiplicateur. 40 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Le courant mesuré se déduit de (9) et (10) et s'écrit : Imes = Is / (1 + Is / Isat) (11) Dans notre cas, Isat est de l'ordre de 5.107 Cps/s. La figure II.22 représente la Courant mesuré (Cps/s) dérive de Imes par rapport au courant d'ions secondaires réels "Is" : 1.E+08 1.E+07 Imes Is Isat 1.E+06 1.E+05 1.E+05 1.E+06 1.E+07 1.E+08 courant réel (Cps/s) figure II.22 : limite de détection d'un multiplicateur d'électrons. Au-dessus d'un certain seuil, les impulsions d'électrons ne sont plus comptées individuellement. Il y a recouvrement, d'où une diminution du signal mesuré Imes qui tend vers la valeur du courant de saturation Isat. Si Is << Isat, c'est-à-dire pour un courant ionique inférieur à 106 Cps/s, Imes est proportionnel à Is. Pour des courants ioniques supérieurs à 106 Cps/s, une cage de Faraday est utilisée. Son fonctionnement est le suivant. Les ions secondaires pénètrent dans un cylindre (la cage de Faraday) et sont piégés par un potentiel qui repousse ceux qui ont tendance à s'en échapper. En percutant les parois, chaque ion est neutralisé par un électron. La mesure du courant IA (en ampère) reçu par la cage répond à la formule : (12) IA = (Is + Ib) . e 41 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES avec : Is = courant ionique secondaire en Cps/s, Ib = courant de bruit en Cps/s, e = charge de l'électron. Le courant d'ions secondaire Is est donc linéaire avec le courant mesuré IA : Is = IA / 1,6.10-19 - Ib (13) Un réglage permet de corriger la dérive due au bruit. Le SIMS peut donc, quand il détecte un trop fort courant, basculer automatiquement du mode "multiplicateur d'électrons" au mode "cage de Faraday" sans que cela influe sur le niveau du signal. Ces deux éléments permettent de réaliser : • soit un spectre de toutes les masses (figure II.23), où chaque masse est représentée par un pic. L'intensité d'un pic est proportionnelle à la teneur de la masse en question. Dans ce cas, le spectre est représentatif de la surface et ne contient donc pas forcément tous les éléments présents au cœur de l'échantillon. Cependant, ce mode de fonctionnement s'avère utile pour la détection d'éventuelles contaminations superficielles consécutives à son élaboration. • soit un profil de masses prédéterminées en fonction de l'épaisseur abrasée (figure II.24). L'axe des -x- représente le temps de manipulation, l'axe des -y- le nombre de coups par seconde. 42 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES figure II.23 : exemple de spectre de masse effectué sur une cible d'AlGaAs. A chaque masse correspond un pic dont l'intensité est proportionnelle à sa quantité. Valeurs des échelles 27 = masse atomique de l'aluminium (en mauve) 69 = masse atomique du galium (en rouge) figure II.24 : exemple d'un profil de multicouches d'Al et de Ga dans une structure de miroirs de Bragg d'AlGaAs. L'échelle des -xreprésente le temps de manipulation, ou temps d'abrasion. Celle des -y- représente le nombre de Cps/s, de la masse sélectionnée, reçus par le détecteur. Les valeurs indiquées dans les six rectangles représentent les masses atomiques des éléments recherchés. 43 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Le convertisseur d'image ionique permet de réaliser l'image en 2D de la surface balayée (IMS5F) à une profondeur précise (figure II.25). Ce convertisseur est constitué d'une série de multiplicateurs d'électrons tubulaires. L'image qui provient du spectromètre de masse se forme sur la face d'entrée du convertisseur. Elle est transformée en une image électronique à la sortie des tubes. Les électrons sont ensuite accélérés par un champ électrique, puis viennent frapper un écran fluorescent. Une couleur est alors associée à chaque niveau de concentration de la masse en cours d'analyse. La résolution latérale de cet ensemble sur l'image agrandie est de 50 à 100 µm. figure II.25 : exemple d'une série d'images de la dose implantée du nickel dans du silicium, réalisées à différentes profondeurs en vue d'établir une image en relief. 44 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES En stockant ces images prises à différentes profondeurs d'abrasion, il est possible de reconstituer une image 4D de l'échantillon (figure II.26). Les trois premières dimensions représentent l'échantillon dans l'espace et la quatrième, représentée par les couleurs, sa concentration pour un élément étudié. La correspondance des couleurs avec la concentration de l'élément, selon une échelle arbitraire, est définie en bas de la figure II.26. Faible dose Forte dose figure II.26 : reconstitution d'une image en 4D (x, y, z et concentration). Les niveaux de couleur correspondent aux niveaux de concentration de la masse 58Ni. 45 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES A partir des profils et des spectres de masses, il est possible de remonter à la concentration des éléments et à leurs positions dans l'échantillon. II.2.5. ANALYSES QUANTITATIVES La connaissance de l'épaisseur abrasée permet de déterminer la vitesse d'abrasion. Si la vitesse de pulvérisation est constante, il est possible de transformer l'échelle des temps en échelle des profondeurs. Pour convertir le nombre de coups en nombre d'atomes, il faut connaître le rendement d'ionisation et s'assurer qu'il est constant. Si Ip est le courant primaire et γA/M le rendement ionique de l'élément "A" dans une matrice "M", l'intensité secondaire Is(A,x) de l'élément A en fonction de sa position "x" dans la matrice est donnée par : Is(A,x) = γA/M . Ip (14) Il a été montré précédemment que l'intensité Imes du détecteur est linéaire avec le courant d'ions secondaires Is. Si η est le coefficient de proportionnalité, le courant Imes s'écrit d'après l'équation (2) : Imes = η . Sp . YA/M . CA/M . Ip (15) Avec YA/M le taux de ionisation de l'espèce A dans la matrice, CA/M sa concentration et Sp le taux de pulvérisation. En pratique, la calibration des profils est réalisée par comparaison avec des étalons de référence. Deux types de méthodes d'étalonnage sont utilisés et décrits par la suite. a) Méthode d'étalonnage à concentration A uniforme dans la matrice M. 46 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Cette méthode consiste à comparer l'intensité émise par l'étalon à celle émise par la structure étudiée. Dans l'éventualité où η, Sp, YA/M et Ip restent constants, ce qui est le cas pour de faibles concentrations, le courant mesuré Imes est proportionnel à la concentration CA/M. Soit α ce coefficient, appelé constante de calibration. L'équation (15) devient, en simplifiant l'écriture : CA/M = α . Imes (16) Après analyse de l'étalon, de concentration CAE/M sur une profondeur l, le nombre total NA d'atomes A est : NA = (17) l ∫0 C AE/M ( z). S. dz S est la surface irradiée qui est constante. Cette équation peut donc se mettre sous la forme : (18) l l NA = ∫ C AE / M ( z ). dz = ∫ α . I Emes ( z ). dz 0 0 S le rapport NA/S représente la dose implantée qui est connue pour l'étalon et IEmes est la mesure de l'étalon ce qui permet de déterminer le coefficient α par : (19) α= Dose implantée Aire sous la courbe I Emes Le coefficient α est alors remplacé dans l'équation (16) également valide pour l'analyse de l'échantillon de concentration inconnue. Cependant, α va dépendre de la transmission de l'appareil, qui peut varier en fonction des réglages de l'optique ionique et du taux de pulvérisation. Ce taux va dépendre des fluctuations du courant primaire Ip (instabilité de la source d'ions ou dégazage au voisinage de l'échantillon). Le coefficient α va aussi dépendre des fluctuations des courants 47 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES secondaires (régime transitoire, effet de matrice et modification des taux d'ionisation provoqués par exemple par la présence d'oxygène). On utilise généralement la seconde méthode de calibration. b) Méthode d'étalonnage avec le RSF (Relative Sensitive Factor). Elle se décompose en deux étapes. Dans un premier temps, l'étalonnage est effectué par analyse de l'élément implanté A de concentration CAE/M connue et en utilisant une masse de référence qui est généralement un isotope de la matrice. Soit ImesAE le courant mesuré relatif à la dose implantée dans l'étalon, B la masse de référence et ImesBE son courant. Le rapport des courants, en utilisant l'équation (15), s'écrit : I mesAE η . Sp . YAE/M . C AE/M . I p = I mesBE η . Sp . YBE/M . C BE/M . I p (20) Après simplification, il est possible d'extraire la concentration A dans l'étalon CAE/M : (21) C AE/ M = YBE/ M I I . C BE/ M . mesAE = RSF . mesAE YAE/ M I mesBE I mesBE La concentration de l'impureté A dans l'étalon est proportionnelle au courant réduit ImesAE/ImesBE. Le coefficient de proportionnalité, appelé RSF, tient compte des variations des taux d'ionisation YBE/M et YAE/M et s'affranchit des variations du courant primaire Ip. Il est défini comme suit : (22) RSF = Dose implantée ∞ I ∫0 I mesAE .dz mesBE 48 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES La seconde étape consiste à effectuer l'analyse de l'échantillon dont la concentration en A est donnée par : (23) C A/M = YB / M I . C B / M . mesA YA / M I mesB Cela implique la définition d'un deuxième coefficient noté RSF' défini par : RSF' = (24) YB / M . CB/M YA / M Si la structure de l'échantillon est proche de celle de l'étalon, les taux d'ionisation YA/M et YB/M sont respectivement égaux à YAE/M et YBE/M. De plus, l'isotope B étant majoritaire dans les deux structures, on en déduit que CB/M est identique à CBE/M. Par conséquent, RSF' est équivalent à RSF. Il s'en suit que : C A / M = RSF . (25) I mesA I mesB La détermination de la concentration de l'élément A devient alors possible par la connaissance du courant réduit ImesA/ImesB. Nous venons de définir, assez succinctement, le fonctionnement du SIMS et plus particulièrement celui d'un CAMECA IMS5F. L'autre appareil, l'IMS300 sur lequel a été effectuée cette thèse, a subi de nombreuses modifications pour en améliorer la résolution en profondeur. Ces améliorations se sont portées sur la source duoplasmatron, sur l'amélioration du vide, et surtout sur une régulation en température du porte échantillon. II.3. DESCRIPTION DES MODIFICATIONS La première modification importante est celle du duoplasmatron. Les duoplasmatrons à cathode froide fonctionnent bien avec de l'oxygène, de l'argon ou 49 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES de l'azote, mais restent instables pour des gaz comme le krypton et le xénon. Pourtant, ces gaz offrent un meilleur taux de pulvérisation [25,26] pour une faible profondeur d'implantation [27]. La solution est d'utiliser un duoplasmatron à cathode chaude [20]. II.3.1. DUOPLASMATRON A CATHODE CHAUDE ET ENCEINTE D'ANALYSE La figure II.27 présente ce duoplasmatron. On peut remarquer, en comparaison à la figure II.15, que la cathode creuse -2-, a été remplacée par deux demi cathodes (2a et 2b) reliées entre elles par un filament de tantale. 1. Introduction du gaz 4. Solénoïde 2a-b. Demi cathodes 5. Anode 3. Electrode intermédiaire 6. Filament 6 2b ions 1 2a 3 4 5 figure II.27 : détail du duoplasmatron à cathode chaude. La cathode creuse a été remplacée par deux demi cathodes. Pour le duoplasmatron à cathode froide, il faut maintenir une tension de plusieurs centaines de volts (≈300 V) entre l'anode et la cathode, d'où les électrons 50 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES sont émis pour ioniser le gaz introduit, et former le plasma. Le duoplasmatron à cathode chaude comprend un filament qui émet des électrons pour ioniser le plasma. Ce duoplasmatron est très stable dans le temps. De plus, comme la tension d'arc est de 60 V, il y a peu de pulvérisation interne dans la source. Les durées de vie du filament et de la source sont plus longues (une année), d'où un entretient réduit. Sur le trajet des ions primaires se trouve une chambre de neutralisation pour les transformer en neutres de même énergie. Cela peut s'avérer utile : • pour analyser des isolants et éviter ainsi les effets de charges, • pour effectuer des profils avec un faisceau primaire de faible énergie afin d'accroître la résolution en profondeur. L'analyse avec des ions de moins de 9 keV est impossible avec l'IMS300 (cf. § II.II.2.2). L'adjonction d'une chambre de neutralisation permet d'abaisser l'énergie du faisceau primaire de neutres jusqu'à 1 keV (les neutres n'étant pas déviés par la tension d'extraction des ions secondaires). Les vitesses d'abrasion obtenues avec des neutres de faible énergie étant limitées, 0,1 à 0,001 Å/s, l'atmosphère résiduelle au voisinage de la zone analysée augmente considérablement, pouvant aller jusqu'à polluer la surface de l'échantillon. Pour améliorer le vide au niveau de l'échantillon, l'enceinte Cameca de l'IMS300 à été remplacée par une enceinte Riber équipée d'une pompe ionique et d'une pompe turbo de 400 litres par seconde. Ceci permet d'atteindre un vide de quelques 10-10 Torr en statique c'est-à-dire sans fonctionnement du duoplasmatron. En dynamique, la pression remonte à 10-5 Torr. 51 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES II.3.2. REGULATION EN TEMPERATURE L'étude de la diffusion des éléments entre les différentes couches de matériaux (AlGaAs, multicouches de Nb/Al) nécessite un contrôle de la température de l'échantillon. Cela a motivé le développement d'une régulation en température. Le cahier des charges que nous avons établi est le suivant : • réguler un échantillon porté à haute tension (± 4,5 keV imposé par le champ d'extraction des ions secondaires), • plage de régulation : la plus large possible avec une température minimale égale à celle de l'azote liquide (-196°C), • laisser le porte échantillon mobile dans les trois directions (entrée, sortie et positionnement de l'échantillon dans l'enceinte ultravide), • assurer un bon contact thermique entre l'échantillon et la partie régulée (pour éviter les pertes thermiques). La figure II.28 schématise le fonctionnement de base d'une régulation en température. Elle se compose d'un point froid de référence. Celui-ci donne la température minimale à atteindre. Le point froid est relié à la pièce à réguler par une résistance "thermique" qui maintient le gradient de température entre les deux. La régulation électronique est contrôlée par une résistance électrique de chauffe et une mesure de la température de la pièce à réguler. 52 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Chauffe Mesure Support à réguler Résistance thermique Point froid (77 K) figure II.28 : schéma de fonctionnement d'une régulation en température. Elle comprend un point froid relié au support à réguler par une résistance thermique qui établit le gradient entre les deux. Le contrôle de la température est réalisé par la résistance de chauffe couplée à la mesure. Nous avons d'abord voulu fonder cette régulation sur un montage qui existait déjà dans notre laboratoire. Un récipient isolé monté sur la partie supérieure de l'enceinte d'analyse contient, dans sa partie isolée, une réserve d'azote liquide (point froid). Des tresses de cuivre (résistance thermique) sont fixées à son extrémité et sont reliées au porte-échantillon, ce qui permet la mobilité de celui-ci. La température est mesurée grâce à une résistance étalonnée de platine. Les mesures ont montré les limites de ce système. Non seulement le temps de refroidissement de l'échantillon était long (3 heures) pour arriver à des températures stables, mais en plus, la température limite atteinte était d'environ -100°C au lieu des -196°C désirés. En ajoutant un point froid sur la canne de manipulation du porte échantillon, en isolant thermiquement celui-ci de cette canne et en améliorant les contacts entre les tresses de cuivre et le récipient d'azote liquide, il a été possible de descendre à -130°C, ce qui était encore insuffisant. La figure II.29 retrace les différentes cinétiques 53 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES obtenues au cours de ces essais. Dans le cas idéal où le porte échantillon n'a pas de contact avec l'appareillage (pas de perte thermique par conduction), la température ne descend pas en dessous de -140°C. Ce système s'est finalement révélé limité, donc peu intéressant. 40 Temps (mn) 20 0 Température (°C) -20 -40 -60 -80 0 50 100 150 200 Température Porte Échantillon TPE avec Fil indium + Pastille Isolante TPE avec FI + PI +Point Froid TPE avec FI + PF + Sans Contact -100 -120 -140 -160 figure II.29 : cinétique de refroidissement pour les différents montages. Même dans la configuration du minimum de pertes thermiques (courbe du bas), la température minimale atteinte ne descend pas en dessous de -140°C. Nos investigations se sont alors orientées vers l'utilisation de la détente d'un gaz comprimé à la pression atmosphérique. La température finale Tf se calcule, en fonction de la température initiale Ti, de la pression initiale Pi et finale Pf par la relation : (26) Ti (C v + R. Pf / Pi ) Tf = Cv + R 54 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES R est la constante des gaz parfaits et Cv la chaleur spécifique à volume constant du gaz considéré. Le gaz, introduit dans un tuyau à haute pression (200 bar), passe dans un capillaire très fin (∅ 0,3 mm), puis se détend, dans la pièce à refroidir. Le gaz revient par un deuxième capillaire (∅ 2 mm) concentrique au premier ce qui a pour effet de refroidir préalablement le gaz. La figure II.30 présente ce montage. Bien que la valeur de Tf calculée pour l'azote soit de 207 K, nous espérions mieux de l'effet du refroidissement. Pourtant, aucun résultat significatif n'a été obtenu avec ce dernier. Seul l'argon nous a permis d'atteindre 96 K (-177°C) mais avec une consommation bien trop importante. Enceinte Vide Refoulement Porte échantillon 200 bar Tubes concentriques Détente figure II.30 : schéma du montage de refroidissement du porte échantillon par simple détente. Ces deux montages n'ayant pas été concluants, un troisième système a été développé. Le gaz est d'abord refroidi dans un réservoir contenant de l'azote liquide. Cela doit permettre d'abaisser considérablement la valeur de Ti. D'autre part, les deux capillaires concentriques sont enroulés comme un ressort autour du 55 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES goniomètre tri-axial, permettant ainsi un mouvement du porte échantillon dans les trois directions. Le gaz à refroidir est de l'azote pris au niveau de la ligne d'alimentation du laboratoire à une pression d'un bar d'où une consommation plus faible. Il est ensuite refroidi à l'intérieur d'un tube de cuivre enroulé en spirale dans un réservoir (Dewar) rempli d'azote liquide. Une longueur suffisante de cuivre permet de liquéfier l'azote gazeux. L'ensemble est porté à un potentiel nul. Il traverse ensuite le fond de la réserve et entre dans l'enceinte ultravide par l'intermédiaire d'un passage étanche en verre. L'azote liquide ou gazeux a une conductivité électrique, apparemment non connue et non tabulée, mais qui semble être faible. Il est donc possible de maintenir, à la sortie du passage étanche, le potentiel du porte échantillon, soit 4,5 kV. Nous avons vérifié cette isolation électrique jusqu'à 10 kV. L'azote, qui est à cet endroit liquéfié par son passage dans le dewar, est dirigé vers un petit réservoir qui constitue le point froid de la régulation en température. Il doit être maintenu, quelle que soit la température à réguler, à -196°C. Ce réservoir est relié au porte-échantillon par deux vis en inox qui tiennent lieu de résistance thermique. Le porte-échantillon est équipé d'une résistance de mesure (résistance de platine calibrée) et d'une résistance de chauffe. L'azote liquide, à la sortie du réservoir, est dirigé vers le Dewar par un deuxième passage étanche en verre. Un système en queue d'aronde permet, à l'aide de la canne d'introduction de l'échantillon, de verrouiller celui-ci sur le porte échantillon et d'établir un contact "serré" entre les deux (figure II.31). La partie électronique, qui contrôle le chauffage, est soumise aux mêmes exigences d'isolement électrique puisque les résistances de chauffe et de mesure sont fixées sur le porte échantillon au potentiel de 4,5 kV. Tout l'ensemble a donc été porté à ce potentiel. 56 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Azote gazeux Azote liquide dans le réservoir Azote liquéfié Mesure Goniomètre tri-axial Point 77 K Résistance thermique Porte échantillon régulé Système de vérouillage figure II.31 : vue d'ensemble du porte échantillon régulé en température. 57 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES Nous avons donc construit un châssis doté d'un transformateur d'isolement 220 V/220 V dont le neutre du secondaire est relié à l'alimentation haute tension du porte-échantillon. Ce secondaire alimente une régulation Eurotherm Automation qui sera ainsi mise automatiquement au même potentiel que le porte échantillon. Les câbles de liaison sont tous isolés et entrent dans la cloche à vide par l'intermédiaire de passages électriquement isolés . Cette régulation a les avantages suivants : • mise en température rapide (30 mn pour passer de 25°C à -180°C). • faible consommation d'azote gazeux. • plage de température : -196°C à 500°C. • température de l'échantillon stable au degré près. II.4. CONCLUSION L'IMS300, comparé à sa petite sœur la sonde ionique IMS5F, est difficile à régler car il possède peu de moyens de contrôle. Sa vétusté est également à l'origine de nombreuses pannes. Cependant, la mise en place du duoplasmatron à cathode chaude, le remplacement de l'enceinte ultravide et l'adjonction d'un système performant de refroidissement de l'échantillon permettent de réaliser des analyses de très haute qualité si on arrive à s'affranchir des variations du courant primaire. Il faut pour cela avoir recours à la mesure de courant réduit en suivant le profil d'un élément majoritaire, ce qui n'a pas toujours été le cas. Le soufflage de gaz réactifs comme O2 et Cl2 s'avère parfois primordial pour "exalter" le taux d'émission de certains éléments. L'oxygène est utilisé pour l'analyse du Si, Ni, Fe et le chlore pour celle de GaAs, CdTe, CdHgTe. 58 Chapitre II DESCRIPTION DE LA SPECTROMETRIE DE MASSE DES IONS SECONDAIRES II.5. REFERENCES [1] J. PLÜCKER, Ann. Phys. Chem., 13, 88, (1858). [2] V. KOHLSCHUTTER et R. MULLER, Z. Elektrochem., 12,365, (1906). [3] R.C. BRADLEY, Phys. Rev. 93, 719, (1954). [4] F. KEYWELL, Phys. Rev., 97, 1611, (1955). [5] W.J. MOORE, Amer. SC., 48, 109, (1960). [6] G.K. WEHNER, Phys. Rev., 102, 690, (1956). [7] P. SIGMUND, Topics Appl. Phys., 47, 9, (1981). [8] G. CARTER ET J.S. COLLIGON, "Ion bombardment of solids", Heinemann Educational Books Ltd., London, 310, (1968). [9] P. SIGMUND, Rev. Roum. 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Puis, dans le but de créer un modèle reproduisant ces phénomènes, nous détaillerons les diverses pertes énergétiques que subissent les ions lors de leur parcours dans le solide. Enfin, dans la dernière partie, nous présenterons le fonctionnement du programme TRIM, qui a servi de base pour la modélisation d'une analyse SIMS. III.1. DESCRIPTION DE RESULTATS PRELIMINAIRES Une première analyse avait été effectuée sur une structure complexe de miroirs de Bragg d'AlAs/GaAs appelée "échantillon-1". Le faisceau primaire utilisé était constitué de neutres xénon à 2 keV avec un angle d'impact de 45°. L'échantillon est décrit à la figure III.1. Pour essayer le duoplasmatron à cathode chaude, et montrer en particulier ses performances à faible énergie, l'énergie du faisceau primaire avait été baissée à 1,5 keV au cours de la première analyse. En effet, il est usuel de dire que la dégradation des profils en profondeur est due au "mixage collisionnel" qui a pour origine le transfert d'énergie cinétique de la particule incidente (ion ou neutre) aux atomes du solide. Puisqu'à 1,5 keV, l'énergie cinétique "transportée" par un neutre incident est plus faible qu'à 2 keV, le mixage collisionnel causé par celui-ci doit être moins important et la résolution en profondeur doit s'améliorer. 62 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Epaisseur (Å) X (AlxGa(1-x)As) GaAs non dopé 2795 0 AlAs non dopé 195 1 ≈ 500 0/1 AlAs non dopé 97 1 GaAs non dopé ≈ 670 0 GaAs non dopé x 5 AlAs non dopé x 10 2.83 Å 98 Å substrat figure III.1 : détail de la structure de l'échantillon-1. La valeur de 2,83 Å correspond à l'épaisseur d'une monocouche de GaAs. Le profil du gallium (figure III.2) avait été effectué en deux étapes dans le but de montrer une amélioration de la résolution à faible énergie : 1- un faisceau primaire de neutre xénon à 2 keV a d'abord été utilisé (partie gauche de la figure), 2- l'analyse se poursuit ensuite avec un faisceau de 1,5 keV (partie droite de la figure). Ce profil apporte de nombreuses informations. Les temps t1 et t2, nécessaires à l'analyse des deux couches de 670 Å d'épaisseur, sont différents. La valeur de t2 est le double de celle de t1 donc la vitesse de pulvérisation à 1,5 keV est augmentée d'un facteur deux. D'autre part, à 2 keV nous pouvons observer les cinq monocouches de GaAs dans l'AlGaAs. Ces couches ne sont pas visibles à 1,5 keV. Cela permet de conclure que diminuer l'énergie des ions primaires (partie droite du profil) conduit à une diminution de la résolution en profondeur. 63 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Ga t1 t2 Les monocouches de GaAs ne sont plus visibles Monocouches de GaAs 2 keV 1.5 keV figure III.2 : profil de Ga effectué sous neutre xénon à 2 keV puis à 1,5 keV. Dans la deuxième partie (1,5 keV), les monocouches de GaAs ne sont pas visibles, alors qu'elles le sont à 2 keV, et le temps d'abrasion est augmenté (t2>t1). Ceci est contraire à ce qui est attendu d'après la remarque précédente sur le mixage collisionnel. Nous avons alors songé à un mixage dont l'origine serait la diffusion. Les effets de la diffusion, qui sont dépendants du temps, doivent se faire davantage ressentir à 1,5 keV puisque le temps d'érosion, donc de diffusion est augmenté. Il existe alors une compétition entre la vitesse de diffusion et la vitesse d'abrasion : si la vitesse d'abrasion augmente, la diffusion n'a plus le temps de s'effectuer. Pour confirmer cette hypothèse et montrer que ce n'est pas la dégradation de la résolution en profondeur due au mixage collisionnel qui est seule en cause, le même profil (figure III.3) a été réalisé entièrement à 2 keV. 64 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Ga Les monocouches de GaAs sont toujours visibles figure III.3 : sous bombardement constant à 2 keV, la résolution est beaucoup moins dégradée avec la profondeur qu'à 1,5 keV. Bien qu'une légère dégradation en profondeur subsiste sur la résolution des couches de 195 Å d'AlAs non dopées, les couches de GaAs sont bien mieux visibles pour une profondeur plus importante qu'à l'analyse précédente. Cela confirme qu'à ces faibles énergies de faisceau primaire, la diminution de la résolution en fonction de la profondeur par le mixage collisionnel n'est pas assez significative pour expliquer le résultat du profil à 1,5 keV. Le mixage collisionnel1 ou la formation de cônes de cratère ne peuvent pas être les seules explications de cette dégradation. Ces deux analyses permettent d'émettre l'hypothèse que la diffusion joue un rôle dans la résolution en profondeur. Nous émettons alors l'hypothèse que cette diffusion est favorisée par les défauts créés par l'irradiation : lacunes et/ou interstitiels. Les traitements de ces deux diffusions répondent aux mêmes équations 1 Les analyses ioniques sont habituellement effectuées sous bombardement à 10 keV, ce qui correspond à une énergie d'impact minimale de 5,5 keV (colonne primaire à 30° et analyse d'ions secondaires positifs avec un faisceau primaire positif). C'est pourquoi le terme de "mixage collisionnel" est couramment utilisé dans les études traitant de la résolution en profondeur en analyse SIMS. 65 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION et à la même physique. Pour simplifier sa description, la diffusion sera considérée uniquement comme un phénomène lacunaire. [1][2][3] [4][5] III.2. LA DIFFUSION LACUNAIRE La diffusion est traitée dans de nombreux ouvrages [1-5]. Les atomes qui constituent la matière sont soumis à l'agitation thermique. Dans les gaz, où les molécules sont très éloignées les unes des autres et où l'interaction entre elles est très faible, l'énergie thermique est purement cinétique. Les molécules ont des trajectoires aléatoires dont les variations sont induites par les chocs entre particules. Les vitesses de translation sont considérables, de l'ordre de la centaine de mètres par seconde. Ce brassage continuel de la matière est appelé diffusion. Une molécule donnée s'écarte progressivement de sa position initiale. Sa vitesse de dérive, par rapport à sa position initiale et comparée à sa vitesse instantanée, n'est que de quelques millimètres par seconde, à température ambiante. Cela provient des directions aléatoires que suit son mouvement. Cette diffusion se produit aussi dans les liquides. Cependant, le mouvement des molécules, en raison de la densité moléculaire, se fait moins facilement. Les vitesses de diffusion sont plus faibles (1 µm/s) comparées à celles dans les gaz. Pratiquement, il faut agiter le flacon, c'est-à-dire créer des mouvements de convection, pour effectuer le mélange. Dans un solide cristallin parfait, la diffusion est impossible car, en dépit de leur agitation thermique, les atomes restent encagés par leurs plus proches voisins en des positions déterminées. Cette diffusion peut cependant exister, en raison des défauts présents dans la matière : ce sont les lacunes. Bien que leur concentration soit très faible, jamais supérieure à un millième du nombre d'atomes, il est possible d'observer la diffusion résultante. Le coefficient de diffusion (en cm²/s), est une grandeur représentative de ce phénomène qui dépend de la température. 66 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION La retranscription mathématique de la diffusion lacunaire est possible. L'atome vibrant autour d'un site passera sur le site voisin s'il est activé par une énergie de libération E. D'après la loi de Boltzmann, la probabilité pour qu'un atome possède l'énergie E est donnée par : (27) P = exp (- E/kB . T) avec kB la constante de Boltzmann et T la température en Kelvin (K). Pour qu'une particule puisse diffuser, il faut d'une part que l'un de ses voisins soit une lacune, et d'autre part qu'elle quitte son site pour prendre celui de la lacune. L'énergie de libération se décompose en deux énergies, Ef et Ed. Ef est l'énergie de formation d'une lacune et Ed est l'énergie de migration de la lacune, qui entraîne le déplacement d'un atome en sens inverse. Le coefficient de diffusion s'écrit : (28) D = D0 . P1 . P2 où D0 est une constante du coefficient de diffusion qui dépend des caractéristiques du réseau comme le paramètre de maille "a" et la fréquence de vibration de l'atome "ν". P1 est la probabilité de formation d'une lacune qui, d'après la loi de Boltzmann, est donnée par "exp(-Ef/kB . T)", et P2 la probabilité d'activation donnée par "exp(-Ed/kB . T)". Dans le cas simplifié où la variation de la concentration est unidimensionnelle, la loi de Fick permet ensuite d'exprimer le flux d'atomes passant dans une section dont la surface est l'unité en fonction de la position de l'atome "x" par : (29) J ( x ) = D( x ) dC dx 67 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Si, entre deux plans donnés, on fait le bilan des atomes entrants et des atomes sortants, on obtient l'équation de Fick : ∂C ∂ ∂C = D ( x ) ∂t ∂x ∂x (30) Dans le cas où D est indépendant de l'abscisse, c'est-à-dire que D ne dépend pas de la concentration, on obtient l'équation suivante, appelée équation de la diffusion : (31) ∂C ∂ ²C =D ∂t ∂x ² avec D donné par l'équation (28). Une autre approche du calcul de D à été donnée par J.C. PFISTER [6] pour expliquer l'augmentation de la diffusion quand un échantillon est irradié par un faisceau d'ions. C'est ce que nous développons dans les paragraphes suivants. L'étude ayant essentiellement portée sur des échantillons d'AlGaAs, nous allons d'abord rappeler les détails de leur structure cristalline. 68 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.3. STRUCTURE CRISTALLINE DES COMPOSES DE TYPE III-V Les composés binaires semiconducteurs AIIIBV, forment des phases cubiques où chaque site d'atome est entouré de quatre plus proches voisins, occupant les sommets d'un tétraèdre régulier et se trouvant à égale distance de l'atome considéré. La majorité des composés AIIIBV cristallise dans la structure de la blende, qui est telle que chaque atome d'une espèce donnée se trouve placé au centre d'un tétraèdre régulier dont les sommets sont occupés par quatre atomes de l'autre sorte. Les composés ternaires peuvent également former des phases cubiques. C'est en particulier le cas de l'AlGaAs [7,8]. Le réseau cristallin de la blende peut être représenté par deux réseaux cubiques à faces centrées, constitués chacun par des atomes d'une seule sorte. Ils se déduisent l'un de l'autre par l'intermédiaire d'un vecteur de translation : ρ a r = [111] 4 (32) "a" est la longueur de l'arête du cube du réseau cubique à faces centrées (figure III.4). 69 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Ga As a figure III.4 : structure du réseau de la blende du GaAs [7]. Pour les composés ternaires d'AlxGa(1-x)As, la structure du cristal est la même. Le réseau de l'arsenic est inchangé tandis que l'aluminium et le gallium se partagent le réseau III. La répartition du gallium et de l'aluminium dans ce second réseau se fait de façon aléatoire. Pour l'étude de composés sous irradiation, on ne tient pas compte de l'orientation cristalline. On ne distingue donc pas le composé amorphe du cristal. Le paramètre distinctif du composé est sa densité, dont la valeur se déduit du paramètre de réseau, en fonction de la masse de la maille. Connaissant les valeurs du paramètre -a- pour AlAs et GaAs, les valeurs intermédiaires sont interpolées suivant une loi de Végard. III.4. DESCRIPTION DE L'INTERDIFUSION SOUS IRRADIATION DANS LE SOUS RESEAU D'AlGa La mise en évidence de l'accélération de la diffusion sous irradiation [6] a été observée sur une jonction p-n (figure III.5) par une diffusion plus importante dans la partie irradiée (centre de l'image). A une température donnée, l'avancée est 70 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION proportionnelle à la dose reçue. Les doses utilisées dans ces expériences sont de l'ordre de 1018 protons par centimètre carré. Zone de diffusion 5 µm 1 mm Surface figure III.5 : vue microscopique d'une jonction p-n dont la partie centrale a diffusé sous irradiation [6]. L'échantillon est taillé en biseau ce qui explique la différence d'échelle. Dans une structure d'AlGaAs sous irradiation, il y a formation de lacunes d'éléments III, dans le sous-réseau d'AlGa, et formation de lacunes d'éléments V dans le sous-réseau d'As. Il peut exister des énergies de liaison différentes entre la lacune d'éléments III et le gallium ou l'aluminium, mais il n'existe pas à ce sujet d'information quantitative utilisable. L'aluminium et le gallium étant isoélectroniques et occupant les mêmes sites, on négligera cette différence d'énergie pour simplifier la description de l'interdiffusion en considérant qu'une lacune d'éléments III permet une diffusion équivalente de l'aluminium ou du gallium. La formation d'antisite2 nécessitant plus d'énergie, on considère que la diffusion dans 2 Un antisite est la position qu'occupe un atome de gallium (ou d'aluminium) dans le sous réseau d'arsenic et inversement si un atome d'arsenic se trouve dans le sous-réseau III. 71 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION les sous-réseaux est indépendante. De plus, l'autodiffusion de l'arsenic dans son réseau n'est pas un phénomène observable en SIMS. Il n'est donc pas utile de la traiter. Seul l'interdiffusion des éléments III est observable. Pendant une analyse SIMS, la dimension de la surface irradiée est très supérieure à la profondeur analysée. L'interdiffusion entre l'aluminium et le gallium est traitée comme un problème unidimensionnel, dans la direction normale à la surface irradiée. On peut donc écrire que le coefficient de diffusion du gallium noté DGa(x) est le produit de la concentration en lacunes d'éléments III, "Nl(x)", par le coefficient de diffusion des lacunes, Dl. DGa(x) = Nl(x) . Dl (33) Si la concentration en lacunes Nl peut être déterminée par la méthode de KINCHIN-PEASE [9,10], il existe peu d'informations sur le coefficient de diffusion des lacunes sous irradiation. Pour simplifier le problème, on supposera que le coefficient Dl ne dépendra pas de x, de t, et de la concentration en lacune Nl. Cette valeur, qui est constante, peut donc être déterminée par ajustement numérique. En remplaçant la valeur de DGa(x) dans (30), on obtient : ∂CGa ( x, t ) ∂ ∂CGa ( x , t ) = N l ( x ). Dl ∂t ∂x ∂x (34) Cette équation, qui représente le déplacement du gallium qui diffuse sous irradiation, sera utilisée pour rendre compte de la diffusion lors d'une analyse SIMS, dans le chapitre IV. Comme il y a conservation de matière, la diffusion de l'aluminium se fait par complémentarité et en sens inverse. La somme des concentrations en pourcentage de Ga et d'Al étant égale à 50 %, la concentration d'aluminium sera toujours donnée par : 72 Chapitre III (35) LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Cal = 0,5 - CGa Pour déterminer le taux de création de lacunes G(x), en vue de modéliser la diffusion sous irradiation, il faut étudier le parcours des ions dans le matériau. Dans un premier temps, nous décrivons les diverses nomenclatures utilisées, puis nous définirons le domaine énergétique dans lequel s'effectue une analyse ionique, afin de mieux comprendre l'interaction entre un ion incident et les atomes du matériau. III.5. ETUDE DES PERTES ENERGETIQUES DES IONS INCIDENTS Comme nous l'avons signalé lors de l'étude de la pulvérisation dans le deuxième chapitre, le parcours d'un ion implanté dans le matériau entraîne de nombreux chocs atomiques. Ces collisions conduisent à des pertes d'énergie responsables du ralentissement de l'ion dans la matière, jusqu'à son arrêt. Dans tout le domaine énergétique, deux types de pertes existent : les pertes électroniques (ou inélastiques) et les pertes nucléaires (ou élastiques). Ces deux pertes d’énergies, bien que corrélées [11,12], sont considérées comme indépendantes avec une bonne approximation [13]. La nomenclature utilisée dans l'étude des pertes énergétiques est la suivante : • Les ions incidents sont caractérisés par leur numéro et masse atomique, respectivement Z1 et M1 ainsi que leur énergie cinétique E et leur angle d'incidence θ. • De même, les atomes du matériau seront définis par leur numéro et leur masse atomique, Z2 et M2 et leur densité atomique ρ. • Les pertes d'énergie inélastique seront notées (dE/dx)i et les pertes d'énergie élastique (dE/dx)e. 73 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.5.1. PERTES D'ENERGIE INELASTIQUES Les pertes d'énergie inélastiques (dE/dx)i résultent de la quantité d'énergie cédée aux électrons des atomes qui composent le matériau. Ce phénomène entraîne soit l'ionisation des atomes de la cible au voisinage de la trajectoire de l'ion incident, soit l'excitation des électrons libres de ces atomes. Le pouvoir d'arrêt inélastique Si(E) est défini à partir des pertes d'énergie inélastiques par unité de longueur en tenant compte de la densité atomique du matériau N. (36) (dE/dx)i = N . Si(E) Le modèle de calcul de Si(E) dépend de E, et également de Z1. D'après J.F. ZIEGLER, J.P. BIERSACK et U. LITTMARK [13], on différenciera le calcul pour l'ion hydrogène (proton) ainsi que pour l'ion hélium, de celui appliqué aux ions de numéro atomique plus élevé. Pour ces derniers, le calcul sera lui-même différencié en trois modèles suivant les valeurs de l'énergie incidente de l'ion primaire : ◊ Pour une énergie incidente inférieure à 25 keV, le modèle L.S.S (J. LINDHARD, M. SCHARFF et H.E. SCHIOTT) [14,15] est utilisé. ◊ Pour les énergies comprises entre 25 keV et 1 MeV, le modèle de base est celui de J.F. ZIEGLER, J.P. BIERSACK et U. LITTMARK (Z.B.L) [13]. Ce modèle introduit une notion de charge effective Zeff et stipule que le pouvoir d'arrêt d'un ion lourd est proportionnel au pouvoir d'arrêt inélastique d'un proton Sp(E) de même énergie E dans le matériau. Si(E) s'écrit alors : (37) 2 S i (E) = Z eff ( Z 1 , a0 , V f , V0 , E )S p ( E ) 74 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Les vitesses Vf et V0 représentent respectivement la vitesse de Fermi, qui est la vitesse qu'aurait un électron libre à 0 K, et la vitesse de Bohr. Le pouvoir d'arrêt inélastique d'un proton est calculé, quant à lui, à partir des coefficients tabulés de Z.B.L. [13]. ◊ Enfin, pour les énergies supérieures au MeV, le modèle retenu est celui de BETHE [16]. Ces énergies ne sont pas atteintes en SIMS. III.5.2. PERTES D'ENERGIE ELASTIQUES Les pertes d'énergie élastiques (dE/dx)e correspondent à la quantité d'énergie cédée aux atomes par répulsion coulombienne. Cette répulsion est plus ou moins écrantée par le cortège électronique. Ces pertes d'énergie entraînent la déviation de la particule incidente ainsi que la mise en mouvement des atomes heurtés et vont contribuer à la formation de lacunes. Comme précédemment, ces pertes d'énergies sont reliées à un pouvoir d'arrêt, cette fois nucléaire et noté Se(E), par la relation : (dE/dx)e = N . Se(E) (38) Le pouvoir d'arrêt nucléaire est l'interaction des noyaux et de leurs électrons internes avec la particule incidente. Ce pouvoir se déduit du potentiel atome-atome de type Coulombien à haute énergie et, à faible énergie, d'un potentiel écranté qui s'écrit : (39) V (r) = Z1 . Z 2 . e 2 . φ ( Z1 . Z 2 . r ) r "r" est la distance entre les deux atomes et φ(Z1,Z2,r) représente la fonction d'écran nucléaire, car les électrons de la cible et de l'ion incident font écran à la charge nucléaire. Elle est telle que : 75 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION • pour r = 0, φ = 1, • pour r > 0, φ < 1 III.5.3. CONTRIBUTION DES DEUX PERTES D'ENERGIE Les pertes d'énergie, élastique et inélastique, étant supposées indépendantes [13], la perte d'énergie globale s'écrit comme étant la somme des pertes électroniques et des pertes nucléaires. (40) ( ) ( ) ( ) dE dx = Totale dE dx + e dE dx n La figure III.6 montre de manière qualitative la dépendance énergétique de la perte d'énergie totale par unité de longueur sur un vaste domaine. 76 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Ln(dE/dx) Z.B.L. Bethe L.S.S. Perte d'énergie totale Perte d'énergie inélastique Relativiste Perte d'énergie élastique 25 keV 1 MeV Ln(E) figure III.6 : Dépendance en énergie de la perte totale d'énergie par unité de longueur. Les différents domaines énergétiques des modèles de L.S.S., Z.B.L. et Bethe sont représentés. La section de L.S.S. correspond au domaine de l'analyse SIMS. Le terme dû aux pertes d'énergie électronique est quasiment négligeable tandis qu'il prend le dessus sur les pertes nucléaires dans les domaines de Z.B.L. et BETHE. A l'aide du programme PRAL (Projected Range ALgorithm) de trim92 [13], nous avons tracé (figure III.7) les dépendances énergétiques des trois pertes (élastique, inélastique et totale) dans le cas d'ions xénon abrasant une cible d'AlGaAs dans le but d'étudier l'influence de ces pertes en analyse SIMS. 77 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION 14 Pouvoirs d'arrêt du Xe dans AlGaAs 12 Inélastique Elastique Totale dE/dx (MeV/(mg/cm²) 10 8 6 Domaine SIMS 4 2 0 0.1 1 10 100 1000 10000 Énergie (keV) figure III.7 : comparaison des pertes énergétiques pour un bombardement Xe sur une cible d'AlGaAs. En-dessous de 10 keV, les pertes inélastiques sont négligeables. Le domaine SIMS se situe bien en-dessous de 100 keV puisque les énergies dépassent rarement 10 keV. Dans ce domaine, avec ce couple ion/cible, la perte d'énergie électronique est négligeable par rapport aux pertes nucléaires. Cette remarque est reprise plus loin en ignorant la perte d'énergie électronique ce qui permet de minimiser le temps de calcul du logiciel présenté dans le chapitre IV. 78 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.6. LES LOGICIELS EXISTANTS Il existe plusieurs programmes permettant de modéliser le déplacement des atomes dans une cible irradiée. Ces programmes ont été créés spécialement pour simuler des implantations ioniques. Deux grandes catégories de modélisation sont à différencier : la première utilise la méthode de dynamique moléculaire, la seconde travaille dans l'approximation des collisions binaires. La méthode de dynamique moléculaire est plus précise et permet le calcul pour des énergies inférieures à 25 keV. Son grand défaut est d'être coûteuse en temps de calcul. Nous pouvons citer, à titre d'exemple, le code QDYN [17]. La méthode utilisant l'approximation des collisions binaires est plus simple à mettre en œuvre et plus rapide en temps de calcul, ce qui est un facteur de choix important. Citons pour mémoire le code "MARLOW" [12,18,19] qui est le premier à utiliser la méthode de Monte-Carlo, TAMIX [20], et surtout TRIM [13] (TRansport of Ions in Matter) qui nous a servi de base pour développer notre logiciel. III.6.1. LE PROGRAMME TRIM Le programme TRIM a d'abord été conçu pour modéliser le parcours des ions incidents dans une cible amorphe [21]. Il a été ensuite modifié de façon à tenir compte des collisions des atomes de recul, dans l'étude de la pulvérisation [22]. En effet, au terme de plusieurs collisions, la direction des atomes de recul a une probabilité non nulle d'être orientée vers la surface et les atomes éjectés peuvent ainsi être comptabilisés. Le principe de fonctionnement de TRIM dans sa version actuelle est le suivant. Un ion est envoyé sur une cible amorphe et son parcours est suivi pas à pas dans le matériau. Les collisions binaires de cet ion, avec un atome choisi 79 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION aléatoirement dans la cible, puis les collisions de cet atome de recul, sont étudiées. Quand un second ion arrive, il voit la cible telle qu'elle était à l'origine. Cet événement est donc indépendant du précédent. Il n'existe donc pas de notion de mémoire de la cible et même si les atomes éjectés peuvent être comptabilisés, la cible garde toujours les mêmes dimensions (épaisseur et concentration). C'est un premier point important qui sera corrigé dans notre version pour rendre compte des effets de diffusion. L'ion incident est suivi jusqu'à ce qu'il cède suffisamment d'énergie à la cible pour que son énergie restante soit inférieure à un seuil fixé, de l'ordre de 5 eV, ou bien qu'il traverse la cible. Les orientations cristallines ne sont pas prises en compte : la cible est considérée comme amorphe. Le paramètre qui caractérise le composé est sa densité. Cette méthode s'applique sur un large spectre d'énergie, de 0,1 keV jusqu'au MeV. Elle permet l'accès au rendement de pulvérisation, à la distribution des ions implantés, au taux de création de lacunes et de phonons. Elle s'applique pour une cible contenant jusqu'à quatre éléments dans trois couches distinctes. Les limites de ce calcul dans le cadre de la modélisation d'une analyse SIMS, sont de plusieurs ordres : 1- suivre toutes les sous-cascades nécessite un long temps de calcul, 1- la cible est considérée "neuve" à chaque nouvel ion incident, 1- l'abrasion n'est pas prise en compte, 1- la diffusion assistée par irradiation est ignorée. Tous ces points sont pris en considération dans notre modèle. Il sont détaillés dans le quatrième chapitre. La partie de TRIM que nous avons conservée est développée dans le paragraphe suivant. 80 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.6.2. DETAIL DE TRIM Dans une cible amorphe, le parcours d'un ion s'effectue comme suit. L'ion se déplace sur une trajectoire rectiligne entre deux chocs. Avant un impact, il est nécessaire de connaître son énergie, sa direction, sa position. L'atome cible est choisi de manière aléatoire. Seules sont calculées les pertes énergétiques de l'ion incident ainsi que les angles pris au terme de la collision. La méthode originale de TRIM est de travailler dans le référentiel de centre des masses et d'utiliser des énergies réduites. Comme nous l'avons détaillé précédemment, les pertes énergétiques sont de deux sortes, les pertes inélastiques et les pertes élastiques. Ces dernières vont déterminer les différents angles de diffusion et de recul des atomes. a) Etude des pertes élastiques dans une collision binaire Pour un ion incident qui entre en collision avec un atome cible, ZIEGLER et al. [13] font intervenir, dans l'équation (39) une fonction d'écran universelle φu définie par : r 4 −β r φu( ) = ∑ αi .e a au i =1 i (41) u Les valeurs de α et β sont tabulées et au représente la distance d'écran universelle qui s'écrit : (42) au = a0 0,8853 Z + Z 02, 23 0, 23 1 où a0 est le rayon de Bohr égal à 0,5292 Å. 81 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION Puis, pour simplifier les calculs, les auteurs introduisent l'énergie réduite sans dimension "ε" : ε= (43) a u .M 2 E Z 1. Z 2. e ².( M 1 + M 2 ) E est l'énergie de l'ion incident, M1 et M2 sont les masses et Z1 et Z2 les numéros atomiques respectivement de l'ion et de l'atome cible, "e" est la charge de l'électron. Cette transformation a pour but de simplifier considérablement les équations de collision. Dans une collision élastique entre deux particules, le mouvement de celles-ci peut être représenté soit en coordonnées du laboratoire (figure III.8), ce qui simplifie la compréhension, soit dans le référentiel du centre de masse (figure III.9), ce qui simplifie souvent les calculs. figure III.8 : représentation d'une collision binaire dans les coordonnées du laboratoire dans le plan (x,y). La particule incidente de masse M1 et de vitesse V0 vient heurter l'atome de masse M2 au repos. ψ représente l'angle de diffusion et φ est l'angle de recul. La vitesse V1 est la vitesse de l'ion incident après la collision et V2 la vitesse de l'atome de recul. 82 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION figure III.9 : représentation d'une collision binaire dans les coordonnées du centre de masse dans le plan. Les deux atomes sont considérés en mouvement. Seul le centre de masse est immobile. Ce référentiel se déplace à la vitesse Vc par rapport au référentiel du laboratoire. V0-Vc est la norme de la vitesse de l'ion incident qui reste constante avant et après la collision, Vc est aussi la norme de la vitesse de l'atome cible. Φ est l'angle de recul et θ l'angle de diffusion. Dans le programme TRIM, l'utilisation des coordonnées barycentriques ou du centre de masse (CM) est bien plus avantageuse. En effet, la description d'une collision élastique de deux particules possède des aspects remarquables dans le référentiel barycentrique. Ainsi la somme des quantités de mouvements est nulle avant et après la collision. Ceci permet de déduire de la conservation de l'énergie cinétique que les normes de toutes les quantités de mouvements, dans une collision élastique binaire dans le CM, sont égales et d'exprimer les vitesses de l'ion et de l'atome en fonction de la vitesse initiale V0 de l'ion : 83 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION (44) Vion = V0 - VC = V0 . MT / M1 (45) Vatome = VC = V0 . MT / M2 Où MT représente la masse réduite définie par M T = M1 . M 2 . M1 + M 2 Un autre avantage de l'utilisation des cordonnées du CM est que les vitesses du système sont indépendantes de l'angle de diffusion entre les deux particules. Le système formé par les deux équations (44) et (45) a donc une solution unique ce qui n'est pas le cas dans le référentiel du laboratoire. Le diagramme des vitesses de l'ion incident peut être représenté dans les deux référentiels comme le montre la figure III.10. Dans cet exemple, "cosθ" est négatif, on peut donc exprimer l'angle ψ par la formule : tanψ = (46) (V0 - VC ) . sinθ VC + (V0 - VC ) .cosθ L'énergie transférée T à l'atome cible, qui est égale à la perte d'énergie élastique de l'ion, s'exprime en fonction de l'énergie incidente E0 par : T= (47) 4. M 1 . M 2 θ E 0 .sin ² ( M 1 + M 2 )² 2 La détermination de l'angle θ permet de revenir facilement à l'angle de diffusion ψ et à la perte d'énergie T. L'énergie restante de l'ion est alors calculée simplement par : (48) Er = E 0 − T − ∆E i 84 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION ∆Ei représente la perte d'énergie inélastique. Nous la négligeons par la suite pour minimiser le temps de calcul (cf. § III.5.III.5.3). figure III.10 : Diagramme des vitesses de l'ion incident qui permet d'exprimer la tangente de l'angle ψ en fonction de l'angle θ. V0 représente la norme de la vitesse de l'ion incident dans le référentiel de laboratoire et V0-Vc sa norme dans le centre de masse. ψ représente l'angle de diffusion dans le laboratoire et θ l'angle de diffusion de l'ion incident dans le référentiel CM. 85 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION b) Evaluation de l'angle de diffusion θ. L'angle de diffusion dans le CM est calculé par une relation exacte si ε ≥ 10 ou par une résolution trigonométrique si ε < 10. ∗ Si ε ≥ 10 : pour un potentiel Coulombien, θ s'exprime en fonction de l'énergie réduite et du paramètre d'impact réduit "Pr" par la relation : (49) sin ² où Pr = θ 1 = 2 1 + Pr (1 + Pr )( 2. ε . Pr )² p avec "P" le paramètre d'impact de la collision. au ∗ Si ε < 10 : la valeur de θ se déduit par l'astuce suivante. La figure III.11 décrit, dans le référentiel barycentrique, la collision entre l'ion incident de masse M1 et d'énergie cinétique E avec un atome, initialement immobile et de masse M2 [13]. Le triangle superposé aux deux orbites des particules s'appelle le triangle de diffusion. Il est constitué de différentes grandeurs comme p, le paramètre d'impact, R0, la distance minimum d'approche, ρ1 et ρ2, les rayons de courbure des trajectoires au minimum d'approche, et δ1 et δ2, deux termes de correction pour fermer le triangle. L'accès à tous ces paramètres rend aisée l'expression de l'angle θ par la relation : (50) cos ρ = ρ 1 + ρ 2 θ ρ +p+δ = avec ρ + R0 2 δ = δ 1 + δ 2 86 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION M1 θ/2 ρ1 ρ1 θ δ1 M1 R0 P δ2 M2 ρ2 ρ2 M2 figure III.11 : représentation d'une collision entre deux particules dans le CM. θ est l'angle de diffusion, P le paramètre d'impact, ρ1 et ρ2, les rayons de courbure des trajectoires, R0, la distance minimum d'approche et δ1 et δ2, deux termes de correction. On peut exprimer le cosinus de θ/2 en fonction de tous ces paramètres. Toutes les valeurs citées sont accessibles [13,23]. La valeur de θ peut donc se calculer et l'on peut ainsi revenir au parcours de l'ion dans la cible. 87 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.7. CONCLUSION Les expériences précédemment décrites (figure III.2 et figure III.3) montrent que le phénomène prépondérant dans la dégradation en profondeur des profils n'est pas le mixage dû à des chocs élastiques. Nous avons émis l'hypothèse que ce réarrangement d'atomes est produit par la diffusion assistée sous irradiation. Parmi les études [24,25] portant sur la diffusion assistée par l'irradiation d'ions, les applications sont souvent liées à l'implantation ionique à haute énergie, qui met en jeu des forces qui peuvent être négligées dans notre cas, ou à des études d'irradiation à hautes températures [26,27,28]. De par leurs conditions, ces études ne peuvent être représentatives de l'analyse SIMS. Le but de notre travail a donc été, en nous servant de la base du code TRIM, que nous avons présenté, de modéliser une analyse SIMS. Les différents phénomènes induits tels que : l'érosion de l'échantillon, un effet de mémoire de la cible qui tient compte des modifications de l'échantillon, et la diffusion assistée par l'irradiation seront pris en compte. Ceci n'est pas fait systématiquement dans le système TRIM. 88 Chapitre III LE DEPLACEMENT DES ATOMES DANS LE SOLIDE SOUS IRRADIATION III.8. REFERENCES [1] C. KITTEL, Introduction to Solid State Physics, J. Wiley & Sons, Inc., New York, 4th ed., Chap. 9, 646, (1971). [2] A. GUINIER & R. JULIEN, La matière à l'état solide, Hachette-CNRS, Paris, Chap. 5, 255, (1987). [3] J. PHILIBERT, Diffusion et transport de matière dans les solides, Ed. de Physique Les Ulis, (1985). [4] G.E. MURCH, Atomic diffusion theory in highly defective solids, Trans Tech SA Aedermannsdorf, Switzerland (1980). [5] Y. ADDA, J.M. DUPOUY, J. PHILIBERT, Eléments de métallurgie physique, Tome 4, INSTN. Collection enseignement, (1978). [6] J.C. PFISTER, Th. Sc. Phy., Paris, Sér. 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Sc., 223, 179, (1989). 90 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS CHAPITRE IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS 91 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS IV. MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Nous avons exposé, dans le chapitre précédent, les raisons qui ont amené à considérer la diffusion créée par l'irradiation du faisceau primaire en analyse SIMS. Celle-ci est en partie la cause de la dégradation des profils. Les autres causes étant, pour des analyses effectuées à fortes énergies : le mixage collisionnel, la formation de cônes de cratères, la pulvérisation préférentielle. Nous allons montrer la contribution de la diffusion à cette dégradation puis nous présenterons notre programme SIMSDIFF, qui permet de simuler des analyses SIMS. IV.1. RAPPEL SUR LE TRAITEMENT DE SIGNAL Tout système d'analyse a une fonction de transfert qui lui est propre. Schématiquement on a : nn(t) Fonction de transfert h(t) nm(t) figure IV.1 : représentation schématique d'une chaîne de transfert. "nn(t)" représente le signal d'entrée, appelé aussi signal brut ou signal source, et "h(t)" est la fonction de transfert ou de résolution qui transforme "nn(t)", par le biais de moyens d'acquisition, en un signal résultat "nm(t)". Le résultat d'une analyse "nm(t)" est égal au produit de convolution, noté "*", des données "nn(t)" par la fonction de transfert "h(t)". Ce produit s'écrit : nm(t) = nn(t) * h(t) (51) ⇔ (52) n m (t) = +∞ ∫ h(t − p) . n n (p).dp −∞ 92 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Pour avoir une idée de son application physique, on peut l'imager comme suit. Si on regarde un dessin à travers une loupe de grossissement 2, l'image observée sera deux fois plus grande (figure IV.2). Cet exemple est simple car le produit de convolution par un nombre revient à un produit scalaire. Pourtant, l'acquisition de données fait toujours appel à cette notion de convolution. *2 ⇒ figure IV.2 : exemple de produit de convolution. La fonction de transfert idéale, c'est-à-dire celle qui donne une image identique à l'objet, est la distribution de Dirac que l'on note "δ(t)" (noté encore "↑" graphiquement). Si par exemple on mesure une marche de tension avec un oscilloscope de très bonne qualité dont la fonction de transfert peut être considérée comme un Dirac, on obtient le produit de convolution suivant (figure IV.3) : * ⇒ figure IV.3 : acquisition d'une marche par un système parfait : le signal résultant est identique au signal d'entrée. Pour un appareil avec un long temps de réponse, la fonction de transfert ressemble à une gaussienne et le résultat est le suivant : * ⇒ figure IV.4 : acquisition d'une marche par une fonction de transfert gaussienne. Le signal de sortie est déformé par rapport au signal d'entrée 93 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Le signal de sortie est alors une mauvaise interprétation du signal d'entrée. Le pic de Dirac est une fonction de transfert idéale que l'on tente d'approcher pour effectuer une mesure, mais qui reste physiquement irréalisable. La fonction de transfert d'un appareil contient toute l'information de la chaîne de mesure. Cette information peut donc être nuisible comme, par exemple, le bruit des appareils de mesure (transistors, champs électromagnétiques parasites), les erreurs de mesure (mauvaise calibration des détecteurs), les informations parasites (effet de mémoire3 de la lentille à immersion dans le cas du SIMS) et bien évidemment la diffusion entre les couches à analyser (diffusion assistée par l'irradiation) qui viennent s'ajouter au signal qui est détecté. De plus, étant donné le grand nombre de phénomènes qui intervient dans cette chaîne de mesure, la fonction de transfert ne peut pas toujours être connue précisément. En SIMS, plusieurs possibilités existent pour la déterminer à l'aide de l'expérience. La première solution serait d'analyser un Dirac. Le Dirac étant neutre pour le produit de convolution, le résultat de cette analyse serait la fonction de transfert (figure IV.5). En analyse ionique, la distribution de Dirac est représentée par une monocouche atomique ce qui est très difficile à obtenir en pratique. * ⇒ figure IV.5 : détermination de la fonction de transfert par l'analyse d'une distribution de Dirac qui est l'élément neutre de la convolution. 3 L'effet de mémoire est produit par des particules déposées sur la lentille à immersion lors d'analyses précédentes. Ces particules peuvent, sous l'irradiation d'ions secondaires de hautes énergies, être pulvérisées et envoyées dans la zone d'analyse. Elles sont ensuite détectées alors qu'elles proviennent d'un autre échantillon. Cet effet est détaillé avec un exemple à l'appui dans le cinquième chapitre. 94 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Une deuxième méthode consiste à analyser une marche. L'exploitation de cette analyse passe par deux résultats mathématiques de la convolution : 1- pour dériver un produit de convolution, il suffit de dériver un seul de ses termes, 2- la dérivée d'une marche est un Dirac. Ainsi, l'analyse d'une marche "Mn(t)" par l'intermédiaire de la fonction de résolution "h(t)" s'écrit : Mm(t) = Mn(t) * h(t) (53) Et sa dérivée : (54) d(Mm(t))/dt = d(Mn(t) * h(t))/dt D'après le premier résultat mathématique cela s'écrit encore : (55) d(Mm(t))/dt = d(Mn(t))/dt * h(t) Et en appliquant le second résultat : d(Mm(t))/dt = δ(t) * h(t) = h(t) (56) Dans ce cas, il suffit de dériver le résultat de l'analyse d'une marche "Mm(t)" pour obtenir la fonction de résolution "h(t)" de l'appareillage. La fonction de transfert déterminée, il est possible de retrouver le signal d'entrée à partir du signal "nm(t)" mesuré. Deux méthodes peuvent être mises en œuvre : 95 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS • La première consiste à filtrer le signal "nm(t)" avec un filtre dont la réponse fréquentielle est l'inverse de la transformée de Fourier de "h(t)". Cela nécessite une connaissance précise et détaillée de "h(t)". La transformée de Fourier notée TF d'un signal "x(t)" en temps, est sa représentation en fréquence "X(ν)". On note TF-1 la transformée inverse. Ainsi : (57) x(t) TF → ← −1 TF X( ν ) Plus précisément : (58) X( ν ) = TF{ x( t )} = (59) x ( t ) = TF −1 { X( ν )} = +∞ ∫−∞ x( t ) . e +∞ -2 πjνt ∫−∞ X( ν ) . e dt -2 πjνt dν où "j" est tel que j² = -1, "t" représente le temps, variable d'intégration de l'équation (58), et "ν" la fréquence, variable d'intégration de l'équation (59). Si Nn, Nm et H sont respectivement les transformées de Fourier de nn, nm et h, alors la transformée de Fourier du produit de convolution (51) est un produit simple qui s'écrit : (60) nm(t) = nn(t) * h(t) ⇔ Nm(ν) = Nn(ν) . H(ν) Le produit scalaire peut alors s'écrire : (61) Nn(ν) = Nm(ν) . H-1(ν) Par transformée inverse, en utilisant l'équation (59), on remonte à "nn(t)". 96 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Nous avons simplifié ce processus qui, en toute rigueur, est l'objet de développements mathématiques plus complexes, et nécessite entre autre des conditions d'échantillonnage strictes4. L'un des inconvénients majeurs de cette méthode est qu'elle diminue considérablement le rapport signal/bruit. Cette approche de déconvolution est néanmoins possible avec de nombreux outils de traitement du signal comme l'application de la méthode de VAN CITTERT [1,2], l'utilisation de "filtres blanchisseurs" [3,4] ou encore la mise en œuvre de la méthode de Yule Walker [5,6]. • Une autre solution permet de revenir au profil initial. Si l'on réussit à décrire l'ensemble des phénomènes impliqués dans la fonction de transfert par une fonction mathématique paramétrée, il est possible, par une méthode appelée "simplex" [7], d'estimer les paramètres qui représentent le mieux les conditions d'analyse, et de remonter au profil initial. Prenons par exemple, un résultat d'analyse qui, pour un signal d'entrée inconnu, mais que l’on cherche à définir, donne un disque hachuré. La méthode fonctionne comme suit. Dans un premier temps, il faut modéliser la manipulation. Dans ce cas très simple ce sera : "hachurer la figure". Le signal d'entrée paramétré est ensuite estimé. Un polygone régulier de "n" cotés semble être un bon début. Une valeur initiale de -n- est choisie (n = 4) et la simulation est effectuée en prenant comme modèle : "hachurer la figure". Le résultat ne se fait pas attendre, un carré hachuré est obtenu ! Ce carré est ensuite comparé, par la méthode du "simplex" au disque hachuré qui est le résultat expérimental. Le simplex va définir un nouveau paramètre -n- et la simulation va recommencer jusqu'à obtenir une valeur 4 Il faut en particulier échantillonner finement le signal. La finesse de l'échantillonnage constitue la condition de Shannon qui relie la bande passante B du signal et la période d'échantillonnage TE. La condition s'écrit : TE<1/(2B). 97 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS convenable de -n- (n = 200), pour que le polygone d'entrée ressemble à un disque (figure IV.6). C'est la fonction ajustée. En résumé, la méthode du simplex permet de déterminer la fonction ajustée par ajustement des paramètres de la fonction initiale (appelée fonction estimée). Le calcul s'effectue en minimisant l’écart entre le résultat obtenu par modélisation (fonction simulée) et l'expérience (fonction expérimentale). Ajustement des paramètres n=6 Fonction expérimentale Fonction simulée Fonction estimée FIN Résultat: Fonction ajustée n=4 n = 200 figure IV.6 : fonctionnement d'un ajustement de paramètres à l'aide du "simplex". Cette méthode, avec les mêmes dénominations, a été utilisée pour déterminer le profil initial d'une analyse SIMS. Nous allons maintenant présenter le programme SIMSDIFF que nous avons développé. IV.2. AVANT PROPOS Pour bien comprendre les événements qui interviennent dans la chaîne composant la fonction de transfert d'une analyse SIMS, quelques résultats sont à rappeler. Ils proviennent d'analyses réalisées avec l'appareillage sur lequel cette 98 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS thèse s'est effectuée et doivent permettre de définir, avec une bonne approximation, la fonction de transfert de l'IMS300. Deux séries d'analyses ont été réalisées dans notre laboratoire : la première sur un échantillon comportant une couche de Chrome de 10 Å d'épaisseur, déposée sur un substrat d'or (figure IV.7), la deuxième sur une monocouche de Cr sur un substrat de silicium (figure IV.8). Sur les deux figures, on distingue nettement d'une part la couche de 10 Å de chrome (en rouge) et d'autre part la monocouche qui fait 1,8 Å. Cette dernière montre que sous certaines conditions d'analyse, il est possible de détecter précisément une monocouche atomique à l'aide d'un SIMS. Cr 10 Å Au figure IV.7 : Couche de 10 Å de chrome sur un substrat d'or. ≈2Å Si Cr figure IV.8 : monocouche de Cr sur un substrat de silicium. 99 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Ces deux échantillons ont été conçus par J.S. DANEL (LETI/DMITEC CEAGrenoble). La couche de 10 Å de chrome permet de faire adhérer une résine photosensible sur l'or. La fabrication s'est effectuée par évaporation et a été contrôlée par un système de quartz piézo-électrique. Un deuxième contrôle de l'épaisseur a été effectué en ESCA par A. ERMOLIEFF (LETI/DOPT CEAGrenoble). Cette résolution extrême, détection d'une monocouche atomique, est due essentiellement au fait que le système peut fonctionner avec un duoplasmatron à cathode chaude qui permet d'obtenir des neutres primaires de Xe à 1 keV. D'autre part, le vide de la chambre d'analyse (10-9 Torr) est bien meilleur que celui des systèmes d'origine (Cf. Chapitre II) ce qui élimine la présence de gaz résiduel non désiré. Au vu de ces résultats, il est possible d'affirmer que, dans certaines conditions de réglage (basse énergie du faisceau primaire, duoplasmatron à cathode chaude) : Notre système d'analyse, électronique + détecteur, a une fonction de transfert assimilable à un Dirac. Dans le but de concevoir un modèle des analyses SIMS, différents points sont à rappeler : 1- une analyse sur l'IMS 300 ne comprend que 450 points par fichier d'acquisition. Pour une analyse plus longue, l'acquisition se fait sur plusieurs fichiers successifs. 2- Pour les analyses qui vont suivre, la profondeur érodée entre deux points consécutifs est de 8 à 10 Å. La résolution minimale est donc du même ordre. Les problèmes de résolution ne sont pas dus à la chaîne de mesure, mais uniquement au sous échantillonnage (450 points), ou à des complications liés à 100 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS l'échantillon lui-même (rugosité de surface). Compte tenu de l'épaisseur des puits que nous analyserons par la suite (100 Å), hormis les 8 Å de résolution de l'appareillage, un autre phénomène pourrait intervenir dans la dégradation notable des profils : la diffusion assistée par l'irradiation du faisceau primaire qui a été abordée dans le chapitre précédent. L'hypothèse qui suppose que la fonction de transfert de l'appareillage est assimilable à une distribution de Dirac sera maintenue pour toutes les modélisations. Ceci permettra dans un premier temps de bien mettre en évidence le phénomène de diffusion décrit. La modélisation va se décomposer en trois parties : 1- modélisation des chocs des particules incidentes à l'intérieur du matériau, afin de définir le taux de création de lacunes G(x) en fonction de la profondeur irradiée, 2- modélisation de la diffusion assistée sous irradiation, en utilisant le taux G(x), 3- adjonction du "simplex" pour ajuster les paramètres de l'échantillon et revenir au profil réel qui sera assimilé au profil ajusté. IV.3. LE PROGRAMME SIMSDIFF Ce travail se base sur le programme TRIM modifié dans sa version TRIMDYN dans la thèse d'EL KHAKANI [8]. TRIMDYN apporte déjà de nombreuses améliorations par rapport à la version originale ; modifications que nous allons détailler. 101 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS IV.3.1. PRESENTATION DE TRYMDYN La version TRIMDYN a été élaborée dans un travail de recherche [8] portant sur la pulvérisation lors de l'implantation ionique. L'essentiel de ce travail, du moins dans la partie qui nous concerne, a porté sur la prise en compte de l'abrasion de l'échantillon lors de la modélisation. Pour cela, l'auteur a dû tenir compte des modifications de la composition pendant l'implantation. Ces points sont détaillés comme suit : 1- La fluence (φ (ions/cm²)), qui représente la dose à implanter, est divisée par le nombre total d'ions à traiter (HN). Chaque ion incident est représentatif d'une fraction de la dose incidente, soit φ/HN. Cette modification permet de diminuer le temps de calcul d'un facteur HN/φ. 2- La cible est divisée virtuellement en 20 tranches (au lieu de 3 pour TRIM). Chaque ion incident est traité par la méthode TRIM jusqu'à son arrêt dans la cible. La sous-couche où l'ion s'arrête est repérée. 3- Cet arrêt en modifie la composition. On calcule alors : - la fraction massique de l'élément implanté, - la densité moyenne "ρ" de la sous-couche. Cette densité dépend de la position de l'ion dans le matériau. Si mA et mB sont les fractions massiques de 2 éléments respectivement A et B (A implanté dans B), différents cas peuvent être considérés pour la position de A comme : a) une position interstitielle sans modification du réseau hôte : (62) ρ = ρB (1+mA/mB) 102 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS b) une position substitutionnelle sans modification des distances interatomiques : (63) ρ = ρB (1+mA/mB) / (1+mA/mB . MB/MA) c) l'ion implanté est insoluble dans la matrice-hôte et forme des cristaux d'une phase A de masse volumique ρA : (64) ρ = ρB (1+mA/mB) / (1+mA/mB . ρB/ρA) d) l'ion implanté forme un composé défini AaBb de densité ρAB : (65) ρ= 1 1 1 1 b MB ).( + mA (1 + − ) ρB a MA ρAB ρB TRIM ne prévoit pas la position exacte (interstitielle ou substitutionnelle) de l'ion implanté. Cela impose d'émettre une hypothèse sur ρ dans la couche d'arrêt en tenant compte des connaissances que l'on a par ailleurs sur le comportement de ce matériau. De plus, on a création de désordre (défauts, amas de défauts ...) ce qui induit automatiquement une modification de ρ. 4- La pulvérisation, qui se traduit par une abrasion de la surface, est prise en compte en calculant, après chaque ion incident, l'épaisseur abrasée. La connaissance du rendement individuel de pulvérisation Yi de l'espèce i composant le matériau donne pour un ion de fluence φ/HN la relation : (66) YTotal = φ ∑ Yi . Ci HN i Ci représente le pourcentage atomique de l'espèce i dans la zone concernée par la pulvérisation, une zone représentant 1/20 de l'échantillon. 103 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS Le programme TRIMDYN est intéressant car il tient compte de l'abrasion de l'échantillon ainsi que du changement de composition de la matrice. Cependant, ne tenant pas compte de la diffusion assistée sous irradiation ; il n'est pas adapté à la modélisation d'une analyse SIMS. IV.3.2. LES COMPLEMENTS DE SIMSDIFF L'idée pour modéliser un profil SIMS en faisant intervenir la diffusion assistée sous irradiation, est la suivante. Pour chaque ion incident, on établit "la carte" des lacunes créées le long de son parcours. Quand l'ion a terminé son trajet, c'est-à-dire quand l'énergie qui lui reste devient inférieure à celle nécessaire à un déplacement, les résultats du chapitre III sur la diffusion peuvent s'appliquer, et permettent de déterminer le coefficient de diffusion en fonction de la profondeur irradiée. L'équation de Fick est alors résolue pour faire migrer les atomes. Quand la nouvelle composition du matériau est déterminée, l'ion suivant est pris en considération5. SIMSDIFF comporte également diverses modifications : - la procédure diffusion tient compte des effets de diffusion décrits précédemment, et calcule le coefficient de diffusion en fonction de la profondeur irradiée, - la procédure de calcul de l'abrasion est revue, et le calcul de l'abrasion lors du passage entre deux couches successives est corrigé. Cette procédure renvoie à un fichier l'information caractéristique d'un profil SIMS, - la procédure méthode explicite résout l'équation de Fick, 5 Pendant toute la description du modèle, il est important de se rappeler que l'ion représente toujours un "paquet d'ions". Le calcul est donc moyenné pour un nombre d'ions égal à φ/HN. 104 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS - le calcul de la densité atomique est différent et mieux adapté à notre structure d'AlGaAs, - diverses simplifications sont apportées pour diminuer le temps de calcul sans diminuer la précision des résultats. Nous allons maintenant approfondir chaque étape de ce calcul. IV.4. DESCRIPTION DE L'ECHANTILLON L'échantillon est découpé en 600 tranches distinctes contrairement au programme TRIMDYN dans lequel il n'est décrit que par 20 couches. Ceci permet d'avoir un pas de calcul plus précis pour le coefficient de diffusion, qui est fonction de la profondeur, soit 1/600eme de l'épaisseur totale de l'échantillon. Cette modification nécessite la création de tableaux de données volumineux, en particulier pour le calcul des pertes d'énergie électronique (bien qu'elles aient été négligées par la suite) lors de la construction du tableau des pouvoirs d'arrêt de la procédure rstop de TRIM [9]. Le stockage des valeurs nécessite 12 Mo. Au total, 15 Mo du disque sont utilisés pour stocker les différentes valeurs du programme. Ne disposant, au début de ce travail de recherche, que d'un PC286 avec 520 Ko de mémoire vive et un disque dur de faible capacité (10 Mo de libre), il ne nous était pas possible d'effectuer ces modifications. Nous avons donc opté pour le développement de ce programme sur une station Unix. La gestion de la mémoire se fait automatiquement ce qui simplifie la programmation. Chaque couche virtuelle de notre échantillon doit avoir une épaisseur suffisamment faible pour bien définir l'échantillon. Par la suite, le minimum d'épaisseur des puits quantiques qui seront modélisés est de 100 Å. Nous fixons l'épaisseur des couches virtuelles à 25 Å. La composition de l'échantillon est donc 105 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS redéfinie tous les 25 Å. Ces puits sont alors représentés par 4 couches virtuelles, ce qui permet une définition suffisante du gradient de composition. IV.5. LA PROCEDURE DIFFUSION Cette procédure calcule le coefficient de diffusion des lacunes d'éléments III, en fonction de la profondeur de l'ion incident, à chaque fois qu’il va heurter un atome. La concentration en lacunes d'éléments III, expliqué dans le troisième chapitre, est déterminée par la méthode de KINCHIN-PEASE [10,11]. Un tableau indexé de Nl(LL), la concentration en lacunes en fonction de la profondeur, est construit pour les différentes couches (600 au total) . Après avoir déterminé le numéro de la couche dans laquelle s'effectue le choc, donc l’emplacement où il y a création de lacunes, le coefficient de diffusion est: D(LL) = Nl(LL) . Dl (67) ⇒ LL représente la couche virtuelle où s'est produit le choc, parmi les 600 qui forment l'échantillon. ⇒ Nl(LL) est la concentration de lacunes qui se trouvent dans la couche LL. ⇒ Dl est le coefficient de diffusion déterminé par ajustement numérique. Cette valeur peut se décomposer en deux facteurs Dlr et α. Dlr est le coefficient réel de diffusion de lacunes d'éléments III et α est une constante qui permet de minimiser le coefficient de diffusion D(LL). En effet, le calcul de la concentration en lacune Nl(LL) suppose que les atomes sont au repos à 0 K et qu’il n’y a pas, par conséquent, de recombinaison possible entre interstitiel et lacune. Ce calcul est donc trop optimiste. Une partie de la concentration Nl(LL) intervient aussi dans la création des lacunes d'éléments V qui vont contribuer à 106 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS l'autodiffusion de l'arsenic. La méthode qui est utilisée ne permet pas de différentier ces deux termes. Quand l'ion a perdu toute l'énergie nécessaire à son déplacement dans le solide, les modifications subies par l'échantillon peuvent être estimées. Ces modifications sont : • l'abrasion de la couche de surface, • la diffusion lacunaire des atomes du solide. IV.6. LA PROCEDURE ABRASION Cette procédure doit fournir la même information que pour une analyse SIMS afin que le profil simulé soit directement comparable au profil expérimental. Les atomes éjectés qui sont représentatifs, comme les ions secondaires, de la structure de l'échantillon, vont être stockés en fonction de l'épaisseur abrasée et de leur masse. Auparavant, il faut tenir compte de l'érosion de l'échantillon par le passage d'un ion incident. Le taux de pulvérisation globale défini précédemment par : (68) S= nombre d' atomes éjectés nombre de particules incidentes doit être réajusté pour une cible comprenant plusieurs éléments. Cette évaluation s'effectue en fonction de leur taux individuel de pulvérisation S(i) au prorata de chaque élément dans chacune des 600 couches. Si T(i) est le pourcentage de l'élément "i" dans la couche de surface, son taux de pulvérisation dans la cible, noté Y(i) est : (69) Y(i) = S(i) . T(i) 107 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS L'épaisseur abrasée sur la couche de surface est donnée en fonction de la dose par : Dose . (70) épaisseur = 5 ∑ Y(i) . M(i) 1 N.ρ ♦ "Dose" représente la fluence d'un ion incident en at/cm² (cf. note 5). ♦ N est le nombre d'Avogadro en at/Mol. ♦ Y(i), le taux individuel de pulvérisation de l'élément -i-, est sans unité. M(i) est exprimé en g/Mol. ♦ ρ, la densité atomique, est en g/cm3. ♦ "épaisseur6" est donc donnée en "cm". Une fois calculée l'épaisseur abrasée par un ion, en réalité un paquet d'ions, nous utilisons la procédure "abrasion" pour stocker les atomes pulvérisés dans un tableau de données. Ces ions, stockés dans le temps, sont typiquement représentatifs des ions secondaires émis lors d'une analyse SIMS. Les résultats sont obtenus directement en pourcentage. Ces informations collectées, la nouvelle organisation de l'échantillon est calculée en résolvant l'équation de Fick. 6 Corrections apportées par rapport à la version TRIMDYN : le calcul de l'épaisseur abrasée de la couche virtuelle "j" tient compte de la dose apportée par l'ion incident. Si cette couche est entièrement abrasée par l'ion incident, TRIMDYN garde la valeur de la dose pour calculer l'abrasion de la couche suivante "j+1". Dans SIMSDIFF, la dose restante est calculée après l'abrasion de la couche "j" et elle est utilisée pour le calcul de l'abrasion de la couche "j+1". 108 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS IV.7. LA PROCEDURE METHODE EXPLICITE Le but de cette procédure est de résoudre numériquement l'équation (71) qui n'a pas de solution analytique. ∂C( x , t ) ∂ ∂C( x , t ) = DGa ( x ) ∂t ∂x ∂x (71) Ce calcul s'effectuant, dans le temps, à chaque fois qu'un ion a fini son trajet à travers la cible, on supposera que ce parcours s'effectue durant un temps constant "dt". Pour cela, les "pas" d'intégration dx et dt sont pris constants. La méthode de résolution numérique utilisée est la méthode explicite décrite dans le "Numerical Recipes" [7]. Elle fonctionne de la façon suivante. L'échelle des temps est représentée par les indices "j", celle des profondeurs par les indices "i". La dérivée de la concentration C par rapport au temps s'écrit : ∂C 1 = (C i, j+1 − C i, j ) ∂t i, j dt (72) et la dérivée seconde par rapport a "x" s'écrit : ∂ 2C 1 (C i −1, j − 2.C i, j + C i +1, j ) = 2 ∂x i, j dx 2 (73) On utilise pour le coefficient de diffusion DGa(x) les notations : (74) D(i,j) = DGa(x) (75) Di+1/2,j = 1/2 [D(i+1,j) + D(i,j)] Avec les notations des équations (72), (73), (74) et (75), l'équation (71) se met sous la forme : 109 Chapitre IV (76) MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS (C i, j+1 − C i, j ) dt = D i+1/2, j (C i+1, j − C i, j ) − D i-1/2, j (C i, j − C i-1, j ) (dx)² Dans cette équation, il est facile d'isoler la valeur Ci,j+1. Connaissant toutes les concentrations à l'instant "j", cette valeur représente la concentration à la position "i" et à l’instant suivant "j+1". La figure IV.9 schématise cette méthode qui revient à calculer le terme à l'instant "j+1" représenté par un point noir, à l'aide des trois termes définis à l'instant précédent "j" et aux trois positions, "i-1", "i" et "i+1". Temps dt Ci,j+1 Ci-1,j j+1 Ci,j j j-1 Ci+1,j dx i-1 i i+1 Profondeur figure IV.9 : Schématisation de la méthode explicite. La condition suivante doit être respectée pour que cette méthode reste stable : (77) (dx)² dt ≤ min i 2Di + 1 / 2 En effet, la valeur Ci,j+1 dépend de l'information des trois points précédents qui eux mêmes dépendent des cinq précédents. On détermine le domaine de stabilité par un triangle où toute l'information nécessaire pour définir convenablement le 110 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS point Ci,j+1 doit être comprise dans le triangle formé par Ci,j+1 Ci-1,j et Ci-1,j. . Cette condition de stabilité est résumée dans la figure IV.10. stable instable Ci,j+1 t ou j } dt Ci,j+1 Ci+1,j Ci-1,j Ci+1,j } } dt Ci-1,j dx } dx X ou i Domaine de définition du point Ci,j+1 (en gris) figure IV.10 : condition de stabilité de la méthode explicite. La méthode est stable : le domaine de dépendance de Ci,j+1 est entièrement compris dans un triangle formé par Ci,j+1 Ci-1,j et Ci-1,j. La méthode devient instable si le triangle formé par Ci,j+1 Ci-1,j et Ci-1,j est inclus dans ce domaine Comme "dx" est fixé à 25 Å pour que les 600 couches puissent définir correctement l'épaisseur totale de notre échantillon, la valeur de "dt" doit être ajustée pour remplir la condition de l’équation (77). Cependant, il faut garder à l'esprit qu'une analyse SIMS est gouvernée par la vitesse d'abrasion de l'échantillon. Cette vitesse doit être conservée pour retranscrire correctement le phénomène de diffusion, étroitement lié au temps d'analyse. Pour ce faire, nous recherchons une valeur de la fluence d'un ion telle que : 1. la vitesse de pulvérisation soit identique à la vitesse de pulvérisation fixée par le profil expérimental, 111 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS 2. la valeur de dt déduite puisse satisfaire à la condition de stabilité imposée par la méthode de résolution numérique de l'équation de diffusion. IV.8. LA PROCEDURE DENSITE Ce sous programme a pour but de calculer la nouvelle densité de toutes les couches après un intervalle de temps constant qui correspond à un "pas" de calcul de la procédure de diffusion. Il y a alors réarrangement des atomes de gallium et d'aluminium. La perturbation induite par les défauts créés au cours de l'irradiation, ainsi que la dose implantée qui reste faible pour le xénon [12], sont négligées. Le calcul repose sur la connaissance du paramètre de maille de deux éléments, l'AlAs et le GaAs. La loi de VEGARD permet d'extrapoler toutes les valeurs intermédiaires. Nous avons utilisé pour "a", paramètre de maille, les valeurs suivantes données dans [13] et [14] : (78) aAlAs = 5,62 Å (79) aGaAs = 5,6537 Å Les valeurs intermédiaires de "a" pour un pourcentage fixé (1-x) de gallium, qui représente le double de la concentration réelle dans une structure AlxGa(1-x)As, se déduisent par la relation : a(1-x) = (5,6537-5.62)*(1-x)+5,62 (80) Une maille d'AlxGa(1-x)As comporte 4 atomes d'arsenic et 4 atomes représentant l'aluminium et le gallium. Plus généralement, le calcul de la masse MTotale peut s'écrire : 112 Chapitre IV (81) MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS MTotale = 4 . (MAs + x . MAl + (1-x) . MGa) MAl, MGa et MAs représentent les masses molaires des différents éléments. Le calcul de la densité, avec N le nombre d'Avogadro, devient : ρ = MTotale/(a3 . N) (82) Le calcul se poursuit jusqu'à ce que l'échantillon soit totalement abrasé. De nombreux tests permettent de vérifier la stabilité de la méthode explicite et de contrôler que les taux d'atomes rétrodiffusés ou transmis ne sont pas trop élevés. IV.9. LE SIMPLEX Les résultats du profil simulé sont ensuite comparés au profil expérimental. Les divers paramètres qui définissent l'échantillon sont ensuite ajustés à l'aide du programme simplex pour minimiser l'écart entre les deux profils. Les itérations se succèdent jusqu'à obtention d'un écart inférieur à une limite préalablement fixée. Cette valeur est atteinte d'autant plus rapidement que le profil estimé est proche du profil expérimental. Le code du programme est donné dans le "Numerical recipes in Fortran" [7]. 113 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS IV.10. CONCLUSION A partir des sources du programme TRIM, nous avons pu, après de nombreuses modifications, établir un "code" capable de modéliser une analyse SIMS. Ces modifications devraient permettre de simuler n'importe quelle analyse d'une structure d'AlxGa(1-x)As. Le calcul de la densité atomique n'est actuellement applicable qu'à ce composé. Nous avons par ailleurs pris l'initiative de ne plus calculer les pertes d'énergie inélastique qui sont négligeables pour les énergies mises en jeux lors d'une analyse SIMS par rapport aux pertes d'énergie élastique. Le temps de calcul en est significativement diminué. Dans le chapitre suivant, nous montrons l’effet prépondérant de la température de l’échantillon sur la résolution en profondeur. Nous remarquons ensuite la corrélation qui existe entre la température de l'échantillon et la vitesse d'abrasion, ce qui met en évidence la diffusion induite par l’irradiation. Nous présentons ensuite diverses analyses ainsi que les modélisations qui leur sont associées. 114 Chapitre IV MODELISATION D'UNE ANALYSE SIMS IV.11. REFERENCES [1] G. PRUDON, Th. Sc. Phy., Lyon, N° 90ISAL0009, (1990). [2] A.V. OPPENHEIM & R.W. SCHAFFER, Digital signal processing, Prentice Hall, (1975). [3] B. PICINBONO, Eléments de théorie du signal, Dunod, (1977). [4] R.A. ROBERTS & C.T.MULLIS, Digital signal processing, Addison Wesley, (1987). [5] J. MAX, Méthodes et techniques de traitement du signal et application aux mesures physiques, Masson, 4eme ed., I et II, (1987). [6] L.E. LUDEMAN, Fundamental of digital signal processing, Harper and Row, New York, (1987). [7] W. H. PRESS et al., Numerical recipes in Fortran, Cambridge University Press, 2nd ed., (1992). [8] EL KHAKANI, Th. Sc. Phys., IN2P3-CNRS, N° 252-90, (1990). [9] J.F.ZIEGLER, J.P. BIERSACK & U. LITTMARK, The stopping and range of ions in solids, Pergamon Press, I, (1985). [10] G.H. KINCHIN and R.S. PEASE, Rep. Prog. Phys., 18, 1, (1955). [11] M.J. NORGETT and al., Nucl. Eng. Design., 33, 50, (1975). [12] E. TAYLOR, Th. Sc. Phy., Grenoble, (1986). [13] H.C. CASEY et M.B. PANISH, Heterostructure Lasers, Quantum Electronics, part B, (1990). [14] P. BARANSKI, V. KLOTCHKOV et I. POTYKEVITCH, Electronique des semiconducteurs, Ed. De Moscou, 2, (1978). 115 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS CHAPITRE V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS 116 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS V. ANALYSES ET RESULTATS Les analyses effectuées au cours de ce travail nous ont permis, dans un premier temps, d’étudier l’influence de la température sur la résolution en profondeur obtenue sur des lasers à cavité verticale et sur des multicouches de niobium/aluminium. Dans un deuxième temps, nous avons validé les simulations de la diffusion assistée par irradiation sur une structure laser appelée Picogiga. V.1. ETUDE D'UN LASER A CAVITE VERTICALE Ces séries d'expériences ont porté sur l'analyse des lasers à cavité verticale étudiés dans le groupe III-V du LETI (CEA Grenoble), spécialiste dans l'étude des structures d'AlGaAs. Le principal intérêt de ce système, appelé VCSEL (Vertical Cavity Surface Emitting Laser), est une émission perpendiculaire à la surface qui permet l'interconnexion d'une multitude de lasers, par un réseau de fibres optiques. Ces lasers, réalisés par la technique EJM (Epitaxie par Jet Moléculaire), sont constitués d'une série de couches d'AlGaAs et de AlAs, d'épaisseur optique λ/4, formant les miroirs de Bragg, puis de trois puits quantiques de GaAs situés dans la cavité formant le laser puis de nouveau de multicouches formant les miroirs de Bragg. L'échantillon qui nous a été proposé est en réalité un demi laser, c'est-à-dire qu'il se compose d'une succession de couches constituant le miroir de Bragg, des trois puits quantiques et d'une couche d'AlGaAs. La figure V.1 montre cet échantillon noté échantillon-2. Cette structure a été analysée à différentes températures d'abrasion pour étudier l'influence de ce paramètre sur la résolution en profondeur. Nous utilisons un faisceau d'ions primaires Xe+ accélérés à 9,5 keV et du chlore est soufflé en surface. L'axe de la colonne primaire fait un angle de 45° avec la normale au porte échantillon. L'échantillon est porté à 4500 Volt ce qui va décélérer le faisceau 117 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS primaire. Il atteint l'échantillon avec une énergie d'impact de 5 keV et un angle d'incidence de 77° comme le montre la figure de conversion du chapitre II. Cavité Miroir inférieur Epaisseur (Å) X (AlxGa(1-x)As) AlGaAs ≈ 945 0,16 GaAs AlGaAs GaAs AlGaAs GaAs AlGaAs 45 80 45 80 45 0 0,16 0 0,16 0 ≈ 420 0,16 AlGaAs ≈ 570 0,16 AlAs ≈ 700 1 x 25 figure V.1 : détail de l'échantillon-2 : demi-laser à cavité verticale. V.1.1. ANALYSE A TEMPERATURE AMBIANTE Le profil de cet échantillon à température ambiante est représenté dans la figure V.2. La calibration de la profondeur n'a pas été réalisée pour laisser apparaître le temps d'analyse, primordial pour en tirer les conséquences qui vont suivre. La calibration de la dose n'a pas non plus été effectuée, car elle apporte peu d'information. Nous avons suivi, dans cette analyse, le signal du gallium et celui de l'aluminium. Les multicouches qui composent les miroirs de Bragg se distinguent nettement. Par contre, il est impossible de définir les positions exactes des 3 puits quantiques. Dans tous les profils présentés par la suite sur cet échantillon, la zone de transition visible au début des analyses est un artefact dû à un redépôt d'aluminium. 118 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Ga Al Position des 3 puits quantiques Artefact figure V.2 : Profil de l'échantillon-2 effectué sous faisceau d'ions Xe+ avec une énergie d'impact de 5 keV et un angle d'incidence de 77°. La zone de transition en début de profil est un artefact lié à un effet de mémoire décrit dans la figure V.3. 1- ions primaires 2- atomes issus des régions voisines du fond de cratère se redéposant sur la lentille à immersion 2'- neutres se déposant sur la lentille à immersion 3- particules initialement déposées sur la lentille à immersion pulvérisées par des particules secondaires de haute énergie 4→4' dépôt direct de neutres sur la suface depuis les bords du cratère. 1 2 Lentille à immersion 2' 4' 2 2' 4 3 Aire analysée Aire irradiée figure V.3 : effet de mémoire dû à un dépôt sur la lentille à immersion (particule 3) ou à un dépôt sur l'échantillon lors d'une analyse précédente (particule 4'). Cet effet crée un artefact en début d'analyse. 119 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS L'aluminium peut avoir été initialement déposé sur la lentille à immersion puis être pulvérisé par des particules secondaires de haute énergie comme le montre l'exemple 3 de la figure V.3. Quand la lentille est "nettoyée" par la pulvérisation, l'effet diminue. L'aluminium peut aussi provenir de neutres déposés en surface lors d'une analyse précédente et qui sont analysés par la suite si la nouvelle pulvérisation est proche du cratère précédent (exemple 4→4' de la figure V.3). Dans le but d'étudier les effets de la température de l'échantillon sur la résolution en profondeur7, cette analyse a été reprise à plus basse température. V.1.2. ANALYSES A BASSE TEMPERATURE Des analyses complètes de l'échantillon-2 ont été effectuées tous les 10°C. Les résultats les plus significatifs sont reproduits par la figure V.4 et la figure V.5. La figure V.4 présente les profils d'aluminium et de gallium de l'échantillon-2 à -50°C. La distinction des puits quantiques commence à apparaître, ce qui prédit une augmentation de la résolution en profondeur. Plus la température de l'échantillon baisse et plus la résolution des profils s'améliore. 7 La résolution en profondeur est déterminée en mesurant la largeur prise entre deux bornes, fixées au préalable, de l'analyse d'une marche de concentration. Les bornes sont habituellement [10 %-90 %] de la concentration ou encore [16 %-84 %]. C'est une convention. Il faut pour cela que le profil soit calibré en profondeur et en concentration. Dans le cas présent, il est toujours possible d'estimer la résolution en profondeur en regardant la définition des puits quantiques. Pour l'échantillon de niobium/aluminium, l'augmentation de l'amplitude des multicouches donne une idée de l'amélioration de la résolution en profondeur. % 100 90 84 16 10 0 x R[0,84-0,16] R[0,9-0,1] 120 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Ga Al Apparition des puits quantiques figure V.4 : étude du demi-laser à -50°C, effectuée sous xénon avec une énergie d'impact de 5 keV et un angle d'incidence de 77°. les puits quantiques commencent à apparaître sur le profil d'aluminium. Ga Al Puits quantiques figure V.5 : étude du demi-laser à -100°C, effectuée sous xénon avec une énergie d'impact de 5 keV et un angle d'incidence de 77°. Les 3 puits quantiques sont visibles sur le profil d'aluminium. 121 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS A -100°C (figure V.5), les 3 puits quantiques sont totalement visibles. Il y a donc une corrélation entre la température de l'échantillon, lors de l'analyse, et la résolution en profondeur ! Sur les échantillons de type III-V, la résolution en profondeur dépend inversement de la température. En fait, cet aspect avait déjà été remarqué lors de l'analyse de simples puits quantiques dans des échantillons similaires, ce qui a d'ailleurs motivé la conception d'une régulation en température performante pour pouvoir mieux étudier ce phénomène. Une limite a cependant été atteinte à -170°C. Bien que la définition des trois puits quantiques soit très bonne (figure V.6) par rapport à la figure V.5, la vitesse d'abrasion a brusquement diminué. Le temps de manipulation est augmenté d'un facteur 5 ce qui est préjudiciable. Al Al figure V.6. : profil d'aluminium réalisé à -170°C avec soufflage de chlore. Le temps d'analyse pour atteindre les puits quantiques a augmenté d'un facteur cinq, la vitesse de pulvérisation a donc diminué. A très basse température, le soufflage de chlore ralentit la vitesse d'érosion sans diminuer la résolution en profondeur. L'explication est la suivante. La température de liquéfaction du chlore est de -34,05°C, et sa température de solidification se situe à -100,99°C [1]. Par conséquent, à -170°C, il se forme une couche solide de chlore sur la surface de l'échantillon qu'il faut abraser. Si le 122 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS soufflage est trop intense, cette couche croît continuellement. Une limite peut être atteinte où il n'est plus possible de l'éroder. Si le soufflage de chlore est arrêté à très basse température (figure V.7), le chlore résiduel dans l'enceinte et en surface de l'échantillon suffit à favoriser l'émission ionique : le profil obtenu est correct. Al figure V.7 : analyse sans soufflage de gaz réactif (chlore) à -170°C. La vitesse d'érosion augmente, comparée à l'analyse à même température, mais avec soufflage de chlore. V.2. ETUDE DE MULTICOUCHES DE NIOBIUM/ALUMINIUM Nous avons ensuite étudié des multicouches de niobium/aluminium. Pour ce composé métallique, l'émission ionique est favorisée par un soufflage d'oxygène. Or, les températures de liquéfaction et de solidification sont bien plus basses que pour le chlore. La température de liquéfaction se situe à -182,97°C et celle de solidification à -222,8°C [1]. De grandes variations de vitesse de pulvérisation comme celles de la figure V.6 ne devraient plus être observées. 123 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Cet échantillon est défini comme suit : sur un substrat de silicium sont déposées successivement des couches de 60 Å de niobium puis d'aluminium. La couche de surface est du niobium pour éviter l'oxydation de l'échantillon. La figure V.8 représente la structure de l'échantillon-3. Epaisseur (Å) X4 Nb 60 Al 60 Nb 60 Substrat figure V.8 : multicouches de niobium/aluminium. L'épaisseur de chaque couche est de 60 Å. Les conditions d'analyse sont différentes de celles de l'échantillon-2 car les épaisseurs à analyser sont bien plus faibles (60 Å). Le faisceau d'ions incidents est neutralisé pour limiter les effets de mixage collisionnel. L'énergie des neutres est de 3 keV. L'angle d'impact (45°) est fixé par l'angle de la colonne primaire puisque les neutres ne sont pas déviés par le potentiel d'extraction des ions secondaires. Le gaz réactif est de l'oxygène. Les profils présentés par la suite ne sont pas calibrés pour faire apparaître les vitesses de pulvérisation et permettre ainsi les interprétations qui suivront. Nous présentons trois profils effectués à différentes températures : 25°C (figure V.9), -100°C (figure V.10) et -175°C (figure V.11). 124 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Al A25 Nb figure V.9 : étude de multicouches de niobium/aluminium sous bombardement xénon à 3 keV. A25 représente l'amplitude de la troisième couche de niobium (cf. note 7 page120). L'échantillon est à température ambiante. Al A25 Nb A-100 + 10% figure V.10 : analyse à -100°C de multicouches de niobium/aluminium de 60 Å d'épaisseur. L'amplitude du niobium augmente de 10 % par rapport à l'analyse effectuée à température ambiante (A25). 125 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Al A25 A-175 + 30% Nb figure V.11 : analyse à -175°C de multicouches de niobium/aluminium de 60 Å d'épaisseur. L'amplitude du niobium augmente de 30 % par rapport à A25 de l'analyse effectuée à température ambiante. Plus la température de l'échantillon diminue, plus l'amplitude du niobium augmente. Cette augmentation atteint 30 % sur l'amplitude de la troisième couche de niobium à -175°C par rapport à l'analyse effectuée à 25°C. Cela donne une information suffisante pour conclure qu'il y a un accroissement de la résolution en profondeur. Comme nous en avions fait l'hypothèse, les températures atteintes ne suffisent pas à liquéfier, et par conséquent à solidifier l'oxygène soufflé en surface. Il n'y a pas de changement important, par rapport à l'analyse sous chlore de la figure V.6, de la vitesse de pulvérisation. Avec cette structure de niobium/aluminium, nous pouvons énoncer la même remarque que pour l'échantillon-2, la résolution en profondeur augmente quand la température de l'échantillon analysé diminue. 126 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS V.3. INTERPRETATIONS Nous avons représenté les 3 profils de l'échantillon-2 sur un même graphe, figure V.12 et les 3 profils de l'échantillon-3 dans la figure V.13. Seul le niobium est représenté par souci de clarté. En étudiant précisément les différents profils réalisés, on s'aperçoit que non seulement la résolution augmente, mais que la vitesse d'abrasion augmente également8. Ces résultats sont tout à fait cohérents avec ceux de l'analyse de l'échantillon-1. La résolution en profondeur est liée à la vitesse de pulvérisation de l'échantillon via la température de celui-ci. 25°C -50°C -100°C figure V.12 : les 3 profils d'aluminium de l'échantillon-2 sont reproduits sur ce graphique. On en déduit que la vitesse d'analyse augmente quand la température diminue. 8 Cet effet ne peut être observé que si les profils ne sont pas calibrés en profondeur. 127 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS -100°C 25°C -175°C figure V.13 : les 3 profils de niobium de l'échantillon-3 sont reproduits sur ce graphique. On en déduit que la vitesse d'analyse augmente quand la température diminue. L'augmentation de la vitesse d'abrasion quand on refroidit l'échantillon a une l'explication suivante. Quand la température baisse, la tension de vapeur du gaz réactif augmente et il vient se condenser en surface de l'échantillon qui joue le rôle de piège froid. Il y a alors, avec soufflage de chlore sur l'échantillon d'AlGaAs, formation de composés comme Ga+Cl3-, AlCl2 dont les liaisons chimiques avec le matériau sont plus faibles. Ces composés vont mieux s'abraser et le taux de pulvérisation va augmenter. L'explication pour l'oxygène est plus délicate car l'oxygène soufflé se combine avec les éléments de la couche de surface. Il y a augmentation du volume. La couche de surface est alors définie sur une plus grande épaisseur ce qui en améliore la résolution mais diminue la vitesse d'abrasion [2]. L'électronique de l'IMS300 datant d'une vingtaine d'années, il a déjà été observé des fluctuations de densité de courant primaire ce qui apporterait une explication mais qui n'est pas vérifiable. Nous ne pouvons pourtant que constater dans cet exemple, que la vitesse de pulvérisation a bien augmenté. 128 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Ces résultats sont en parfait accord avec les expériences qui ont motivé cette recherche (cf. chapitre III). Dans une première approximation, on admet que la température n'influe que sur la vitesse d'érosion de l'échantillon. Donc pour ces analyses, la résolution en profondeur est liée au temps de manipulation. Les observations sont cohérentes avec l'hypothèse émise dans le troisième chapitre stipulant que la dégradation des profils est due à la diffusion des lacunes de gallium lors de l'irradiation. Le profil de la figure V.6 ayant une vitesse d'abrasion très faible, les effets de diffusion auraient dû se faire davantage ressentir. Mais le gonflement de la couche de surface par solidification du chlore vient perturber cette interprétation. De plus, la lacune simple est mobile vers 100 à 150 K (-170 à -120°C) [3] ce qui laisse présumer que le phénomène de diffusion n’intervient plus à -170°C. V.4. PROFILS ET SIMULATIONS D'UN ECHANTILLON D'AlGaAs Une série d'analyses a été effectuée et simulée pour vérifier si l'hypothèse de la diffusion assistée par irradiation d'un faisceau d'ions peut expliquer, à elle seule ou tout au moins en grande partie, la distorsion des profils. Pour la suite de ce travail, nous disposons d'une structure assez complexe d'AlGaAs. L'échantillon-4 a été choisi pour différentes raisons que voici. Dans un premier temps, l'étude de cet échantillon a fait l'objet d'un travail de recherche récent [4], ce qui nous a permis de disposer de nombreux échantillons. D'autre part, il a été caractérisé au sein de notre laboratoire, ce qui nous donne accès à différentes autres mesures pour vérifier les résultats à venir, comme par exemple des images de microscopie électronique. Cet échantillon a servi de structure témoin pour réaliser un laser à semiconducteur. C'est une structure à base de AlGaAs/GaAs qui a été réalisée pour le LETI par le fabriquant "Picogiga". Le mode de fabrication est l'Epitaxie par Jets Moléculaires. Ce produit, appelé PG159 possède les spécifications suivantes : 129 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Epaisseur (Å) x (AlxGa(1-x)As GaAs non dopé 50 0 AlGaAs non dopé 1500 AlGaAs non dopé 2000 0.50 0.45 0.45 0.20 x5 GaAs non dopé 100 AlGaAs non dopé 2000 AlGaAs non dopé 8000 0.50 1000 0 / 0.50 GaAs non dopé 100 Å AlGaAs non dopé 100 Å 0 0.20 0.50 substrat figure V.14 : structure de l'échantillon PG159 donné par le fabriquant "Picogiga". Seules les analyses de l'échantillon-4, dont la masse d'arsenic a aussi été enregistrée, peuvent être calibrées dans le but d'être comparées à la modélisation. L'explication en est très simple. Le pourcentage d'arsenic dans cet échantillon est constant et fixé à 50 % du nombre d'atomes qui forment une maille élémentaire. Son signal en SIMS doit donc être constant. Si, par hasard, la source d'ions incidents était instable dans le temps, le signal de l'arsenic reproduirait cette instabilité. Il suffit alors de "diviser" les signaux d'aluminium et de gallium par celui de l'arsenic pour corriger cette dérive. 130 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS V.4.1. DENOMINATION DES PROFILS DU PG159 Par la suite, nous appellerons "profil expérimental-4" toute analyse SIMS de l'échantillon-4, à différentier du "profil estimé-4" que nous allons présenter tout de suite et des "profils simulés-4" et "profils ajustés-4" que nous détaillerons avec la simulation. Cette dénomination a pour objectif de simplifier la compréhension du chapitre en gardant une écriture homogène avec celle des profils présentés dans le chapitre IV. Le "profil estimé-4" est le profil de l'échantillon tel que défini dans la figure V.14. C'est le profil théorique du PG159. Dans la suite de ce chapitre, seuls les profils d'aluminium seront représentés. Les profils d'arsenic sont constants avec une teneur de 50 % et ceux de gallium se déduisent des profils d'aluminium pour que la somme des deux concentrations atomiques soit aussi de 50 %. La figure V.15 reproduit le profil estimé d'aluminium du PG159. Aluminium 30% 20% Aluminium 10% 0% 0 2000 4000 6000 8000 10000 Profondeur en Å 12000 14000 16000 figure V.15 : profil estimé de l'aluminium dans l'échantillon-4 d'AlGaAs de Picogiga. Pour appliquer la méthode du simplex, décrite dans le quatrième chapitre, on introduit le "profil ajusté-4" qui est paramètré. Les paramétres a, b, c, d, e, f, g, h et i 131 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS sont explicités sur la figure V.16. Les valeurs initiales de ces paramètres sont déduites du "profil estimé-4" de la figure V.14. Ils sont ensuite modifiés par le simplex pour que la simulation de l'analyse du "profil ajusté-4" corresponde au plus près au "profil expérimental-4". La simulation a donc deux effets : 1- déterminer si le modèle, fondé sur la diffusion assistée par irradiation, représente bien l'analyse SIMS. 1- permettre de revenir aux paramètres exacts de l'échantillon. Epaisseur (Å) x5 x (AlxGa(1-x)As GaAs non dopé a AlGaAs non dopé b AlGaAs non dopé c GaAs non dopé d AlGaAs non dopé e AlGaAs non dopé f 0.50 GaAs non dopé g Å AlGaAs non dopé h Å 5 x (g+h) 0 / 0.50 0 0.50 0.45 0.45 i 0 i 0.50 substrat figure V.16 : Détail du profil ajusté-4. Les huit paramètres a-h représentent des épaisseurs et i est proportionnel au pourcentage d'aluminium. Ils sont déterminés par le simplex. L’analyse SIMS a été effectuée sous bombardement xénon à 3 keV avec un angle d'incidence de 45°. A cette énergie, le faisceau d'ions est neutralisé afin qu'il 132 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS puisse atteindre l'échantillon sans être dévié par le champ d'extraction. Le "profil expérimental-4" est représenté dans la figure V.17. 30% Aluminium 25% 20% 15% Profil expérimental 10% 5% 0% 0 2000 4000 6000 8000 10000 12000 14000 16000 Profondeur (Å) figure V.17 : profil expérimental de l'aluminium réalisé sur l'échantillon-4 effectué sous neutres xénon à 3 keV à température ambiante et avec une vitesse d'érosion de 1,08 Å/s. V.4.2. SIMULATION DE L'ANALYSE DU PG159 Nous disposons du "profil estimé-4" comme condition initiale de la simulation ainsi que du "profil expérimental-4". L'objectif est de déterminer le "profil ajusté-4" à l'aide du simplex. Pour cela nous allons effectuer le "profil simulé-4" qui sera comparé au "profil expérimental-4". Les données initiales sont les suivantes : • l'énergie primaire est de 3keV pour des atomes neutres de Xe, • l'angle d'incidence est de 45°, • le profil initial est donné par le profil estimé-4 de la figure V.15, 133 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS • le taux de pulvérisation, sans dimension, est de 5,68 pour Al et Ga. Il est de 5,8 pour As9, • la vitesse de pulvérisation est de 1,08Å/s. La simulation du profil du PG159, après ajustement des paramètres, donne les résultats de la figure V.18. Un agrandissement de cette figure au niveau du puits quantique est représenté sur la figure V.19. Echantillon-4 30% Aluminium 25% 20% 15% Profil expérimental Profil simulé 10% 5% 0% 0 2000 4000 6000 8000 10000 Profondeur (Å) 12000 14000 16000 figure V.18 : profil SIMS (profil expérimental effectué à température ambiante) comparé au profil modélisé de l'échantillon PG159 à une vitesse d'érosion de 1,08 Å/s. La simulation est en bon accord avec l'analyse sauf pour la résolution des cinq puits quantiques. L'accord entre les deux profils est excellent pour la définition du puits quantique ainsi que des pentes des deux gradients d'indice. La simulation de l'analyse du puits quantique, tel qu'il est représenté par le profil estimé-4 (figure V.15), par une fonction de résolution équivalente à la distribution de Dirac 9 Ces trois taux de pulvérisation ont été obtenus à l'aide du programme TRIM en mode abrasion. Ils peuvent être retrouvés en mesurant le courant d'ions lors d'une expérience et après avoir estimé le nombre d'atomes pulvérisés (par mesure du volume abrasé). Ce calcul pour des ions 10 keV donne une valeur très proche de celle de TRIM. Pour des neutres, le courant ne peut pas être mesuré. Nous utilisons donc les valeurs calculées par TRIM. 134 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS devrait également donner un puits aux bords carrés. L'observation de la figure V.19 montre que la diffusion assistée suffit à expliquer la distorsion du profil à cet endroit (puits aux bords évasés). Echantillon-4 (1.08 Å/s) 20% 18% 16% Aluminium 14% 12% 10% 8% Profil expérimental 6% Profil simulé 4% 2% 0% 3500 3700 3900 4100 4300 4500 4700 4900 Profondeur (Å) figure V.19 : agrandissement de l'analyse du puits quantique. Le profil d'aluminium simulé s'accorde bien avec le profil expérimental. Au niveau des 5 puits quantiques, il existe une discordance entre le profil expérimental et le profil simulé. La concentration en aluminium fixée pour alléger le temps de calcul peut expliquer ce désaccord. Le simplex n'a donc pas pu estimer une nouvelle valeur pour la concentration en aluminium. Pour des raisons évidentes de coût, il n'a pas toujours été possible de disposer de la partie centrale des plaquettes, le meilleur morceau étant conservé pour réaliser le laser. On peut donc supposer que la définition de ces puits est moins bonne que prévue ou que la dose en aluminium est différente de celle donnée par le profil estimé-4. 135 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Les dimensions exactes de la simulation sont données par le profil ajusté. Ce profil est représenté sur la figure V.20 ainsi que le profil estimé. Il apparaît clairement un désaccord entre le profil estimé-4 qui, rappelons-le, sont celles évaluées lors de l'élaboration de l'échantillon et le profil ajusté-4 tant du point de vue de la concentration que de l'échelle des profondeurs. Aluminium 30% Echantillon-4 20% Profil ajusté Profil estimé 10% 0% 0 2000 4000 6000 8000 Profondeur en Å 10000 12000 14000 figure V.20 profil ajusté d'aluminium obtenu par la méthode du simplex. Des écarts importants de concentration et d'épaisseur sont visibles. La largeur du puits quantique est presque le double de celle prévue par l'estimation et la zone de 0,8 µm est diminuée de 25 %. Toutes les valeurs des paramètres sont données dans le tableau V.1. Le coefficient de diffusion des lacunes d'éléments III a été calculé par la modélisation pour que le profil simulé soit en accord avec le profil expérimental. Ce coefficient est de 2,3.10-14 cm²/s et celui d'interdiffusion du gallium avec l'aluminium est en moyenne de 3,6.10-16 cm²/s. Pour avoir une idée de l'importance du phénomène de diffusion assistée par l'irradiation, ce coefficient d'interdiffusion est du même ordre de grandeur que celui d'autodiffusion du gallium dans le GaAs, pour une température de 1250 K [5]. 136 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Paramètres Valeurs estimées Valeurs ajustées a 50 Å 75 Å b 1500 Å 2775 Å c 2000 Å 1400 Å d 100 Å 175 Å e 2000 Å 1575 Å f 8000 Å 5975 Å g 100 Å 75 Å h 100 Å 100 Å i 0.2 0.28 tableau V.1 : tableau récapitulatif des différents paramètres ajustés lors de la simulation. Les valeurs obtenues sont pour la plupart très différentes de celles estimées. V.4.3. ANALYSE PAR LA MICROSCOPIE A TRANSMISSION (MET) Pour tenter de comprendre les écarts observés entre les valeurs estimées et celles ajustées de l'échantillon-4, il a été entrepris des observations par microscopie MET. Le gradient d'indice n'est pas détectable par cette méthode. Elle ne peut en aucun cas aider à la détermination des valeurs de b, c, e, f et i (figure V.16). Seule la détermination des épaisseurs a, (b+c), d, (e+f), g et h sont visibles. L'échantillon a donc été préparé, c'est-à-dire aminci et poli, pour être étudié en microscopie MET par C. VANNUFFEL (LETI/DOPT CEA-Grenoble). L'image de la coupe de cet échantillon est représentée par la figure V.21 où le profil ajusté est superposé. Les parties sombres représentent une faible dose d'aluminium. 137 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Al Profil ajusté 25% 20% 15% 10% 5% 0% 0 2000 4000 6000 8000 10000 12000 Profondeur (Å) Colle Image MET figure V.21 : image MET de l'échantillon-4 comparée au profil d'aluminium ajusté. Les valeurs des paramètres a, (b+c), d, (e+f), g et h trouvées par la simulation peuvent être validées par cette méthode. Il apparaît visiblement sur cette figure que les valeurs de a, (b+c), d, (e+f), g et h déterminées par la simulation sont tout à fait exactes. Pour valider le modèle, nous allons effectuer une comparaison des effets de diffusion avec différentes vitesses d'érosions. V.4.4. EFFET DE LA VITESSE DE RESOLUTION EN PROFONDEUR PULVERISATION SUR LA L'étude de l'échantillon-4 est reprise à la même température, avec des atomes neutres de xénon 3 keV, mais une vitesse de pulvérisation inférieure. Cette différence provient tout simplement d'une variation du courant primaire qui ne peut pas être contrôlée sur l'IMS300. Le temps de manipulation étant augmenté, l'effet de 138 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS la diffusion doit davantage se faire ressentir. C'est ce que montre le profil SIMS de la figure V.22 qui représente un agrandissement de l'analyse, au niveau du puits quantique, effectuée à une vitesse de pulvérisation de 0,57Å/s. Echantillon-4 (0.57 Å/s) 20% 18% 16% Aluminium 14% 12% 10% 8% Profil experimental 6% Profil simulé 4% 2% 0% 3500 3700 3900 4100 4300 4500 4700 4900 Profondeur (Å) figure V.22 : profils expérimental et simulé d'aluminium réalisés sous neutres xénon à 3 keV à température ambiante avec une vitesse d'érosion de 0,57 Å/s. Les bords du puits quantique sont évasés. La simulation est en accord avec l'expérience. La simulation à l'aide du programme SIMSDIFF représente bien l'effet de diffusion. La définition des bords du puits quantique est plus évasée : il y a dégradation du profil ! Dans le cas de cette deuxième simulation, le programme retourne les mêmes paramètres pour le profil ajusté que ceux donnés dans le tableau V.1 ce qui montre que, quelle que soit la vitesse d'abrasion, il est possible par la méthode du simplex de remonter aux paramètres réels (profil ajusté) de l'échantillon. Pour effectuer la comparaison avec l'analyse précédente, les profils des deux simulations sont représentés sur la figure V.23. La dégradation du profil augmente 139 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS avec la profondeur analysée10. Cela n'est dû ni au mixage atomique, ni à la formation de cône de cratère puisque la modélisation ne les prend pas en compte. Par contre, les atomes des couches les plus profondes ont un temps imparti de diffusion supérieur à celui des atomes des couches de surfaces ce qui explique la dissymétrie du puits quantique. La diffusion pour ces atomes s'opère de façon plus longue ce qui explique la dissymétrie du profil. Echantillon-4 18% 16% 14% Aluminium 12% 10% 8% 6% 4% 1,08 Å/s 0,57 Å/s 2% 0% 3700 3900 4100 4300 4500 4700 Profondeur (Å) figure V.23 : comparaison des deux profils d'aluminium simulés effectués à deux vitesses de pulvérisation. Quand la vitesse diminue, le profil se dégrade. Nous finirons donc cette discussion en montrant une représentation (figure V.24) de plusieurs simulations effectuées sur l'échantillon-4 à différentes vitesses d'abrasion. Au dessus de 5 Å/s, la définition du puits quantique est acceptable. En dessous de cette valeur, la résolution se dégrade. Aucune 10 Le bord droit du puits quantique de l'analyse effectuée à 0,57 Å/s, est moins abrupt que le bord gauche. 140 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS interprétation ne peut être déduite d'un profil réalisé avec une vitesse de pulvérisation inférieure à 0,5 Å/s. Simulation échantillon-4 20% 18% 16% Aluminium 14% 12% 10% Al Al Al Al Al 8% 6% 4% (20 Å/s) (5 Å/s) (1,08 Å/s) (0,57 Å/s) (0,2 Å/s) 2% 0% 3500 3700 3900 4100 4300 4500 4700 4900 5100 Profondeur (Å) figure V.24 : représentation de diverses simulations effectuées à différentes vitesses de pulvérisation. Plus la vitesse diminue, plus le profil se dégrade. V.4.5. EFFET DE L'ENERGIE PRIMAIRE SUR LA RESOLUTION EN PROFONDEUR D'autres analyses ont été effectuées sous faisceau d'ions primaires xénon avec une énergie d'impact de 5,5 keV et un angle de 72°. Ces profils, dont le signal d'arsenic n'avait pas été enregistré, ne peuvent pas être modélisés ni calibrés en concentration. La figure V.25 compare le profil effectué à 25°C avec celui réalisé à 3 keV et une vitesse de pulvérisation de 0,57 Å/s. 141 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS 3 keV Al 5,5 keV figure V.25 : profils d'aluminium effectués à deux énergies d'impact. La résolution à 5,5 keV est nettement meilleure que celle obtenue à 3 keV, et ce pour une même température de l'échantillon (25°C). Sur cette figure, on constate que la résolution est bien meilleure à 5,5 keV. Pour cette analyse, la vitesse de pulvérisation relevée est de 5 Å/s contre 0,57 Å/s à 3 keV. Le résultat était prévisible pour deux raisons : • la résolution augmente avec la vitesse d'abrasion, • la résolution augmente avec l'angle d'impact qui est de 72° à l'énergie d'impact de 5,5 keV et de 45° à 3 keV [6]. Néanmoins, les effets du mixage collisionnel sur la résolution sont plus néfastes à 5,5 keV qu'à 3 keV ce qui va à l'encontre des deux remarques précédentes. L'observation de la figure V.25 permet d'en déduire que le mixage collisionnel a peu d'incidence sur la résolution en profondeur, tout du moins à ces énergies. 142 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS V.5. CONCLUSION Pour toutes les modélisations, la fonction de transfert de l'appareillage a été assimilée à la distribution de Dirac. Ainsi, dans le cas d'un puits quantique à bords abrupts et dans lequel la concentration d'aluminium est nulle, le profil SIMS doit également présenter les mêmes caractéristiques. Or ce n'est pas le cas, les bords du puits quantique sont évasés et le pourcentage d'aluminium varie entre 2 et 6 %. Plusieurs raisons peuvent en être la cause : 1. la fonction de transfert de l'appareillage pourrait ne pas être du tout assimilable à la distribution de Dirac. Le profil réalisé sur une monocouche atomique de chrome déposée sur silicium nous permet d'écarter cette hypothèse (cf. chapitre IV), 1. l'effet du mixage atomique dû aux atomes de recul. Il n'est certainement pas nul, bien que l'analyse de l'échantillon-1 ait montré qu'il n'est pas prépondérant, 1. la formation de cônes de cratères peut également entraîner une détérioration de la résolution. Nous en avons quelquefois observé par Microscopie Electronique à Balayage (MEB) sur des échantillons dont les profils SIMS étaient vraiment de très mauvaise qualité. Pour d'autres profils présentant une résolution moins dégradée, ces cônes n'ont pas été mis en évidence, 1. la diffusion lacunaire assistée par l'irradiation [3], qui a été le seul phénomène que nous avons pris en compte dans notre modélisation. L'accord entre les résultats expérimentaux et ce modèle est remarquable et nous conforte dans le fait que ce mode de diffusion lacunaire est bien le mécanisme prépondérant dans la dégradation de la résolution en profondeur. Par contre, la simulation des cinq puits quantiques situés à plus de 1,2 µm est en désaccord avec l'expérience. Le modèle ne tient pas compte des atomes de recul. 143 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS Or, ces atomes vont créer des sous-cascades de collisions dont les effets vont être plus importants à 1,2 µm qu'à 0,4 µm : 1- Le nombre d'atomes déplacés est plus grand. 1- le nombre de lacunes créées est également plus important. Une évolution future du modèle devrait tenir compte de ces deux remarques. Les résultats présentés dans ce chapitre ont fait l'objet d'une présentation par affiche lors de la conférence internationale COSIRES'96 (COmputer SImulation of Radiation Effects in Solids) à l'Université de Surrey, à Guildford (RU), du 22 au 26 juillet 1996. Une publication a été soumise au mois d'août 1996 dans la revue "Radiation Effects and Defects in Solids". Elle a été acceptée le 18 décembre 1996. 144 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS V.6. REFERENCES [1] "PERIODIC TABLE OF ELEMENTS", Sargent-Welch Scientific company,Illinois, (1979). [2] B. BLANCHARD, Techniques de l'ingénieur, P3, P 2618, 1, (1981). [3] J.C. PFISTER, Th. Sc. Phy., Paris, Sér. A 4401. N°5250, (1964). [4] D. HERVE, Th. Sc. Phy., Grenoble, (1995). [5] LEI WANG et al., Phys. Rev. Let., 76, 13, 2342, (1996). [6] E. TAYLOR, Th. Sc. Phy., Grenoble, (1986). 145 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS CHAPITRE VI CONCLUSION GENERALE 146 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS VI. CONCLUSION GENERALE Ce travail a mis en évidence une notion peu connue en analyse SIMS : la diffusion assistée par l'irradiation. Elle permet d'expliquer entre autres la dégradation des profils réalisés à faible énergie, où le mixage collisionnel des atomes est un phénomène mineur. Le modèle proposé tient compte des défaut créés dans le matériau lors de l'irradiation par un faisceau de particules (neutres ou ions). Il peut simuler l'analyse à faible énergie de n'importe quelle structure d'AlxGa(1-x)Al et en particulier de la structure Picogiga conçue au LETI. La diffusion assistée par l'irradiation du faisceau primaire conduit à une déformation du profil SIMS. La modélisation des analyses nous permet donc de revenir aux paramètres réels de l'échantillon et d'estimer le coefficient de diffusion assisté par l'irradiation. Nous avons pu ainsi montrer que les paramètres étaient assez différents de ceux estimés lors de la fabrication de l'échantillon. Une image de microscopie en transmission a pu valider certaines valeurs de ceux-ci. Pour concevoir ce modèle, nous avons dans un premier temps négligé l'influence du mixage collisionnel. Ensuite, pour faciliter la conception du code de calcul, certaines hypothèses simplificatrices ont été avancées. Leurs justifications ont montré que l'erreur commise avait peu d'influence sur le résultat final. Les principaux avantages de ce programme par rapport au code TRIM qui nous a servi de base sont : - l'intégration du calcul de la diffusion assistée par l'irradiation, - une meilleure définition de la structure de l'échantillon qui est divisé en 600 couches au lieu de trois pour le programme TRIM, - la prise en compte des modifications de la cible causées par la diffusion et la pulvérisation de la couche de surface, 147 Chapitre V ANALYSES, SIMULATIONS ET RESULTATS - la gestion des particules éjectées, permettant ainsi de reconstituer un profil simulé directement comparable à celui de l'expérience, - la modification de paramètres initiaux définissant la structure supposée de l'échantillon pour revenir au profil réel de celui-ci, - l'omission des pertes inélastiques, ce qui augmente considérablement la vitesse d'exécution du logiciel. La modélisation est facilement transposable à l'étude de composés où entrent en jeu des phénomènes d'interdiffusion. Elle peut cependant faire l'objet de nombreuses améliorations. Il faudrait en particulier tenir compte des sous-cascades qui se produisent dans l'échantillon lors du passage d'un ion incident. Cela nécessiterait de reconsidérer le problème à trois dimensions pour suivre le parcours des atomes de recul. Le temps de calcul serait augmenté mais le modèle tiendrait compte du mixage collisionnel. Il serait aussi intéressant d'évaluer plus précisément le taux de création de lacunes, ainsi que leur taux de recombinaison. Bien évidemment, cela impliquerait l'étude approfondie de chaque matériau. Le développement d'un outil graphique sous UNIX apporterait aussi une amélioration pour le traitement des données. Nous pensons ainsi avoir ouvert une voie nouvelle quant à l'interprétation des profils SIMS, en mettant plus particulièrement l'accent sur l'effet de la vitesse de pulvérisation lié à la résolution en profondeur. Cette vitesse pouvant être contrôlée par la température de l'échantillon. 148