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Français moderne, module BA4
hiver 2006-2007
Linguistique du texte
A. Auchlin
L’information dans le texte
Organisation thématique
Le statut des informations dans l’énoncé et dans le texte
notions de base (thème-propos, sujet, agent; explicite, implicite, posé-présupposé)
relations lexicales et relations conceptuelles
structure des phrases et structuration de l’information
0. Introduction
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

Fig. 1 : le carré derrière le disque (cercle)
(NB : il n’y a pas de carré – il est reconstruit cognitivement ; il n’y a pas non plus « derrière », sauf dans la
reconstruction ; dans la reconstruction : le cercle est entre le carré et l’observateur)
Fig. 2a, b : un cube ;
l’orientation des 3 traits non orthogonaux le fait voir par en dessous ou par en dessus – l’observateur est
ainsi placé plus bas resp. plus haut que le cube montré – et le voit sur sa gauche.
L’opposition premier plan - arrière-plan narratif (Combettes) repose sur ces principes, appliqués aux domaines
temporel et événementiel.
1. Thème-propos en général - quelques outils
Thème = df: le thème d’un énoncé est ce à propos de quoi il faut comprendre l’énoncé - ce à propos de
quoi “a lieu” l’énoncé;
le thème se distingue du rhème (ou propos, ou commentaire), ce qui est dit du thème (ou « information
nouvelle », information présentée par l’énoncé comme ce qu’il apporte.
1.1 Thème - sujet - agent:
Dans les phrases (à verbe tensé) :
• la structure grammaticale - syntaxique engage (entre autres) un sujet grammatical (qui
détermine l’accord du verbe),
• la structure sémantique associée engage un agent sémantique (en fonction du prédicat),
• la structure pragmatique - discursive (l’énoncé) engage un thème (la phrase est dite à propos
de quelque chose qui doit être accessible – intelligible ; la structure grammaticale est au
service de, et reflète, ce que l’énoncé est supposé apporter).
• Les sujets grammaticaux sont, prototypiquement, mais pas nécessairement, les agents sémantiques, qui
sont, prototypiquement, les thèmes (Van Oosten). Ainsi dans (1):
Linguistique du texte – hiver 2006-2007
(1)
A. Auchlin
Jacques mange une pomme
- Jacques est le sujet grammatical de la phrase (accord du verbe)
- Jacques est l’agent sémantique du verbe manger (c’est lui qui “fait l’action” de manger...)
- Jacques peut être le thème de la phrase - si le fait de dire cette phrase sert à “parler de Jacques”.
• Les structures syntaxiques “transformées” (passif, notamment; mais aussi clivage, etc.,...) sont motivées
par ce jeu des trois niveaux
(2’) focalisations : un élément particulier du rhème peut être pointé comme spécifiquement saillant : le focus ou
foyer informationnel ; à l’oral, un élément focalisé est porteur d’un « ton » (ou intonème) spécifique
(HB), et suivi d’un plateau intonatif inaccentué. L’écrit dispose de la ressource syntaxique du clivage,
extraction de l’élément focal :
a. C’est Jacques qui mange une pomme
b. C’est une pomme que Jacques mange
c. Ce que Jacques fait, c’est manger une pomme (c’est manger une pomme que fait Jacques)
(3)
a. Peu avant les faits, M. J. conduisait le véhicule en cause
b. Peu avant les faits, c’est M. J. qui conduisait le véhicule en cause
c. Peu avant les faits, le véhicule en cause était conduit par M. J. (passif ; inversion des places dans l’ordre
de la phrase ; choix motivé par la focalisation sur le dernier élément, par M.J. ;
... c’est peu avant les faits que le véhicule en cause (...) (cumul passif+focalisation)
(4)
Où était M.J. peu avant les faits? (a, *b, *c)
Qui conduisait le véhicule peu avant les faits? (*a, b, c)
Où était le véhicule en cause peu avant les faits? (*a, *b, c).
Qu’est-ce qui s’est passé? (a, b, c)
1.2 Thème et “focus informationnel” :
(2’’)
Jacques mange une pomme
- Que mange Jacques?
-> ce dont parle (2), c’est de ce que J. mange (= son thème)
- Que fait Jacques?
-> ce dont parle (2), c’est de ce que J. fait
Que se passe-t-il?
-> ce dont parle (2), c’est de l’”événement” J....
(5)
Echelle focale
Suzanne est sortie voir un match de football
--------> S. est sortie voir un match de quelque chose
- de quoi? élément focalisé
------------->
S. est sortie voir quelque chose /
- qu'est-ce que S. est sortie voir?
---------------------->
S. a fait quelque chose /
- qu'a fait S. ?
----------------------->
il s'est passé quelque chose au sujet de S.
- que s'est-il passé avec S.?
(d’après Sperber & Wilson 1986)
(6)
Le chameau, il a deux bosses
(implication analytique)
à propos 1 du chameau
à propos 2 du nombre de bosses qu'il a
(7)
Le chameau, il a deux bosses
à propos 1 du chameau
à propos 2 de ce que le chameau a par deux
(8)
« Assertion Pragmatique Possible » d’une phrase P est une paire formée de la proposition p de P et
d’une interprétation f d’un élément nominal de P ("Possible pragmatic assertion" PPA (S) = {p together
with <p , f>; f is the interpretation of a NP expression in S} (Reinhart 1982).
(9)
S : Pierre veut épouser Marie
PPA1 (S) :
PPA2 (S) :
f1 = SN1 (Pierre)
f2 = SN2 (Marie)
à propos de f1 : Pierre, il veut épouser Marie
à propos de f2 : Marie, (il y a) Pierre (qui) veut l'épouser.
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A. Auchlin
(10)
A: Qui Pierre veut-il épouser?
B1: Pierre, il veut épouser Marie (Pierre? y veut épouser Marie)
B2: ??Marie, Pierre veut l'épouser. (Charolles 1988)
(11)
A: Qui veut épouser Marie? / Qu'est-ce qui arrive à Marie?
B : Marie, (y a) Pierre (qui) veut l'épouser.
(12)
"Titre de concernement" : motif sémantique, pragmatique ou énonciatif rendu accessible par
l'établissement d'une relation d'à propos entre deux entités (objets, événements, actions).
(13)
Marylin Monroe, j'ai acheté un livre sur elle
?Marylin Monroe, j'ai perdu un livre sur elle. (Fodor, cité par Reinhart 1982)
(14)
Le chameau, il a deux bosses (un chameau, ça a deux bosses).
(15)
Le chameau, il a avalé une pomme tout rond (*un chameau, ça a avalé une pomme ...).
(16)
?? Le chameau, il a deux bosses et il a avalé une pomme tout rond. (réduction de coordination
impossible)
1.3 Thème et reprise anaphorique (ex repris du cours précédent)
(17)
La famille V... nous prie de rappeler le décès de Madame Elisabeth V. survenu dans sa 92ème année et
précise sa nouvelle adresse.
(18)
Un chien, même tatoué, ne pourra être repris par son propriétaire que si celui-ci est en mesure de
présenter un certificat de vaccination anti-rabique, sinon il sera lui aussi abattu.
(19)
Les retraités militaires et leurs veuves se sont réunis.
(20)
Un de ces jeunes reptiles rampait dans la cour de la quincaillerie H. C'est un client, M. M. de X, qui a eu
la surprise de le découvrir. Il a fini son existence dans un bocal d'alcool de la pharmacie Maurice-Michel.
(A. Grall, Petit bêtisier de la presse, cité par M-J. Reichler-Béguelin)
(21)
C'est au cours d'une crise de folie que ma femme a mis le feu à la maison. Il a fallu la compagnie des
pompiers pour l'éteindre. (Cité par M.-J. R.)
(22)
Il prit sa retraite en même temps que Madame C, malheureusement il était malade et ne put jouir de cette
dernière. (Lacroix, S comme Sottise, cité par M.-J. R)
***
(23)
"(...) Au lieu de dire : “cette femme, je l'ai beaucoup aimée”, on dit : “je l'ai beaucoup aimée... cette
femme”. C'est beaucoup cela, mon style : un report à la fin du mot majeur. Du mot qui compte." (M.
Duras, Nouvel Observateur 24-30.5.90 : 132).
N.B. : Duras confond ici la cause et l’effet : le « mot » reporté à la fin (ici : cette femme, syntagme
nominal) est le thème de l’énoncé ; le fait qu’il « compte » résulte de son déplacement, en est un effet : il
« compte » parce qu’il est attendu, annoncé par le pronom cataphorique « je l’ai … »
(24)
Il gèle. Nous ne sortirons pas. ("coordination sémantique" Bally) : deux énoncés successifs peuvent
s’articuler l’un à l’autre comme séquence < thème (ici : il gèle) – propos (à propos du fait qu’il gèle, je dis
que nous ne sortirons pas)>
(25)
A:
B1:
B2:
Peux-tu sortir la poubelle?
Elle est déjà pleine? / d'accord / non, je n'ai pas le temps
Je n'ai pas à t'obéir / je n'ai pas d'ordre à recevoir de toi (réplique)
B1 = réponse; prend pour thème celui qui est proposé par A (le propos de A), et pour “occasion”
l’obligation créée par l’énonciation de A;
B2 = réplique; n’enchaîne pas sur le thème proposé par A (le rejette); prend pour thème l’énonciation
même de A (le fait que A dise quelque chose), qu’elle prend également pour “occasion”.
(26)
Le démantèlement de l’état social se heurtera à la résistance résolue des syndicats
(27)
La chute définitive de l’illusion communiste confirme la suprématie de l’économie de marché.
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A. Auchlin
(28) Relations sémantiques
conceptuelles
lexicales
superordonné
niveau de base
subordonné
végétal
arbre
fleur
tulipe rose
hyperonymie
algue
dahlia marguerite
...
hyponymie
(29)
Thématisation
hyperthème
thème1,
thème 2
thème 3
sous-thème1, sous-thème 2
(30)
La mondialisation des échanges économiques
(ses causes, ses effets, son évolution prévisible)
(types de causes; types d’effets ; etc)
(hyperthème)
(thèmes 1, 2, 3)
(sous-thèmes 1, 2)
L'identification claire de ces rapports conceptuels et de leur organisation thématique est une condition nécessaire
à une argumentation valide.
L’articulation (l’intégration) des niveaux grammatical, sémantique, et pragmatique, est une condition à une
argumentation crédible.
aa/12.06
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