Lhumanisme politique
de saint Thomas d’Aquin
Louis Lachance, o. p.
VIENT DE PARAÎTRE
chez Quentin Moreau, éditeu
L
e père Lachance ore, dans cet œuvre majeure, un
exposé systématique de la philosophie politique
de saint omas dAquin, et nous en livre sa pensée
authentique.
Grand connaisseur des écrits du Docteur commun et de
ceux dAristote, lauteur saache à replacer la politique sur le
plan moral, cest-à-dire sur le plan de lagir humain. Ceci à lop-
posé de certaines conceptions qui ne voudraient voir dans la
politique quune métaphysique ou quune physique sociale.
LÉtat doit être à la poursuite du bien commun, bien qui
doit correspondre véritablement aux aspirations et aux exi-
gences de la nature humaine.
LÉtat travaille donc à la poursuite dun véritable humanisme.
Ce bien humain, quel est-il ? Lauteur entreprend une vaste
enquête pour nous le faire (re)découvrir en compagnie de
saint omas dAquin.
Le père Lachance se refuse dentrer dans une distinction abu-
sive entre indi vidu et personne, qui dénature toute la perspective
de la vie politique et humaine. LÉtat nest pas au service de la
personne. Au contraire la personne est sub-ordonnée à lÉtat.
Cest dans la vie sociale que lhomme trouve sa perfection
et rien ne peut faire disparaître la dimension politique de sa
vie morale.
     
Individu et État
La lecture de ce beau
livre est uctueuse.
Lexposé graduel vous
fera aller de découvertes
en découvertes.
Lintelligence est
conduite à ladmiration
de lœuvre divine.
S aint omas dAquin fut un philosophe
très remarquable de la politique. Sou-
vent éclipsés par la gloire de ses ensei-
gnements métaphysiques ou théologiques, ses
écrits de philosophie politique tels que le De
Regno, lExposition de la Politique dAristote ou les
chapitres spéciques de la Somme de éologie
révèlent une pensée très vaste, pénétrante et
structurée, ancrée dans sa philosophie méta-
physique et intégrée à sa synthèse générale.
Surpassant amplement celle des auteurs
médiévaux antérieurs, elle ore aussi un fon-
dement intemporel à la réexion de tous ceux
quintéresse léthique de la cité.
Pendant longtemps, au travers de bien des
contingences, le Moyen Âge avait surtout été
une lente montée civilisatrice dans la pratique
vécue de cee éthique. Sur le plan intellectuel,
on sétait concentré sur les questions relatives
à la distinction des pouvoirs de lÉglise et de
lÉtat et à leurs rapports mutuels. Avec la nais-
sance des grandes écoles et des universités, à
partir du  siècle, lintérêt pour les questions
plus philosophiques sur la société se renou-
vela, avec des noms tels que Jean de Salisbury
ou avec luniversité de Bologne. Ensuite, la
redécouverte des écrits dAristote et les contro-
verses autour de sa pensée orientèrent encore
davantage les études vers la constitution dune
véritable science politique.
Frère omas, quant à lui, reprend les ré-
exions à la base: spécicité de lordre pratique,
contre-distingué du spéculatif ; irréductibilité
du moral à lontologique sur lequel néanmoins
il se fonde ; lhomme animal politique selon
les caractères essentiels de sa nature ; unité
dynamique des sociétés, cest-à-dire unité de -
nalité et daction ; le bien commun nalisant la
vie collective et consistant en la sagesse, la jus-
tice, lunité et la paix ; subordination du bien
particulier au bien commun, qui lui donne
sa nalité et en parachève la valeur morale ;
principe de totalité ; perfection de la société
politique en tant quelle possède en elle-même
ce qui lui permet de réaliser sa n propre ; rôle
architectonique de la prudence politique ; jus-
tice générale au sommet de lédice des habitus
moraux
Et certes, omas dAquin sappuie large-
ment sur Aristote, quil avait appris à mieux
connaître par des versions textuelles et des
traductions enn dèles et quil avait défendu
sans répit en compagnie de son professeur
Albert le Grand. Mais aussi il va notablement
au-delà de son maître grec:
- il comble les lacunes de la doctrine dAristote
sur les relations de lunivers à son Auteur. Dieu
est reconnu comme le bien commun de luni-
vers et le bien commun temporel trouve en lui
sa véritable nalité ;
- il met en évidence lunité de lhumanité. La
souveraineté des diverses cités politiques est
limitée par leur ordination au bien commun
du genre humain tout entier ;
- la belle doctrine aristotélicienne de lamitié
politique sépanouit en une véritable philoso-
phie de la fraternité entre les hommes du fait
de leur relation commune à un même Dieu,
bonté innie, principe et n de toute chose ;
- lapprofondissement de létude de la per-
sonne lamène à explorer davantage les liens
entre société politique et personne humaine.
Cee pensée philosophique si riche et si nuan-
cée a été trop souvent mal perçue au travers
dexposés et de résumés approximatifs ou lar-
gement décients. En cause, la prépondérance
progressive des théories des juristes aux 
et  siècles, le retour aux préoccupations sur
les souverainetés respectives du pape et des
rois, et puis, la montée des absolutismes réga-
liens à la recherche de justications morales, et
plus tard encore, lambiance intellectuelle des
philosophies libérales.
Même à lépoque plus récente où, sur lini-
tiative de lÉglise depuis Léon XIII, lintérêt
fut renouvelé pour létude approfondie des
œuvres de lAquinate, la partie politique de
sa philosophie a été comme ousquée par
trop de reconstructions a posteriori, passable-
ment éloignées de la pensée originale. Divers
personnalismes à revendication thomiste se
développèrent, tous plus ou moins focalisés sur
les dicultés de conciliation de la personne et
de lÉtat, dans un climat de crainte des totali-
tarismes, et tous plus ou moins empêtrés dans
des conceptions absolutistes de la dignité de
la personne. Certains crurent trouver la base
dune solution dans une distinction individu-
personne quils estimaient exhumer de la
philosophie de saint omas : en tant quin-
dividu, la personne humaine serait référée à la
société, mais la société serait à linverse référée
à la personne en tant que personne.
En quête de la pensée véritable de saint omas,
le père Louis Lachance a voulu se dégager de
ces néo-thomismes. Il est dès lors retourné aux
textes eux-mêmes et a entrepris de nous en faire
connaître leur teneur authentique. Son dessein
nest nullement dexposer une synthèse préé-
tablie, structurée en chapitres découlant les
uns des autres, comme le ferait un manuel à
intention scolaire. Il se propose plutôt de re-
trouver selon leur genèse les composantes de
la réexion de saintomas, de nous faire par-
ticiper intellectuellement à la redécouverte de
leur réalisme, de nous faire saisir sur le vif leurs
principes, leurs rapports et leurs articulations.
Sa préoccupation spécique de faire la lu-
mière sur les relations réciproques entre la
personne et lÉtat selon saint omas, lamène
à développer amplement les chapitres sur la
personne, sa structure métaphysique, sa signi-
cation psychologique et physique et son
or ganisation morale. Dans la même perspec-
tive, il explore tout à loisir les grands concepts
détat, de sociabilité, de bien commun…
Au long de ce cheminement de réinvention
en compagnie de saint omas, le lecteur ren-
contrera plus dun joyau ; tel le chapitre sur
« létat, lieu de la sagesse », ou « bien propre
et bien commun », ou « léconomie de la pru-
dence », ou encore « lépanouissement de
lamitié »…
Le père Lachance prend aussi grand soin de
mere en évidence la distinction si neement
exposée par saint omas entre lordre de la
nature et celui de la grâce, ainsi que la subor-
dination de la nature à lordre surnaturel qui,
soulevant et emportant la nature dans son
dynamisme propre, a pour n de conduire
lhomme à la vie éternelle.
Avec saint omas, lauteur réarme tout
autant la gratuité de lélévation surnaturelle ;
cee gratuité implique que la nature, en amont
de la réception de la grâce, est déjà une réalité
complète ayant sa consistance propre (sans
quoi la grâce serait nécessaire à la nature, et
non point gratuite…). En conséquence de
quoi, létude proprement philosophique de
cet ordre naturel est légitime et nécessaire aux
yeux de saint omas, tout particulièrement
dans le domaine politique. Et tel est le propos
principal de louvrage du père Lachance.
N
é le  février  à Saint-Joachim-de-
Montmorency (Québec), le père Louis
Lachance revêt à vingt et un ans lha-
bit des domi nicain au noviciat de Saint-Hyacinthe.
Après avoir complété sa formation au couvent
dOawa et être devenu lecteur en théologie, il y
enseigne la philosophie. De  à , il est envoyé
à Rome pour y poursuivre ses études. Il y retourne
en  an denseigner à lUniversité Angelicum et y
défendre sa thèse de maîtrise en théologie.
En , il est promu à la maîtrise en Sacrée
éologie, le plus haut titre universitaire dans
lOrdre des Frères Prêcheurs. La même année, il
est nommé professeur de philosophie morale et so-
ciale à la Faculté de philosophie de lUniversité de
Montréal. Il occupe également une chaire de philo-
sophie en Espagne (Salamanque). À partir de ,
il enseigne en Argentine et au Brésil. En , il est
nommé supérieur du couvent des Prêcheurs dOu-
tremont et il accède au vice-décanat de la Faculté de
philosophie de Montréal, dont il deviendra nale-
ment le doyen en .
L L, . ., -
Le père Louis Lachance est décédé le  octobre
.
Haute intelligence emplie de sagesse et de péda-
gogie, acharné au travail, passionné de recherche,
généreux, plein de bonhomie et de déli catesse,
Louis Lachance sest encore signalé par le nombre
et la qualité des ses ouvrages philosophiques – où le
social et le politique sont très présents, sans évincer
dautres pré occupations plus spéculatives:
Saint omas dans l’histoire de la logique ()
Le concept de droit selon Aristote et saint omas
(, revu et corrigé en )
Où vont nos vies ? ()
Nationalisme et religion ()
Philosophie du langage ()
Lêtre et ses propriétés ()
La lumière de l’âme ()
Le droit et les droits de l’homme ()
Louvrage est de nature à rendre déminents services à ceux qui
sinterrogent sur la nature de la chose politique.
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