La recherche des Particules Stables Chargées et

publicité
La recherche des Particules Stables Chargées
et Lourdes avec le détecteur CMS au LHC
Loı̈c Quertenmont∗
1
Introduction
Des Particules Stables (ou quasi-stable) Chargées et Lourdes (HSCP) sont
prédites par différentes extensions du Modèle Standard des interactions fondamentales entre particules élémentaires. Si ces prédictions se révèlent être
exactes, ces particules devraient être produites lors de collisions de protons
énergétiques au Grand Collisioneur de Hadrons (LHC) et observables grâce
au détecteur ”Compact Muon Solenoid” (CMS).
1.1
Le Large Hadron Collider
Le ”Large Hadron Collider” (LHC), situé sur le site du CERN près de Genève,
est un collisioneur supraconducteur de hadrons. Le but principal du LHC
est de comprendre la nature de la brisure de symétrie électro-faible pour
laquelle le méchanisme de Higgs est présumé responsable. L’exploration de
la physique à l’énergie du TeV est aussi l’un des buts de cet accélérateur. Les
Particules Stables Chargées et Lourdes (HSCP) font, entre-autres, partie de
cette nouvelle physique qui pourrait être révélée au LHC.
L’accélérateur est installé dans l’ancien tunnel du ”Large Electron Positron
Collider” (LEP). Ce tunnel, enterré sous la frontière Franco-Suisse à une profondeur variant de 45 m à 170 m, a une circonférence de 26.7 km. Le LHC est
utilisé pour accélérer des faisceaux de protons (ou de hadrons lourds) circulant en sens opposés jusqu’à une énergie de 7 TeV. Les particules accélérées
peuvent être mises en collision en quatre points d’interaction. En chacun de
ces points se trouve l’une des expériences majeures:
∗
Florida State University with Funding by the Departement Of Energy (DOE), USA
• ALICE (A Large Ion Collider Experiment)
Etudie les plasma Quark-Gluon dans les collisions d’ions lourds.
• ATLAS (A Toroidal LHC Apparatus)
L’une des deux experiences généraliste, recherche le boson de Higgs, la
nouvelle physique et effectue des mesures de précision sur la physique
du Modèle Standard.
• CMS (Compact Muon Solenoid)
L’une des deux experiences généraliste, recherche le boson de Higgs, la
nouvelle physique et effectue des mesures de précision sur la physique
du Modèle Standard.
• LHCb (LHC-beauty)
Etudie la physique des hadrons B et la violation CP pour expliquer
l’assymétrie matière/anti-matière dans l’univers.
Le LHC est entré en opération en automne 2009 et les premières collisions
pp produites à une energie centre de masse de 7 TeV ont été enregistrées par
CMS au début du mois d’avril 2010.
1.2
Le Compact Muon Solenoid
Le but principal de l’expérience ”Compact Muon Solenoid” (CMS) est d’explorer
la physique à l’énergie du TeV en exploitant les collisions protons-protons
produites par le LHC. La complexité du détecteur CMS, comme celle des
autres expériences du LHC, est sans précédent.
Le détecteur CMS est remarquable pour la recherche des HSCP, car il est
capable de mesurer l’impulsion des traces avec une bonne précision, en particulier pour les particules de type muonique grâce à son grand trajectographe à
muons. Ce même système à muons permet d’obtenir une information précise
sur le temps d’arrivée des particules au détecteur à muons, cette information
peut être utilisée pour mesurer la vitesse des particules produites au point
d’interaction. Une autre particularité du détecteur CMS, utilisée pour la
recherche des HSCP, est la grande granularité de son détecteur à silicium.
Celui-ci permet de mesurer la perte d’énergie par ionisation spéficique des
particules avec une grande précision et dès lors d’identifier les HSCP.
2
2
Signatures Experimentales
Tout comme les muons, les particules stables, chargées et lourdes (HSCP) ne
sont en général pas arrêtées dans les calorimètres de CMS. Ces particules,
particulièrement pénétrantes, sont supposées atteindre le système à muons
de CMS. La signature typique d’une HSCP est dès lors une trace de grande
impulsion qui atteint le système à muons. De plus, étant donnée leur grande
masse (M ¿ 100 GeV/c2 ), les HSCP devraient être produites avec une vitesse
nettement inferieure à celle de la lumière (v = βc avec 0.1 ≤ β ≤ 1). Il
est dès lors possible d’identifier ces particules, simplement en mesurant leur
vélocité (β).
Deux méthodes peuvent être utilisées. La première consiste simplement à
mesurer le temps que met la particule pour atteindre le système à muons et
d’en déduire la vitesse de la particule. Ceci se fait via les détecteurs à muons
qui ont une résolution sur la mesure du temps de l’ordre de 1 ns. L’autre
méthode, plus subtile, consiste à mesurer la perte d’énergie par ionisation
(dE/dx) des particules et d’en déduire la vélocité de la particule. La formule
de Bethe-Bloch montre que le dE/dx moyen d’une particule dépend de sa
vitesse. Pour des particules non-relativistes
(0.2 ≤ βγ ≤ 0.9), cette formule
D E
m2
dE
peut être approximée come suit: dx = K p2 +C. Les HSCP auront dès lors
une perte d’énergie par ionisation anormalement élevée du fait de leur faible
vitesse. Le dE/dx peut être mesuré à l’aide du trajectographe en silicium de
CMS.
Deux types de HSCP peuvent être envisagés. Les HSCP de type leptonique
et celles de type hadronique. Celles du premier type sont semblables à des
muons très massifs: elles interagissent peu avec le détecteur et sont donc
capables d’atteindre le système à muons. Les HSCP de type hadronique,
comme les quarks et les gluons, devraient former des états liés (R-hadron) à
cause du phénomène d’hadronisation. Ceux-ci sont simplement des hadrons
classiques dans lesquels l’un des partons a été remplacé par une HSCP de type
hadronique. Ils ont néanmoins quelques particularités. En effet, lorsqu’ils interagissent avec la matière (typiquement avec le détecteurs), il est possible
que la charge électrique de ces R-hadrons soit supprimée ou inversée via
l’échange de partons légers entre l’état lié et la matière du détecteur. Ce
phénomène complique notablement la détection de telles particules. De plus,
une étude récente sur la modélisation des HSCP avec la matière conclut que
certains types de HSCP ont une probabilité proche de l’unité d’atteindre le
système à muons avec une charge électrique nulle. Ces particules ne pourraient dès lors pas être détectées par le système à muons. Il est par conséquent
important d’avoir des techniques de recherche ne requièrant pas l’observation
des HSCP dans le système à muons.
3
3
Recherche
Deux stratégies complémentaires ont été utilisées
pour mettre en évidence la
q
création de HSCP dans les collisions pp à (s) = 7 TeV produites par le LHC
durant l’année 2010 et correspondant à une luminosité intégrée de 3.1 pb−1 .
Dans les deux cas, des traces de grande impulsion avec une énergie perdue
anormalement haute sont recherchées. La première stratégie ne considère
que les traces atteignant le système à muons alors que les autres types de
traces sont également considérées pour la seconde stratégie.
Pour ces deux analyses, aucun candidat n’a passé la sélection alors qu’un
bruit de fond inférieur à 0.1 évènement était attendu. Cette absence de
candidat a dès lors permis d’exclure, avec un interval de confiance (C.L.)
de 95%, l’existence de gluinos stables de masse inférieure à 398 GeV/c2 en
utilisant un modèle conventionel d’interactions de ces HSCP avec la matière.
Dans ce modèle, il est fréquent que les gluinos stables atteignent le système
à muons (la stratégie d’analyse utilisant le système à muons est dès lors
utilisée). Dans le cas où l’interaction des gluinos stables avec la matière, plus
pessimiste, ne leur permet pas d’être observé dans le système à muons, les
gluinos stables de masse inférieure à 311GeV/c2 ont pu être exclus.
Tracks / 50 GeV/c2
s = 7 TeV 3.06 pb -1
Tracker + Muon
Data-based prediction
CMS
σ (pb)
CMS
103
Theoretical Prediction
s = 7 TeV
95% C.L. Limits
gluino; 10% ~
gg
gluino; 50% ~
gg
gluino (NLO+NLL)
Data
2
10
3.1 pb -1
gluino; 10% ~
gg; ch. suppr.
stop (NLO+NLL)
MC - ~
g 400
stop
stop; ch. suppr.
2
10
10
1
10
10-1
0
500
1000
200
Mass (GeV/c2)
400
600
800
1000
Mass (GeV/c2)
Figure 1: A gauche: Distribution de masses observées dans les données,
prédites pour le bruit de fond et attendues pour des HSCPs (gluino) de
400 GeV. A droite: Section efficace théorique et limite supérieure de la section
efficace observée ( C.L. 95%) pour différents modèles de HSCP et scénarios
d’interaction avec le détecteur.
4
Téléchargement