UEMOA : Une intégration économique a deux vitesses a travers des

Unité de Recherche 047 de l'IRD Réseau de Recherche sur les Politiques Economiques et Pauvre
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èmes
journées scientifiques du réseau
« Analyse Economique et Développement de l’AUF »
Thème des journées
« Institutions, développement économique et transition »
Paris
Les 7 et 8 septembre 2006
Organisées et financées conjointement par
L’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF, Paris)
Le Réseau Politiques Economiques et Pauvreté (PEP Université Laval Québec)
Et
IRD, Paris, DIAL
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UEMOA:UNEINTEGRATIONECONOMIQUE
ADEUXVITESSESATRAVERSDESCLUBSDE
CONVERGENCE
UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION
par :
Dr. Mohamed Ben Omar NDIAYE
Enseignant/Chercheur à la FASEG de l’Université Cheikh Anta DIOP (UCAD) de Dakar.
BP. 8414 Dakar-Yoff, Sénégal.
RESUME
L’objectif de cette étude sera de montrer que dans l’UEMOA, on assiste à des processus de
convergence économique différenciés, sur la période 1980-2000, à travers l’existence de clubs
(groupes de pays) qui convergeraient à des niveaux différents de revenus par habitant. Les résultats ont
montré que le processus de convergence régionale de l’UEMOA est relativement lent, même si des performances
notoires ont été enregistrées.
En conséquence, les hypothèses de convergence absolue et de convergence conditionnelle
ont été testées à partir de la méthode d’une β-convergence, conformément aux travaux de BARRO et
SALA-I-MARTIN (1991, 1992). L’hypothèse de convergence conditionnelle apparaît plus testable
(robuste) que l’hypothèse de convergence absolue. L’hypothèse de convergence absolue testée dans
l’UEMOA a donné des résultats médiocres. Cependant nous devons noter que des progrès ont été
accomplis sous l’hypothèse de la convergence conditionnelle, aussi bien entre 1980-1993 que durant,
et surtout, la sous-période après la dévaluation du franc CFA, 1994-2000.
Par ailleurs, la détection de clubs de convergence a été faite en utilisant une approche conforme aux
travaux de BAUMOL et WOLFF (1988) et CHATTERJI (1992) qui suggèrent l'introduction de fonctions
quadratiques ou cubiques pour statuer sur l'existence ou non de clubs de convergence. Deux clubs ou sous-
ensembles de convergence ont été ainsi identifiés, traduisant ainsi deux niveaux différents de convergence : un
groupe (club) de pays convergeraient au dessus de la moyenne et un autre groupe (club) de pays convergeraient
en dessous de la moyenne des niveaux de revenus par tête. L’existence de ces deux clubs de convergence dont
la cohérence (la convergence) en leur sein, et entre eux, est peu convaincante, explique en partie les lenteurs
notées dans le processus de convergence d’ensemble de l’UEMOA.
Toutefois, les mesures de politique d'harmonisation (d'intégration économique) des politiques
économiques nationales ainsi que la dévaluation de 1994 semblent, malgré tout, avoir contribué à réduire les
situations de « divergence » (préalablement existantes sous l'influence de facteurs plus conjoncturels que
structurels). Elles ont donc favorisé le processus de la convergence des économies en zone UEMOA.
2
INTRODUCTION
La notion "d’hypothèse de convergence" a fait l’objet de beaucoup de travaux
controversés durant ces deux dernières décennies. Trois hypothèses de
convergence ont souvent été testées dans de nombreuses expériences d’intégration
régionale et les résultats semblent montrer une plus grande acceptation des
hypothèses de convergence conditionnelle et de convergence des clubs que celle de
convergence absolue. Dans le même ordre d’idées, cette étude se propose de tester
ces hypothèses de convergence économique dans le contexte actuel de l’expérience
d’intégration économique régionale en Afrique de l’Ouest de la Zone Franc
(UEMOA).
En effet, les pays membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
(UEMOA) se sont engagés, au lendemain de la dévaluation de franc CFA de 1994,
dans le cadre de la Zone Franc, dans un processus de convergence économique.
Bien que des progrès aient été enregistrés pour certains critères de convergence,
des disparités semblent exister entre les différentes économies des Etats membres.
Ces disparités reflètent ainsi les différences de structures économiques, lesquelles
sont très déterminantes dans l’évolution des critères et du processus de convergence
à long terme.
De ce fait, étant donné que l’équilibre économique de long terme dépend des
caractéristiques structurelles des pays (par exemple, la technologie, les préférences,
la croissance démographique, les politiques publiques, les structures de marché,
etc.) et que la convergence absolue requiert, au préalable, la convergence des
caractéristiques structurelles entre les pays, il ne serait pas étonnant que l’hypothèse
de la convergence absolue soit aussi rejetée dans l’UEMOA. Par contre, l’hypothèse
de la convergence conditionnelle selon laquelle « les revenus par tête des régions
dont les caractéristiques sont identiques (par exemple en terme de préférences, de
technologies, de taux de croissance démographique ou de politiques publiques)
convergent vers un niveau identique à long terme indépendamment de leur situation
initiale1 » serait mieux acceptée dans le contexte de l’UEMOA. Par ailleurs,
l’hypothèse de clubs de convergence sera aussi testée dans le contexte de l’UEMOA
pour vérifier s'il n’existerait pas dans cette union régionale des sous-ensembles de
pays, relativement homogènes, qui convergeraient à leur tour entre eux : il s’agira ici
de tester l’existence d’équilibres multiples et localement stables.
Cette étude sera répartie en deux parties. Dans la première partie nous
définirons la notion de convergence économique pour ensuite exposer les
fondements théoriques et les résultats empiriques sur la convergence économique.
La deuxième partie présentera la méthodologie et les résultats des tests des
hypothèses de convergence économique.
1 Les faits empiriques relatés dans les travaux de BARRO (1991), MANKIW et al. (1992) et BARRO et SALA-I-MARTIN
(1995) confortent cette hypothèse. Notons toutefois que ces faits sont aussi, dans une large mesure, compatibles avec
l’hypothèse de convergence des clubs.
3
I. LA CONVERGENCE ECONOMIQUE : HYPOTHESES, FONDEMENTS
THEORIQUES ET RESULTATS EMPIRIQUES.
I. 1- Les hypothèses de convergence économique.
La notion "d’hypothèse de convergence"2 a suscité une intense controverse
(empirique) qui traite de la pertinence de trois hypothèses testables concurrentes.
L’hypothèse de convergence absolue ; les revenus par tête nationaux
convergent vers un niveau de long terme identique quelles que soient les
conditions initiales3 ;
l’hypothèse de convergence conditionnelle : les revenus par tête des
régions dont les caractéristiques sont identiques (par exemple en terme de
préférences, de technologies, de taux de croissance démographique ou de
politiques publiques) convergent vers un niveau identique à long terme
indépendamment de leur situation initiale4 ;
l’hypothèse de convergence des clubs (à la base des notions de
polarisation, trappe de pauvreté et "clustering")5 : les revenus par tête des
régions dont les caractéristiques structurelles sont identiques convergent
vers un niveau de long terme identique pour autant que les conditions
initiales de ces régions soient suffisamment proches6.
I. 2- Les fondements théoriques de la convergence des économies.
Depuis maintenant deux décennies, l'analyse du processus de convergence
des économies fait l'objet de travaux de beaucoup d'économistes. La théorie
traditionnelle de la croissance prédit que les économies semblables en terme de
technologie et de préférence convergeront vers un même niveau de PIB par tête. En
revanche la théorie de la croissance endogène initiée par ROMER (1986), énonce
que les différences entre les niveaux de PIB par tête persisteront.
Face à ce débat théorique, plusieurs tentatives sont apparues pour éprouver les
implications des deux types de modèle. Plusieurs hypothèses ont été élaborées pour
tester la convergence économique, parmi lesquelles nous étudierons celles relatives
à la convergence absolue, la convergence conditionnelle et la convergence de clubs.
I. 2. 1- Le rejet de l’hypothèse de convergence absolue
L’origine du débat actuel réside dans la notion de convergence absolue, idée
selon laquelle les revenus par tête nationaux convergeraient les uns vers les autres à
long terme, indépendamment des conditions initiales. Cependant, compte tenu de
l’importance et du rôle des caractéristiques structurelles des pays dans la
détermination de l’équilibre économique de long terme, l’hypothèse de la
convergence absolue a très vite été rejetée par les régressions économétriques
2 Entendue ici comme l’hypothèse testable découlant de la théorie économique.
3 ROMER (1986), Lucas (1988) et BARRO (1991) montrent que les faits vont à l’encontre de cette hypothèse.
4 Les faits empiriques relatés dans les travaux de BARRO (1991), MANKIW et al. (1992) et BARRO et SALA-I-MARTIN
(1995) confortent cette hypothèse. Notons toutefois que ces faits sont aussi, dans une large mesure, compatibles avec
l’hypothèse de convergence des clubs.
5 DURLAUF et JOHNSON (1995) et QUAH (1996) justifient empiriquement cette hypothèse.
6 Les régions convergent les unes vers les autres pour autant que leurs conditions initiales appartiennent au bassin d’attraction
d’un même équilibre de long terme.
4
fondées sur les données transversales (voir BARRO, 1991) et sur l’évolution de la
distribution des revenus entre pays (voir QUAH, 19967).
Ainsi, comme le fait remarquer BARRO (1991), MANKIW et al. (1992) ou
BARRO et SALA-I-MARTIN (1995), le modèle de croissance néoclassique implique
plutôt la convergence conditionnelle que la convergence absolue, de sorte que le
rejet de l’hypothèse de convergence absolue n’implique pas forcément le rejet du
modèle de croissance néoclassique en soi.
L’hypothèse de convergence conditionnelle suggère que, parmi tous les pays
similaires en terme de préférence, de technologies, de croissance démographique,
de politiques publiques, etc., le taux de croissance est une fonction décroissante du
niveau de production par tête. En conséquence, les pays qui sont identiques à tous
égards, sauf en ce qui concerne leur niveau initial de revenu par tête, sont supposés
converger vers le même état stationnaire ou, ce qui est équivalent, converger les uns
vers les autres. Dans ce scénario, un choc temporaire ne peut altérer les
classements internationaux qu’à court terme, mais n’aura aucun effet persistant.
Cette hypothèse de convergence conditionnelle est étroitement liée à l’idée que
chaque économie se caractérise par un équilibre stationnaire unique, globalement
stable. Il s’en suit que les pays identiques dans leurs "fondamentaux" (et donc en
terme de système dynamique) convergent les uns vers les autres indépendamment
de leurs conditions initiales.
Par ailleurs, il est clair que si le système dynamique était caractérisé par
l'existence d'équilibres multiples et localement stables, l'hypothèse des clubs serait
préférable à celle de convergence conditionnelle. Les pays similaires dans leurs
caractéristiques structurelles convergent vers un équilibre de long terme identique si,
et seulement si, leurs niveaux initiaux de production par tête ne sont trop éloignés.
Dans ce scénario, un choc temporaire peut alors affecter l'économie de façon
durable.
L'évaluation des deux hypothèses revient donc à examiner la plausibilité de
l'existence d'un équilibre de long terme unique et globalement stable plutôt que de
l'existence d’équilibres multiples localement stables.
I. 2. 2- La robustesse de l’hypothèse de convergence conditionnelle
Oded GALOR (1996)8 démontre, en effet, que sous les spécifications
néoclassiques traditionnelles, l'hypothèse de convergence conditionnelle apparaît
comme la seule implication testable découlant tant du modèle de croissance
(SOLOW, 1956) que du modèle de croissance optimale (RAMSEY, 1928).
L'économie se caractérise par un équilibre stationnaire unique (et non trivial) et le
taux de croissance diminue au fur et à mesure que l'économie se rapproche de sa
solution de long terme. Dans le modèle de générations imbriquées, au contraire,
l'hypothèse de convergence des clubs devient aussi pertinente que celle de
convergence conditionnelle, pour autant qu'on n'impose pas d'autres restrictions sur
les préférences et sur la technologie que dans le modèle néoclassique.
7 La convergence au sein d’un sous-ensemble de pays sélectionnés sur base de proximité de leurs conditions initiales ou
terminales (BAUMOL, 1986) n’est pas une preuve empirique de l’hypothèse de convergence absolue, mais plutôt une
preuve
de l’hypothèse de convergence des clubs ou de la convergence conditionnelle (DE LONG, 1988).
8 Oded GALOR : «Convergence ? Les enseignements des modèles théoriques», 1996, Le Journal Economique, 106, pp.
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