parler de Dieu en vérité. Il ne peut dire que des paroles humaines approximatives sur
Dieu, mais non fiables. Dieu seul peut donner Dieu, parler de lui en vérité et nous
donner de le connaître. Si Jésus n’est pas Dieu et homme, il n’y a aucune chance pour
l’homme de rencontrer Dieu. Pire encore, selon cette théorie, ce n’est pas Dieu qui
meurt pour nous et nous sauve, mais un homme. Or l’homme est incapable de procurer
le salut, que ce soit pour lui-même ou pour les autres. Il n’y a donc pour nous aucun
accès possible au salut. C’est la négation absolue de l’Evangile et de son espérance.
C’est la raison pour laquelle Jean insiste dans son Evangile et dans ses Lettres sur
l’importance de l’Incarnation, sur le lien indissoluble qu’il y a dans la personne du
Christ Jésus entre son humanité et sa divinité, comme il insiste sur la Rédemption
accomplie par le Fils de Dieu lui-même. En Jésus, c’est Dieu qui a souffert et est mort
pour nous sauver. Pour Jean qui en est le Témoin, la personne de Jésus est à la fois,
Dieu et homme, ensemble et indissolublement. Il est le Verbe fait chair. Telle est notre
foi. Si Jésus est « Dieu et homme » comme nous le croyons, par son humanité nous
pouvons entrer en contact avec le Père invisible. En lui, Dieu nous aime de façon
humaine, avec un cœur et des gestes d’homme, selon la belle expression de Jean-Paul
II : « Jésus est le visage humain de Dieu et le visage divin de l’homme. »
Message
Le témoignage de Jean dans sa première Lettre nous renvoie au côté transpercé
de Jésus d’où ont jailli le sang et l’eau (Jn 19,3-37). Le côté blessé constitue à ses yeux
une affirmation particulièrement forte de l’identité de Jésus, de sa mission. Celui qui
meurt sur la croix est véritablement Dieu et véritablement homme. Il est né et il meurt
sur la croix pour nous sauver parce que Dieu nous a aimés jusqu’à l’extrême.
Pour bien comprendre cela, il faut savoir que depuis l’Exil (6e s. a. J-C), l’eau est
l’image privilégiée par les prophètes pour annoncer le don messianique par excellence :
l’Esprit, le salut promis à Israël, la Sagesse divine que Dieu donnera à son Peuple, le
moment venu. L’eau suggère purification (Ez 36) et fécondité (Ez 47,1-14). C’est ce don
que Jésus annonce solennellement à l’occasion de la fête des Tentes (Jn 7,37-39). On
l’attendait du Temple, de Dieu. Voici que Jésus proclame qu’il en est la Source : « Si
quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive… Il parlait de l’Esprit que devait
recevoir ceux qui croiraient en lui. En effet, il n’y avait pas encore d’Esprit parce que
Jésus n’avait pas encore été glorifié » (Jn 7,37-39).
Si en mourant et en ressuscitant Jésus donne l’Esprit qui est Dieu, c’est qu’il est
Dieu, car Dieu seul peut donner Dieu. L’eau qui jaillit du côté de Jésus est une
affirmation de sa divinité, comme le sang est une affirmation de son humanité. Présent
dès le premier instant de son Incarnation, l’Esprit est à l’œuvre dans sa vie à travers les
signes qu’il opère. Jésus n’est donc pas devenu Dieu quand Jean l’a baptisé au
Jourdain (ou après 4 siècles de discussion théologique comme F. Lenoir le soutient). Mais au
moment du baptême, la divinité qui est en lui, est révélée à Jean par la présence de
l’Esprit qui repose sur le Christ sous forme de colombe. L’Esprit désigne ainsi Jésus à
Jean comme étant celui qui baptise dans l’Esprit parce qu’il le possède en plénitude.
Jésus n’est donc pas un homme qui aurait été saisi par « le Christ, être spirituel »
comme se l’imaginait Cérinthe, mais au moment du baptême, l’Esprit manifeste la
divinité qui est en son humanité. Cette manifestation de l’Esprit est une véritable
Pentecôte pour Jean dont la mission est de révéler le Christ à son Peuple. Elle lui
permet de reconnaître en Jésus le Fils de Dieu, l’Agneau de Dieu, envoyé par le Père :
« Celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute ma faveur. » (Mt 3,16) Il est Dieu.