CLES METHODOLOGIQUES DE LA SOCIOANTHROPOLOGIE DE L’ENVIRONNEMENT Comment aborder la dimension sociale de l’eau ? Direction de la Planification et de la Programmation Karin TRÖGER JUIN 2010 SOMMAIRE PREAMBULE – Dimension sociale de l’eau, de quoi parle-t-on ?...............................................................3 L’intégration progressive de la dimension sociale dans la gestion environnementale..................................3 De la « socio-économie » aux « sciences humaines et sociales » ...............................................................4 Les apports de la dimension sociale de l’eau................................................................................................5 PARTIE 1 – Quelques notions sociologiques rapportées à la gestion de l’eau ...........................................7 Acteurs territoriaux, usagers, riverains, habitants .........................................................................................7 Territoire(s) ....................................................................................................................................................8 Usages et pratiques, changements de pratiques........................................................................................10 Représentations sociales, perceptions, opinions ........................................................................................11 Valeur patrimoniale, dimension culturelle de l’eau......................................................................................12 Demande sociale, acceptation sociale ........................................................................................................13 Capital social ...............................................................................................................................................14 Bénéfices sociaux et « plus-value sociale » de la gestion de l’eau ............................................................16 Solidarités de bassin ...................................................................................................................................18 Visibilité, invisibilité de la ressource ............................................................................................................20 Gouvernance et dispositifs participatifs.......................................................................................................21 PARTIE 2 – Les méthodes de la socio-anthropologie...............................................................................26 Le diagnostic territorial ...............................................................................................................................26 Représentations sociales, perceptions et pratiques....................................................................................28 L’approche quantitative.........................................................................................................................28 L’approche qualitative ...........................................................................................................................29 Mise en pratique à partir d’une situation fictive ...........................................................................................34 PARTIE 3 - Perspectives opérationnelles ................................................................................................35 Des besoins de connaissance… .................................................................................................................35 … A la proposition d’axes thématiques et méthodologiques ......................................................................36 REPERES BIBLIOGRAPHIQUES...............................................................................................................38 Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 2 sur 39 PREAMBULE Dimension sociale de l’eau : de quoi parle-t-on ? L’intégration progressive de la dimension sociale dans la gestion environnementale Le social, un des piliers fondateurs du développement durable Dès l’origine, les textes fondateurs du développement durable érigent les dimensions écologique, économique et sociale en principes directeurs de l’action publique, qui se doit désormais de respecter l’harmonie entre les humains et entre l’homme et la nature (rapport Bruntland, 1988). Du côté des politiques environnementales, le seul couple écologie-économie a longtemps été privilégié sous l’angle de l’évaluation coûts-bénéfices d’un programme de gestion, des leviers financiers de mobilisation des usagers autour des enjeux environnementaux, des procédures de développement économique ou territorial pouvant interagir avec la gestion des milieux naturels. Un large pan du caractère sociologique du développement durable est ainsi resté sous-exploité, faute de légitimité scientifique et de compétences propres à rendre intelligible les interactions nature-société, à la mesure de l’investissement tardif des sciences sociales dans le champ environnemental. … Mais un champ à investir plus largement Depuis le début des années 2000, la dimension sociale retrouve sa place originelle aux côtés des autres piliers du développement durable. Si sa contribution demeure modeste, du moins est-elle identifiée dans sa capacité à éclairer les « impasses écologiques » auxquelles décideurs et gestionnaires se trouvent confrontés dès lors que les outils techniques, financiers et réglementaires ne permettent à eux seuls d’appliquer les mesures environnementales sur les territoires. Clairement, les systèmes de gestion écartant trop systématiquement les aspects politiques, sociaux, historiques, culturels et symboliques ont montré leurs limites et appellent à présent à mieux appréhender les lignes de convergence entre activités humaines et protection de l’environnement. En bref, à porter un regard affiné sur les croisements et entrechoquements des logiques décisionnelles et des processus sociaux entrant en résonance avec les projets écologiques. L’on s’intéresse désormais de plus près à l’organisation des sociétés locales, l’ancrage territorial des usages des ressources naturelles, aux valeurs accordées aux objets de nature, aux processus d’appropriation des politiques de gestion, aux facteurs culturels conditionnant les changements de pratiques, aux bénéfices escomptés en termes de bien-être collectif ou de cadre de vie. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 3 sur 39 De la DCE au SDAGE : quand gestion de l’eau et sociétés locales se rencontrent Ainsi, tels qu’énoncés par la DCE, les objectifs d’atteinte du bon état écologique reposent – entre autres lignes directrices – sur une logique de gestion territorialisée et intégrée de l’eau, au nom du double principe de subsidiarité et d’association des acteurs territoriaux. La « bonne gouvernance » de l’eau serait garante de meilleurs équilibres entre usages humains et disponibilité d’une ressource de qualité, entre protection des milieux aquatiques et pression foncière,…, en somme de l’harmonie entre les écosystèmes et les sociétés locales. Cette gouvernance suppose un étroit maillage des politiques sectorielles à l’échelle d’un bassin versant, d’une médiation adaptée aux profils et au positionnement des acteurs et des usagers directement ou plus indirectement concernés, du politique au consommateur d’eau potable. En droite ligne des exigences de la DCE, le SDAGE RM 2010-2015 intègre les pratiques de consommation des ménages (orientation fondamentale 1), les dimensions sociales et économiques (orientation fondamentale 3), la gestion territorialisée et concertée de l’eau (orientation fondamentale 4). L’ambition repose sur les différents bras de leviers à activer pour répondre à l’obligation de résultats, de la solution technique aux vecteurs identitaires. Le Comité de bassin formalise ainsi le changement de posture amorcé ces dernières années, élargissant sa focale aux dynamiques sociétales susceptibles d’interagir avec les ressources naturelles. Plus que jamais, il se doit d’explorer les conditions politiques, économiques, démographiques, sociales et culturelles pouvant accompagner, accélérer ou freiner le déploiement du programme de mesures, de manière à concilier, au mieux, priorités écologiques et exigences du développement territorial. De la socio-économie aux sciences humaines et sociales L’habitude est tenace : dès qu’il est question d’aborder la sphère sociétale, scientifiques et techniciens de l’ingénierie environnementale s’en réfèrent à la nébuleuse de la « socio-économie », raccourci facile mais inopérant tant les champs d’action des disciplines invoquées se distinguent. Certes, l’économie et la sociologie se complètent aisément, mais pas nécessairement, du moins pas plus que l’économie et la géographie, l’anthropologie et les sciences politiques, ou tout autre couple qui offre l’opportunité de croiser les regards sur un sujet donné. De la notion fortement réductrice de la « socio-économie », il semble préférable de faire appel à la diversité des « sciences humaines et sociales » (SHS) qui recoupent autant de champs disciplinaires distincts, tour à tour convoqués pour examiner un ou des paramètres des cultures et des sociétés humaines. Chaque discipline mobilise des paradigmes, concepts, moyens d’investigation, outils et modes de valorisation spécifiques, qui, appliquées au domaine de l’environnement, sont capables de penser globalement l’articulation milieux humains, milieux naturels et territoires. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 4 sur 39 Déterminer les contours des sciences humaines d’un côté, et des sciences sociales de l’autre, n’est pas chose aisée tant elles renvoient à des postures et des méthodes scientifiques qui s’interpénètrent. Présenté en opposition avec les sciences de la nature, le champ des SHS est dédié à l’observation des productions humaines et des sociétés constituées, des postures individuelles et des interrelations multiples, des mécanismes sociaux et des organisations collectives, des hommes entre eux et des hommes dans leur environnement. Le champ des SHS se réfère ainsi à : la sociologie, l’anthropologie culturelle, l’ethnologie, l’économie, l’histoire, la géographie humaine, les sciences politiques, la démographie, la psychologie, la linguistique, les sciences de la communication, la philosophie, le droit, les sciences de l’éducation. Le présent document se consacre plus particulièrement aux approches de la sociologie, de l’anthropologie culturelle et de l’ethnologie appliquées au champ de l’environnement, simplifiées sous l’appellation « socioanthropologie de l’environnement », qui néanmoins intègre des aspects relevant des sciences politiques… ellesmêmes s’intéressant de près aux « logiques sociales à l’œuvre dans la vie politique ». Les apports de la dimension sociale de l’eau Des retards dans le développement des projets écologiques, des situations de blocages, des zones d’ombres, mais aussi des opportunités, des vecteurs de mobilisation à ne pas manquer, et tout simplement des spécificités territoriales à intégrer dans toute démarche environnementale… Voilà non pas tout le poids du social, mais la mise en évidence d’une nécessaire prise en considération des contraintes et potentialités territoriales qui, d’une manière ou d’une autre, influeront sur la mise en œuvre des politiques de l’eau. Observer les dynamiques sociales et les multiples interconnexions entre des politiques environnementales, des communautés et des sociétés peut contribuer à : Eclairer la prise de décision, quelle que soit sa nature, par une vision affinée des composantes territoriales et sociales en lien direct ou indirect avec les enjeux de l’eau. Enrichir la pratique de l’ingénierie environnementale par l’ouverture du champ des compétences, s’orienter sur une posture transversale capable de proposer des alternatives aux seules solutions techniques. Se donner les moyens de répondre aux exigences de démocratie participative, en identifiant précisément les publics concernés, leurs profils, leur positionnement et leurs motivations, et en proposant des dispositifs et des argumentaires adaptés à engager le dialogue avec les décideurs, les représentants institutionnels, les usagers socioprofessionnels, les citoyens. Construire des référentiels d’évaluation des programmes pour en mesurer et qualifier l’efficacité mais aussi, plus largement, s’interroger sur leur utilité sociale. Et plus encore… Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 5 sur 39 Ce document à caractère méthodologique n’a pas vocation à doter les lecteurs de compétences proprement sociologiques, mais à accompagner les réflexions et à les aiguiller dès lors qu’ils sont confrontés, dans leur pratique, au besoin de comprendre le contexte socio-politique, les jeux d’acteurs en présence, les usages et représentations sociales qui conditionnent les relations hommes-nature. La première partie est dédiée à la caractérisation des notions socio-anthropologiques auxquelles les praticiens des sciences de la nature se réfèrent usuellement en dépit du flou artistique qui les auréole. Il s’agira donc de livrer des éléments de précision et de contextualisation, tout en se gardant de définitions formelles. A l’heure où les SHS se saisissent du champ de l’environnement pour poser les premières balises, le terrain reste mouvant, propre à faire évoluer les concepts et les rendre les plus opérants possibles. Les deuxième et troisième parties, plus synthétiques, sont clairement positionnées sur des visées opérationnelles. D’une part mettre en évidence les différentes méthodes couramment utilisées par les SHS, non pas dans la perspective de rendre le lecteur opérant en la matière, mais pour lui donner des clés de lecture et l’aider à élaborer un cahier des charges, suivre les offres et le déroulé d’une étude à caractère sociologique. D’autre part illustrer le propos global par une série de questions qui travaillent aujourd’hui les scientifiques et les gestionnaires de l’eau dans un contexte de crise quantitative et qualitative, ou de dégradation des milieux aquatiques, sous la poussée croissante de l’urbanisation et des activités économiques. Bonne lecture… Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 6 sur 39 PARTIE 1 Quelques notions sociologiques rapportées à la gestion de l’eau Acteurs territoriaux, usagers, riverains, habitants Les acteurs territoriaux (infra ou supra locaux, du moment où leur sphère d’influence recouvre tout ou partie du territoire concerné) regroupent les représentants des institutions impliquées dans l’organisation territoriale (gestion, développement et/ou aménagement) au plan politique, urbanistique, économique, environnemental, social, culturel, etc. En font également partie les collectifs d’usagers et citoyens (organisation professionnelle, association militante, groupement riverain…) pouvant peser sur les stratégies territoriales. L’acteur est donc celui qui représente une institution, un groupe social, une communauté d’intérêts. Aux côtés des « acteurs locaux » est bien souvent employée la notion de « grand public », certes commode mais réductrice, puisqu’elle suppose l’existence d’entités sociologiques indifférenciées. Nous préférons employer les termes d’usagers, de riverains, d’habitants, qui renvoient chacun à des acceptations spécifiques. Bien entendu, ces catégories restent poreuses, un individu pouvant tout à la fois être acteur agissant sur le territoire, usager et riverain. L’usager est en premier lieu celui qui développe un usage direct du milieu concerné. Dans le contexte de la gestion de l’eau, c’est donc celui qui engage une relation (quotidienne ou non) avec la rivière au travers de pratiques marchandes ou non marchandes. Plus largement, on se réfère également à la catégorie des usagers pour évoquer la société civile non impliquée (ou indirectement via les organisations représentantes) dans la mise en œuvre des politiques locales : entreprises, exploitations agricoles, établissements résidents (santé, éducation, social), associations. Le riverain est celui qui vit à proximité directe du cours d’eau, tandis que l’habitant s’intègre sur le territoire du bassin versant sans être localisé en bordure de rivière. Ainsi, selon le lieu d’implantation, les motivations, intérêts et formes d’implication dans la vie locale, le riverain et l’habitant peuvent – ou non – être usagers réguliers ou occasionnels du milieu aquatique. Qu’ils en aient ou non une expérience, ils restent cependant des consommateurs des services de distribution d’eau potable et d’assainissement, voire des consommateurs de paysages dès lors que ceux-ci constituent un décor plutôt qu’un lieu de pratique. L’habitant (riverain ou non) est généralement récepteur des actions de communication initiées par les gestionnaires du bassin versant, quel que soit son mode d’appropriation de la rivière ou sa connaissance de son mode de gestion. A l’inverse, l’usager non habitant, malgré sa plus grande familiarité avec le milieu, n’est pas Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 7 sur 39 destinataire de l’information – à moins de faire partie d’une organisation locale ou d’engager des relations A titre d’exemple… informelles avec les acteurs locaux. Le président, chef de projet… d’une association : acteur Un membre d’une association : usager Un agriculteur irriguant : usager… et acteur s’il est convoqué au titre du syndicat d’irrigants Un propriétaire-riverain : usager et habitant Un habitant non pratiquant du cours d’eau : un habitant, donc également consommateur d’eau potable et récepteur de l’information délivrée par la structure locale de gestion de l’eau Un pêcheur non résident sur le bassin versant : usager… mais non récepteur de l’information. Territoire(s) Au plan sociologique, la notion de territoire renvoie à un espace socialement investi, c’est-à-dire un espace au sein duquel s’organise un système de relations politiques, économiques, sociales et culturelles entre les populations qui le composent. Il est entendu en tant qu’« espace d’identification », l’espace vécu, l’espace identitaire sur lequel un individu/une communauté se projette, l’espace consommé au travers de l’habitat et/ou des activités de travail, d’éducation, de loisirs,…. Les espaces d’appropriation sociale s’entrecroisent avec les territoires institutionnels et de projet, également multidimensionnels, se référant à la géographie des lieux, à l’influence politico-administrative, aux processus d’urbanisation, à la gestion des flux et aux communications établies avec les territoires voisins. A géométrie variable, le territoire se conjugue au pluriel, au croisement des différentes constructions sociales qui lui assignent des fonctions et des limites plus ou moins précises. Rarement en phase avec les découpages administratifs, le territoire sociologique – ou plutôt les territoires sociologiques – peut ainsi s’établir sur un périmètre restreint, élargi (quartier, bassin de vie…) voire dépasser les frontières nationales ou se constituer en « territoire virtuel ». Dans certains cas, le territoire « vécu » peut recouvrir tout ou partie d’un espace de projet ou à forte résonance identitaire (PNR ou Pays par exemple), dont les contours font plus aisément écho aux différents modes d’appropriation territoriale. La territorialisation croissante des politiques publiques ne va pas sans causer des phénomènes de brouillage, tant la complexité du jeu d’acteurs et du portefeuille de compétences opacifient la gestion des territoires, plus encore avec l’émergence de nouveaux espaces d’action publique, à l’image des aires métropolitaines. Il s’agit, en fin de compte, moins de délimiter strictement des territoires que de cerner les relations hommesespaces et de mieux comprendre le système d’organisation sociétal pour embrasser d’un même mouvement repères spatiaux, usages effectifs et phénomènes d’appartenance. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 8 sur 39 Territoire et gestion de l’eau Si le bassin versant s’est imposé comme espace pertinent en matière de gestion de l’eau, dans quelle mesure est-il porteur de sens en termes de reconnaissance politique et sociale, autrement dit le territoire hydraulique rejoint-il, peu ou prou, les différentes acceptations territoriales ? Il parait impossible de répondre de manière satisfaisante à une telle question, tant les situations peuvent différer d’un secteur à l’autre, et d’autant qu’elle pose une opposition entre des aires géographiques qui, même si elles ne se superposent pas, se recoupent partiellement. Si les acteurs territoriaux et les populations riveraines ne se projettent pas nécessairement à l’échelle du bassin versant, ils peuvent, selon les cas, se prévaloir d’une appartenance commune à un sous-bassin, un espace « de rive à rive », une zone urbaine fondée autour du cours d’eau. Au plan des usages, il est important de différencier les catégories de populations : du fait d’une pratique régulière de la rivière, l’agriculteur ou le pêcheur, par exemple, sont à même de percevoir le territoire du bassin versant dans sa globalité, tandis qu’un habitant non expérimenté des cours d’eau se référera à un autre périmètre. De fait, l’échelle du bassin versant rejoint en partie celles de l’action territoriale (dans la mesure où les acteurs locaux et supra-locaux la reconnaissent comme telle), elle peut se révéler également opérante au plan sociologique, du moins en l’appréhendant par sous-échelles et en tenant compte de l’élasticité de la question territoriale. Le bassin versant de l’Ardèche, quand territoire hydraulique et territoire vécu se rencontrent Rivière assignée à un rôle de marqueur identitaire et territorial (les gorges de l’Ardèche, l’Ardèche méridionale) et support d’activités touristiques influentes à l’échelle régionale et au- A titre d’exemple… delà. Que les acteurs, usagers et populations résidentes identifient ou non leur territoire d’appartenance à celui du bassin versant, nul ne peut nier la « force territoriale » générée par la vocation structurante conférée à la rivière. Le bassin versant de l’Yzeron, un territoire non reconnu socialement De fortes disparités amont-aval : cours supérieur à dominante rurale, institué de fait « poumon vert de l’agglomération lyonnaise » et progressivement gagné par la périurbanisation, quand l’aval est marqué par une urbanisation de plus en plus dense autour d’un cours d’eau déqualifié dans sa zone de confluence avec le Rhône. Une disparité géographique qui devient distinction sociale, les enquêtes de perception pointant la non-reconnaissance des populations riveraines à l’échelle du bassin, chacun intégrant un « bout de rivière » dans sa vision territoriale. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 9 sur 39 Usages et pratiques, changements de pratiques Bien que sémantiquement proches, les notions d’usage et de pratique diffèrent dans leur acceptation. L’usage met l’accent sur l’objet et les services rendus, les pratiques renvoient à l’homme. Les usages de l’eau se rattachent donc aux fonctionnalités de la ressource en eau et des milieux aquatiques (alimentation en eau potable, industrie et hydroélectricité, irrigation, loisirs et tourisme), quand les pratiques renvoient à la façon dont les individus s’approprient ces fonctionnalités. Alors que l’usage reste généralement en terrain neutre – à moins de parler des « usagers » -, la pratique s’accole souvent d’un jugement de valeur : on parle de « pratique vertueuse » ou de « mauvaise pratique » qu’il s’agirait de corriger. Dès lors, le changement de pratiques s’invite de plus en plus sur la scène de l’action environnementale, récemment investie d’une mission plus globale de changement social. La définition du changement contient en son sein la notion d’interaction (changement, du latin cambiare : échanger) qui met en évidence la dynamique de médiation propre à accompagner le changement. La question de l’engagement lui est intimement liée, toute transformation demandant au préalable que l’individu et/ou le groupe social rationalise ses pratiques et s’engage dans un processus capable de satisfaire l’intérêt général tout en répondant aux intérêts propres. Un processus qui ne relève pas d’une décision actée mais se nourrit chemin faisant par une série de petits actes qui, s’agrégeant, conduisent à la posture du changement. C’est bien souvent la recherche du point d’équilibre qui enclenchera le processus d’engagement, qu’il s’agisse de faire la balance entre individualité et bien commun ou de gérer les zones d’incertitudes induites par le changement. On sait ce que l’on quitte, on sait pourquoi, mais on ne sait pas encore si les moyens engagés porteront leurs fruits, si les résultats seront à la hauteur des bénéfices attendus ou, pour le moins, équivalents aux bénéfices antérieurs – que ces gains soient d’ordre financiers, environnementaux, symboliques, sociaux. Emergent là des questions relatives aux marges de manœuvre possibles pour les individus soumis à l’injonction du changement (injonction qui peut prendre différentes formes, du dispositif institutionnel incitatif aux dispositions réglementaires, en passant par la pression sociale), ainsi qu’à la capacité d’anticipation et à l’obtention de garanties minimales quant à l’intégration de nouvelles pratiques. Mais un degré de satisfaction, même optimal, suffirait-il à infléchir les pratiques ? Qu’en est-il des déterminants sociaux de résistance au changement, qui s’affranchissent des logiques institutionnelles et économiques ? Suivant une rationalité en propre, ceux-ci peuvent relever d’une carence d’information et de médiation à même d’accompagner le changement ; d’une mise en cause de l’efficacité des solutions techniques proposées ; d’une posture de déni face à la pression sociale exercée trop unanimement sur une catégorie d’usager et du refus d’une responsabilité unilatérale ; de la fidélité à des savoir-faire et à la transmission intergénérationnelle ; du poids de l’inertie ; du sentiment de ne pouvoir, isolément, réellement influer sur les problèmes environnementaux,… ou encore, plus prosaïquement, d’une intention qui peine à se traduire en passage à l’acte, sans cesse repoussé à des stades ultérieurs. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 10 sur 39 Etude « Le risque d’inondation dans la vallée du Rhône : postures riveraines » DREAL RhôneAlpes, délégation de bassin (MdFR 2007) A titre d’exemple… S’intéressant au sentiment de vulnérabilité et aux degrés de prise en compte du risque d’inondation par les riverains des zones inondables du Rhône, l’étude souligne la diversité des postures des habitants et des usagers, certains se déclarant conscients du risque mais pas nécessairement prêts à prendre des mesures de protection de l’espace domestique. Entre autres facteurs sociaux, s’exerce une pression sociale bien particulière, principalement repérable dans les bourgs régulièrement soumis à des inondations de faible à moyenne intensité : les « rhodaniens avertis », familiers des débordements du fleuve et tirant fierté de leur expérience, portent un jugement peu amène sur ces nouveaux résidents qui s’inquiètent au moindre remous, jusqu’à remettre en question leur intégration dans la communauté locale. En milieu urbain, le déni du risque s’apparente au « mythe du barrage protecteur » : en ville, seule la nature sous contrôle aurait droit de cité, les colères du fleuve ne s’exprimant qu’aux confins des zones urbanisées. Représentations sociales, perceptions, opinions Les représentations sociales renvoient à un système symbolique et cognitif propre à une société et une époque donnée. Celui-ci résulte d’un héritage historique et culturel transmis par les grandes institutions sociétales (éducation, religion, famille…) et, de fait, reste relativement stable dans le temps. Evoquer les représentations sociales, c’est donc se référer à un système de valeurs et de « sens commun », des formes de connaissance et des schémas de pensée permettant d’appréhender la réalité sociale. Si les cadres des représentations sont socialement partagés (à l’échelle d’une société ou d’un groupe social), les perceptions qui en découlent restent attachées à l’individu, en fonction de son environnement, sa trajectoire de vie, son héritage familial, etc. L’opinion se distingue de la perception de deux manières. Employée au singulier, l’opinion renvoie à « publique », telle une perception qui serait partagée à tous les niveaux d’une société et largement relayée par les médias. Au plan méthodologique, l’opinion est plus proche de l’idée, plus volatile que la perception. Les représentations relèvent donc à la fois du collectif et de l’individuel. Inscrites dans la durée, elle produisent des perceptions qui, elles, évoluent dans le temps (changements apportés au cadre de vie, acquisition de nouvelles connaissances, etc.). Ce sont donc les représentations qui influent directement sur les pratiques d’un individu. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 11 sur 39 Au niveau des usagers et populations Une représentation stable, généralement partagée : la valeur positive accordée à la nature, à l’eau, source de bien-être, de vie. Une perception mouvante, individuelle : cette valeur positive peut s’exprimer par la A titre d’exemple... perception d’un espace d’agrément, tel un bien de consommation à des fins de loisirs. Des pratiques associées, adaptables, fonction des représentations et perceptions : VTT, jet ski… Evolution possible : la valeur positive accordée à la nature/eau peut, au fil du temps et des évolutions sociétales, conduire à des perceptions plus proches de la rivière « sanctuaire » à protéger des nuisances humaines. Les pratiques associées s’en verront dès lors modifiées, passant à des modes plus respectueux faune et flore…). des équilibres naturels (promenade, observation Au niveau des politiques de l’eau Evolution des représentations : transition progressive de « l’eau au service de l’homme» à « l’eau bien commun », une ressource à protéger et partager équitablement. Un mode de gestion associé : adoption de procédures territoriales et contractuelles de gestion de l’eau, passage progressif à la gestion intégrée de l’eau. Valeur patrimoniale, dimension culturelle de l’eau Instituée par la loi de 1992 qui érige l’eau en « patrimoine commun de la Nation », la valeur patrimoniale repose sur la préservation de l’équilibre et la pérennité des écosystèmes, l’équité dans l’accès aux services offerts par la ressource en eau et ses milieux associés, dans une optique de transmission intergénérationnelle. Au-delà de la notion de bien commun, la valeur patrimoniale s’intéresse à la dimension culturelle des patrimoines naturels, y compris dans ses aspects immatériels : symbolique de l’eau, histoire des usages et des aménagements, esthétique et perception paysagère, savoirs et savoir-faire, patrimoine vernaculaire, valeurs accordées à la ressource,… Loin d’être anecdotiques ou de constituer la « cerise sur le gâteau » de la gestion de l’eau, les questions patrimoniales s’imposent comme un objet d’investigation à part entière, à même de participer pleinement à un programme de gestion ou de s’inscrire dans un projet de territoire. C’est bien au travers des caractéristiques culturelles que s’explorent les relations intimes à l’eau, que s’identifient les moteurs du changement social, que se composent les dynamiques territoriales autour de l’eau-bien commun,…. Comment en effet imaginer qu’une action de protection des milieux puisse « survivre » dans le temps si sa transmission aux usagers les plus directement concernés ne s’est pas correctement opérée ? Et comment transmettre si ce n’est en s’appuyant sur ce qui fonde le rapport de l’homme à la nature : la culture ? Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 12 sur 39 Demande sociale, acceptation sociale Concepts flous et appellations valises largement utilisés par les politiques publiques, la demande et l’acceptation dites sociales réclament d’être examinées de plus près. Précisons déjà qu’elles sont tour à tour convoquées pour, en amont, légitimer la mise en place d’une action (réponse à une demande sociale, qu’elle soit réelle ou supposée) et, au moment de la mise en œuvre, susciter l’adhésion au projet et à ses effets sur les territoires, voire aplanir les oppositions. Dans le premier cas le citoyen – ou la figure du citoyen – devient prescripteur indirect de l’action, dans le second, il est désigné comme bénéficiaire direct (dans le cadre des politiques territoriales) ou indirect (dans le cadre des politiques environnementales). La notion de demande sociale suppose le repérage préalable de besoins et d’attentes qui s’exprimeraient collectivement, sinon clairement, du moins en creux – la demande latente. Encore faut-il que cette demande, si elle existe, soit bien identifiée (à l’aide d’enquêtes de perceptions, de réunions de concertation réalisées en amont, ou par une connaissance suffisamment fine du contexte social). Or, c’est bien là que le bât blesse : loin de toujours constituer une réalité, même en la considérant sous sa forme latente, la « demande » n’existe souvent qu’au travers de visées politiques, ainsi brandie pour justifier le bien-fondé des orientations stratégiques choisies. Au mieux, la demande s’identifie sur la base des pressions portées par les organisations militantes, ou de tendances sociétales en émergence véhiculées par les médias… et peu importe si elles ne correspondent que peu ou prou aux singularités des territoires et de leurs composantes sociologiques. Certes, des attentes socialement construites sont largement audibles et appréciables, dans la mesure où elles suivent les évolutions de nos sociétés, se généralisent progressivement et s’inscrivent dans la durée. L’environnement et plus particulièrement l’eau en concentrent plus d’une, que ce soit en matière de satisfaction des usages, de santé publique, de préservation de la biodiversité, de valorisation du cadre de vie. Mais l’on constate qu’elles s’établissent à un niveau global et ne se transforment pas nécessairement en besoin à portée locale et/ou au regard des relations que les individus engagent avec les milieux naturels. Toutefois, si la demande préexistante est difficilement palpable, elle peut s’exprimer au moment des étapes de réalisation du projet, qui agira comme un révélateur de problèmes ou de besoins jusqu’alors occultés. Il s’agit alors moins de demande sociale que « d’écho socialement favorable ». Et puisque l’on aborde la question de la demande, pourquoi ne pas, dans le même mouvement, s’interroger sur son possible corollaire, à savoir une « offre sociale » ? On pourrait fort aisément renverser les points de vue et imaginer qu’un territoire de gestion, parce que socialement investi, dispose de capacités à conférer au projet initial une envergure nouvelle : infrastructures, équipements, intelligence collective et volonté d’appropriation comme autant de « services d’accompagnement ». En miroir, se pose la question de l’acceptation sociale, autrement dit la bonne réception du projet par les populations concernées. L’acceptation s’inscrit dans le processus d’acceptabilité sociale, qui recouvre les différents paliers menant à l’acceptation d’une politique ou d’un projet par un groupement d’individus et/ou une collectivité. L’acceptabilité renvoie à l’anticipation d’un risque ou d’une situation de crise potentiellement générée par le projet. L’on parle d’acceptation du moment où le risque est intégré par la société en tant que composante Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 13 sur 39 même du projet, dès lors que se dessine un équilibre entre les risques encourus et les bénéfices escomptés (économiques, sociaux ou environnementaux). L’acceptation sociale n’est cependant possible que si les collectifs d’usagers sont en mesure de s’approprier le projet, autrement dit de disposer d’une vision éclairée de ses tenants et aboutissants, mais aussi d’être en capacité de réagir et d’influer sur l’une ou l’autre de ses composantes. L’appropriation va au-delà de la seule question de l’adhésion, dont l'objectif viserait l’adaptation des publics à l’action et non l’adaptation de l’action aux publics. Si l’appropriation doit permettre de renforcer l’association projet/territoire/usagers, elle suppose néanmoins que les maîtres d’ouvrages acceptent eux aussi les possibles effets produits par cette appropriation, que celle-ci concerne ses orientations ou ses modalités de mise en œuvre. Acceptabilité sociale : comprendre, observer et concerter Le processus d’acceptabilité sociale doit nécessairement passer par des étapes successives d’information et de concertation propices à favoriser la compréhension des enjeux, contexte, objectifs du projet ; à accompagner son appropriation par les usagers concernés (ne pas contourner les phases de conflits, préalable bien souvent nécessaire à la recherche de consensus) pour in fine, aboutir (ou non) à son acceptation. De ce point de vue, l’appréhension de l’acceptabilité sociale réclame la mise en place de démarches participatives dès la phase d’élaboration du projet, et jusqu’à sa phase d’évaluation, pouvant conduire au déploiement de dispositifs de gouvernance citoyenne. De fait, il est essentiel d’identifier les conditions sociales et culturelles (les systèmes de valeurs, les héritages et les contextes sociétaux dans lesquels ils s’inscrivent) qui prévalent ou accompagnent les dispositifs de participation/concertation. Cette étape exploratoire s’avère nécessaire pour comprendre les fondements mêmes de l’acceptation ou la non-acceptation sociale : quelles sont les propres rationalités des acteurs et des usagers, dans quelles dynamiques historiques et contemporaines se fondent-elles et en quoi se confrontent-elles, se recoupent-elles avec les enjeux politiques ? Capital social Sollicitée par les praticiens des politiques publiques depuis la fin des 1990, la notion de capital social souffre d’un manque de visibilité et surtout de clarification. Bien que difficile à cerner du fait de son caractère multidimensionnel, le concept de capital social a initialement été développé par Bourdieu en 1986, dans une optique strictement individuelle. Le courant anglo-saxon, porté par Putman (1993) confère au capital social une dimension collective et territoriale. Il est proposé de retenir la définition récemment revisitée par les travaux du CEMAGREF (Jean-Marc Callois). « Un ensemble de ressources encastrées dans la structure sociale, utilisables de manière volontaire par les individus. » Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 14 sur 39 Le capital social s’organise autour de l’individu considéré en tant que ressource propre, partant du principe que les systèmes interrelationnels constituent une force territoriale à part entière, à l’image du poids des réseaux informels dans l’accès à l’emploi (30 % des offres sur le « marché caché »). Deux approches complémentaires théorisent le capital social. D’une part celle qui considère les structurations sociales qui permettent la création du capital social, s’intéressant de fait à la nature et la forme des réseaux sociaux. D’autre part celle qui analyse la dynamique globale de l’interaction entre les individus, socle et facilitateur de l’action collective – perspective retenue ici. Le capital social, ou les déterminants de la structuration territoriale Le CEMAGREF aborde le capital social sous l’angle de l’interaction entre l’identité sociale, la cohésion territoriale et les stratégies de développement local, considérant que les paramètres sociologiques conditionnent les gouvernances locales. De ce point de vue, c’est la corrélation entre le fondement social des territoires et la coopération entre les acteurs qui fait osciller le curseur sur une ligne tirée entre deux mouvements extrêmes : cohésion communautaire : liens sociaux forts, environnement sécurisé, ancrage territorial, repli communautaire ; ouverture sur l’extérieur : liens sociaux faibles et multi-niveaux, coopération qui s’engage à différentes échelles territoriales. Contrairement à ce que l’on pourrait croire de premier abord, le capital social ne se dilue pas dans le niveau de cohésion communautaire, celui-ci pouvant même constituer un frein à la « bonne santé » du capital social d’un territoire. Des études de cas révèlent en effet que sur les secteurs à haute cohésion communautaire, en zone rurale particulièrement, la dynamique collective peine à prendre place tant l’organisation sociale se centre sur du micro local, comme le hameau. De même, ces territoires « fermés » éprouvent généralement les plus grandes difficultés à s’inscrire dans la coopération intercommunale. La production de capital social réclame à la fois identité et cohésion territoriale, mais aussi ouverture à l’extérieur, à travers l’existence de réseaux sociaux élargis et de différentes natures.. A lui seul, le capital social peut être le ciment de l’engagement de partenariats forts entre des acteurs ou des territoires, mais il est néanmoins souvent subordonné à la présence d’un cadre institutionnel (une démarche Pays par A titre d’exemple... exemple) qui lui permettra de s’exprimer. En 2000, la définition du périmètre du SAGE Basse Vallée de l’Aube en projet a fait l’objet de vifs débats dans la mesure où celui-ci ne concernait qu’une partie du bassin versant (le tiers aval), en raison de caractéristiques et d’enjeux de gestion bien différenciés. De fait, les préconisations formulées n’auraient pas de valeur réglementaire hors des limites du périmètre, malgré la nécessité de considérer les interactions amont-aval et d’envisager des solutions à portée globale. L’agrément n’a été accordé qu’à la condition qu’un dispositif de coordination soit mis en place à l’échelle du bassin. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 15 sur 39 Se sont clairement posées ici des problématiques de coopération des acteurs à l’échelle d’un bassin. La grille de lecture du « capital social » nous invite à émettre l’hypothèse de microterritoires où la coordination se révèle efficace par sous-bassins, mettant toutefois à l’épreuve les capacités internes à engager une dynamique élargie aux territoires connexes, qui peuvent certainement contribuer à identifier des solutions adaptées. Bénéfices sociaux et « plus-value sociale » de la gestion de l’eau Aux côtés de la mesure classique des bénéfices environnementaux et économiques des politiques de l’eau, celle des bénéfices sociaux fait une timide apparition dans les programmes d’évaluation. Les bénéfices sociaux peuvent s’entendre dans l’appellation plus englobante de « plus-value sociale » qui resitue l’évaluation d’une politique dans le long temps des processus sociaux. Explorée par les chercheurs canadiens depuis le début des années 2000, la plus-value sociale est ainsi définie : «Valeur accrue indirectement au profit de l'ensemble de la ou des collectivité(s) territoriale(s). La plus-value peut ne pas résulter d'un travail et être due, par exemple au développement social ou à une infrastructure.» La plus-value sociale se positionne ainsi sur les effets indirects – et non attendus initialement – d’une politique ou d’un projet, tels qu’ils sont amenés à se produire non seulement sur le périmètre de gestion mais bien plus largement sur le(s) territoire(s) interconnecté(s), en somme à considérer les « remontées du local », là où se confrontent et parfois s’emboîtent gestion de l’eau et spécificités territoriales. Elle ambitionne de porter un regard à la fois rétrospectif et prospectif en considérant un triple pas de temps : celui du projet, celui de son appropriation par les acteurs locaux et les populations concernées, celui des dynamiques sociétales qui précèdent, accompagnent et suivent sa mise en place. Elle s’organise autour de la question suivante : comment l’application d’une politique environnementale affecterat-elle le mode de vie actuel et futur des individus et des collectivités ? Il s’agit donc d’apprécier, analyser, évaluer un système interactif entre les sociétés et les écosystèmes, les uns répondant aux autres, les uns évoluant avec les autres. A la frange de l’environnement, de l’économie et de la société, la notion de plus-value sociale reste aujourd’hui sous-investie méthodologiquement, d’où le nécessaire travail de délimitation de ses contours. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 16 sur 39 L’observation sociale, exercice pratique Considérer : les impacts sociaux : effets à court et moyen terme du projet sur le périmètre de gestion ; les incidences sociales : effets directs, indirects, cumulatifs,synergiques, positifs et négatifs à long terme et sur un espace à géométrie variable, conditionnées par le projet, par son appropriation par les groupes sociaux et par les évolutions sociétales en marche. Une grille d’analyse construite a minima autour des paramètres suivants : modes d’organisation politique, sociale et culturelle des territoires investigués relations entre des groupes d’acteurs ou d’usagers (réseaux de sociabilité) relations entre les usagers de l’eau et le milieu aquatique (usages, pratiques et représentations) relations entre le « territoire de projet » et le « territoire d’appartenance» (lien eau et territoire) l’équité des accès aux ressources naturelles et aux services associés modes de transmission et d’expérimentation du milieu naturel (éducation, sensibilisation, savoirs et savoir faire..). Des indicateurs quantitatifs et qualitatifs attachés aux effets d’entraînement d’une politique de l’eau concernant : la sociométrie des territoires : évolution démographique, enjeux de développement, axes de communication et infrastructures, état de l’emploi et prospective,.... ; la cohabitation eau et territoire : évolution des usages de l’eau, coordination des politiques eau et territoire (SAGE/SCOT/PLU…), perception du projet « eau » par les acteurs et publics, perspectives d’aménagement du territoire en lien avec le projet « eau » ; la gouvernance et participation citoyenne : évolution de l’organisation socio-politique, des logiques d’acteurs et des compétences, modalités de concertation et outils de communication, quantification et qualification des publics concernés, effets sur les processus décisionnels, effets sur les publics, sur l’engagement des acteurs, sur les partenariats engagés, sur les changements de pratique,… ; l’économie locale : initiatives (offre de services et équipements) pouvant accompagner le projet de gestion de l’eau, emplois directs et induits, évolution des activités industrielles, agricoles, touristiques, récréatives, dépense touristique moyenne, répartition des retombées économiques… ; le cadre de vie, bien-être, valeurs attribuées à la ressource et aux milieux naturels : valorisation des paysages et évolution des pratiques des sites naturels (fréquentation, perception), image et attractivité du territoire, pratiques de loisirs, perceptions des populations sur le cadre de vie,… ; l’équité, l’accessibilité à la ressource et aux milieux naturels : équité entre l’ensemble des groupes sociaux du territoire, gestion partagée de l’eau, accessibilité aux services d’eau potable et d’assainissement, aux berges des cours d’eau (handicap…),… Offrant la part belle à la synergie des indicateurs qualitatifs et quantitatifs, l’observation des effets sociaux d’un projet de gestion de l’eau démontre une capacité à « faire parler les chiffres », ainsi propice à porter Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 17 sur 39 l’argumentation auprès des élus et des acteurs mobilisables : comment évoluent de pair fréquentation des sites et perception positive des paysages, par exemple. La dimension sociale s’avère tout à fait pertinente et « vendeuse » dès qu’il s’agit d’exposer les bénéfices possibles en matière de dynamique d’acteurs et de démocratie de proximité (effets dus à la mise en débat d’un projet, à l’appropriation partagée des actions environnementales), d’impulsion économique et de qualité du cadre de vie (actions d’aménagement et de promotion touristique qui peuvent accompagner un projet de restauration physique, par exemple), de positionnement territorial et d’image des collectivités autour des notions d’eau biencommun et du souci apporté au développement durable. Certainement amenés à s’imposer en expériences éclairantes de la plus-value sociale, les programmes de réhabilitation des tronçons dégradés des rivières périurbaines (Yzeron à Oullins, Gier à Rive-de-Gier…) portent des enjeux de gestion de l’eau qui s’inscrivent étroitement dans les enjeux du territoire, en termes de protection contre les inondations, de requalification urbaine et de stratégie d’image pour des zones urbaines en mal de visibilité et de rayonnement à l’échelle des métropoles. L’on voit bien que, en dépit d’une dénomination quelque peu réductrice, la plus-value sociale dépasse la seule question de la valeur ajoutée pour démontrer concrètement comment les problématiques eau et territoire peuvent avancer de concert. L’étude de suivi socio-économique du programme de restauration hydraulique et écologique du Haut-Rhône (Maison du Fleuve Rhône, 2008) livre un certain nombre d’enseignements sur les thématiques « cohabitation et territoire », « effets d’entraînements sur l’économie locale » et A titre d’exemple… « cadre de vie ». Dans ce contexte, la plus-value sociale se lit à travers l’émergence d’initiatives sur le territoire s’articulant avec le projet écologique (remise en eau, revégétalisation de 24 lônes) sous l’impulsion du Syndicat du Haut-Rhône, l’acteur moteur localement. Impacts directs sur le périmètre concerné : le projet écologique a motivé les prestataires de canoë-kayak à se coordonner autour d’une promotion commune et d’une charte qualité ; une augmentation effective de la pratique nautique a été constatée ; relance de la pêche professionnelle et mise en place de circuits pêche ; requalification sociale des lieux (anciens « no man’s land »). Incidences territoriales potentielles, appréciables au long terme : articulation de la restauration écologique avec les projets de tourisme structurants à vocation supra-régionale (remise en navigabilité du Haut-Rhône, vélo route) ; incidences économiques liées aux usages de loisirs et de tourisme ; intégration du Rhône dans la promotion touristique du territoire jusqu’alors essentiellement orientée sur les dimensions « montagne » et « lacs ». Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 18 sur 39 SOLIDARITES DE BASSIN Mobilisée par les gestionnaires et les acteurs institutionnels, la notion de solidarité de bassin est invoquée dès lors qu’apparaissent des problématiques de gestion quantitative ou qualitative de la ressource, ou qu’émergent des conflits d’usages ou d’intérêts entre l’amont et l’aval. Le recours à une logique solidaire encourage les collectivités, syndicats, usagers de l’eau ou simples particuliers à mettre en cohérence leurs interventions et pratiques, dans le respect des équilibres naturels et de la satisfaction des usages. Au nom de la valeur patrimoniale de l’eau, on en appelle au sens civique de tout un chacun, qui se doit de développer une vision globale du territoire et d’être conscient des effets que son action génère à l’aval. Si une telle dynamique solidaire est structurée institutionnellement et économiquement au niveau des syndicats intercommunaux – du moment où ceux-ci sont coordonnées à l’échelle du bassin -, et si elle suit les principes de participation financière à la gestion des équipements et services relevant de l’intérêt général, elle peine aujourd’hui à s’organiser socialement, notamment au plan des pratiques individuelles. Celles-ci rendent en effet visible le paradoxe de la solidarité amont-aval, dont les mécanismes sociaux se calquent sur les mécanismes naturels des cours d’eau. De ce point de vue, les fondements solidaires peuvent paraître inéquitables : le sacrifice des uns (utilisation raisonnée de la ressource en eau, limitation des impacts dans le milieu) pour la satisfaction générale, en l’absence de mesure compensatoire qui rendrait l’équation juste. Si les contributions financières en matière d’équipements et de services intercommunaux sont activées, elles s’engagent plus rarement en faveur d’un soutien des changements de pratiques individuelles, en dépit des pressions exercées par les communes et populations de l’aval. S’imposent ici les questions de consentement à payer pour la protection de la ressource et des milieux, visant à rendre chacun contributeur de l’effort collectif. Au-delà, il s’agit de s’interroger sur les systèmes compensatoires autres que financiers qui pourraient participer de cette solidarité (valorisation des productions agricoles de l’amont et création de circuits courts, promotion sur le territoire des usagers/entreprises « respectueux » des milieux naturels, etc.), et plus encore d’identifier les moteurs du changement social. Mais le développement d’une chaîne solidaire soulève des questionnements préalables : les usagers, habitants, acteurs locaux disposent-ils réellement d’une vision de bassin versant ? Dans quelle mesure le cours d’eau tient-il une place structurante dans l’appréhension du territoire « vécu » ? Raisonnent-ils en termes d’amont-aval ? En fin de compte, peut-on véritablement employer la notion de solidarité de bassin au singulier ? Ne devrait-t-on pas plutôt s’interroger sur les solidarités existantes ou potentielles – solidarité institutionnelle, solidarité « sous contrainte » (réglementaire, politique….), solidarité de l’entre-soi …, ainsi que les formes qu’elles prennent, sont amenées à prendre, ou ont pu être prises par le passé ? Questionner le ciment solidaire à l’échelle d’un bassin demande donc d’examiner de plus près le triptyque territoire vécu / eau / usagers et populations résidentes, d’explorer le sentiment d’appartenance (à un territoire, une communauté d’usagers…), de disposer d’une vision historique et prospective sur les usages du bassin et les composantes territoriales. En somme, de se livrer à un exercice approfondi des dimensions institutionnelles et politiques, économiques et sociologiques du bassin à différentes échelles. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 19 sur 39 VISIBILITE, INVISIBILITE DE LA RESSOURCE Le rapport de l’homme à l’eau repose très étroitement sur la pratique qu’il institue directement avec le milieu aquatique. Si le lien se crée spontanément par l’usage du cours d’eau (irrigation, industrie, loisirs en bord de rivière), il peut également s’en trouvé distendu et dématérialisé par le simple geste d’ouvrir le robinet d’eau. Dans ce cas précis, la pratique est remplacée par la consommation, c’est-à-dire par l’achat d’un produit - géré, traité, distribué – acté par la facture d’eau. Plus encore, dès lors que l’eau potable provient des nappes phréatiques, son caractère impalpable s’en trouve renforcé, le rapport à l’eau se focalisant sur un objet invisible et inaccessible (l’eau souterraine) plutôt qu’un milieu fréquentable (l’eau de surface). La question de la visibilité de la ressource prend tout son sens quand on la rapporte à la volonté de communiquer, sensibiliser, mobiliser autour des enjeux de l’eau. Visible par l’usage, l’eau s’ancre profondément dans la façon de vivre le territoire, la rivière en est partie prenante, ainsi plus aisément « mobilisatrice ». Invisible, elle s’exprime à travers la posture du consommateur distancié, moins soucieux des questions de préservation des milieux aquatiques. A cette forme d’invisibilité s’ajoute celle de l’opacité de la gestion de l’eau, le citoyen ordinaire éprouvant de sérieuses difficultés à se repérer dans les rouages d’un système multi-niveaux et multiacteurs. Une des problématiques majeures de la gestion quantitative et qualitative de la ressource tient à la faible mobilisation des acteurs et usagers autour des eaux souterraines, véritables symboles de l’eau invisible. Si l’intérêt grandit en situation de crise (déficit hydrique, pollution avérée), il peine à s’amorcer autour des seules démarches préventives. Dans un quotidien banalisé par la répétition des gestes de consommation, l’attention portée à l’eau devient prégnante quand la rivière se dévoile, placée sous les feux des projecteurs à l’occasion d’un épisode d’inondation, d’étiage sévère, de pollution ponctuelle (rivière menace) ou d’un projet de valorisation des paysages et patrimoines fluviaux, de promotion touristique (rivière agrément, vecteur d’image). La mise en visibilité de la ressource en eau constitue-t-elle une des voies de sensibilisation et d’engagement citoyen en faveur d’une gestion équilibrée et partagée de l’eau ? Mais l’on peut se demander si la « mise en scène » de l’eau est suffisante pour catalyser l’implication des acteurs et des citoyens au-delà de l’effet d’actualité, au-delà également de l’instrumentalisation possible de l’eau par le politique et l’acteur militant qui verraient là une opportunité parfaite de sauter à pied joint dans le débat public… En somme, faut-il nécessairement passer par une mise en visibilité pour hisser la valeur patrimoniale de l’eau aux tous premiers rangs des préoccupations ? Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 20 sur 39 Pré-enquête « Perception des micro-polluants toxiques par les pêcheurs amateurs et professionnels du Rhône ». (ZABR – MDFR 2007). A titre d’exemple… L’enquête ethnologique explore un thème spécifique de l’invisibilité de l’eau : la pollution par les PCB. Recourant à des indicateurs sensoriels pour estimer qualité de la ressource (vue, odorat et toucher principalement), les pêcheurs se disent particulièrement déroutés par l’imperceptibilité de la pollution par les micro-polluants : « une souillure informe, incolore, inodore, impalpable et qui ne transmet aucun goût particulier à la chair du poisson » (extrait d’entretien avec un pêcheur du Rhône). Cette pollution invisible ré-interroge la pratique même du pêcheur qui ne peut se fier à son expérience et ses propres savoirs, ainsi soumis à l’information externe transmise par les messages scientifiques et institutionnels. Une information généralement jugée incomplète, qui en fin de compte n’atteint pas les objectifs escomptés : au lieu de rassurer, elle inquiète, ouvre la porte au doute, voire dénature le lien de confiance établi avec les pouvoirs publics. GOUVERNANCE ET DISPOSITIFS PARTICIPATIFS La gouvernance, s’opposant conceptuellement au mode traditionnel de gouvernabilité (la capacité d’une société à être gouvernée ou à se gouverner elle-même), se prévaut des principes de transversalité et de subsidiarité. Elle ambitionne une gestion partenariale de l’action publique, la prise de décision s’effectuant sur la base d’une négociation entre les parties prenantes, suivant les principes. Elle suppose de fait une dynamique de démocratie participative qui associe les acteurs institutionnels et les représentants de la sphère civile – elle peut également, à une ou plusieurs étapes du processus, impliquer des citoyens « ordinaires ». Dépassant le seul temps de l’action, elle doit contenir les modalités de sa pérennisation, pour une gestion concertée et durable sur le territoire de projet. Si la gouvernance suppose la mise en place d’un processus participatif, mis en œuvre dans le cadre d’une politique ou d’un projet territorial, ce dernier n’a pas nécessairement de visée décisionnelle. Ces processus recouvrent en effet les différents degrés de la participation des acteurs et citoyens, de la consultation à la codécision, palier le plus abouti. Autant de modalités d’orchestrer les exigences démocratiques sur un territoire à l’aide des outils de communication qui vont permettre à l’opérateur d’engager un dialogue ou de transmettre un message, à travers la médiation (intervention d’un tiers en charge de traduire les points de vue, connaissances et positionnements des participants) ou la négociation (recherche de consensus et de compromis permettant d’aboutir à une décision respectant au mieux les intérêts des parties prenantes). Pour mémoire En matière de concertation, le champ de l’environnement s’est imposé comme un véritable « laboratoire » de démocratie participative depuis la fin de années 1970 – suivant la mouvance anglo-saxonne – avant de s’ouvrir à d’autres domaines au tournant du 21e siècle (développement social urbain, urbanisme, services publics...). La loi de 1976 stipule en effet le « droit à l’information en matière d’environnement », suivie par Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 21 sur 39 la réforme de l’enquête d’utilité publique (1983), puis de la Loi Barnier (1995) qui institutionnalise le débat public en créant la Commission Nationale du Débat Public en charge de « répartir les parts du débat » mais sans se prononcer sur l’application du processus de décision. Enfin, la loi relative à la démocratie de proximité (2002) réaffirme le principe de participation citoyenne par l’instauration d’une série de mesures propres à renforcer les moyens d’expression des citoyens. Les niveaux d’association des acteurs et publics Information Ce premier niveau ne s’intègre aux processus participatifs que dans la mesure où il constitue un moyen de renforcer leur efficacité (information des participants aux dispositifs concertés). En soi, l’information n’est nullement participative du moment où elle s’établit de manière unilatérale, partielle (sélection de l’information transmise), descendante, sans capacité - ou minime – d’interaction opérateur-récepteur. Consultation Processus de communication qui ambitionne une interactivité avec le public cible, dans l’optique de favoriser l’adhésion à un programme et/ou de sensibiliser les citoyens. Le public est appelé à donner son avis au travers d’outils tels que les réunions publiques, les forums Internet, les questionnaires. La participation reste néanmoins limitée : d’une part la consultation s’opère bien souvent au moment de la mise en œuvre du projet (elle a alors, au mieux, pour vocation de valider les options prises), d’autre part, étant rarement précédée d’une « formation » (médiation) aux enjeux et objectifs du programme, le public ne dispose pas des connaissances suffisantes pour émettre une opinion jugée pertinente par l’opérateur. Il s’agit donc, le plus souvent, de se soumettre à un exercice imposé par les nouvelles réglementations européennes, sans réelle efficacité au vu des modalités d’application de la consultation. Concertation Démarche participative associant la sphère institutionnelle et la société civile, calquée sur le temps du projet (de sa définition à son évaluation). Ainsi initiée dès l’élaboration du programme, elle doit permettre d’interroger ses orientations, d’ajuster ses modalités au contexte sociétal (spécificités du territoire, contraintes et besoins exprimés par le terrain), d’accompagner sa mise en œuvre et d’évaluer ses effets au plus près des sensibilités locales. La concertation suppose : une réflexion approfondie quant à la composition du groupe, la qualification de ses membres, le rôle dévolu à chacun et les attendus quant à leur présence ; la détermination de ce qui est négociable et ce qui ne l’est pas (objectifs, modalités de mise en œuvre), les marges de manœuvre existantes à présenter d’entrée de jeu aux participants pour pallier les ressentis possibles de « concertation alibi », qui pourraient bloquer la bonne conduite du processus l’identification en amont des pouvoirs accordés au groupe, la capacité d’influence sur la prise de décision ; Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 22 sur 39 un partage préalable et en continu de l’information (bases de connaissance et construction d’une vision commune des problématiques), des tenants et aboutissants du projet, dans une optique d’apprentissage collectif, sans oublier les étapes de restitution ; l’instauration d’une relation de confiance, une attention portée à la capacité d’expression de l’ensemble des participants, en limitant les effets d’imposition et en partant du principe que chacun dispose d’un point de vue légitime – amené à croître tout au long du dispositif – , d’une rationalité en propre ; d’accepter, pour les gestionnaires et politiques, les effets produits par l’appropriation du débat autant que du projet par les acteurs (redéfinition des règles du débat, réorientation, ajustement du projet) ; Un exercice difficile et rarement satisfaisant pour les techniciens, confrontés à de multiples obstacles : les lourdeurs de gestion d’une démarche établie sur le long terme, l’essoufflement probable des participants au fil du temps ; la difficulté à assurer la représentativité des participants de la société civile, à les mobiliser, à expliciter les attendus et rôles de chacun, à favoriser une prise de parole « décomplexée » ; les différentes temporalités à faire coïncider (temps du projet, temps des mandats politiques, temps de l’appropriation par les publics.) ; la prise en compte des contraintes des acteurs, des points de blocage et des conflits d’intérêt susceptibles de dominer les échanges, sans trop dévier des objectifs opérationnels. Co-construction Dispositif qui invite les participants à définir, suivre et évaluer collectivement une action, certains étant directement associés à la prise de décision, d’autres plus indirectement, mais tous disposant d’une capacité à peser sur celle-ci. Co-décison Mode d’association le plus actif et le plus impliquant, parfois organe décisionnel du dispositif de co-construction, il s’établit généralement sous la forme d’un contrat. Chacune située sur un pied d’égalité, les parties prenantes délibèrent, orientent et fixent les choix politiques et stratégiques. Représentativité, légitimité, responsabilité : les limites des démarches participatives Escompter une représentativité parfaite de la société civile au sein d’une arène de débat parait bien illusoire. Non seulement le citoyen « ordinaire » est difficilement mobilisable (comment le repérer, le convaincre, lui conférer une compétence sur des sujets dont il n’est pas toujours familier ?), mais il est tout autant peu aisément « représentable », y compris par les collectifs qui s’instituent en porte-parole. Le représentant d’usagers ou de citoyens ne porte bien souvent que le point de vue de son organisation, pas nécessairement majoritairement partagé par ses membres. En outre, alors que l’engagement dans les associations ou organisations syndicales reste relativement marginal sur les territoires, celles-ci sont expressément invitées à s’exprimer « au nom de », qu’elles soient en capacité ou non de relayer la diversité des points de vue et positionnements. Il s’agit donc de s’interroger, dès l’amont, sur les finalités de l’exigence de diversité, les connaissances minimales requises pour prendre part aux débats (connaissances qui peuvent être transmises en ateliers Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 23 sur 39 de formation préparatoires), l’écoute accordée aux voix discordantes et aux « capacités profanes », et, audelà, la façon dont les différents points de vue seront intégrés dans le réajustement des objectifs et/ou modalités du projet. Sans oublier la voix des « absents » qui, en creux, peut s’avérer fort instructive… En droite ligne de la représentativité, se pose la question de la légitimité des participants. Décideurs, acteurs reconnus sur la scène locale et experts se partageraient la compétence et la vision stratégique du territoire, quand le citoyen, l’usager lambda ou le collectif en peine de reconnaissance se verraient plus généralement assignés au rôle de « candides » peu avertis des dimensions stratégiques du projet et aussitôt suspectés, au choix, de courte vue, de corporatisme, d’individualisme au mépris des intérêts communs, voire d’incompétence flagrante sur les questions débattues… Le trait est grossier, mais la tendance reste néanmoins bien présente dans les instances de concertation, quoique de moins en moins à mesure que les pratiques de participation se diffusent plus largement sur les territoires. L’on considère aujourd’hui la légitimité sous l’angle d’un processus actif, c’est-à-dire qu’elle se gagnerait au fil des séances de concertation, de fait moins liée à une représentativité établie qu’à la pertinence des argumentaires des participants et à l’accroissement des capacités par l’apprentissage collectif. Questionner la légitimité des participants suppose, en miroir, de mettre à l’épreuve la légitimité du dispositif, et par là du maître d’ouvrage : le dispositif choisi (concertation, co-construction, co-décision) correspond-il aux objectifs initiaux ? Les règles de la participation ont-elles été suivies ? Le maître d’ouvrage a-t-il respecté ses engagements, notamment dans le processus décisionnel ? Est-il bien légitime pour porter le débat ?... Enfin, il s’agit de prendre en compte les effets de dilution de la responsabilité individuelle dans le collectif (D. SALLES , 2006), la collaboration pouvant conduire à resituer l’engagement de chacun en arrière-plan. Par ailleurs, le jeu démocratique peut finir par constituer un but en soi, au détriment de l’action environnementale pour laquelle le processus participatif a initialement été mis en place. Les « gains démocratiques » prédomineraient sur l’efficacité environnementale recherchée, au risque de décrédibiliser l’exercice participatif. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 24 sur 39 Les dispositifs participatifs : récapitulatif Niveaux de Pièce du dispositif Objectifs pour le Degré d’implication participation de gestion porteur de projet des participants Etapes du projet Panel d’outils Public concerné (exemple) Information Mise en œuvre du Présenter le projet, Public uniquement Mise en œuvre Newsletter Acteurs Volet C Contrat de rendre compte de son « récepteur » Evaluation Site Internet territoriaux rivière (information- avancement Conférence Usagers, citoyens communication) Consultation Exposition… Enquête publique Recueillir les avis Capacité pour projet de pour valider un projet d’expression, Panel citoyen Sage et/ou influence limitée Questionnaire susciter l’adhésion sur le projet Forums internet Dispositifs Favoriser la Implication, Lancement Ateliers Acteurs d’accompagnement mobilisation, prendre influence sur mise Mise en œuvre thématiques territoriaux des procédures de en compte les intérêts en œuvre du projet, Jeux de rôles Représentants gestion divergents, négocier mais rarement sur Séances plénières d’usagers-citoyens (ex. groupes les modalités du ses objectifs de débat public Usagers thématiques du projet Lancement Réunion publique Usagers, citoyens Consultation du public (DCE) Concertation Comité de bassin du élargis aux usagers concernés) Co-construction Elaboration d’un Initier une démarche Forte implication, Définition Séances du Comité Acteurs SAGE et mise en collaborative partage décisionnel (participation à) de Bassin territoriaux sur tout ou partie à évaluation place CLE Représentants du projet d’usagers-citoyens Elaboration d’un SDAGE et mise en place Comité de bassin Co-décicion, Contrat de rivière contractualisation partenariat Initier une démarche Partage du Définition à Séances du Comité Acteurs partenariale et définir processus évaluation, de rivière territoriaux des objectifs décisionnel pérennité du Représentants projet d’usagers communs Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 25 sur 39 PARTIE 2 Les méthodes de la socio-anthropologie L’exploration des conditions sociales, culturelles et politiques qui prévalent (et sont susceptibles d’accompagner) à la mise en œuvre des procédures de gestion de l’eau demande de recourir aux méthodes employées par la sociologie et l’anthropologie. Il peut s’agir d’observer et d’analyser : • la structuration d’un territoire de gestion et son évolution dans le temps ; • les modalités organisationnelles et les dynamiques des acteurs impliqués directement ou indirectement dans la gestion de l’eau ; • les représentations sociales, les « univers de référence » se rapportant à la ressource en eau, aux milieux aquatiques et au cadre de vie ; • les tendances sociétales et les comportements associés, la question du changement social ; • les dispositifs de concertation et de participation des publics. Le diagnostic territorial : structuration du territoire et organisation des acteurs Le diagnostic territorial fait appel à des formes d’investigation spécifique, distinctes des méthodologies classiques de l’enquête, qu’elle soit quantitative ou qualitative. Dans sa forme la plus aboutie, le diagnostic territorial s’intéresse à la fois au territoire (son portrait socio-économique, sa structuration) et aux acteurs, parties prenantes de son développement (les logiques organisationnelles, les connections établies, les compétences, les actions et perspectives). Le diagnostic, protocole méthodologique Intérêt Dresser un portrait de territoire (phase d’état des lieux) ; comprendre comment il se positionne vis-à-vis des territoires voisins, quels enjeux de développement il soutient, quelle vision politique il porte, à quelles contraintes il est soumis, comment les acteurs s’organisent et coopèrent (phase de diagnostic) ; proposer des stratégies d’action adaptées (phase des recommandations stratégiques) Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 26 sur 39 Limites Le diagnostic territorial montre ses limites s’il se contente d’un commentaire sur les enjeux de développement et les dynamiques en présence, sans examiner les interactions avec l’objet d’étude (l’eau, par exemple), l’imbrication des différentes échelles territoriales, les évolutions possibles non seulement au regard de son développement mais aussi en termes d’organisation et de jeux d’acteurs, bref s’il n’offre pas une vision éclairée de l’objet territorial dans toutes ses dimensions. Modes opératoires Recueil des données et des informations pertinentes Récolte de données en ligne et auprès des organismes nationaux, régionaux, locaux. Analyse presse et/ou documents de communication institutionnelle pour repérer les thématiques porteuses sur le territoire. Rencontre avec les acteurs territoriaux : interviews individuelles ou groupes focus (également appelés « groupes de réflexion » ou « ateliers collectifs »). La combinaison des deux outils s’avère bien souvent opérante dans une visée participative, mais il semblerait que la seule utilisation des groupes focus ne puisse réellement prendre en compte les différents positionnements des acteurs, sauf s’ils partagent problématiques et visions sur le sujet (par exemple collectifs agricoles ou associatifs). Carte d’identité du territoire et modes organisationnels Composantes et tendances géographiques, économiques, démographiques, sociales, culturelles, politiques Flux de personnes et de marchandises, axes de communications, attractivité et aires de chalandise,… Organisations territoriales et logiques d’acteurs : compétences, champs d’action, problématiques rencontrées, contraintes, opportunités et facteurs limitants, enjeux de l’aménagement du territoire,… Logiques opérantes et limitantes (forces/ faiblesses, opportunités/ menaces). Orientations stratégiques Analyse et regard prospectif (leviers d’actions et points d’achoppement, facteurs de changement…). Recommandations stratégiques et opérationnelles. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 27 sur 39 Représentations sociales, perceptions et pratiques. Deux approches complémentaires : le quantitatif et le qualitatif Deux méthodes sociologiques co-existent sans s’opposer, l’enquête quantitative et l’enquête qualitative, chacune destinée à des applications différentes. Selon les objectifs (mais aussi les moyens et les délais de réalisation) de l’étude, l’une et l’autre peuvent se combiner pour offrir une vision élargie d’une situation donnée, dans d’autre cas et en fonction des types de résultats attendus, l’une ou l’autre sera privilégiée. La combinaison des deux méthodologies peut s’opérer conjointement (si sujets, questions préalables ou cibles différents sur un même territoire) ou en deux temps, l’une succédant à l’autre. Par exemple, une investigation qualitative peut être conduite en premier lieu pour émettre des hypothèses et pistes de travail, vérifiées ensuite par l’approche quantitative. A l’inverse, l’enquête quantitative peut être menée initialement afin de disposer d’une vision globale sur le territoire, complétée par une enquête qualitative visant à préciser ou interroger les résultats du sondage. Attachée à l’appréhension des phénomènes sociaux et des relations engagées entre les groupes humains qui composent une société, la sociologie s’est traditionnellement orientée sur l’outil quantitatif dans une perspective de typologisation et de caractérisation du « fait social ». L’anthropologie culturelle et sociale développe une approche comparative pour étudier le caractère universel des structures des sociétés et des traits humains. L’ethnologie, branche de l’anthropologie, explore quant à elle les communautés sociales et culturelles au travers de méthodes qualitatives – celle relevant de l’ethnographie, soit la récolte de l’information là où elle se trouve –, érigeant l’ethnologue en véritable professionnel du terrain. L’étanchéité entre les disciplines et leurs méthodes n’est plus véritablement de mise aujourd’hui, nombre de sociologues, fonction de leur champ d’intervention (sociologie des organisations, sociologie de l’action publique…), s’intéressent à la dimension qualitative de l’investigation en articulant les outils méthodologiques, quand des ethnologues s’ouvrent aux paradigmes sociologiques en resituant leur pensée dans l’analyse sociétale. C’est pourquoi, et pour simplifier le propos, la dimension sociale sera ici évoquée sous l’angle de la socio-anthropologie de l’environnement, qui considère les composantes politiques, organisationnelles, culturelles, symboliques de l’interaction entre les hommes et la nature. L’approche quantitative Employée à des fins statistiques, l’approche quantitative permet de dresser un portrait des usages sur un territoire, de dessiner des tendances générales, de catégoriser des attitudes et des positionnements. Elle est également utilisée lorsque que l’on cherche à relever une opinion1 à un instant T se rapportant à un sujet donné. 1 L’opinion se différencie de la perception par son caractère évolutif, particulièrement volatil. La perception, elle-même évolutive mais sur des plus longues échéances, découle directement des représentations sociales (systèmes de valeurs et de cognition) relativement stables dans le temps. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 28 sur 39 Intérêts Tendre à la généralisation, comparer des faits sociaux à grande échelle, offrir une lecture rapide des phénomènes observés (faire « parler le chiffre »). Limites L’outil quantitatif montre ses limites dès lors qu’il s’agit d’analyser en profondeur une situation ou un positionnement particulier. L’usage de questions fermées posées à un vaste échantillon ne peut prendre en compte les postures contradictoires et la complexité des relations engagées par un individu avec son environnement (cadre de vie, milieu aquatique), encore moins de rapporter les expériences intimes et personnelles. Modes opératoires Outils : sondage téléphonique et/ou passation de questionnaires en face à face, en ligne ou par envoi postal. Questionnaire standardisé, essentiellement constitué de questions fermées (série d’items proposés au sondé), éventuellement couplées à quelques questions ouvertes (commentaire libre), plus difficiles à codifier et traiter au plan statistique. Biais pouvant influencer les résultats : questions complexes ou mal formulées, susceptibles d’orienter les réponses. Cible : constitution d’un vaste échantillon représentatif de la population : échantillonnage construit de façon « aléatoire » (sélection des personnes interrogées par tirage au sort), peu pratiqué en France, plus souvent par « quotas » selon des variables telles que le sexe, l’âge, la catégorie socioprofessionnelle, la localisation géographique. Taille approprié de l’échantillon : en théorie, plus l’échantillon est grand, plus il gagne en représentativité, mais tout dépend des objectifs poursuivis, du sujet posé et de la population ciblée. Les enquêtes d’opinion pratiquées à l’échelle nationale par les instituts de sondage visent généralement un millier de personnes, pour un coût approximatif de 1000 € HT par question. Des enquêtes plus modestes peuvent être conduites avec succès si certains paramètres sont modifiés : taille du territoire considéré, sélection de catégories spécifiques, etc. L’approche qualitative Axée sur la dimension « sensible » des usages sociaux et de leurs mécanismes, l’approche qualitative se donne pour objectif d’explorer finement le champ du social, des représentations et des systèmes de valeurs ainsi que les parcours des individus. Intérêt La méthode qualitative permet de repérer les conditions sociales et culturelles dans lesquelles s’inscrit un territoire, des usagers, une population, et de les rapporter aux perceptions et pratiques qui en découlent. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 29 sur 39 Limites Si l’enquête qualitative peut livrer des éléments signifiants pour conceptualiser un problème, elle ne peut prétendre à la généralisation du fait du faible échantillonnage et des conditions mêmes de l’entretien (questions ouvertes et thèmes adaptés à l’individu et la situation). La question de la représentativité du public-cible ne se pose pas dans ce cadre, puisque l’on cherche moins à catégoriser qu’à comprendre des logiques, des mécanismes de pensée, des trajectoires individuelles, des modes d’appropriation. Par ailleurs, l’interaction enquêteur/enquêté n’échappent pas à certains biais pouvant tenir aux rôles de chacun (l’enquêteur perçu comme « inquisiteur » ou « agent de l’Etat », l’enquêté soucieux de se conformer aux supposées attentes de l’enquêteur ou ne se sentant pas légitime à y répondre) ; aux thèmes de l’investigation (sujet trop sensible ou au contraire trop éloigné des préoccupations quotidiennes, guide d’entretien mal défini, questionnements orientés ou trop directs…) ou aux conditions d’entretien (suspicion de l’enquêté refusant d’être enregistré ; lieu non propice à une relation de confiance…). Enfin, l’interprétation des résultats et l’analyse qui en résultera est directement conditionnée par la capacité, l’expérience et même la sensibilité de l’enquêteur. Celui-ci, dans son interprétation des entretiens, doit être conscient des facteurs limitants et du rôle joué par l’interaction enquêteur/enquêté. Modes opératoires L’approche qualitative suppose un faible échantillonnage : la masse critique est située dans une fourchette de 25 à 60 individus, selon les objectifs de l’étude, le contexte et les catégories d’usagers à interroger. Dans sa forme la plus aboutie et en suivant les principes de la recherche scientifique, l’étude à caractère qualitatif suppose : de problématiser une question et de définir deux ou trois hypothèses qui seront validées ou infirmées à l’issue de l’étude ; de délimiter le terrain de l’investigation : périmètre géographique, catégories de population et variables à prendre en compte ; de construire les outils de l’investigation (grille d’entretien, questionnaires, supports) et d’identifier les modes d’entrée sur le terrains (informateurs privilégiés et relais, mairie et associations pour repérer les populations résidentes à contacter…) ; de réaliser une pré-enquête (d’une durée de quelques semaines et auprès de 10 à 15 personnes) pour tester la pertinence grille d’entretien/questionnaire et re-orienter si besoin la problématique et les hypothèses ; de conduire l’enquête de terrain proprement dite, avant de passer à la retranscription (totale ou par « filage ») des entretiens, puis la phase d’analyse qui devra porter un regard transversal sur l’ensemble des entretiens et en faire émerger les thématiques porteuses, les univers sémantiques récurrents, les paradoxes apparents et les contradictions discursives. L’approche qualitative décliner les outils suivants : Observation participante : l’enquêteur s’immerge au seind ‘un groupe pour partager une activit ou une situation particulière dans un double rôle d’observateur et d’acteur. Il doit savoir doser « participation » et « regard extérieur » afin d’être en mesure de relever des comportements qui paraissent anodins aux membres du collectif. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 30 sur 39 Observation directe : l’enquêteur ne participe pas à proprement parler à une activité collective mais se poste à un endroit stratégique (un bord de rivière par exemple) ou accompagne un individu (une journée de travail par exemple) pour relever des types de pratiques, sur un moment clé ou à plusieurs périodes de la journée, semaine ou année. Entretiens individuels approfondis, en face à face, s’étalant sur une durée d’une heure à deux heures, généralement au domicile de l’enquêté (ou un lieu de son choix), pouvant être renouvelés pour préciser certaines questions et/ou approfondir l’interaction. Un guide semi-directif (parfois non directif, donc très ouvert) structure l’entretien où une large place est accordée à la parole de l’individu. Entretiens collectifs (ou groupes focus, ateliers participatifs…) en groupes restreints (6 à 10 personnes par groupe) : - habitants et citoyens réunis sur la base du volontariat (parfois dédommagés) dans l’objectif d’appréhender des univers de références collectivement partagés dans un groupe relativement homogène, par catégories socioprofessionnelles, catégories d’usagers ou résidents d’un quartier. Une méthode originellement employée dans les domaines du marketing et de la communication, qui prend progressivement place dans le cadre des stratégies territoriales (identité et promotion d’un territoire, compréhension des positionnements des individu par rapport à une problématique ciblée) ; - acteurs locaux et représentants des collectifs d’usagers, réunis dans une optique de « groupe de travail/atelier participatif » afin de faire émerger une vision partagée ou un consensus sur une problématique donnée – outil notamment utilisé dans le cadre de l’élaboration ou l’évaluation des politiques publiques. Les entretiens collectifs peuvent également avoir pour objectif d’identifier des opportunités et solutions nouvelles, de type « réunion de créativité ». A noter que les entretiens individuels et collectifs peuvent s’accompagner de supports (photos, cartes, schémas ou objets) qui stimulent l’imaginaire et permettent de repérer plus aisément les symboles attachés à tel ou tel sujet. Quand l’objectif de l’enquête s’y prête, il peut arriver que l’enquêteur demande à l’enquêter de dessiner un schéma où il situe son domicile par rapport au cours d’eau, par exemple, afin d’explorer les « cartes mentales » propres à chacun. Du fait de leur complémentarité, entretiens individuels et collectifs peuvent se combiner au sein d’une même étude, chacun enrichissant l’autre. L’entretien individuel, plus proche de la sphère de l’intime, permet une analyse approfondie du discours d’un individu et de son positionnement propre sur un thème/situation donnée. L’entretien collectif a plutôt vocation à repérer des significations et des référents (univers de mots et d’expressions) collectivement partagés. Par ailleurs il prend toute sa pertinence dans le cadre des réunions d’acteurs/collectifs d’usagers conduites pour débattre et échanger autour d’une problématique ou d’un programme, faire dégager un consensus. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 31 sur 39 Ou plutôt de contre-exemple … Dans le cadre d’une étude d’évaluation contingente liée à l’amélioration de l’état écologique d’un cours d’eau, un des objectifs consistait à apprécier le consentement à payer pour la restauration d’un bien environnemental. A cet égard, un questionnaire a été envoyé aux habitants (foyers) et usagers (pêcheurs) du bassin versant concerné. Sur un sujet aussi sensible, difficile d’extrapoler les résultats de l’enquête qui comporte plusieurs biais. Ceux-ci sont relèvent principalement des moyens humains et financiers dévolus à l’étude. A titre d’exemple… Pour limiter les frais, le questionnaire est envoyé par voie postale, les répondants se comptant ainsi parmi les personnes les plus sensibilisées aux questions environnementales ou l’attrait du cadre de vie, et certainement les plus disponibles en temps (80 % de retraités). La réduction des coûts a également un impact direct sur la construction même du questionnaire, qui, n’ayant pas fait l’objet d’une expertise sociologique, s’avère particulièrement orientée. En effet, le questionnaire, accompagné d’un courrier de présentation du cours d’eau et des scénarios de restauration écologique, s’élabore autour d’une trentaine de questions balayant les connaissances et pratiques de la rivière, la perception de son état écologique et de son évolution, du montant maximum que le répondant serait prêt à payer annuellement via sa facture d’eau. Précisons que le questionnaire est jalonné de notes explicatives sur les problématiques du bassin versant, la dégradation du cours d’eau concerné, les pollutions constatées, les bénéfices environnementaux d’un projet de restauration. C’est bien là que les biais surgissent : à une question telle que « Pensez-vous que l’état écologique de la rivière s’est amélioré ces 10 dernières années ? », comment le répondant pourrait-il cocher la case « beaucoup amélioré » quand un encadré précise les fortes dégradations subies par la rivière depuis les années 1950 ? Idem avec la question sur les bénéfices attendus (également largement explicités dans un encadré) immédiatement suivie de celle sur le consentement à payer pour profiter de ces bénéfices. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 32 sur 39 Mise en pratique à partir d’une situation fictive La situation Sur un bassin versant X, se posent des problèmes de pollutions agricoles diffuses de l’eau brute qui alimente les communes du bassin, principalement causés par les usages agricoles de l’amont et l’érosion des sols conséquente. Les gestionnaires de l’eau souhaitent accélérer le projet de protection d’aire d’alimentation du captage, mobiliser plus activement les porteurs de projets et les usagers les plus directement concernés sur le périmètre par le biais d’actions de conseil et coordination, de mise en place mesures agri-environnementales, de techniques innovantes. Bien que nombre d’acteurs locaux se déclarent conscients de la nécessité d’intervenir, les premières négociations se heurtent à des blocages susceptibles de freiner la mise en œuvre du processus, qu’ils soient d’ordre économique (gel du développement du territoire, perte de foncier, mesures compensatoires,..) ou social (défauts de circulation de l’information, résistance au changement, ..). Les acteurs La commune située en partie sur le périmètre (en projet) de protection, responsable de la qualité de la ressource et de l’eau distribuée : les élus et techniciens concernés Les institutions et organismes socio-professionnels impliqués dans la gestion de l’eau, la politique agricole et l’aménagement du territoire : les acteurs locaux, départementaux, régionaux Les usagers de l’eau concernés par le projet : 25 exploitations agricoles Les consommateurs de l’eau potable captée à l’amont : 40 000 résidents Les objectifs opérationnels Pour faciliter le lancement du projet de protection d’une aire d’alimentation de captage et favoriser la mobilisation durable des parties prenantes, une étude à visée compréhensive et stratégique est lancée sur une durée de 6 à 8 mois. 1 – Disposer d’une vision éclairée des enjeux d’articulation des logiques « eau » et « territoire », du positionnement des différents acteurs en présence, des réseaux effectifs. 2 – Comprendre la réalité des usages et des pratiques de l’eau, des représentations sociales associées, de l’effectivité des formes de solidarité à l’œuvre sur le bassin, des déterminants sociaux pouvant accompagner le changement. 3 – Définir une stratégie d’actions orientée sur la participation des acteurs et des usagers, sur le rôle à jouer des consommateurs, sur les formes de négociation à engager et les argumentaires à développer, sur les types de mesures à mettre en place. Les méthodes potentiellement mobilisables Successivement ou de manière concomitante, le protocole d’étude peut recourir aux différentes méthodes de l’ingénierie des territoires et de la socio-anthropologie de l’environnement, fonction des objectifs, des résultats attendus et des cibles de l’investigation. Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 33 sur 39 1 – Disposer d’une vision éclairée des enjeux d’articulation des logiques « eau » et « territoire », du positionnement des différents acteurs en présence, des réseaux effectifs. Æ Réaliser un diagnostic territorial et organisationnel pour contextualiser la problématique, identifier les enjeux porteurs et les logiques d’acteurs, les actions en cours ou programmées, les contraintes et les opportunités, les tendances de développement, les formes de cohabitation « eau et territoire ». Récolte des données existantes (sites Internet des institutions, données INSEE, études socio-économiques…). Entretiens individuels : 15 à 20 entretiens auprès des « informateurs privilégiés » du territoire (collectivités, services de l’Etat, chambres consulaires, associations et organisations socio-professionnelles..). 2 – Comprendre la réalité des usages et des pratiques de l’eau, des représentations sociales associées, de l’effectivité des formes de solidarité à l’œuvre sur le bassin, des déterminants sociaux pouvant accompagner le changement. Æ Conduire des enquêtes de terrain à dimension qualitative auprès des différentes cibles identifiées pour explorer finement les rapports à l’eau et au cadre de vie, les systèmes de valeurs associés, les formes de sociabilité, les facteurs opérants ou limitants de changement de pratiques. Entretiens approfondis auprès de différentes catégories d’acteurs et d’usagers parmi les plus directement concernés : 20 à 30 entretiens (élus, techniciens de mairie, usagers agricoles) Groupes focus par « sphères » : un groupe « élus », un groupe « agriculteurs », 2 à 3 séances par groupe, visant à identifier collectivement les points d’achoppement et les facteurs du changement. Æ Conduire une enquête socio-économique quantitative (intégrant l’analyse économique contingente), pour caractériser les tendances sociétales à l’échelle du bassin et des territoires connexes et caractériser les comportements de consommation, la vision des enjeux de l’eau et du développement durable, les attentes en matière de protection des milieux, les questions de consentement à payer dans une perspective solidaire. Sondage téléphonique auprès des consommateurs d’eau potable : échantillonnage par quotas selon des variables telles que le sexe, l’âge, la CSP, le lieu de résidence (1 à 2 % de la population totale). 3 – Définir une stratégie d’actions orientée sur la participation des acteurs et des usagers, sur le rôle à jouer des consommateurs, sur les formes de négociation à engager et les argumentaires à développer. Æ Sur la base des résultats du diagnostic et enquêtes conduits préalablement, faire des recommandations stratégiques et opérationnelles construites autour des enjeux, des modalités d’action et des cibles, permettant de répondre aux questions suivantes : qui mobiliser, dans quelle perspective, sur quels acteurs relais s’appuyer, quelles argumentations porter, quels dispositifs de concertation/ information mettre en place ? Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 34 sur 39 PARTIE 3 Perspectives opérationnelles Face aux nouveaux défis qui se posent aux techniciens de la gestion de l’eau, de plus en plus interpellés sur les questions sociales, qui désormais s’affichent dans les dispositions du SDAGE, il est ici proposé de formaliser une série de questions à résonance sociale. Loin d’être exhaustives, elles offrent un regard transversal sur les multiples aspects sociétaux qui interfèrent avec les objectifs de gestion. Des besoins de connaissance… Bon état des milieux aquatiques Comment mesurer la perception de la qualité des milieux aquatiques par les différents usagers et les citoyens ? Quels sont leurs prismes de vue, les critères de perception ? Comment communiquer sur le bon état et ce qu’il signifie ? Quelles conclusions pour conduire les consultations du public, pour informer sur la politique de l’eau et sensibiliser aux différents enjeux en présence ? Restauration physique Dans le cadre d’un ambitieux projet de restauration physique d’une rivière, quelles sont les clefs essentielles pour favoriser l’adhésion, la participation des différentes catégories d’usagers (riverains, pêcheurs…) ? Dans le cadre d’un ambitieux projet de restauration physique d’une rivière, quels peuvent être les argumentaires socio-économiques déterminants vis-à-vis des porteurs de projet potentiels pour déclencher/accélérer leur décision et faire en sorte que ce projet devienne un projet de « développement local » ? La restauration physique peut aller à l’encontre de la préservation du patrimoine local (patrimoine bâti, seuils, moulins…) : comment dès lors intégrer cette difficulté dans le montage des projets ? Protection des aires d’alimentation de captage Comment mobiliser autour de ces nouveaux projets de « territoire » ? Collectivités, services de l’Etat, agriculteurs et consommateurs d’eau doivent coopérer pour inventer de nouvelles solidarités, en développant, pour le monde agricole, de nouvelles approches technologiques et économiques. Comment trouver des synergies? Sur quelles bases ont été construites les réussites autour de cette problématique ? Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 35 sur 39 Fiscalité environnementale Quels sont les fondamentaux sociaux et économiques du principe pollueur payeur ? Au-delà des stricts retours financiers, comment optimiser l’utilisation de cet outil pour qu’il génère des changements de comportements durables ? Eau souterraine L’eau souterraine ne se voit pas et mobilise peu, alors qu’elle requiert de plus en plus une approche patrimoniale et une gestion collective. Comment mobiliser élus et usagers de la ressource autour de cette problématique ? … A l’organisation par axes thématiques et méthodologiques Objectifs de gestion Bon état des milieux Thématiques sociologiques Cibles de Modes d’investigation l’investigation possibles Résultats escomptés Critères de Usagers Enquêtes de Stratégies de qualité/quantité Habitants perception communication- Perception paysages sensibilisation des Valeur patrimoniale publics Pollution par Critères de qualité Ménages Enquêtes de Stratégies de substances Modes d’accès à (pollution perception communication- dangereuses l’information domestique) Enquête par « sphères sensibilisation des Valeur patrimoniale Acteurs (PCB) d’acteurs-usagers » publics Mobilisation Usagers (PCB) Sondage auprès des Leviers de ménages mobilisation Restauration Acceptation sociale Usagers Diagnostic Moteurs de physique Gouvernance Décideurs, organisationnel l’acceptation sociale Mobilisation porteurs de projets Enquête de perception Perspectives de (Enquête par « sphère valorisation territoriale d’acteurs » Argumentaires socio-éco Protection des Acceptation sociale Retours d’expérience Synergies eau- captages Gouvernance Diagnostic territorial et territoire Toutes cibles Valeur patrimoniale organisationnel Porteurs de projets Engagement, Enquêtes par «sphères potentiels changements de pratique d’acteurs, usagers » Leviers de mobilisation hors financier et réglementaire Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 36 sur 39 Objectifs de gestion Thématiques sociologiques Cibles de Modes d’investigation l’investigation possibles Résultats escomptés Fiscalité Valeur patrimoniale Acteurs Enquêtes par «sphères Rapport eau- environnementale Valeur économique Usagers d’acteurs » agriculture-industrie Engagement, Ménages changements de comportements Enquêtes de Leviers perception économiques, Enquêtes contingentes symboliques, (éco) identitaires Sondage auprès des ménages Eau souterraine Valeur patrimoniale Acteurs, décideurs Diagnostic territorial et Gestion locale Visibilité/invisibilité Usagers organisationnel concertée et Solidarités de bassin Enquête par «sphères dispositifs de Gouvernance, d’acteurs » concertation Mobilisation, Sondage Leviers de engagement, changement mobilisation de comportements Agence de l’Eau RM&C Clés méthodologiques – juin 2010 Page 37 sur 39 REPERES BIBLIOGRAPHIQUES Ouvrages généraux BERGER Corinne, ROQUES Jean-Luc. 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