La PCR révèle la présence fréquente de Chlamydiae pneumoniae sur
les ballons d'angioplastie
27 mars 2006 _Vincent Bargoin_ (javascript:launchJournalistBio(383359);)
Paris, France - Un test diagnostique de la présence de Chlamydia pneumoniae
dans les coronaires, va peut-être permettre d'y voir plus clair sur le rôle de
la bactérie dans les lésions athéromateuses [1]. Sur le plan physiopathologique, un rôle de
l'infection est plausible, puisque les métalloprotéases et cytokines secrétées dans
l'environnement des bactéries, constituent a priori des facteurs favorisant localement
l'athérome. Un certain nombre de travaux ont par ailleurs montré la présence de C. pneumoniae
dans les lésions vasculaires. Pourtant, les essais d'intervention n'ont pas montré d'amélioration
du pronostic sous antibiothérapie [2].
Le problème est qu'aucun des arguments en faveur ou en défaveur de
l'hypothèse infectieuse, n'est entièrement valable. La sérologie n'étant pas
significative, les bactéries n'ont, jusqu'à présent, pu être mises en évidence dans
les lésions qu'à l'occasion de biopsies, lors d'actes chrirurgicaux, voire
d'autopsies. Soit, en toute hypothèse, à des stades très avancés de la maladie.
Une association ne prouve par ailleurs nullement une relation de cause à
effet.
Quant aux résultats négatifs de l'antibiothérapie, leur valeur probante est
tout aussi limitée.
Comme l'explique le Dr Benjamin Wyplosz (Institut Pasteur - Paris, Unité de
biologie des interactions cellulaires), "les essais ont été menés avec des
macrolides, donnés pour des durées variables, alors même que la diffusion de
l'antibiotique dans les artères, et la sensibilité des infections endovasculaires sont des
paramètres mal connus. Dans ces conditions, il est difficile de déterminer un schéma
thérapeutique, et l'absence de bénéfice clinique d'une monothérapie par macrolide n'exclut pas
un rôle de Chlamydia pneumoniae". Pour le moment, donc, c'est le statu quo. Le travail publié
dans le Journal de l'American College of Cardiology pourrait permettre d'en sortir.
Le principe du test consiste à rechercher l'ADN de Chlamydia pneumoniae sur
les ballons d'angioplastie. Les ballons ont été fournis par l'Hôpital de la
Pité-Salpétrière, et analysés à l'Institut Pasteur. La recherche proprement
dite a été effectuée par amplification de l'ADN (PCR), dans des conditions
assurant un seuil de détection très bas.
Un total de 204 ballons, utilisés chez 87 patients non sélectionnés, a
finalement pu être analysé. 176 de ces ballons provenaient de 76 patients atteints
d'athérosclérose primitive, et 28 ballons de 11 sujets traités pour
resténose, ces derniers faisant figure de contrôle.
Chez 30 patients atteints d'athérosclérose (39,5%), la recherche de l'ADN
bactérien s'est révélée positive, alors qu'elle était négative chez les 11
patients en resténose (p=0,01). Par ailleurs, la présence de Chlamydia pneumoniae
était significativement corrélée aux antécédents coronariens familiaux, aux
antécédents personnels, au caractère symptomatique de la maladie, et au
nombre de vaisseaux atteints. Enfin, en analyse multivariée (âge, sexe, diabète,
HTA, hypercholestérolémie, tabac, histoire familiale, histoire personnelle, et
PCR), seule la PCR positive était corrélée positivement à la présence de
symptômes (p=0,021 ; OR=4,04), ainsi qu'à l'atteinte de plusieurs vaisseaux
(p=0,017 ; OR=3,67).Corrélation entre sévérité de la maladie et présence de
Chlamydia pneumoniae
PCR +
(n=30)
PCR -
(n=46)
p
Histoire personnelle (IDM = 1 mois, SCA, angine stable, revascularisation)
63,3%
28,3%
0,003
Symptômes
80%
56,5%
0,04
= 2 vaisseaux atteints
80%
52,2%
0,01
Présence de la bactérie sur 40 % des ballons utilisés pour angioplastie
primaire
Une revue de 43 études concernant des lésions analysées après chirurgie ou
autopsie, rapporte des taux des 24% d'infections mises en évidence par PCR, et
de 48% par immunohistochimie [3]. Compte tenu de la variabilité inhérente à
la technique de détection, le taux de 40% rapporté ici est donc compatible
avec les résultats antérieurs.
La présence de Chlamydia pneumoniae exclusivement dans les cas
d'athérosclérose primitive, et non dans la prolifération musculaire de la resténose, est
un argument en faveur d'un rôle causal - argument renforcé par la corrélation,
indépendante des autres facteurs de risque, entre sévérité de la maladie et
présence de la bactérie. La démonstration ne pourra toutefois être apportée
que par un suivi prospectif, et en définitive, un essai d'intervention. Le
rééxamen des dossiers des malades dilatés à l'Hôpital de la Pitié-Salpétrière
voici déjà trois ans, pourrait fournir des indications. Le Dr Wyplosz projette
d'ailleurs de procéder à ce travail. Plus généralement, toutefois, l'intérêt
du travail publié dans le JACC réside dans la technique elle-même, dont on
peut envisager l'utilisation prospective dans des études plus larges, pour
tenter de faire le lien entre infection et progression de la maladie, et/ou pour
cibler des essais d'intervention sur des patients infectés, à des stades
précoces de la maladie coronarienne.
Sources
1. Wyplosz B, Montalescot G, Subtil A et col. Correlation between
Chalmydia pneumoniae detection from coronary angioplasty balloons and
atherosclerosis severity. J Am Coll Cardiol 2006 ; 47(6) : 1229-31.
2. Andraws R, Berger JS, Brown DL. Effects of antibiotic therapy on
outcomes of patients with coronary artery disease : a meta-analysis of
randomized controlled trial. JAMA 2005 ; 293(21) : 2641-7.
3. Dowell SF, Peeling RW, Boman J et col. Standardizing Chlamydia
pneumoniae assays. Clin Infect Dis 2001 ; 33 : 492-503.
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