Correction du sujet
En quoi la société civile est-elle nécessaire au fonctionnement de la démocratie ?
La vie sociale s’organise de manière spontanée, elle mobilise les citoyens, leur permet d’agir
au travers d’institutions comme les associations, les syndicats, les mouvements sociaux…a priori, la
société civile est éloignée du politique et de l’Etat. Elle apparaît pourtant nécessaire au
fonctionnement de la démocratie. Il suffit d’énoncer ses fonctions pour se rendre compte à quel
point la démocratie a besoin de la société civile : « elle renforce le pluralisme et la représentation des
intérêts, elle agit en faveur d’une démocratie à la fois participative et délibérative, elle forme les
citoyens à l’esprit démocratique et elle exige plus de transparence de la part des élites politiques »
Les organisations qui constituent la société civile représentent les intérêts communs de leurs
membres. Certaines paraissent bien anodines et inoffensives, comme les associations de pêcheurs à
la ligne mais à y regarder de plus près, les pêcheurs ont besoin de poisson qui ont besoin d’une eau
« propre ». Ils sont donc logiquement conduits à lutter contre les responsables des pollutions et à
faire pression pour que le pouvoir politique inscrive cette question à l’agenda politique, c’est-à-dire
s’engagent à la traiter de manière prioritaire. Cet exemple illustre bien l’approche de Tocqueville
(1835, doc1). Le loisir est une toute petite « affaire » qui prend de l’ampleur avec le besoin de
protection du milieu aquatique et débouche sur de grandes affaires politiques comme la défense de
l’environnement dans sa globalité. Sans cette action et sans ces organisations aussi diverses que les
syndicats de salariés (CGT, FSU, SUD cités dans le doc 2) ou les associations de défense des droits de
l’homme LDH, GISTI, Amnesty...) ou encore les mouvements sociaux (les Sans, ATTAC…) de nombreux
groupes sociaux et de nombreux intérêts communs aux membres de ces groupes risquent d’être
ignorés ou négligés. Le cas des « sans-papiers » ou des « sans domicile fixe » est emblématique. Il
s’agit de personnes dépourvues de moyens d’influence mais dont les intérêts sont portés dans
l’espace public par des groupes de pression. Un point de vue s’exprime, il est pris en considération
par le système politique alors que les partis n’en font pas une priorité. Nous pouvons conclure que
les organisations de la société civile élargissent le pluralisme sans lequel la démocratie ne pourrait
pas exister. En ce sens, la société civile est nécessaire au fonctionnement de la démocratie.
La société civile est un mélange d’organisations et de spontanéité. Elle est finalement une
forme particulière de mobilisation des citoyens. Ceux-ci veulent « partout et en tout temps » (Pierre
Mendès France 1962) faire vivre la démocratie et ne pas se contenter de déposer un bulletin dans
une urne tous les 4 ans. La société civile peut être interprétée comme la volonté de participation des
citoyens au moyen de répertoires diversifiés de l’action collective (Charles Tilly, 1978). La remise de
soi (Bourdieu), la dépossession de ses capacités d’action au profit de représentants issus de la classe
politique sont de plus en plus ouvertement contestés. Le mouvement anti globalisation ou
altermondialiste illustre cette tendance. Au lieu de s’en remettre à des partis politiques ou à des élus,
les altermondialistes portent directement leurs revendications dans les rues (manifestation de
Seattle en 2000 par ex) et agissent au moyen de réseaux, souples, informels avec des passerelles
nombreuses entre leurs composantes syndicales, sociales, activistes, politiques, intellectuelles,
associatives (Doc2). Cette effervescence a pour effet de dynamiser le débat public, d’ouvrir les
espaces d’échanges d’idées et d’élargir la participation. La société civile conteste certaines formes de
la démocratie représentative mais finalement elle renforce la démocratie en permettant à un plus
grand nombre d’acteur d’intervenir dans la formation de la volonté collective. N’est-ce pas, aussi ce
que Lincoln nommait le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ? (Gettysburg 1863).
D’une certaine manière, la galaxie de l’anti globalisation (doc2) est une forme d’agora, un
espace d’échange des expériences donc un lieu de formation des citoyens. La théorie de la
démocratie représentative transforme le citoyen en électeur. Pour Daniel Gaxie (Le cens caché ,
1978), il s’agit d’un simple profane, nettement moins bien formé et informé que le professionnel de
la politique, nécessairement plus compétent. Ne s’agit-il pas là d’une des principales limites de la
démocratie ? C’est ici qu’intervient Tocqueville (doc.1), dès le début du dix-neuvième siècle pour
nous dire que la société civile est une école de démocratie, et au passage, que la démocratie n’est
pas qu’une évidence, c’est quelque chose qui s’apprend. L’association civile forme les citoyens aux
petites affaires communes. Ils acquièrent ainsi le sens de l’intérêt général et surtout ils « prennent
goût à l’association », apprennent à écouter la diversité des points de vue en s’associant avec des
américains « de tous les esprits et de tous les âges » (doc.1). C’est ainsi que la démocratie ne se
limite plus à un ensemble d’institutions politiques plus ou moins figées mais devient un état d’esprit,
une culture politique partagée. La démocratie politique en est renforcée car la pratique des petites
affaires permet de s’engager au profit des « grandes affaires politiques ». A la suite de Tocqueville, il
est possible d’affirmer que la société civile est nécessaire pour diffuser au sein d’une population le
sens de l’intérêt général sans lequel la démocratie ne serait pas possible.
Selon certains, l’appel à la société civile proviendrait des insuffisances des partis politiques et
de la société politique. Celle-ci aurait donc un rôle à jouer de contestation des élites et de
dénonciation du politique. L’opposition entre d’un côté la société civile, ouverte, transparente et de
l’autre le monde politique fermé et corrompu est tout à fait caricaturale, du moins aujourd’hui dans
les démocraties pluralistes. De plus, remplacer l’un par l’autre n’a pas de sens car la société civile doit
sa définition, comme les groupes de pression au fait qu’elle cherche à influencer mais pas à exercer
le pouvoir. Nous pouvons en déduire que une société civile organisée, active, bien informée est
nécessaire à la démocratie car elle force le pouvoir politique à expliquer ces choix, être transparent
dans ses décisions et son fonctionnement, à éviter le fonctionnement en vase clos. Cette coopération
de la sphère civile et de la sphère politique est au cœur des nouveaux processus de décision qui
émergent lors des forums citoyens ou plus récemment comme le grenelle de l’environnement
(2007). La démocratie sort renforcée lorsqu’elle peut associer plus de compétences, de points de vue
afin de former la volonté commune. Nous pouvons conclure que société civile et société politique ne
s’opposent pas en démocratie mais au contraire qu’elles se renforcent mutuellement, ainsi que le
suggérait déjà Tocqueville (doc.1)
La démocratie est une chose trop sérieuse pour être laissée aux mains des politiques. Elle est
d’autant plus vivante qu’elle est pluraliste, qu’elle incite à la participation, que le système politique
est transparent, que les citoyens s’impliquent et tout ceci est, on l’a montré permis par l’existence
même des organisations de la société civile.
Jean-Luc Ly 26/2/2014
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