
C. Davister – La GRH en économie sociale – Les cahiers de la Chaire Cera – vol.1 – page  
   
3
I
NTRODUCTION
 
 
 
La gestion des ressources humaines (GRH) représente, pour toute organisation, un enjeu de 
management fondamental. Si la plupart des entreprises utilisent divers modèles et outils de 
GRH afin d’optimaliser l’utilisation de leurs ressources humaines (notamment en s’offrant les 
services  de  firmes  de  consultance  spécialisées),  les  organisations  d’économie  sociale 
semblent gérer leurs ressources humaines de manière plus intuitive et plus informelle. En 
effet, par crainte de négliger leurs valeurs sociales fondamentales et donc de perdre leur 
identité, les entrepreneurs sociaux sont quelque peu réticents à utiliser les outils de gestion 
issus  du  secteur  privé classique,  et  particulièrement  en  matière  de GRH.  Cependant,  les 
recherches de la Chaire Cera démontrent que la plupart des dirigeants d’économie sociale 
développent des pratiques de GRH spécifiques, généralement sans réellement les reconnaître 
comme telles.  
 
L'objectif de ce cahier n'est pas tant d’étudier de manière détaillée chacune des nombreuses 
fonctions et étapes de la GRH lorsque celle-ci est mise en œuvre dans les organisations 
d’économie sociale que de montrer que ces organisations originales sont confrontées à des 
questions spécifiques de GRH, qui sont liés à la fois :  
   à  leurs  caractéristiques fondamentales: finalité  sociale, processus  démocratique  de 
gestion, production de services (aux personnes)… 
  aux particularités de leurs ressources humaines : bénévoles, travailleurs en insertion, 
coopérateurs (salariés-associés), postes subsidiés,… 
  à leur idéologie : primauté des travailleurs sur le capital, respect de l’individu et de ses 
attentes, responsabilité sociétale… 
 
L’analyse  des  enjeux  de  GRH  dans  l’économie  sociale  revêt  aujourd'hui  une  importance 
d’autant  plus  fondamentale  que  ce  secteur  connaît  actuellement  d’importantes  évolutions 
dans son contexte socio-économique :  
   croissance du secteur (en nombre d’organisations, de travailleurs, d’usagers) ; 
  intensification de la concurrence face aux entreprises capitalistes mais aussi à d’autres 
organisations d’économie sociale) ; 
  complexification des demandes et donc des biens/services à produire (apparition de 
nouveaux métiers, nécessité d’une main-d’œuvre hautement qualifiée, etc.) ; 
  renforcement  des  cadres  législatifs  et  institutionnels  (clarification  des  statuts, 
procédures d’agréments, nouvelles obligations, outils d’évaluation, etc.).  
 
Or, les dirigeants d’économie sociale sont souvent désarmés face aux problèmes de GRH 
rencontrés dans leurs organisations : non seulement ils sont peu formés aux outils de gestion 
(et notamment en GRH) et ils n’ont pas accès à des outils de GRH adaptés à leurs réalités. 
En  outre,  ils  ne  peuvent  faire  appel,  pour  résoudre  ces  problèmes,  qu'à  des  ressources 
financières et humaines limitées.  
 
Face  à  ce  paradoxe  entre  la  nécessité  de  gérer  de  manière  pertinente  et  efficace  les 
ressources humaines  des organisations  d’économie sociale  et le  manque de moyens des 
dirigeants de ce secteur pour y parvenir, ce cahier n’a pas la prétention d’offrir une « boîte à 
outils » ou des « recettes » en matière de GRH. Il vise à mettre en évidence et à comprendre 
les  enjeux  spécifiques  de  GRH  dans  ces  entreprises  particulières,  en  posant  la  question 
suivante :  les  organisations  d’économie  sociale  développent-elles  un  « autre »  modèle  de 
GRH que celui véhiculé par les entreprises privées « classiques » ?