Immunosuppression: les coupables démasqués et éliminés, vous pourrez enfin guérir. attaquée (voir schéma L’immunosuppression, qui va bloquer les actions du système immunitaire contre la tumeur, est une des principales raisons de l’échec des thérapies anti-cancéreuses actuelles. Son élimination et la restauration d’une immunité anti-tumorale efficace constituent les premiers pas vers la guérison. Le rôle d’une population de cellules immunosuppressives et les évènements découlant de son élimination par le 5-Fluorouracile, une chimiothérapie couramment utilisée chez l’Homme sont ici exposés. Immunosuppression : quand les cellules cancéreuses jouent à cache-cache avec le système immunitaire. Le système immunitaire, dont le but est de protéger l’organisme, est composé de cellules effectrices, qui vont supprimer la menace, et de cellules régulatrices, qui grâce à leurs propriétés immunosuppressives, vont empêcher les cellules effectrices d’attaquer les cellules saines de l’organisme. Les cellules cancéreuses vont utiliser à leur avantage cet aspect du système immunitaire pour proliférer. En effet, la présence de cellules cancéreuses va induire l’augmentation de cellules immunosuppressives, appelées MDSC, qui vont bloquer l’immunité anti-tumorale, permettant à la tumeur de se développer sans être 1 ). Les MDSC, pour Myeloid-derived suppressor cells, diminuent l’immunité anti-tumorale et bloquent les fonctions des lymphocytes T cytotoxiques. Ces cellules sont à peine détectables dans un organisme sain. La chimiothérapie à la rescousse ! Plusieurs solutions existent pour lever ce phénomène et l’élimination des cellules immunosuppressives arrive en première ligne. Il a récemment été découvert que le 5-Fluorouracile peut éliminer les MDSC sans affecter les autres cellules du système immunitaire (voir schéma 2 ). La disparition des MDSC permet de restaurer pendant un temps l’immunité anti-tumorale avant qu’une autre population de cellules immunosuppressives ne prenne le relais, les lymphocytes Th17. Les événements liants l’élimination des MDSC et l’apparition des Th17 ont été décryptés dans le but d’augmenter l’efficacité des chimiothérapies contenants du 5-Fluorouracile chez l’Homme. Les Th17 sont une sous population de lymphocytes T auxilliaires qui participent à l’immunité anti-microbienne. Ils sont également impliqués dans diverses maladies auto-immune (sclérose en plaque, psoriasis…) et sont immunosuppressifs dans certains cancers. Des MDSC aux Th17 : l’IL-1β comme messager. Avant d’être éliminées après un traitement par 5-Fluorouracile, les MDSC vont produire une molécule, l’interleukine-1β (IL-1β) (voir schéma 3 ). Cette interleukine est un élément clef de la prolifération d’une population immunosuppressive, les lymphocytes Th17. L’IL-1β va donc servir de messager et va participer à la mise en place de cette nouvelle population de cellules immunosuppressives. Après l’élimination des MDSC, ce sont ces Th17 qui vont bloquer l’action du système immunitaire contre la tumeur (voir schéma 4 ). L’interleukine-1β est une molécule inflammatoire produite par des cellules du système immunitaire en réponse à une infection. Son action sur l’hypothalamus la rend notamment responsable de la fièvre. Une lueur d’espoir. Dans ce combat contre l’immunosuppression, un espoir semble pourtant possible. Il existe en effet une molécule, déjà utilisé chez l’Homme dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, appelée IL-1Ra qui se lie aux récepteurs de l’IL-1, bloquant ainsi les effets de l’IL-1β. Efficacité du traitement: Traitements Souris guéries 5-Fluorouracile 9% 5-Fluorouracile + IL-1Ra 46 % L’IL-1Ra permet d’augmenter l’efficacité du traitement par 5-Fluorouracile sur des souris atteintes de cancer. Chez la souris, cette molécule empêche l’IL-1β produite par les MDSC après traitement par 5-Fluorouracile d’augmenter la population de Th17 et permet ainsi la mise en place d’une immunité anti-tumorale efficace (voir tableau et schéma 5 et 6 ). Pour résumer: Th17 Lymphocytes T cytotoxiques 5 4 IL-1Ra 6 IL-1β 1 3 MDSC Cellules cancéreuses 5-Fluorouracile 2 Et chez l’Homme ? Chez l’Homme aussi, le nombre de MDSC augmente en présence de cellules cancéreuses, nombre qui est radicalement réduit quelques jours après un traitement contenant du 5-Fluorouracile. Si une augmentation de l’IL-1β dans le sang de ces patients après traitement est observée, l’association du 5-Fluorouracile à l’IL-1Ra (qui sont deux molécules déjà utilisées chez l’Homme) pourrait permettre d’augmenter l’efficacité anti-tumorale du 5-Fluorouracile et à long terme d’augmenter la survie des patients. Modulation de la tolérance immunitaire par la chimiothérapie et identification de nouvelles cibles thérapeutiques. Mélanie Bruchard, INSERM U866, Dijon