Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 1/34 LES THEORIES ETHIQUES Introduction La question de l'éthique est de plus en plus posée en nos jours, dans un monde où les valeurs risquent de se perdre; dans un monde qui souffre violence, injustice, idéologie… là où la nécessité de redéfinir ce qu'est le bien se présente comme urgente. Qu’est-ce que l’éthique? Faut-il la distinguer de la morale ? Paul Ricœur dans son livre "Soi-même comme un autre" publié en l'an 1990, traite cette problématique. Il présente les nuances entre les deux termes : Morale Ethique Mores (latin) Ethos (grec) Ce qui s'impose comme obligatoire marqué par des normes, obligations et interdictions Ce qui est estimé bon Exigence d'universalité et effet de contrainte La visée d'une vie accomplie sous le signe des actions estimées bonnes Héritage kantien Héritage aristotélicien Point de vue déontologique Perspective téléologique Selon Xavier Thevenot, la vie éthique est une quête de sens où le jugement éthique se présente comme un acte herméneutique qui s'efforce de dégager la logique des relations de l'homme à son monde afin de croître et de faire croître en humanité. Et de conclure que cette quête de sens, loin d'être insulaire dans une Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 2/34 représentation univoque, est bien intégrée dans un système complexe où la rationalité, surtout subjective, dépend déjà de la manière dont on conçoit le sens de la vie, le sens de l'existence et du vivre en commun.1 Dans son contexte spatio-temporel, l'homme est représenté comme un être relationnel et social doté de raison et de volonté. Ses actes sont un objet de l'éthique appelés à être étudié et critiqué tout en tenant compte des éléments qui le constituent. Il est toujours à la recherche du bonheur; en quête du sens de sa vie et de ses actes. De là, l'éthique avec son axe objectif est considérée comme une référence dans tout discernement afin que l'homme puisse réanimer sa procédure de réflexion et de discernement dans le but de choisir le bien et d'éviter le mal. Ce discernement rencontre deux difficultés2: - Une difficulté d'ordre instrumental: savoir comment analyser l'acte humain et à partir de quels critères objectifs porter un jugement de moralité - Une difficulté d'ordre épistémologique: elle est située à un niveau plus fondamental; c'est le fait de préciser les fondements de toute définition du bien et de son contraire: une argumentation de la définition du bien et de la justification de sa nécessité. Pour résoudre la première difficulté, la société humaine a établi des systèmes de références appelés Normes, constitués de trois niveaux: les règles (particulières et concrètes), les principes (universels et abstraits) et les valeurs. Ces dernières rencontres deux ambiguïtés: la reconnaissance des valeurs par le sujet et le système dans lequel s'articulent ces valeurs. Y aurait-il des valeurs plus importantes que d'autres? Qui le décident? Comment les discerner? D’où la présence des convictions comme une structuration du discernement éthique. "C'est dans la reconnaissance de son appartenance à une certaine communauté conditionnelle que le sujet va reconnaître la précédence d'un système de valeurs dans lequel il accepte librement et consciemment d'être formé et humanisé"3. Ces différentes communautés sont appelées écoles ou théories éthiques. Une théorie éthique c’est l’ensemble des convictions et des articulations axiologiques qui fonde et justifie, d’une manière qui se veut cohérente et rigoureuse, des ensembles de principes et de règles dans un système moral quelconque. On parle de plusieurs systèmes moraux donc de plusieurs théories (ou courants) morales. Ce travail met en relief deux tableaux: (1) Le premier tableau mettra en relief les différentes théories éthiques selon trois classements: - Classement selon le mode de recherche de la définition du Bien 1 X. Thevenot, Le discernement éthique. La méthodologie du moraliste, Cours polycopiés édités par l'Association André Robert, 1993-1994, p. 5-22. 2 P. Edgard El Haiby, Pour bien éduquer: Eduquer au "Bien". Ethique et éducation, Article paru dans Revue de l'ILE, USJ, nº2, oct. 2002, p. 4. 3 Idem, p. 6. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) - Classement selon le lieu de la définition du Bien - Classement selon le mode de raisonnement dans le discernement de la moralité de l’acte 3/34 Ce classement nous permet de repérer les différents niveaux de l'axe objectif du discernement éthique: - Il présente les repères de discernement éthique: ontologique, téléologique (Axiologique: Valeurs) et déontologique (principes et règles). Nous sommes au 2ème niveau de l'axe objectif du discernement éthique. - En plus, ces mêmes théories exposées présentent les fondements de l'éthique. C'est tout ce qui est de l'ordre des convictions, fondements de toute réflexion éthique, fondements philosophiques, théologiques, culturelles et/ou Idéologiques. Nous sommes au 1er niveau de l'axe objectif du discernement éthique. En plus de ce classement, les théories éthiques sont reparties dans des courants différents selon le mode de classement: - Ethiques empiristes, Ethiques positives déclenchées par les sciences biologiques, Ethiques rationnelles ou formelles, Ethiques intermédiaires entre empirisme et rationalisme. (Classement selon le mode de recherche de la définition du Bien) - Ontologique, déontologique, utilitariste, axiologique et personnaliste. (Classement selon le lieu de la définition du Bien) En dernier lieu, le classement est fait selon deux modes de raisonnement dans le discernement de la moralité de l’acte: téléologique et déontologique. Toutes ces approches sont énumérées pour arriver au discernement éthique: discerner l'acte humain dans la visée de faire le bien et d'éviter le mal. (2) Le second tableau exposera les différentes définitions des théories éthiques citées ci-dessus, données par plusieurs sources: - Les différents dictionnaires: dictionnaire d'Ethique et de Philosophie morale; dictionnaire Larousse en Ligne; Encyclopeadia Universalis - Wikipédia Le fait de recourir à plusieurs sources, permet d'avoir une vue globale sur le concept. Une source complète l'autre. En insistant sur les points de base, chaque source aborde le sujet à sa façon. Dans certains cas, on a dû recourir à l'auteur pour définir un concept. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 4/34 Tableau nº1 Classement selon le mode de recherche de la définition du Bien Courant Ethiques empiristes Egocentriques Guidées par l’expérience Altruistes Ethiques positives Théorie Etymologie Principe du discernement éthique Dynamisme Auteurs clés Hédonisme Hédonè = plaisir Recherche du plaisir sensible Consommation Démocrite Epicurisme Epicure Recherche du plaisir spirituel Vertu Epicure Utilitarisme de J. Bentham Utilité Calcul pondéré des plaisirs et désagréments de la vie Intérêt J. Bentham Utilitarisme de S. Mill Le plus grand bien pour le plus grand nombre Collectivité Justice J. S. Mill Marxisme Société justice K. Marx Autoritarisme Rejet du plaisir Recherche du pouvoir par la volonté de puissance et par la force Déclenchées par les sciences biologiques Ethiques rationnelles ou formelles Nietzsche Déontologiques Stoïcisme Kantisme Ontologiques Aristotélisme Thomisme / Eudémonisme Deon, deontos = devoir Ontos = être L’intentionnalité du sujet et non la matérialité de l’acte. L’impératif catégorique. Universalité Zénon de Citium La matière de l’acte Aristote Cicéron/ Kant St-Thomas d’Aquin Conception : P. Edgard El Haiby Ethiques intermédiaires entre empirisme et rationalisme Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 5/34 Morale de la sympathie Adam Smith Morale de la pitié Schopenhauer Expérience morale et religieuse H. Bergson Existentialisme La liberté est un principe formel de l’être, de l’ontos J. P. Sartre Classement selon le lieu de la définition du Bien Courant Ontologique Etymologie Ontos = être Point de départ Fondement transcendantal Dynamisme Agir par vertui interne La fin, la visée i.e. Bien Deon – deontos = Devoir, obligation Fondement transcendantal La bonne volonté i.e. l’autonomie existe dans les êtres (ontos), intrinsèque (nature) l’homme la découvre (raison) i.e. Béatitude, Bonheur Déontologique Moralité D’où : loi naturelle Agir par devoir dans l’universalisation de la maximeii l’homme l’établit Facteurs de moralité Exemple Intention Toujours immoral parce que contraire à la vérité du réel (intrinsèquement mauvais) Aristote, Grec, 3è s. av.J.XT Toujours immoral parce que son acceptation générale rendrait la société impossible Kant, Allemand, fin 18è s. Nature de l’acte Circonstances : temps, lieu, personnes, conséquences prévisibles, etc. Intention Nature de l’acte Circonstances : temps, lieu, personnes, conséquences prévisibles, etc. Auteurs clés Le mensonge Thomas d’Aquin, Italien, religieux dominicain, 13è s. J.XT Conception : P. Edgard El Haiby Utilitariste Contre ontologique Contre déontologique Utilité = pour maximiser le bonheur et minimiser la misère Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy Fondement immanent et non transcendantal (version 1) Agir par intérêt, par utilité dans les conséquences 6/34 Conséquences effectives l’homme les prévoit ou les inventorie La démocratie (personnel = égocentrique) (socialiii = altruiste) Moral selon les circonstances et les conséquences Référence extrinsèque aux choses et aux actes Théories hédonistes Théories individualistes. Epicure, 3è s. av. J .XT ; David Hume, GrandeBretagne, 18è s. ; Jeremy Bentham, Gde-Bretagne, 19è s. John Stuart Mill, Gde-B., 19è s. Axiologique Axios = valeur, digne d’être estimé Les valeurs : Ce qui vaut d’être recherché pour moi et par moi, mais aussi, pour tous et par tous.iv Agir par attraction Personne Les personnes concrètes Agir par projet de personnalisation A mis chemin entre déontologique et utilitariste Personnaliste Pour éviter utilitarisme et déontologisme déterminée par le sujet en lien avec les choses déterminée par le sujet à partir des éléments structurants de la personne Appropriation personnelle des valeurs Immoral Engagement dans ce processus Immoral parce qu’il implique un mépris de l’autre Louis Lavelle, français, 20è s. René Le Senne, français, 20è s. Emmanuel Mounier, français, 20è s. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 7/34 sans revenir à l’ontologisme Classement selon le mode de raisonnement dans le discernement de la moralité de l’acte Raisonnement Théorie Définition Auteurs clés Téléologique Personnalisme prudentiel La fin de l’action humaine est toujours la personne et la communauté. Très présent chez les penseurs catholiques (Télos = fin) Problème : la nature humaine, la loi naturelle, la loi révélée. La prudence est le moyen pour viser cette fin Raisonnement guidé par le but, la fin à atteindre Proportionalisme La raison proportionnée permet de juger si l’acte est proportionné à la valeur qu’il poursuit (Principe de l’acte à double effet) P. Knauer J. Fuchs R. McCormick Conséquentialisme Les conséquences bonnes de l’action déterminent la moralité de l’acte Existe chez quelques moralistes catholiques Utilitarisme Forme de conséquentialisme où l’action est bonne si elle vise le plus grand bien pour le plus grand nombre A. Smith J. Bentham J.S. Mill Situationnisme (pitié, sympathie, etc.) Déontologique (deontos = devoir) Volontaristes et cognitifs Légalisme religieux Nominalisme Positivisme Une règle morale « agir avec amour dans les circonstances » est le but de l’action envisagée J. Fletcher Déontologisme fondé sur l’ultime autorité de Dieu qui seul peut déterminer le bien en morale. Agir bien, c’est obéir à la volonté de Dieu Occam Déontologisme séculier qui identifie la moralité avec le légal Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy raisonnement guidé par le devoir à accomplir et l’obéissance à des lois Emotivisme (version 1) 8/34 Autonomisme Déontologisme kantien opposé à la morale hétéronome ou théonome E. Kant, W. Frankena, J. Rawls Existentialisme Déontologisme qui consiste dans l’acte d’être responsable dans chaque nouvelle situation et de créer ses propres valeurs face à l’absurdité de ce monde J. P . Sartre Hédonisme, Epicurisme, etc. Une sorte de déontologisme qui enseigne que chaque personne a le devoir de suivre la loi de ses sentiments, instincts et intuitions comme les meilleures autorités de ce qui est bien J.O. Urmson Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 9/34 Tableau nº2 : Classement selon le mode de recherche de la définition du Bien Les dictionnaires Wikipédia Ethiques empiristes Guidées par l’expérience Hédonisme L'hédonisme (du grec ἡδονή hedonê: plaisir) est un terme générique qui désigne les conceptions et théories du plaisir défendues à l'origine par Aristippe, Eudoxe et Epicure, et qui ont été renouvelées à plusieurs reprises jusqu’à nos jours. L’hédonisme (du grec ancien : ἡδονή / hēdonḗ, "plaisir" et du suffixe –ισμός / -ismós) est une doctrine philosophique grecque selon laquelle la recherche du plaisir et l'évitement du déplaisir constituent l'objectif de l'existence humaine. L'hédonisme semble engendrer le l'indifférence religieuse. Epicurisme Selon la proposition la plus générale de l’éthique épicurienne, toutes nos actions sont conduites en vue d’une fin ultime, qu’Epicure appelle aussi bonheur. L’épicurisme est donc un eudémonisme. A ce titre, il se situe, comme toutes les éthiques hellénistiques-à l’exception notable de la philosophie cyrénaïquedans le cadre défini par Aristote dans l’Ethique à Nicomaque. De l’analyse aristotélicienne, Epicure retient aussi implicitement que le bonheur est une notion holistique, en ce qu’elle doit pouvoir s’appliquer à l’ensemble d’une vie. L’épicurisme est donc un hédonisme. La première tâche de l'Epicurisme est de définir un concept de plaisir tel qu'il puisse faire fonction de fin ultime, et spécifier le contenu du bonheur dans le sens hérité d'Aristote. relativisme moral et L'épicurisme (ou la doctrine d'Épicure) est une école philosophique fondée à Athènes par Épicure en 306 av. J.-C. Elle entrait en concurrence avec l'autre grande pensée de l'époque, le stoïcisme, fondé en 301 av. J-C. L'épicurisme est axé sur la recherche d'un bonheur et d'une sagesse dont le but est l'atteinte de l'ataraxie, la tranquillité de l'âme. C'est une doctrine matérialiste et atomiste. Le but de l'épicurisme est d'arriver à un état de bonheur constant, une sérénité de l'esprit, tout en bannissant toute forme de plaisir non utile Conception : P. Edgard El Haiby Utilitarisme de J. Bentham et de S Mill Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 10/34 L’utilitarisme enseigne qu’une action ne peut être jugée L'utilitarisme est une doctrine éthique qui prescrit d'agir (ou ne pas moralement bonne ou mauvaise qu’en raison de ses conséquences agir) de manière à maximiser le bien-être global de l'ensemble des bonnes ou mauvaises pour le bonheur des individus concernés. êtres sensibles. L'utilitarisme est donc une forme de conséquentialisme, théorie évaluant une action (ou une règle) L’utilitarisme de Jeremy Bentham et de John Stuart Mill a été uniquement en fonction des conséquences escomptées, qui se l’objet de critiques et d’attaques passionnées qui ont dissimulé sa distingue de la morale rationnelle et notamment kantienne véritable nature et en ont laissé une image caricaturale. C'est Jeremy Bentham qui introduisit le vocable en 1781 et qui tira L’utilitarisme a tenté une entreprise symétrique quoiqu’inverse de de ce principe les implications théoriques et pratiques les plus celle de Kant : énoncer, à partir du seul sujet humain et de ses abouties. Le principe éthique à partir duquel il jugeait les besoins, un critère universel pour répondre à la question: que doiscomportements individuels ou publics était l'utilité sociale. Pour je faire? Il a eu des conséquences révolutionnaires en matière de reprendre la formule bien connue, "le plus grand bonheur du plus justice. grand nombre". L’utilitarisme est une théorie morale qui permet de coordonner de Le postulat de départ de sa théorie utilitariste est que le bien manière précise l’évaluation et l’action morales. Il possède trois éthique constitue une réalité constatable et démontrable. On peut dimensions essentielles : un critère du bien et du mal, un impératif le définir à partir des seules motivations élémentaires de la nature moral : maximiser ce bien, une règle d’évaluation de l’action morale humaine : son penchant " naturel" à rechercher le bonheur, c'est-àgrâce à ce critère. dire un maximum de plaisir et un minimum de souffrance. Ce La doctrine utilitarisme possède une forte dimension téléologique principe est formulé ainsi par Bentham "La nature a placé en raison du lien qu’elle établit entre la recherche naturelle du l'humanité sous l'empire de deux maîtres, la peine et le plaisir. C'est à eux seuls qu'il appartient de nous indiquer ce que nous devons plaisir, la répulsion à l’égard de la peine et la moralité. faire comme de déterminer ce que nous ferons. D'un côté, le critère La doctrine utilitarisme dite classique trouve son expression la plus du bien et du mal, de l'autre, la chaîne des causes et des effets sont pure chez William Godwin. Mais c’est Jeremy Bentham qui est le attachés à leur trône. "(Principes de la morale et de la véritable fondateur de l’utilitarisme comme doctrine et comme législation, 1789). mouvement politique et social. John Stuart Mill est le successeur immédiat de l'utilitarisme La version normative que Bentham propose de l’utilitarisme pose benthamien. Il s'en écarte toutefois en développant un un problème : est-il ou non coupable du "sophisme naturaliste"? utilitarisme indirect. Bentham n’a jamais confondu l’observation des comportements humains avec l’élaboration d’un principe d’action. Il a, au contraire, Là où Bentham identifie welfare (= bien être) et plaisir, Mill définit soigneusement distingué entre "le principe du plus grand bonheur le welfare comme bonheur. Ce faisant il s'écarte de l'utilitarisme pour le plus grand nombre comme la seule fin universellement hédoniste et propose un utilitarisme indirect. Le plaisir n'y est plus Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 11/34 désirable" et "le bonheur de chaque homme qui est sa seule fin la fin de la moralité, il ne joue un rôle qu'indirectement, dans la réelle". mesure où il contribue au bonheur (du plus grand nombre). C’est la confusion entre ces deux sens, l’un normatif et collectif, On doit aussi à Mill la reconnaissance de la dimension qualitative l’autre descriptif et individuel, du principe d’utilité qui est à la source des plaisirs. Contrairement à Bentham, qui ne hiérarchise pas les des malentendus. plaisirs et s'intéresse uniquement à la quantité de ceux-ci, John Stuart Mill défend une différence de qualité entre les plaisirs. On La véritable critique que l’on peut adresser à la philosophie de peut ainsi préférer une quantité moindre d'un plaisir de plus grande Bentham consiste, en réalité, non pas à l’accuser de dériver une qualité à une quantité supérieure d'un plaisir de qualité plus norme d’un fait, mais d’avoir mal cerné la manière indirecte dont médiocre. fonctionne le principe d’utilité et c’est John Stuart Mill qui corrigera le simplisme de la psychologie benthamienne sur ce point. Une des questions les plus débattues par l’utilitarisme contemporain a été la critique de l’hédonisme et la définition du principe d’utilité en des termes qui se prêtent à la fois à l’évaluation quantitative et à la prescriptive universelle. On peut décrire le bienêtre, en suivant Bentham, comme l’état mental que nous expérimentons lors de la satisfaction de certains choix et qui nous fait rechercher certains objets. Marxisme Le marxisme se distingue de tous les autres systèmes socialistes par sa tendance anti-éthique. Dans tout le marxisme, il n’y a pas un gramme d’éthique, et par conséquent, il n’y a pas plus de jugement éthique que de postulat éthique. 1) 2) 3) Le marxisme est un courant de pensée politique, sociologique et économique fondé sur les idées de Karl Marx (et dans une moindre mesure de Friedrich Engels) et de ses continuateurs. Politiquement, le marxisme repose sur la participation au mouvement réel de la lutte des classes, afin d'arriver à une société sans classes en tant Le marxisme vise le dévoilement des lois de l’histoire ; il exclut qu'alternative au capitalisme. En effet, Karl Marx considère que les questions de devoir et les discussions éthiques, au sens où il "l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs les tient pour obsolètes. eux-mêmes" Le marxisme, comme n’importe quel cadre d’analyse, "autorise" des discussions éthiques, mais ne permet pas de Dans le cadre éthique, il milite pour le projet révolutionnaire valider des réponses morales qui lui seraient, spécifiques. communiste, c'est-à-dire une société débarrassée du salariat, du Le marxisme a un contenu moral spécifique, qui prescrit capitalisme, des classes sociales, des États, et des frontières. notamment de combattre pour la révolution et pour le communisme. Mais à court terme comme à moyen terme, les Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 12/34 considérations "instrumentales" peuvent l’emporter sur l’équité et sur la morale: il y a une raison de classe, comme il y a une raison d’état. Stoïcisme Ethiques rationnelles ou formelles Cette philosophie exhorte à la pratique d'exercices de méditation conduisant à vivre en accord avec la nature et la raison pour École philosophique fondée au IIIe s. avant J.-C. par Zénon de Cition, atteindre la sagesse et le bonheur envisagés comme ataraxie, but le stoïcisme se prolonge à travers toute l'Antiquité, tant en Grèce ultime de l'existence de l'homme (absence de troubles qui prend la que dans l'Empire romain, et reste influent jusqu'à notre époque. forme d'une absence de souffrance). Epictète résume cette Pour cette philosophie de l'acceptation et du courage, à la fois conduite stoïcienne à travers la maxime Sustine et abstine qui fataliste (pour ce qui ne dépend pas de nous) et volontariste (pour signifie "Supporte et abstiens-toi". ce qui en dépend), qui dit oui à tout ce qui arrive et à tout ce que la situation donnée, la vertu ou la raison exigent de nous, le bonheur La morale stoïcienne peut donc se résumer ainsi : est le souverain bien et la vertu, le seul bonheur. chacun agit conformément à sa nature (kathekon), mais le sage agit On distingue traditionnellement trois périodes: l'ancien stoïcisme toujours de façon parfaite (même, dans des circonstances (Zénon, Cléanthe et surtout Chrysippe), qui couvre tout le IIIe s. exceptionnelles, en faisant des actes que la moralité ordinaire avant J.-C. ; le moyen stoïcisme (Panaitios de Rhodes, Posidonios), réprouverait) qui traverse les IIe et Ier s; enfin le stoïcisme impérial, le mieux la fin de cette morale, c'est de vivre par des choix conformes à la connu, qui s'épanouit durant les deux premiers siècles après J.-C., raison universelle: vivre en suivant la nature, puisque tout arrive par grâce aux œuvres de Sénèque, Épictète et Marc Aurèle. la raison universelle. Cela permet d'atteindre l'aponie (absence de Contre les épicuriens, leurs contemporains et adversaires, les troubles corporels) et l'ataraxie. Mais la sagesse est un idéal très stoïciens refusent de considérer que le plaisir soit un bien. "En effet, difficile à atteindre. disaient-ils, il y a des plaisirs honteux, et rien de ce qui est honteux n'est un bien". Pour la même raison, la douleur n'est pas un mal, puisqu'il n'y a "d'autre mal que ce qui est honteux", ce que la douleur n'est pas. Il en résulte que "le seul bien, c'est ce qui est moral (honestum); et avoir une vie heureuse, c'est vivre moralement, c'est-à-dire avec vertu" (Cicéron, De finibus). Ce qu'on peut appeler le moralisme des stoïciens est indissociable du naturalisme de ces philosophes. Le souverain bien consiste en effet à "vivre en accord avec la nature": "en accord", c'est-à-dire homologoumenôs, "d'une même raison". C'est en quoi la vie naturelle est aussi une vie raisonnable et, par-là, une vie vertueuse: Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 13/34 la vertu est "conformité de l'âme avec elle-même", de la raison en moi avec la raison en tout. Kantisme Prenant acte de la révolution intellectuelle accomplie dans les sciences par Copernic puis par Newton, Emmanuel Kant met en place une nouvelle philosophie, à laquelle il donne le nom de "criticisme". Penseur d'un rationalisme renouvelé, grâce à Hume, qui le réveilla, dit-il, de son sommeil dogmatique, il formule les conditions a priori de toute connaissance et établit la valeur absolue de la loi morale: elle constitue pour lui un impératif catégorique qui fonde la liberté de l'homme. Kant part d’un constat: ce qu’on tient pour véritablement moral, c’est une bonne volonté. Les autres dispositions comme les talents de l’esprit, les qualités de caractère, ne peuvent jamais être considérées comme bonnes en elles-mêmes, mais dépendent de l’usage que notre volonté en fait : il est en effet possible de faire usage de son talent, de son intelligence ou de son courage à des fins malveillantes. Ainsi, seule une volonté bonne saurait vraiment avoir une valeur pour elle-même: une volonté bonne, c’est une volonté qui entraîne une action accomplie simplement par devoir. A partir des acquis de la Critique de la raison pure, Kant élabore une philosophie morale profondément nouvelle qui part du concept de loi morale valable pour tout être raisonnable, universelle et nécessaire, et de son corrélat, la "liberté transcendantale". Exposée en particulier dans la Critique de la raison pratique, l'éthique kantienne a été qualifiée de déontologique, c'est-à-dire qu'elle considère l'action en elle-même et le devoir ou obligation morale, indépendamment de toute circonstance empirique de l'action. Elle s'oppose donc aussi bien à l'éthique conséquentialiste, qui estime la valeur morale de l'action en fonction des conséquences prévisibles de celles-ci, qu'à l'eudémonisme, qui considère que l'éthique doit viser le bonheur. Du fait du caractère absolument impératif de la notion de devoir, et de la connexion non nécessaire entre le bonheur et la morale, la position kantienne a souvent été qualifiée de rigoriste. Un acte simplement conforme au devoir, en tant qu’il n’obéit à aucune loi universelle de la raison, ne peut être considéré comme bon. Ainsi, pour Kant, agir par devoir, c’est avoir l’intention désintéressée de bien faire, avec pour seul motif le respect de la loi morale. Aristotélisme Les quatre grands traits de la "philosophie pratique" d’Aristote: L'aristotélisme est la doctrine d'Aristote (385 env.-322 av. J.-C.), telle qu'elle résulte de l'ensemble des œuvres conservées d'Aristote, 1) Nous avons affaire à ce qu’on peut appeler une "théorie de publiées par Andronicos de Rhodes, au premier siècle avant notre l’action" puisque la vertu ou l’excellence est non seulement une ère. habitude, mais encore celle de choisir ceci de préférence à cela. 2) La définition de la vertu morale comme "juste milieu" ou Née, en effet, de la critique de la doctrine platonicienne des Idées, "médiété". cette œuvre embrasse toutes les disciplines philosophiques, qui Conception : P. Edgard El Haiby 3) Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 14/34 Le caractère relatif de ce juste milieu, relativisme apparemment redoublé puisqu’il est relatif à nous et déterminé par l’homme prudent. Le rôle essentiel du prudent puisque c’est lui qui norme cette médiété, rôle qui sera réaffirmé quand il s’agira de définir l’objet du souhait, le bien, ou encore la nature du plaisir. vont de la dialectique et de la logique à la philosophie morale et politique et même à l'esthétique, en passant par la physique, la biologie et la psychologie. La philosophie platonicienne avait montré une union entre la vie intellectuelle, morale et politique : la philosophie, par la science, atteint la vertu et la capacité de gouverner la cité. La philosophie aristotélicienne va dissocier tout cela. Pour Aristote, le bien moral ne correspond pas à l’Idée du Bien, cet objet de science que Platon mettait au sommet des êtres, et dont la contemplation donnait au philosophe l’opinion droite. "Quand il s’agit de vertu, dit Aristote, il n’est pas suffisant de savoir ; il faut encore la posséder et la pratiquer." Pour lui, ce qui pourrait être juste de faire dans une situation pourrait ne pas convenir dans d'autres situations. En ce cas, seule la phronesis (prudence, sagacité ou encore sagesse pratique) peut permettre de nous aiguiller, en nous conduisant à adapter notre action à la particularité d'une situation. 4) Aristote définit la vertu comme disposition acquise volontairement Aristote croyait que le bonheur, qui s'identifiait avec la vertu, était la fin (telos) de la vie. Ainsi, l’homme bon est celui qui réalise bien sa fonction (ergon), son télos. Il s'agit donc de devenir véritablement un être humain, c’estLa morale n’est donc pas une science exacte, mais un enseignement à-dire de développer ce qui en moi fait qu’on peut me reconnaître pratique qui vise à rendre les hommes meilleurs. comme faisant partie de la communauté des êtres humains. Or, la La première étape de ce programme consiste à déceler la fin qui vertu est ce qui définit l'homme en tant qu'homme (et non en tant oriente toutes les actions humaines. Or l’observation montre que que charpentier, musicien, etc.). tous les hommes recherchent le bonheur : plaisir, science, richesse, ne sont que des moyens pour atteindre cette fin. Plus précisément, ce bonheur doit être un bonheur humain, c'est-à-dire, un bonheur qui nous soit durable et accessible par nos actions. Un être n’atteint sa fin que lorsqu’il accomplit la fonction qui lui est propre. L’excellence dans l’accomplissement de cette fonction est la vertu de cet être. L’éthique est une description concrète de la manière dont la raison peut diriger toute l’activité humaine. Il n’y a donc pas de règle générale dans l’éthique aristotélicienne ; il s’agit seulement de rechercher "quand il faut agir, dans quel cas, à l’égard de qui, en vue de quoi et de quelle manière". La vertu consiste dans le bon usage Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 15/34 d’une raison sachant s’adapter aux circonstances particulières que la vie quotidienne lui présente. Thomisme Corps doctrinal à la fois philosophique et théologique que caractérisent une forte cohérence et des perspectives critiques, le thomisme s'est rapidement imposé à l'attention. Du vivant même de son auteur, l'accueil et les oppositions ne lui ont pas manqué. Le thomisme est pourtant une entreprise irénique par son double souci de rejeter le dogmatisme hors du domaine où règne la raison et de présenter sur les problèmes de la philosophie et de la théologie une vue austère peut-être, mais toujours faite de haute intelligence. Doctrine de saint Thomas d'Aquin exposée dans la Somme théologique notamment, dont l'originalité est de concilier les acquis de la pensée aristotélicienne et les exigences de la foi chrétienne et qui repose sur l'affirmation fondamentale de l'Être comme réalité universelle. La morale thomasienne est une morale de l’agir vertueux spontané et non pas imposé, et que l’épanouissement humain en est le terme normal. Sa morale est également très proche de celle d’Aristote: ses considérations sur la justice aboutissent à distinguer justice distributive (celle qui répartit les honneurs, les richesses selon les qualités de chacun) et justice commutative (celle qui règle les échanges économiques selon le principe de l’égalité de proportion). Au sommet de l’éthique thomiste se place la figure du Sage: il désigne celui dont l’attention est tournée vers la cause suprême de l’Univers, à savoir Dieu. Ainsi la sagesse représente-t-elle la connaissance des réalités divines. L’ultime bonheur de l’homme consiste à contempler le divin et la vérité : la contemplation du vrai est notre but ultime et nous élève à Dieu. Eudémonisme Du grec eudaimonia (eu -signifie "bon" et daimon signifie "génie". Se dit des systèmes où l'activité morale consiste dans la recherche du bonheur, tenu pour souverain bien. Les eudémonismes diffèrent selon la définition qu'ils donnent du bonheur : harmonie de diverses vertus et dispositions (Platon); activité noétique et éthique accompagnée d'occurrences favorables (Aristote); constance d'un L’eudémonisme (du grec : εὐδαιμονία / eudaimonía, "béatitude") est une doctrine posant comme principe que le bonheur est le but de la vie humaine. Le bonheur n'est pas perçu comme opposé à la raison, il en est la finalité naturelle. Pour Aristote "Le bonheur, [eudaimonia] est un principe; c’est pour l’atteindre que nous accomplissons tous les autres actes ; il est bien Conception : P. Edgard El Haiby Morale de la sympathie Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 16/34 plaisir consistant essentiellement dans l'absence de douleur (Épicure); accord volontaire de soi-même avec l'ordre cosmique (les stoïciens). Kant restreint la définition de l'eudémonisme: il est la morale du bonheur individuel, blâmable comme fin de l'action quand il s'agit de soi, puisque c'est la perfection qu'il faut vouloir. Mais, quand il s'agit des autres, la recherche de leur bonheur est un devoir, qui s'impose au nom de la raison et implique donc une fin supérieure au bonheur lui-même. le génie de nos motivations". L'eudémonisme qualifie les doctrines éthiques qui font du bonheur la valeur suprême et le critère ultime de choix des actions humaines: Aristote, Épicure, Montaigne, Spinoza, Diderot…. L'eudémonisme se fonde sur une confiance générale en l'homme qui reste la clé irremplaçable de l'humanisme. La doctrine se concentre sur cette seule chance d'épanouissement que constitue la vie terrestre et c'est par conséquent à la réussite de cette vie, au bonheur immédiat ou rationalisé sur un temps long, tant au sien qu'à celui d'autrui, qu'elle consacre logiquement l'essentiel de son effort. Ethique intermédiaire entre empirisme et rationalisme Le mot est dérivé de la langue grecque συμπάθεια (sympatheia), du grec ancien σύν (sýn) qui signifie ensemble et de πάθος (pathos) passion, en l'occurrence la souffrance (de πάσχω - pascho, "être affecté par, à souffrir), d'où le sens originel de "compassion" ou "condoléance" que le mot a encore de nos jours en anglais par exemple. Il est indéniable que Smith participe de ce sentimentalisme. Lui aussi pense que le jugement moral est fondé, non sur la raison, mais sur des émotions et des sentiments. Ce n’est pas à la raison des hommes que le créateur s’est fie pour leur donner le sens de ce qui est bien et de ce qui est mal, mais à la nature, aux passions qui l’animent, aux appétits qui l’enflamment. Adam Smith, ami de Hume, tient la sympathie (sympathy) pour la "faculté de partager les passions des autres". Il fait de la sympathie L’un des traits les plus manifestes du jugement moral est son le mobile premier des actes et le fondement des jugements moraux caractère d’immédiateté, de spontanéité. C’est donc, concluent les bénévolats, que loin de procéder de l’opération de la raison pure découvrant, sous la forme de relations nécessaires entre les choses, des normes transcendantes, le jugement moral s’enracine dans les passions et les sentiments, qui présentent précisément ce caractère de spontanéité. Le problème, c’est que le jugement moral présente d’autres caractéristiques qu’il parait plus difficile de concilier avec les propriétés des sentiments et des passions: l’objectivité, l’universalité, le caractère d’obligation. Le principe de sympathie engendre donc le jugement moral, mais il engendre bien autre chose, y compris la "corruption" de la moralité- Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 17/34 à vrai dire, tout l’ordre social, y compris le désordre nécessaire à sa reproduction, résulte de la sympathie. Morale de la pitié Par le fondement de la morale Schopenhauer entend, non les Selon Schopenhauer, Kant a eu l'indéniable mérite de "purifier" la principes suprêmes selon lesquels il faut se conduire, mais la raison morale de l’eudémonisme des Anciens pour la majorité desquels la pour laquelle ces principes ont de l’autorité. vertu s’identifie presque toujours à la félicité. Sur le fondement de la morale commence par écarter toute solution théologique du problème. On ne peut faire remonter à la volonté de Dieu l’autorité des principes moraux, insiste Schopenhauer, puisqu’aucune révélation divine n’est assez certaine ou claire pour s’imposer par elle-même; au contraire, on établit l’authenticité d’une révélation supposée en l’examinant à la lumière de nos convictions morales. Une morale théologique favorise d’ailleurs l’idée que l’action bonne repose sur le calcul des peines et récompenses, alors que l’essence de la morale consiste à dépasser un tel égoïsme. Cependant, pour Schopenhauer, la philosophie morale de Platon était déjà une exception notable à cette "morale des anciens" car son éthique est "désintéressée" et "ascétique" ; c'est d'ailleurs aussi pourquoi, elle tourne, quelquefois, au "mysticisme". Selon Schopenhauer, toute morale, basée sur le devoir, envisagé comme principe, en arrive inévitablement à présupposer un "principe" transcendant non fondé (au sens de non justifié et, peutêtre même, inévitablement "injustifiable"), car une telle morale "déontologique" ne peut rien "faire" d'autre que de déplacer la question du fondement. Schopenhauer repousse également les théories "eudémonistes" Selon Schopenhauer, l’hypothèse d’une volonté extérieure et du fondement de la morale, qui identifient vertu et bonheur de étrangère et surtout, "transcendant" toute détermination sensible l’individu ou supposent que son bonheur est la conséquence de la et empirique (par exemple: "une volonté divine" ou "une volonté vertu. autonome") dictant les devoirs ne devrait pas du tout avoir sa place Schopenhauer n’hésite pas à dénoncer la conception impérative dans une "philosophie morale". De plus, les notions de "devoir comme une "morale d’esclave". inconditionnel" ou de "devoir absolu" sont des "contradictions in adjecto". Lorsqu’on se réfère à l’expérience, on trouve tout de suite que le motif principal de la conduite humaine est l’égoïsme. Chacun agit la "Ce que je fais est toujours ce à quoi je consens" : De cette plupart du temps selon son intérêt tel qu’il l’entend. On trouve aussi affirmation, Schopenhauer conclut qu'il n’y a pas véritablement que seuls des actions qui échappent à cette motivation sont l’objet d’injustice envers soi-même, ni aussi, de devoir ou d'obligation de l’approbation morale. morale de charité envers soi-même parce que celle-ci est "naturelle" au sens de "spontanée" et même d'"instinctive" ou elle n'est pas. Il n’y a donc pas de devoirs envers nous-mêmes. La morale est donc une conception et surtout, une pratique variable Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 18/34 qui découle de la culture particulière (et surtout de l'éducation) d'un individu. Expérience morale et religieuse Bergson semble pourtant en déplacer profondément les termes: loin de rapporter une conscience à une loi pure, l’obligation se ramène d’abord à une habitude ou à un instinct qui lie l’individu humain à son espèce et à la vie ; elle est ensuite inspirée invinciblement, comme une émotion, devant l’action de certains hommes exceptionnels, au-delà de toute loi ; dans chacun des deux cas, la réponse à la question ne semble donc découler de la recherche rationnelle du fondement, et aucune des deux "morales" que va distinguer Bergson ne part même d’une question posée par un sujet libre, par un "je", sur le sens de sa propre activité. Les Deux Sources de la morale et de la religion est un ouvrage du philosophe français Henri Bergson paru en 1932. Il s'agit du dernier ouvrage du philosophe. Sa réflexion sur la morale l'amène à discuter les approches sociologiques de son temps (Émile Durkheim, Lucien Lévy-Bruhl) en insistant particulièrement sur le concept d'obligation qu'il place au cœur des relations interindividuelles. Il pose la distinction restée célèbre entre "société ouverte" et "société fermée" (qui sera reprise dans une autre perspective par l'épistémologue Karl R. Popper). La question à poser n’est pas : que dois-je faire ?, mais: "pourquoi obéissions-nous?". Le philosophe ne recherche pas un fondement Bergson considère que la première morale, la morale close c'est tout rationnel, mais un principe ou une force effective, il se livre à une le système d'habitudes qui règlent notre conduite en fonction des exigences sociales et que l'on appelle ou que l'on rattache à généalogie qu’à une critique. l'obligation morale mais une telle obligation morale procède en L’intelligence ou la raison humaine se manifesteraient d’abord, réalité de la vie selon Bergson, dans ce rapport de forces, pour ramener l’individu à l’obéissance, comme "résistance aux résistances". Pourtant, non seulement cette force se manifeste toujours dans un sentiment, mais celui-ci implique la liberté: "un être ne se sent obligé que s’il est libre, et chaque obligation, prise à part, implique la liberté. Mais il est nécessaire qu’il y ait des obligations". L’unité complexe de la morale de Bergson, qui conjoint la forme naturelle de l’obligation, la direction métaphasique de l’émotion, et la méditation de la raison, impose tout d’abord de surmonter ce qui apparait comme une double limite, et que l’on retrouve dans la plupart des objections qui lui ont été adressés. Existentialisme Le mot "existence" signifie avant tout un arrachement, une rupture L’existentialisme est un courant philosophique et littéraire qui par laquelle une réalité s'exclurait d'un tout auquel elle a appartenu. postule que l'être humain forme l'essence de sa vie par ses propres Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 19/34 Dans ce sens, un sujet accède à l'existence lorsqu'il s'extrait de actions, en opposition à la thèse que ces dernières lui sont l'unité d'être dont il faisait partie, et se "fragilise" ainsi en une prédéterminées par de quelconques doctrines théologiques, présence autonome dans le temps. philosophiques ou morales. L'existentialisme considère donc chaque personne comme un être unique qui est maître, non L'existence: tout ce qui est essentiellement réel pour moi ne l'est seulement de ses actes et de son destin, mais également, pour le que parce que je suis moi-même. Nous ne sommes pas seulement meilleur comme pour le pire, des valeurs qu'il décide d'adopter. là en fait, mais notre vie nous est confiée comme lieu et comme Selon Sartre, la famille passe avant le rêve de soi-même. corps pour que nous y réalisions notre liberté originelle. Sartre déclare que pour la pensée existentialiste toute vérité et toute action impliquent un milieu humain et une subjectivité humaine. Cela veut dire que tous les aspects de cette doctrine se rapportent à l’être humain et à sa faculté de prendre conscience de sa situation. Pour Sartre, l'homme est donc cet être chez qui "l'existence précède l'essence", c'est-à-dire qui est d'abord et qui se définit ensuite, par ses choix, par ses actes. Ce qui signifie qu'il est libre. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 20/34 Tableau n°3 : Classement selon le lieu de la définition du bien Ontologique Les dictionnaires Wikipédia "Ontologie" veut dire : doctrine ou théorie de l'être. Cette simple définition, toute nominale d'ailleurs, propose une petite énigme de lexique : le mot "ontologie" est considérablement plus récent que la discipline qu'il désigne ; ce sont les Grecs qui ont inventé la question de l'être, mais ils n'ont pas appelé ontologie la discipline qu'ils instituaient. Aristote désigne de façon indirecte comme "la science que nous cherchons" la théorie de l'être en tant qu'être. Ses successeurs, mettant en ordre ses cours de philosophie, ont appelé Métaphysiques les traités contenant cette théorie, voulant signifier à la fois que ces traités succèdent aux traités sur la nature, ou Physiques, et que leur objet dépasse, transcende celui de la nature. On n'a songé à donner le nom d'ontologie à la science de l'être en tant qu'être que lorsqu'il a fallu préciser le statut de cette science par rapport aux sciences philosophiques qui traitaient, non de l'être en général, mais de l'être du monde, de l'être de l'âme, de l'être de Dieu et que l'on appelait cosmologie rationnelle, psychologie rationnelle, théologie rationnelle. L'ontologie est une branche de la philosophie concernant l'étude de l'être, de ses modalités et de ses propriétés. En philosophie, l'ontologie (de onto-, tiré du grec ὤν, ὄντος "étant", participe présent du verbe εἰμί "être") est l'étude de l'être en tant qu'être (définition proposée par Aristote), c'est-à-dire l'étude des propriétés générales de tout ce qui est. Conception : P. Edgard El Haiby Déontologique Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) Le terme « deontology » dérive du grec: « deon » (devoir) et logos (science). En général, on entend par une éthique déontologique une éthique qui soutient que certains actes sont moralement obligatoires ou prohibés, sans égards pour leurs conséquences dans le monde. 21/34 L'Éthique déontologique ou déontologisme (dérivé d'un mot grec signifiant "obligation" ou "devoir") est la théorie éthique qui affirme que chaque action humaine doit être jugée selon sa conformité (ou sa non-conformité) à certains devoirs. Le déontologisme s'oppose ainsi au conséquentialisme, qui affirme Le premier philosophe qui a défendu explicitement une éthique que les actions humaines sont à juger uniquement en fonction de déontologique est Kant: un acte est moralement bon si et leurs conséquences. seulement s'il est accompli "par devoir", ou par "respect pour la loi". Le déontologisme moniste fait dériver toutes nos obligations d'un Il s'agit d'une véritable rupture opérée par le formalisme kantien par seul et unique principe, comme l'impératif catégorique dans la rapport à toute tradition qui cherche à déterminer un "bien" doctrine de Kant. extérieur à la volonté. Le déontologisme pluraliste refuse un tel réductionnisme et affirme que les actions humaines sont à juger en fonction de plusieurs principes distincts, comme le devoir de ne pas faire de mal à autrui inutilement (principe de non-malfaisance), le devoir de se conformer aux engagements librement donnés (principe de fidélité), le devoir de remercier ceux et celles qui nous ont aidés (principe de gratitude), le devoir de compenser les personnes à qui nous avons fait un tort (principe de justice restaurative), etc. Conception : P. Edgard El Haiby Utilitariste Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) Mill établit en ces termes la doctrine utilitariste: "le Bonheur est désirable; il est, à titre de fin, la seule chose désirable, toutes les autres choses n'étant désirables que comme des moyens en vue de cette fin." 22/34 On peut résumer le cœur de la doctrine utilitariste par la phrase : Agis toujours de manière à ce qu'il en résulte la plus grande quantité de bonheur (principe du bonheur maximum). Il s'agit donc d'une morale eudémoniste, mais qui, à l'opposé de l'égoïsme, insiste sur le fait qu'il faut considérer le bien-être de tous et non le bien-être du seul agent acteur. Tout ce qu'il a à dire au sujet de la relation entre l'hédonisme et le principe d'utilité est que si "le Bonheur de chacun est un bien pour chacun", alors "le Bonheur général" doit être "un bien pour L'utilitarisme est donc un conséquentialisme eudémoniste. l'ensemble des personnes réunies." Cependant cette définition minimale du principe d'utilité ne doit pas Mill explique qu'il considère que "la parfait impartialité entre les masquer les nombreuses différences existantes entre les systèmes personnes" fait partie de la signification même du principe du plus utilitaristes: utilitarisme hédoniste, utilitarisme indirect, utilitarisme grand Bonheur: "ce principe n'est qu'une suite de mots dépourvus de l'acte contre utilitarisme des préférences, etc. de sens raisonnable, s'il n'oblige pas à compter exactement pour Ce sont avant tout Jeremy Bentham (1748-1832) et John Stuart Mill autant le bonheur d'une personne et celui d'une autre, supposés de (1806-1873) qui ont donné une forme systématique au principe même degré, et compte tenu de leur nature dans la mesure d'utilité et ont entrepris de l'appliquer à des questions concrètes convenable. Ces conditions étant remplies, la maxime de Bentham: "chacun doit compter pour un, personne pour plus d'un" pourrait Par principe d'utilité, on entend le principe selon lequel toute figurer au-dessous du principe d'utilité comme commentaire action, quelle qu'elle soit, doit être approuvée ou désavouée en fonction de sa tendance à augmenter ou à réduire le bonheur des explicatif." parties affectées par l'action. [...] On désigne par utilité la tendance Mill comprend que la norme utilitariste de valeur est incapable de de quelque chose à engendrer bien-être, avantages, joie, biens ou nous dire par elle-même selon quelles règles, quels buts et idéaux bonheur. pratiques nous devons vivre. Il donna la place qui convenait, parmi les nécessités premières du bien-être humain, à la culture La notion d'utilité n'a pas chez les utilitaristes le sens qu'on lui personnelle de l'individu. La première tâche qui incombe à chaque attribue couramment. Ce qui est "utile" désigne ce qui contribue à être humain est de s'atteler à cette culture intime, de développer maximiser le bien-être d'une population. C'est en ce sens particulier qu'on peut parler du calcul de l'utilité d'un acte, ou qu'on peut tout ce qu'il y avait de meilleur en lui. comparer les utilités de différentes actions ou règles. La pensée utilitariste consiste donc à peser le pour et le contre d'une décision et comparer cette dernière aux avantages et désavantages de la décision inverse. Conception : P. Edgard El Haiby Axiologie Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 23/34 Étude ou théorie (en grec : logos) de ce qui est digne d'estime (en L’axiologie (du grec: axia ou axios, valeur, qualité) peut définir, soit grec : axion), de ce qui vaut, de ce qui peut être objet d'un jugement la science des valeurs morales, soit, en philosophie, à la fois une de valeur. théorie des valeurs (axios) ou une branche de la philosophie s'intéressant au domaine des valeurs. Pratiquement, axiologie est synonyme de "philosophie des valeurs". Cette philosophie s'est développée, depuis 1892, à la suite des Le Senne élabore une philosophie des valeurs qui subordonne le travaux de H. Rickert, néo-kantien de l'école badoise. Pour Rickert, devoir à une plus haute instance, l'esprit agissant qui est Valeur, vie qui reprend une distinction de Kant, puis de Fichte, le devoir-être surabondante. Dès lors, l'ordre des valeurs (l'axiologique) l'emporte sur l'être, la valeur l'emporte sur la réalité. Ce qui est se transcende l'opposition entre l'ontologique (ce qui est) et le constate. Mais ce qui est valeur commande et prescrit (un jugement déontologique (ce qui doit être). Le postulat spiritualiste de la d'existence s'énonce à l'indicatif, un jugement de valeur s'énonce à doctrine axiologique est que "l'absolu est, dans son fond, valeur l'impératif). L'interrogation se déplaçant de l'être au devoir-être, du infinie". C'est cette valeur qui est source de tout devoir. La Valeur réel à la valeur, on est passé tout naturellement de l'ontologie à absolue se diffracte en l'homme sous les espèces des quatre valeurs l'axiologie ; certains axiologues ont même regardé l'ontologie cardinales : Vérité, Bien, Beauté, Amour, qui se combinent les unes comme périmée (celle-ci ne s'est pas inclinée : l'être est ce qui vaut les autres en des synthèses indéfiniment complexes. en soi, les valeurs ne sont souvent que ce qui vaut pour nous). Le Senne conclut que la destinée humaine d'une personne Le Senne se consacre à la philosophie morale. Il ne s'agit pas de responsable consiste à mettre son caractère au service de la valeur regretter ce que nous ne pouvons, mais d'aimer ce que nous devons. particulière que sa vocation propre lui désigne. De cette fidélité ou La morale se prolonge en axiologie. La valeur est ce qui est digne de cette trahison à ses propres valeurs découlera son bonheur ou d'être recherché par nous. Elle est destinée à combler notre son malheur. indigence et à conforter notre faiblesse. Les valeurs sont transcendantes ; pourtant, elles ont besoin de nous pour être actualisées. Les quatre valeurs cardinales sont la vérité, la beauté, le bien et l'amour, qui est la valeur de l'intimité. Mais toutes les quatre émanent de la valeur absolue ou Dieu. Conception : P. Edgard El Haiby Personnaliste Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) Mounier n'est pas un moraliste. Il est convaincu que le mal tient d'abord à une culture qui a fait de l'homme un individu abstrait, coupé des autres et de la nature. Descartes, en fondant l'esprit moderne, a consacré la scission. Il faut donc "refaire la Renaissance", c'est-à-dire reconstruire un humanisme capable d'intégrer à une civilisation nouvelle toutes les données de l'histoire et des sciences de l'homme. L'axe de cet humanisme, c'est la personne. Mounier ne conçoit pas la personne comme une entité juridique qu'il faudrait défendre contre la collectivité. Au contraire, le personnalisme tient que la société est dans l'homme, autant que l'homme est dans la société. Par opposition à l'individu, être isolé, pure abstraction, la personne est engagée, dès sa naissance, dans une communauté. Par opposition à l'individu, objet arithmétique, élément d'une masse, la personne est un sujet autocréateur : "Elle est la seule réalité que nous connaissions et que nous fassions en même temps du dedans; elle se conquiert sur l'impersonnel par un mouvement de personnalisation". Enfin, par opposition à l'individu, entité close, la personne est ouverte à la transcendance, elle est réponse à une "vocation". La personne est donc l'homme qui se fonde, mais par la négation même de son individualité, s'ouvrant ainsi à la communauté et à l'univers. "L'homme concret, c'est l'homme qui se donne". Ce personnalisme rassemble de nombreux apports, les uns venant du thomisme, les autres de l'existentialisme allemand et de l'idéalisme russe. C'est que, pour Mounier, le conflit du matérialisme et de l'idéalisme est artificiel, comme celui de l'individualisme et du collectivisme; ce sont des abstractions complémentaires. Le matérialisme exprime une séparation. L'esprit doit rétablir l'union. À l'intérieur d'une ontologie dynamique dont la personne ("mouvement d'être vers l'être") est le moteur, l'homme 24/34 Le personnalisme, (ou personnalisme communautaire), est un courant d'idées fondé par Emmanuel Mounier autour de la revue Esprit et selon le fondateur, recherchant une troisième voie humaniste entre le capitalisme libéral et le marxisme. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) retrouvera le contact perdu avec autrui et avec la nature, et les communautés s'ordonneront en une cité orientée, non point vers le confort, mais vers la justice, l'amour et la création. Ce personnalisme, qui dessine une figure utopique de la civilisation, est pourtant une praxis. Exigeant la transformation personnelle, il pousse à l'engagement: la rencontre avec l'événement viendra révéler et concrétiser la vocation personnelle. Mais il ne se laisse pas absorber dans une philosophie de l'histoire. C'est parce qu'elle reste orientée vers la transcendance que la personne est capable d'agir dans l'histoire sans s'y perdre. 25/34 Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 26/34 Tableau n°4 : Classement selon le mode de raisonnement dans le discernement de la moralité de l’acte Personnalisme prudentiel Les dictionnaires Wikipédia Téléologique Le personnalisme "post-Mounier" est une philosophie éthique dont la valeur fondamentale est le respect de la personne. Le principe moral fondamental du personnalisme peut se formuler ainsi: "Une action est bonne dans la mesure où elle respecte la personne humaine et contribue à son épanouissement ; dans le cas contraire, elle est mauvaise." Le personnalisme est une vision de l'homme qui souligne sa dignité comme fils de Dieu. Il voit dans le dynamisme inhérent qui caractérise l'être humain un appel à une auto-réalisation qui s'approprie librement les valeurs permanentes et transcendantes. Quiconque est imprégné d'esprit personnaliste nourrit une conscience vive de la liberté personnelle, la sienne et celle des autres. Il a par conséquent une conscience non moins vive de la responsabilité personnelle. Le personnalisme entretient une vision aiguë des droits fondamentaux de la personne et incite à les défendre contre tout type de violation perpétrée à son égard. Il tient à la fois que celui qui est conscient de ses propres droits doit avoir également conscience de ses devoirs. Pour le personnalisme, il n'y a aucune déchéance à obéir à la vérité, à la loi ou à l'autorité légitime et moins encore à être fidèle aux exigences d'un engagement librement assumé. Le personnalisme implique ouverture et attention aux valeurs qui se trouvent chez les autres. Il représente un ferment prodigieux pour la construction de la communauté. Dans le véritable personnalisme il y a une alliance naturelle entre la personne, l'être humain individuel et particulier, et la communauté. La participation personnaliste à la communauté n'implique pas une adaptation d'intérêts mutuels mais un accord de personne à personne fondé sur la conscience de la dignité et des droits que l'on a en commun. Conception : P. Edgard El Haiby Proportionalisme Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 27/34 Enoncée par Thomas d’Aquin au XIIIe siècle, à propos de la légitime Proportionalism is an ethical theory that lies between consequential défense, cette règle appartient à la tradition de la théologie morale theories and deontological theories. Consequential theories, like ; aujourd’hui, elle est exposée sous la forme suivante : utilitarianism, say that an action is right or wrong, depending on the consequences it produces, whereas deontological theories, like The On peut accomplir un acte ayant à la fois un bon et un mauvais effet Categorical Imperative, say that actions are either intrinsically right seulement si le bon effet est supérieur au mauvais et si, de surcroît, or intrinsically wrong. Proportionalist theories like rule au moins les conditions suivantes ont été remplies : utilitarianism, however, say it is never right to go against a principle 1) l'acte en lui-même doit être bon ou moralement neutre, ou tout unless a proportionate reason would justify it. au moins ne doit pas être interdit ; 1960s Proportionalism is a consequentialist attempt to develop 2) le mauvais effet ne doit pas être un moyen de produire le bon Natural Moral Law, a Catholic teleological theory by Thomas effet, mais doit être simultané ou en résulter ; Aquinas. The moral guidelines set down by the Roman Catholic 3) le mauvais effet prévu ne doit pas être intentionnel ou teachings of Natural Moral Law are mostly upheld in that approuvé, mais simplement permis ; intrinsically evil acts are still classified so. In certain situations where 4) l'effet positif recherché doit être proportionnel à l'effet there is a balance of ontic goods and ontic evils (ontic evils are those indésirable et il n’y a pas d’autre moyen pour l’obtenir. that are not immoral but merely cause pain or suffering, ontic goods La doctrine du double effet est contestée par les tenants de are those that alieviate pain or suffering). Proportionalism asserts l'utilitarisme, qui refusent notamment la possibilité que deux that one can determine the right course of action by weighing up actions identiques dans leurs conséquences ne soient pas d'égale the good and the necessary evil caused by the action. As a result, valeur. proportionalism aims to choose the lesser of evils. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) Conséquentialisme Le conséquentialisme est la théologie qui pose que, pour déterminer si un agent a eu raison d'opérer tel choix particulier, il convient d'examiner les conséquences de cette décision, ses effets sur le monde. En portant notre attention sur les conséquences, cette théorie adopte une orientation téléologique- du grec telos signifiant but ou fin. C'est le contraire d'une perspective déontologique. 28/34 Le conséquentialisme fait partie des éthiques téléologiques et constitue l'ensemble des théories morales qui soutiennent que ce sont les conséquences d'une action donnée qui doivent constituer la base de tout jugement moral de ladite action. Ainsi, d'un point de vue conséquentialiste, une action moralement juste est une action dont les conséquences sont bonnes. Plus formellement, le conséquentialisme est le point de vue moral qui prend les conséquences pour seul critère normatif. On oppose généralement Tandis que le conséquentialisme évalue un choix en examinant ses le conséquentialisme aux éthiques déontologiques, lesquelles conséquences, une méthode déontologique évaluerait mettent l'accent sur le type d'action plutôt que sur ses généralement ce choix en déterminant dans quelle mesure il conséquences, et à l'éthique de la vertu, laquelle se concentre sur satisfait aux obligations qui incombent à l'agent. le caractère et les motivations de l'agent. Il est présente tantôt comme une théorie portant sur le juste, tantôt comme une théorie qui porte aussi sur ce qui est bon. Dire qu'une chose est bonne, c'est affirmer qu'elle a une certaine valeur, en particulier une certaine valeur positive. Dire qu'une chose est juste, c'est affirmer que, devant un choix, c'est cette chose qui devait être choisie. Une théorie du bien, une théorie de la valeur, nous permettait de déterminer la valeur de différentes entités, y compris la valeur des options. Une théorie du juste nous permettrait de déterminer, pour tout ensemble d'options, du moins au sein d'une certaine catégorie, l'option ou le sous-ensemble d'options qui est juste. Conception : P. Edgard El Haiby Situationnisme (pitié, sympathie, etc.) Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) L'éthique de la situation veut travailler sur des situations de fait. Les éthiciens adoptant cette perspective comprennent en général la situation dans son sens existentiel. Il en résulte que seule la personne qui se trouve en situation peut vivre celle-ci dans toute sa réalité. Conformément à ce principe, la situation ne peut être jamais analysée indépendamment de l'être propre et du vécu de la personne. La même situation peut être vécue par différentes personnes de diverses manières. Ce qui est constitutif d'une situation n'est donc pas simplement un ensemble de circonstances, mais aussi, dès le départ, la personne concernée et appelée à l'action. 29/34 L'éthique de la situation, (connue aussi sous le nom de situationnisme) se réfère à un point de vue particulier de l'éthique qui affirme que la moralité d'un acte est fonction de l'état du système au moment où il est accompli. On la confond souvent avec le relativisme moral, qui affirme qu'il n'y a pas de vérité morale universelle, qu'il y a seulement des croyances et des perspectives, aucune n'étant plus valide qu'une autre. L'éthique de situation en elle-même ne dit pas s'il y a des vérités universelles ou non. Elle dit seulement que l'état du système au moment d'un acte doit être inclus dans la considération de l'acte. Le terme d'éthique de situation a été étendu pour inclure de Mais, J. Fletcher souligne que: "l'éthique de situation ne peut pas nombreuses situations dans lesquelles un code d'éthique est conçu s'en tirer sans axiomes, mais elle les utilise, avec tout le respect pour s'accorder aux besoins de la situation. voulu, non pas comme lois ou normes, mais comme principes. Pour La théorie originelle de l'éthique de situation a été développée par lui, en tant que chrétien et tenant de l'éthique de situation, la norme Joseph Fletcher, un prêtre épiscopal, dans les années 1960. Basée de référence suprême, le critère ultime est l'amour au sens d'agapè/ sur le concept que la seule chose qui ait une valeur intrinsèque est Caritas. l'Amour (spécifiquement l'agapè chrétien), Fletcher préconise un certain nombre de cas d'actions à discuter. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 30/34 Légalisme religieux Déontologique Nominalisme Le nominalisme est une doctrine logique, philosophique et théologique qui a vu le jour au sein de la scolastique médiévale. Son Doctrine philosophique selon laquelle les mots ne désignent pas la fondateur est Roscelin. On utilise aussi le mot occamisme pour réalité, mais seulement notre représentation de celle-ci. désigner le nominalisme de Guillaume d'Occam, principal Au Moyen Âge, le nominalisme de Guillaume d'Occam possède des représentant de cette école dans la scolastique tardive. implications ontologiques (seuls existent véritablement les individus), théologiques (l'essence divine est une, et les concepts des attributs divins, comme ceux de volonté ou de toute-puissance, Le légalisme désigne, au sens large, le souci de respecter la loi. Il est ne sont que des noms), et même politiques et économiques. Ce parfois utilisé dans un sens plus appuyé afin de désigner ceux qui dernier aspect ne se révèle toutefois avec netteté que dans les prônent l'obéissance à la loi et au droit en vigueur quel qu'il soit, écrits, bien postérieurs, de Hobbes, et dans sa défense de c'est-à-dire hors de toute considération morale et politique. l'"individualisme possessif". Locke et Condillac ont aussi représenté le courant de pensée nominaliste, qui a eu des prolongements jusqu'au XXe s, avec W. Quine, B. Russell et D. Hilbert. Le nominalisme contemporain a parfois pris la forme de l'"instrumentalisme", conception selon laquelle la science a pour tâche de décrire de manière adéquate et systématique l'ensemble de nos expériences de la réalité. Positivisme Le positivisme est un courant de pensée né au XIXème siècle autour des théories d’Auguste Comte, qui ne donne de crédit qu’aux différents domaines qu’il nomme sciences. Les faits de la vie de tous les jours sont toujours explicables par la science sous forme d’expérience et d’observation. Le positivisme est un évolutionnisme par la science. Le terme positivisme désigne un ensemble de courants qui considère que seules l'analyse et la connaissance des faits vérifiés par l'expérience peuvent expliquer les phénomènes du monde. La certitude en est fournie exclusivement par l'expérience scientifique. Il rejette l'introspection, l'intuition et toute approche métaphysique pour expliquer la connaissance des phénomènes. Le positivisme influencera l'empirisme logique. Il a fortement marqué la plupart des domaines de la pensée occidentale du XIXe siècle. Il est associé à une foi parfois presque religieuse dans le progrès scientifique et la formalisation mathématique du réel. Le marxisme est fortement influencé par le positivisme. Conception : P. Edgard El Haiby Autonomisme Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) Selon Kant, l'autonomie est définie comme "la propriété qu'a la volonté d'être à elle-même sa loi (indépendamment de toute propriété des objets du pouvoir. C'est le principe suprême de la moralité, en tant que condition de possibilité d'un impératif catégorique. Selon lui, il est légitime d'attribuer l'autonomie à la volonté de tous les agents rationnels, y compris, par conséquent, à la volonté humaine. 31/34 La théorie de l'autonomie de la volonté est une théorie juridique qui érige la volonté en source créatrice de droit et d'obligation. Populaire au XIXe siècle chez les juristes, cette théorie, qui s'inspire librement du principe kantien de l'autonomie de la volonté, s'oppose au solidarisme contractuel et à la théorie de l'utile et du juste. Le respect de la loi doit prévaloir sur toute considération concernant La théorie de l'autonomie de la volonté trouve sa justification dans le bien-être ou le Bonheur de l'agent moral ou d'autres personnes. l'existence de droits naturels de l'Homme, selon lesquels l'Homme La volonté prend alors la place que "le désir raisonnable" occupait à l'état de nature est libre. dans les éthiques d'inspiration aristotélicienne. Selon ce courant de pensée, les hommes naissent libres et ne sont, C'est Kant qui a introduit de façon la plus explicite le thème de à l'origine, soumis à aucun d'entre eux. Raisonnables, ils tombent en l'universalité: "agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu accord pour constituer une société qui leur profitera à tous. puisses vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle." Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 32/34 Synthèse: Bien qu'elles aient le même but: choisir le bien et éviter le mal, les théories éthiques se diffèrent entre elles. Chacune se présente suivant un système de convictions bien particulières, poussant l'individu à la réalisation de soi-même dans un contexte spatio-temporel bien défini. Nous pouvons conclure que le discernement concernant un acte, ne peux se faire sans préciser une certaine appartenance à une théorie éthique. D’où l'importance de nous situer et d'aider chaque individu à se situer dans une école éthique pour pouvoir choisir le bien et éviter le mal. Au lieu de promouvoir telle ou telle valeur, ces écoles nous poussent à promouvoir telle et telle valeur selon l'école éthique à laquelle l'individu appartient. Ce passage pousse le sujet à se référer de plus en plus à son système convictionnel, à hiérarchiser les valeurs non selon une échelle unidimensionnelle mais une échelle multidimensionnelle. Le fait de comprendre la situation de l'autre, ses convictions et ses valeurs de référence, diminue le conflit, justifie son acte et diminue le nihilisme (indifférence et nominalisme). Chaque individu se réalisera dans sa singularité en tant que personne humaine responsable pour soi et pour les autres dans le temps et l'espace de la personne et de son humanité. C'est le fait de se réaliser avec, par, pour les autres et non pas à leur détriment! Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy (version 1) 33/34 Bibliographie Articles - EL HAIBY Edgard, Pour bien éduquer: Eduquer au "Bien". Ethique et éducation, Article paru dans Revue de l'ILE, USJ, nº2, oct. 2002. - RICOEUR Paul, Ethique et morale, Revue de l'Institut Catholique de Paris, nº34, avril-juin 1996. - Dictionnaires - Dictionnaire d'éthique et de philosophie morale, sous la direction de Monique Canto-Sperber, PUF, 1996 - Dictionnaire Larousse en Ligne - Encyclopaedia Universalis Site Internet - Wikipédia iVertu : Un habitus qui dispose du bien : Une façon d’être qui, sans cesse répétée, finit par devenir comme une seconde nature dans l’être humain. L’homme vertueux est donc celui qui tend vers le bien comme de l’intérieur, par conviction personnelle (et non par imposition extérieure) et qui le fait de manière facile, agréable et constante. Ce n’est pas une simple affaire de connaissance (délibération et décision) mais aussi d’habitude et de comportement (action). Vertus fondamentales : foi, espérance, amour. Vertus cardinales : prudence, force, tempérance, justice. ii Impératifs catégoriques de Kant : (1) Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle. (2) Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin et jamais simplement comme un moyen. Conception : P. Edgard El Haiby Réalisation : J. Barouki – M. Douaihy iiiLe plus grand bien pour le plus grand nombre ivTentative de concilier subjectivité et objectivité, singularité et universalité (version 1) 34/34